3. SYNDICALISME
En 1902 la législation sociale est encore
três mince, malgré l'ceuvre non négligeable acco mplie par
Millerand depuis 1899. Le syndicalis me frangais est en pleine période
d'organisation. La Confédération générale du
travail, constituée en 1895, n'a pas encore réalisé
l'unité du syndicalis me ouvrier4. D'ailleurs le no mbre de
syndiqués est relative ment restreint : il se situe alors aux environs
de 600.000. Il est intéressant de noter que le syndicalis me frangais,
assez forte ment influencé par l'anarchis me, se développe
indépendamment du mouve ment socialiste, bien qu'en fait tous deux
visent le même but : l'é mancipation du
prolétariat.
3 Claude WILLARD,
Les guesdistes, pp. 389-390.
4 Cette unité n'est
réalisée qu'en 1902 à Montpellier.
Esti mant sa sécurité mieux
assurée en Europe, par suite de la conclusion de l'alliance
franco-russe, la France se consacre active ment pendant les dernieres
années du XIX"me siecle a son oeuvre d'expansion coloniale.
Elle annexe Madagascar, poursuit l'unification de ses possessions africaines,
ne reste pas inactive en Extreme-Orient, et s'intéresse de fort pres au
Maroc, dont le contrôle lui apparait de plus en plus nécessaire
pour asseoir sa domination dans le Maghreb. Cette politique d'expansion
coloniale n'est plus contestée en France avec autant de vigueur qu'elle
l'était au temps de Jules Ferry et de la guerre du Tonkin. L'extreme
gauche socialiste, et dans une mesure beaucoup moindre radicale-socialiste, y
est toujours opposée pour des raisons hu manitaires. Par contre,
l'alliance franco-russe enleve leurs arguments a a ceux qui proclamaient que la
France, isolee en Europe, ne pouvait, sans peril mortel, distraire de ses
frontieres une partie de ses forces »1. Le gouverne ment est
encouragé et poussé dans son action par les milieux d'affaires
agissant par l'intermédiaire du co mité de l'Afrique frangaise et
en liaison avec le parti colonial que dirige active ment au Parle ment le
député d'Oran Eugene Etienne.
Ministre des Affaires étrangeres depuis juin
1898, Delcassé continue certes a s'occuper des problemes coloniaux, et
en particulier de la question marocaine, mais il cherche surtout a renforcer la
position européenne de la France. Il s'attache tout d'abord a consolider
l'alliance avec la Russie : ce but est atteint par la signature d'un protocole
militaire en 1900. Delcassé s'efforce ensuite d'améliorer les
relations franco-italiennes: un accord commercial en 1898, un accord colonial
en 1900 sont conclu a cet effet, et un accord politique est en
préparation2. Enfin Delcassé commence certaine ment a
songer en 1902 a l'éventualité d'un rapprochement avec
l'Angleterre ; des dé marches diplo matiques dans ce sens ont certaine
ment déjà été entreprises a cette
époque.
1 Jacques CHASTENET,
La République triomphante (1893-1906), p.
138.
2 Il sera signé en
juillet 1902.
LIALSACE-LORRADVE 3
Les élections qui ont eu lieu en 1898 en
Alsace-Lorraine, pour désigner les quinze députés
alsaciens-lorrains devant aller siéger au Reichstag, ont
été marquées par une três nette victoire des autono
mistes sur les protestataires. Les Alsaciens-Lorrains, dans leur
majorité, se mblent donc avoir accepté l'annexion et ne
réclament plus que d'être traités co mme les autres
habitants de l'E mpire. Co mme ils sont pour la plupart catholiques ce n'est
certaine ment pas la politique anticléricale pratiquée par
Waldeck-Rousseau qui contribue a leur faire regretter le temps oil ils
étaient Francais.
Satisfait de ce change ment d'attitude des
Alsaciens-Lorrains, le gouverne ment adopte lui-même a leur égard
une attitude plus conciliante. En 1902, précisé ment, il suppri
me le « paragraphe de dictature ». En France, bien que la question
d'AlsaceLorraine empêche tout rapprochement avec l'Alle magne, on se mble
se désintéresser de plus en plus du sort des provinces perdues et
on envisage de moins en moins l'éventualité d'une guerre de
revanche.
