4.4.3 Mesures de contournement de la longue
procédure de prise de
décision d'une battue administrative
Lorsque les dégâts sont importants et permanents,
la délégation régionale peut autoriser une battue
administrative et rendre compte dans un délai de soixante douze heures.
Par ailleurs, la loi forestière 94/1 du 20 janvier 1994
portant régime de forêts, de la faune et de la pêche en son
article 83 (1) stipule que nul ne peut être sanctionné pour fait
d'acte de chasse d'un animal protégé, commis dans la
nécessité immédiate de défendre ses cultures
à condition que la preuve de la légitime défense soit
avérée. Cette seconde possibilité de protéger les
récoltes n'est pas appliquée pour deux principales raisons : les
paysans ne sont pas informés de cette disposition de loi et ils ne
disposent pas d'armes et de munitions capables de tuer un
éléphant.
D'un autre côté, il serait possible que
l'administration en charge de la faune demande au guide de chasse de
procéder à une battue dans le cadre de son quota avec le MINFOF
pour ce qui est du nombre d'éléphants autorisé à
abattre. Toutefois la battue n'aura pas lieu pendant la période de
chasse. Ainsi le dénouement sera en ce moment bénéfique
à la fois aux populations, au MINFOF et au guide de chasse.
4.4.4 Conséquences du CHE
a) Diminution de la surface cultivée
Les paysans n'osent plus établir les plantations loin du
village au risque de voir leurs champs dévastés par les
pachydermes sans pouvoir chasser. Ils se rabattent sur les terres
situées à proximité des villages, zones
souvent composées de terres appauvries par plusieurs décennies de
culture sur brûlis. La jachère n'est plus suffisante pour
régénérer les sols, la productivité s'effondre, les
villageois s'appauvrissent et l'exode rural s'accentue.
b) Diminution de la production agricole
C'est la conséquence directe de la réduction
des superficies. En effet, la diminution de la production agricole subit
à la fois l'influence des dégâts et celle de la
réduction des superficies cultivées. Cette situation est
aggravée par le fait que les paysans subissent également des
pressions de la part des guides de chasse qui interdisent de cultiver de
nouvelles terres. Ceci afin de ne pas réduire l'habitat de la faune
sauvage et de réduire la superficie de la Zone à Usage Multiple
(ZUM) qui est comptée dans la taxe sur la superficie de la ZIC.
c) Activités contre la conservation
La réduction du pouvoir d'achat des paysans suite
à la pression exercée par les pachydermes sur l'agriculture
enclenche l'instinct de survie. Le niveau de braconnage est désormais en
nette augmentation. En effet, les populations tissent des partenariats avec des
acheteurs illégaux à qui ils livrent de la viande de brousse. Le
butin est transporté de nuit sur des motos en direction de la ville de
Tcholliré. Par ailleurs, ceux qui sont incapables de braconner (femmes,
enfants, personnes âgées) se ruent dans la ZIC 2 pour faire de
l'orpaillage. Cette activité est à l'origine d'une augmentation
sans cesse croissante de la dégradation de l'habitat de la faune
sauvage. On assiste également à la naissance d'un village
à l'intérieur de l'aire protégée
caractérisée par une population de plusieurs centaines
d'individus vivant dans des habitations de fortune.
e) Impact des dégâts sur la
famille
La baisse de la production agricole provoquée par les
dégâts causés par les éléphants n'a à
priori que des incidences néfastes sur la famille. Lorsque la campagne
agricole est perdue et ne peut plus être rattrapée, les
agriculteurs se livrent à d'autres activités
génératrices de revenus (orpaillage, braconnage, pêche
etc.) pour sauver leurs familles de la famine et de la pauvreté. La
pauvreté sans cesse croissante pousse les paysans à
déserter les villages pour se rapprocher de la nationale
1 où ils espèrent, disent-ils, pouvoir s'en
sortir. Ce phénomène d'exode des populations a aussi
été observé par TCHAMBA et HATUNGIMANA (1996) dans la
région de Waza - logone. L'inflation des prix des denrées telles
que le mil, l'arachide et maïs observée ces trois dernières
années sur le marché de Tcholliré pourrait s'expliquer en
partie par la migration des agriculteurs vers la Nationale. Toutefois, les
quantités perdues par
les agriculteurs restent encore mal connues du fait d'une
politique d'évaluation des pertes quasi inexistante.
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