3.3. Les inconvénients de la finance islamique
Nous avons vu que la finance islamique possédait de
réelles qualités pour endiguer les crises. Cependant, elle
comporte de réels inconvénients que nous allons
étudier.
3.3.1. Manque de
maitrise sur le système actuel :
La finance islamique est très jeune. Elle reste
très minoritaire dans les opérations financières qui
s'effectuent chaque jour. Ainsi on peut voir qu'elle n'a aucune maitrise sur
les opérations de finance traditionnelle. En effet si une banque
islamique n'a pas le droit d'investir dans des CDO, la banque traditionnelle,
quant à elle, n'est pas soumise à cette interdiction. Elle n'a
pas encore assez de poids par rapport à la finance conventionnelle.
Par ailleurs, on peut voir que la finance islamique ne prend
pas en compte l'inflation. Ainsi, on observe qu'en France, par exemple, les
taux de rémunération sont fixés en fonction de
l'inflation. Les livrets se rémunèrent par rapport au livret A
(l'actif sans risque), pour lequel le taux dépend en partie de
l'inflation. L'inconvénient que cela suppose est que lorsqu'un client
dépose une somme X sur son compte bancaire à une date T et qu'il
récupère cette somme à une date T+1, il perd de l'argent.
Ceci étant dû au fait que les prix ont augmenté entre T et
T+1. Il perd donc du pouvoir d'achat. Ainsi la finance islamique ne permet pas
de conserver sa capacité d'achat sur une durée. Il faut noter que
cette finance, restant minoritaire ne permet pas non plus d'endiguer
l'inflation. Effectivement, cette dernière est en partie causée
par le coût de l'argent sur les marchés monétaires. Or si
l'on est une banque islamique on ne peut empêcher les autres banques de
se refinancer sur les marchés.
Enfin même si nous avons observé que le cadre
juridique français se positionnait en faveur de la finance islamique,
nous ne pouvons pas dire que la législation soit adaptée à
cette dernière. En effet le cadre juridique de la loi de 1905
définissant les rapports entre l'Eglise et l'Etat est peu compatible
avec la charia.
Ainsi son statut de finance embryonnaire ne lui permet pas
d'avoir un poids nécessaire pour faire pression sur les banques
classiques.
3.3.2. Le
développement moins rapide que celui des banques
conventionnelles
L'un des aspects négatifs d'une banque islamique est sa
faible capacité à se développer rapidement. Cela
s'explique par la structure de son bilan. Ainsi, nous pouvons voir dans
l'annexe 5 que l'essentiel des fonds propres d'un de ces
établissements est constitué des dépôts des clients.
Ainsi une banque islamique, n'ayant pas le droit d'utiliser les leviers du
refinancement, sera contrainte de restreindre sa vitesse de
développement. Ceci est pourtant en désaccord avec la
réalité. En réalité, nous pouvons constater,
une croissance conjoncturelle de cette finance
extrêmement rapide. Cependant le rapport Arthuis, montre
que cette croissance est entièrement due à l'évolution des
cours pétrole (dépendance à la filière
financée).
De plus, on notera que dans le cadre de la gestion
actif/passif (cf. chapitre 1), la banque islamique aura du mal à pallier
le risque de liquidités. En effet, le fait qu'elle n'utilise pas de
produits de refinancement (qui sont ribawi), l'empêche de couvrir ce
risque. Ainsi, dans l'hypothèse où tous les clients d'une
même banque venaient à retirer leurs dépôts en
même temps, la banque islamique aurait des difficultés à
les servir. Là aussi, la réalité nous fait mentir,
cependant, Anouar HASSOUN a affirmé dans un rapport sénatorial de
mai 2008 : « bénéficiant à
l'origine des surliquidités du golfe persique liées au
pétrole et renforcées par les effets du 11 septembre, la finance
islamique, s'est orientée vers les années 1990 vers les
particuliers ». Cela montre bien qu'elle doit s'orienté
vers une nouvelle cible pour pouvoir générer des
liquidités.
Ensuite, nous dirons que la finance islamique prévoit
la fin du trading haute fréquence. Comme nous avons pu le souligner les
spéculateurs sont des « market makers ». Ils
participent à la liquidité des marchés et les rendent plus
attrayant pour les investisseurs. Ils ont donc une utilité
économique et financière. L'inconvénient de la finance
islamique est donc qu'elle freine l'évolution des marchés.
D'autre part, il est important de comprendre que le
modèle économique des banques françaises, est
composé environ à 60% de la marge d'intermédiation
(différence entre les intérêts perçus et les
intérêts versés). Elle représente une vraie source
de revenus pour les banques. Or la finance islamique ne permet pas la prise ou
le versement d'intérêts. Cela signifie qu'une banque islamique
doit se priver d'une recette importante. Or on sait qu'une banque qui fait des
bénéfices peut investir, embaucher, prêter (grâce au
renforcement des fonds propres du à l'intégration des
bénéfices dans les réserves) et payer son impôt sur
les sociétés. En résumé une entreprise
bénéficiaire est une bonne chose au niveau économique. On
peut donc considérer la finance islamique comme étant un frein
à l'économie, mais aussi un frein au développement de ses
institutions financières.
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