3 Pierre
RENOUVIN, Le sentiment national et le nationalisme ans l'Europe
occidentale, C.D.U., 1962, pp. 14 à 27.
Pendant plus de deux années, Méline
avait gouverné appuyé sur une majorité co mposée
des progressistes et des conservateurs. Ce rapprochement entre
républicains de gouverne ment et conservateurs, ralliés ou non,
était dir a leur co mmun désir de défendre des
intérêts qu'ils jugeaient menacés, a la fois par les
attentats anarchistes, les progrês du syndicalis me et du socialis me et
les projets d'impot sur le revenu. Dans le do maine social, le gouverne ment
n'avait entrepris aucune réforme sérieuse. Sur le plan religieux,
répudiant l'anticléricalis me, il avait mené une politique
« d'apaise ment », mais il n'avait toutefois pas modifié la
législation scolaire dans le sens espéré par les
catholiques.
Le 22 juin 1899, un an aprês le départ de
Méline, Waldeck-Rousseau constituait son ministêre de
défense républicaine en s'appuyant sur une majorité
diamétrale ment opposée qui englobait une minorité de
progressistes, les radicaux et radicaux-socialistes et meme la majorité
des socialistes. Ce co mplet change ment n'était pas dir aux
résultats des élections législatives de mai 1898, qui
avaient seule ment été marqués par de três
légers gains des conservateurs et l'élection d'un petit nombre de
députés nationalistes et antisé mites: c'était la
conséquence de l'affaire Dreyfus.
Lorsque au cours de l'année 1897, les
irrégularités du procês de 1894 furent connues, ce furent
les nationalistes et les conservateurs qui soutinrent le plus énergique
ment les chefs militaires dans leur refus de remise en cause du juge ment ayant
condamné Dreyfus. Lorsqu'en aoirt 1898 la découverte du faux
Henry permit au gouverne ment Brisson de faire examiner la de mande de
révision, ce furent encore les nationalistes et les conservateurs qui
entretinrent a Paris une violente agitation en y organisant notamment e
três no mbreuses manifestations de rue. Puis en 1899, lorsque cette
révision apparut co mme de plus en plus probable malgré le vote
de la loi de dessaisisse ment et quand a la présidence de la
République le révisionniste Loubet remplaga
l'anti-révisionniste Félix Faure, les monarchistes et les
nationalistes tentêrent
d'abattre la République parle mentaire. Du co
mplot royaliste, on ne sait pas grand chose, sinon qu'au moment des
obsèques de Félix Faure, le duc d'Orléans se tenait
prêt a rentrer en France. Du côté nationaliste
Déroulède tenta d'entrainer sur l'Elysée un
général a la tête de ses troupes le soir des
obsèques du président de la République, mais il
échoua assez piteuse ment. Enfin, le lende main de l'arrêt de la
Cour de cassation cassant le juge ment de 1894, le président Loubet fut
victi me a Auteuil d'une agression nationaliste.
Un certain no mbre de républicains
progressistes qui avaient soutenu la politique « d'apaise ment »
menée par Méline co mmencèrent dès 1898 a
s'inquiéter du renouveau d'agressivité manifesté par la
droite a l'occasion des élections de 1898. Puis au fur et a mesure que
s'amplifia l'agitation nationaliste et monarchiste, ces mê mes ho mmes
virent leur inquiétude grandir. Enfin en 1899, ils en vinrent a craindre
pour les institutions républicaines elles- mê mes. C'est pourquoi
en juin 1899 ils se joignirent aux radicaux et aux socialistes pour former a la
Chambre une nouvelle majorité décidée a soutenir un
ministère résolu a défendre la République en
faisant cesser l'agitation de la droite. a La constitution d'une majorite de a
defense republicaine » etait chose faite. C'etaient la droite et les
nationalistes qui l'avaient rendue viable par leur exces, pour avoir disloque
le parti de l'Ordre etabli en essayant de la transformer en parti de combat
contre la Republique »1. Le 22 juin 1899 cette majorité
accorda sa confiance a Waldeck-Rousseau.
