- CONCLUSION
Conversions et transformations, de par leurs
définitions littéraires, représente un changement, un
retournement progressif, et ne mettent pas en avant l'idée d'une
destruction mais plutôt d'une réappropriation, d'une
réutilisation, que ce soit de l'objet architecturale ou de son potentiel
symbolique et sa sacralité, qui sont réutilisés dans des
contextes politiques, religieux et sociaux particuliers.
Les conversions des lieux de culte à Alger pendant le
XIXème et le XXème siècle ont
accompagnées tous les bouleversements historiques qu'a subit la ville et
le pays de façon générale, de la période du
protectorat Ottoman en Algérie, suivi par la période de
colonisation française à partir de 1830 et l'indépendance
du pays en 1962, les lieux de cultes ont subi la fluctuation des rapports de
force entre les différentes communauté et leurs appartenances
religieuses.
Les interventions sur ces lieux sacrés ne sont jamais
fortuites, elle touchent des symboles religieux, pour toucher la
communauté lié à cette religion, et cet dimension
symbolique de l'acte qui a fait que comme en Espagne pendant le
reconquête ou les grandes mosquées des villes étaient
converti en premier, en Algérie en 1832 et en 1962, c'est la
mosquée/cathédrale de Ketchaoua qui a été cible de
ces opération de conversion, certes pour des besoins d'usage religieux,
mais essentiellement pour la portée symbolique de l'acte de
l'appropriation d'un lieu de culte majeur.
A travers la conversion de la mosquée en église
en 1832 et sa transformation architecturale de 1845 jusqu'à la fin du
XIXème siècle, on peut suivre les hésitation
qui ont caractérisé la politique patrimoniale en Algérie
au début de la conquête Française, ainsi après une
période de destructions, une prise de conscience du patrimoine
architecturale du pays commençait à voir le jour, suite aux
explorations architecturales -dans le cadre des exploration scientifique-
effectuées par l'armée française ; cette période a
été suivi par une réappropriation du patrimoine
arabo-islamique avec les prémices de l'architecture Néo-Mauresque
qui va devenir l'architecture de l'administration au début du
XXème siècle. Au cours de cette même
période, l'ancienne mosquée Ketchaoua fut transformée en
profondeur, une transformation qui effaça la majorité des traces
de l'ancien édifice, pour donner à la nouvelle cathédrale
un style architecturale à des tendances orientaliste.
Et avec la reconversion de la cathédrale Saint-Philippe
en mosquée pendant l'été 1962, on peut suivre
l'évolution de la protection du patrimoine en Algérie
indépendante, et cela après une période de laisser aller
jusqu'à la fin des années 1960, suivi par les premières
règlementation propre au pays en matière de protection du
patrimoine, puis la ratification des conventions internationales et le
classement de la mosquée au niveau national et de son site - la casbah
d'Alger- au niveau international ont fait que l'édifice
bénéficie actuellement d'une protection qui empêche tout
remaniement architectural majeur dans le but de restituer l'ancienne
mosquée comme acclamer par certains associations locales.
Le cas de la mosquée/cathédrale de Ketchaoua
représente tout le malaise et l'embarras qu'a l'Algérie
indépendante dans le traitement du patrimoine issu de la période
de colonisation Française, ainsi avec la prise en compte et le
classement de la plupart des édifices des périodes historique
antérieur à 1830, le patrimoine antérieur à cette
date et postérieur à 1962 dit « le patrimoine colonial
» est encore imprégné des conflits du passé et il
constitue encore un sujet tabou dans les commissions de classement des biens
culturels, un tabou qui commence à tomber ces dernières
année avec les nouveaux impératifs de restauration d'une grande
partie de ce patrimoine et la nécessité de lui fournir une
protection juridique et effective.
Mais l'acceptation du patrimoine de cette période reste
tributaire des avancées de l'écriture de l'histoire et comme le
constate Gabi Dolff-Bonekämper, « Il peut s'avérer utile
de revisiter ces conflits historiques afin de faire la lumière sur ce
qui se passe dans le présent, et de reconnaitre que les sites du
patrimoine servent de catalyseur à de nouvelles controverses
dans la vie politique et culturelle actuelle
»112, et toute étude sur le patrimoine
algérien du XIXème et XXème
siècle constitue une contribution à la prise de conscience
générale de l'importance de ce patrimoine, une prise de
conscience nécessaire à sa sauvegarde.
112 GABI Dolff-Bonekämper, « Patrimoine
européen des frontières #177; Points de rupture, espaces
partagés », Direction de la culture et du patrimoine culturel
et naturel, Projet intégré «Réponses à la
violence quotidienne dans une société démocratique»,
Editions du Conseil de l'Europe, imprimé en Allemagne, décembre
2004.
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