Waldeck-Rousseau confia les postes ministériels
les plus i mportants a des modérés, n'accordant que deux
portefeuilles secondaires aux radicaux. 1l plaga en outre le
général de Galliffet a la tête du ministère de la
Guerre : ce poste ministériel était capital, en mê me temps
que peu envié, car son titulaire allait avoir a re mettre de l'ordre
dans l'Armée profondé ment ébranlée par l'affaire
Dreyfus. Cependant la principale innovation de Waldeck-Rousseau consista a
appeler au ministère du Commerce un socialiste, Millerand : cette
nomination surprit alors beaucoup l'opinion.
Les premières mesures prises par le nouveau
gouverne ment visèrent a clore l'affaire Dreyfus et a
réintroduire la discipline dans l'Armée. Jugé une seconde
fois en septe mbre 1899, Dreyfus fut une nouvelle fois condamné, mais
cette fois-ci le Conseil de
1 François GOGUEL,
La politique des partis sous la IIIème
République.
Guerre lui accorda les circonstances
atténuantes. Pour en finir une fois pour toutes, Waldeck-Rousseau le fit
gracier par le président de la République. D'autre part le
président du Conseil fit traduire devant le Sénat
érigé en Haute Cour les chefs des ligues nationalistes, dont
Déroulède, et quelques royalistes. Enfin le ministre de la Guerre
prit quelques mesures, co mme la réforme des commissions de classe ment
et invita l'Armée / se consacrer exclusive ment a sa tOche de
défense nationale.
A la fin de l'année 1899, le gouverne ment et
la majorité parle mentaire qui le soutient ont atteint les objectifs
qu'ils s'étaient fixés en juin : rétablir l'ordre et
assurer la sauvegarde des institutions républicaines. Un nouveau change
ment de majorité n'était-il pas alors possible ? Ceux des
progressistes qui avaient permis par leur alliance avec les radicaux et les
socialistes la formation de la majorité de « défense
républicaine » ne pouvaient-ils pas renouer avec la droite ? Cela
fut rendu impossible par a la violence extraordinaire des passions
déclenchées par l'affaire Dreyfus »2. L'affaire
Dreyfus a en effet contribué a creuser plus profondé ment le
fossé existant entrees deux grandes tendances de la vie politique
frangaise : celle des tenants de la Révolution et celle de ses
adversaires. Ce qui était grave, c'est qu'il ne s'agissait pas unique
ment d'une opposition de caractère politique, mais d'une opposition
entre deux conceptions radicale ment différentes de la
société. Pour les héritiers de la Révolution, la
société devait être fondée sur les principes de
justice, d'égalité et de liberté et avait pour but
essentiel l'épanouisse ment de l'individu. Pour les
contre-révolutionnaires, la société devait être
hiérarchisée et l'individu devait être sacrifié a
l'intérêt général.
Tout nouveau reclasse ment des partis était
donc impossible. D'ailleurs les vainqueurs songeaient a exploiter leur
victoire. Ils étaient décidés a faire payer chère
ment a leurs adversaires les craintes qu'ils avaient éprouvées.
Les trois groupe ments politiques qui formaient la majorité de
Waldeck-Rousseau devaient trouver un programme d'action qui, sans les diviser
eux- mê mes, serait dirigé contre leurs adversaires. L'accord ne
pouvait pas se faire sur un programme de réformes écono miques et
sociales, car les progressistes qui s'étaient fort bien acco
mmodés durant deux ans de la politique d'i mmobilis me de Méline
n'étaient pas décidés a aller très loin dans ce do
maine. C'est
2 François GOGUEL,
op.cit.
ainsi que les projets d'impot sur le revenu et de
retraite ouvriêre n'aboutirent pas au cours de la
législature3. Cependant Millerand parvint a faire voter par
les Chambres la diminution de la durée de la journée de travail :
fixée a 11 heures, elle devait être amenée a 10 heures 'A
dans un délai de deux ans et a 10 heures dans un délai de quatre
ans; il prit aussi un certain no mbre d'autres mesures propres a
améliorer le sort des salariés et a faire jouer un role plus
important aux syndicats ouvriers : régle mentation des conditions de
travail dans les adjudications au co mpte de l'Etat, des départe ments
et des communes, réorganisation du Conseil supérieur du travail,
etc. Mais quand il voulut régle menter le droit de grêve, il se
heurta a la double opposition du patronat et des syndicats.
L'accord entre les trois groupes de la coalition
gouverne mentale ne pouvait pas se faire non plus sur un programme d'action
anti militariste. L'anti militaris me avait presque disparu en France
aprês 1870. Déjà le boulangis me avait
réveillé chez certains un sentiment de méfiance a
l'égard de l'Armée, mais c'est l'affaire Dreyfus qui fait faire a
l'anti militaris me de três sensibles progrês. Il faut rappeler a
cet égard que depuis 1889, les universitaires étaient assujettis
au service militaire et qu'ils n'avaient certaine ment pas tous
apprécié la vie de caserne: or c'est juste ment dans leurs rangs
que se recrutêrent les premiers révisionnistes. Au fur et a mesure
du déroule ment de l'affaire, l'attitude des principaux chefs de
l'Armée, leur collusion avec les partis de droite, suscitêrent
dans la presse de gauche, et surtout dans la presse socialiste, de três
violentes attaques contre la hiérarchie militaire. Les officiers
supérieurs étaient représentés co mme formant une
caste recrutée dans les milieux de l'aristocratie et de la haute
bourgeoisie cléricale et constituant un danger pour la
République. Quoiqu'il en soit aucun gouverne ment frangais ne pouvait
adopter une position antimilitariste, car l'i mmense majorité du Parle
ment et probable ment celle du pays n'auraient jamais accepté de voir
désorganisée la défense nationale. Les deux ministres de
la Guerre successifs du cabinet Waldeck-Rousseau, les généraux de
Gallifet et André, se contentêrent de prendre quelques mesures
destinées a assurer la préé minence du pouvoir civil : le
premier suppri ma les commissions de classe ment dont il s'attribua les
fonctions et déplaga un certain nombre de chefs militaires viole mment
hostiles au gouverne ment, le second s'attacha surtout a
3 tin impôt progressif
sur les successions fut cependant voté.
/democratiser l'Armee » , c'est-ci-dire a favoriser
l'avancement des officiers dont les convictions republicaines semblaient sures
»'.
En définitive ce fut a dans l'action
anticlericale, et bientot anti-catholique que, par un mouvement naturel, la
majorite de Waldeck-Rousseau chercha le moyen de se perpetuer · ce
programme seul ne heurtait profondement aucune de ses fractions
»5. Pourtant l'Eglise en tant que telle n'avait pas joué
un role prépondérant dans le déroule ment de l'Affaire.
Les élé ments dirigeants s'étaient abstenus de prendre
publique ment parti: le pape Léon XIII ne voulait pas intervenir dans
une affaire intérieure frangaise et l'épiscopat, a la seule
exception de l'archev8que de Toulouse, avait toujours gardé une attitude
prudente. Par contre, il est vrai que certains élé ments du
clergé séculier (des prêtres abonnés a La Libre
Parole de Drumont) et régulier (les Asso mptionnistes de La Croix)
avaient manifesté leurs opinions anti-dreyfusardes d'une fagon souvent
violente et en tout cas fort peu chrétienne. Mais ce qui est plus
important, co mme l'a montré M. Adrien Dansette6, c'est que
la quasi-totalité des catholiques et des amis de l'Eglise aient
été anti-dreyfusards, alors que la plupart des enne mis de
l'Eglise étaient dreyfusards. Une fois de plus l'Eglise s'était
laissée entrainer dans la coalition anti-républicaine. Les
adversaires pensèrent ou feignirent de penser que c'était elle
qui l'avait dirigée et ils résolurent de la punir en
conséquence.
Ce furent les congrégations religieuses qui
firent les premiers frais de ce nouvel accès d'anticléricalis me.
Pendant et aussitot après l'affaire Dreyfus les Asso mptionnistes et les
Jésuites avaient été les religieux les plus
attaqués : aux premiers on reprochait l'ardeur de la campagne
anti-révisionniste menée dans La Croix ; quant aux seconds, ils
étaient accusés de donner une instruction
anti-républicaine aux futurs officiers qui passaient dans leurs
écoles et de conserver une grande influence sur leurs anciens
élèves parvenus aux plus hauts grades de l'Armée, en
particulier sur ceux qui étaient devenus me mbres des commissions de
classe ment. Les Asso mptionnistes furent les premiers frappés : le 25
janvier 1900, après un procès, la congrégation fut
dissoute. Puis le ministre de l'Instruction publique déposa un projet de
loi créant pour les futurs candidats aux
4 Il prépara aussi
l'abaissement de la durée du service militaire à deux
ans.
5 François GOGUEL,
op. cit.
6 Histoire religieuse de la
France contemporaine, pp.558-559.
grandes écoles l'obligation d'effectuer leurs
trois dernières années d'études dans un établisse
ment d'Etat. Ce projet de loi sur le stage scolaire était évide
mment dirigé contre certaines congrégations enseignantes au
premier rang desquelles les Jésuites, mais il fut repoussé par la
Cha mbre. Enfin toutes les congrégations furent atteintes par le vote de
la loi sur les associations (loi du 1er juillet 1901).
Jusqu'alors il y avait en France deux
catégories de congrégations : les congrégations
autorisées qui avaient une existence officielle, et les
congrégations non autorisées qui n'étaient que
tolérées. Mais le Concordat ne les mentionnait ni les unes ni les
autres, si bien que le gouverne ment n'avait pas le moyen de contrôler
efficace ment leur développe ment et leurs activités. Dans un
grand discours prononcé a Toulouse le 28 octobre 1900, Waldeck-Rousseau
exposa les raisons qui le poussaient a présenter un projet de loi sur le
statut des congrégations. Selon lui, il s'agissait d'abord
d'empêcher certaines congrégations d'avoir une activité
politique co mme celle qu'avaient eue les Asso mptionnistes. Il s'agissait
ensuite de les empêcher d'accu muler davantage de biens de mainmorte ;
Waldeck-Rousseau affirma que la valeur des biens i mmeubles détenus par
les congrégations s'élevait a un milliard : le « milliard
des congregations » devait constituer une excellente formule pour la
propagande anticléricale. Mais il s'agissait surtout d'arrêter le
développe ment de l'enseigne ment congréganiste qui, par son
esprit contre-révolutionnaire, co mpro mettait grave ment l'unité
morale du pays. Waldeck-Rousseau parla a ce propos des « deux jeunesses
» qui grandissent sans se connaitre : cette formule connut égale
ment un grand succês auprês des propagandistes
anticléricaux.
Le projet de loi préparé par le gouverne
ment accordait une liberté quasi complête a toutes les
associations sauf a celles co mposées en partie d'étrangers ou
dirigées par des étrangers, c'est-à-dire les
congrégations religieuses. Aux termes du projet de loi, celles-ci
étaient sou mises a une autorisation du Conseil d'Etat. Mais « la
commission nommee par la Chambre fut composee en majorite de deputes qui
tenaient moins a etablir un statut veritablement applicable aux congregations
qu'd les contraindre a se disperser »7.
7 François GOGUEL,
op. cit.
En conséquence, elle modifia assez
profondé ment le projet du gouverne ment. Tout d'abord les
congrégations furent désignées par leur nom. Ensuite, et
ce fut là la modification la plus i mportante, l'autorisation
n'était plus accordée par un décret mais par une loi.
Enfin les me mbres des congrégations non autorisées n'auraient
plus le droit d'enseigner. Accepté par le gouverne ment, le projet de la
commission fut voté par la Chambre après de très vifs
débats par 305 voix contre 225, puis par le Sénat, et devint la
loi du 1er juillet 1901. Aux termes de la loi les
congrégations autorisées pourront 9tre dissoutes par
décret pris en Conseil des ministres. D'autre part une autorisation par
décret sera nécessaire pour tout nouvel établisse ment
d'une congrégation autorisée.
Dans ces conditions, la question religieuse ne pouvait
pas manquer de se trouver au centre du débat électoral, d'autant
plus qu'à la veille des élections la menace pesant sur l'enseigne
ment libre se mblait devenir encore plus réelle. En effet, a la fin de
la législature, le 14 février 1902, la Chambre vota le principe
de l'abrogation de la loi Falloux par 266 voix contre 2428. Ce vote
n'était pas du a l'initiative du gouverne ment, mais celui-ci avait
approuvé la proposition qui é manait des radicaux.
8 Certains progressistes
dissidents s'abstinrent ou votèrent avec l'opposition.
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