C- Transformation : édifice cathédrale -
fonction cathédrale :
La construction de la cathédrale Saint-Philippe sur
l'emplacement de l'ancienne mosquée Ketchaoua débuta en 1845
à la suite des travaux de démolition qui avaient commencé
en 1844 ; ces travaux viennent suite à la nomination de Monseigneur
Dupuch comme évêque à Alger en 1838 ; ce dernier demanda la
construction d'une nouvelle église qui serait la cathédrale
d'Alger. Mais les autorités en place en l'Algérie, qui
détenaient les finances de l'église en Algérie à
cause du Concordat, décidèrent la transformation de
l'édifice existant et son agrandissement.
Des projets de transformation de l'édifice avaient
déjà été initiés dès les
années qui ont suivi sa conversion en 1832, notamment par l'architecte
des bâtiments civiles Pierre Auguste Guiauchain qui avait fourni
« un projet de reconversion et de restauration au milieu des
années 1830 »69, ce projet a été
reprit en 1839 par l'architecte Amable Ravoisié dans le cadre
l'exploration scientifique de l'Algérie, ce dernier «
réalise un relevé et suggère une proposition de
restauration de l'édifice »70 (Figures 5, 6 et 7),
mais ces planches sont surtout destinées à la publication.
Les travaux de construction de la cathédrale dureront
de 1845 à 1860, et le traitement de la façade en revanche n'a
été finalisé qu'à la fin du siècle. Pendant
la durée des travaux, l'église Notre-Dame des Victoires
--ancienne mosquée Betchine- occupa momentanément la place de
cathédrale de la ville d'Alger.
L'église fut considérablement agrandit, pour
occuper environs quatre fois la surface de l'ancienne mosquée, qui
était limité à l'espace du choeur de la cathédrale
à la fin des travaux, celle-ci fut dotée « d'un escalier
monumental donnant sur la place et de deux clochers »71. La
cathédrale a subi une transformation générale, «
Elle fut presque entièrement démolie et reconstruite, puis
considérablement agrandie »72.
Les travaux de transformation ont été
entamés par l'architecte des bâtiments civils Pierre- Auguste
Guiauchain, puis menés successivement par les architectes
diocésains Harou
69 OULEBSIR Nabila, op.cit
70 Ibid.
71 KOUMAS Ahmed, op.cit.
72 KLEIN.H, op.cit.
ROMAIN, Jean-Baptiste FERAUD (1815-1884) remplacé par
Jean-Eugène FROMAGEAU nommé par le ministère des colonies
architecte en chef des édifices diocésains d'Algérie.
Le projet de transformation de l'ancienne mosquée a
été perturbé plusieurs fois par des problèmes de
stabilité du bâtiment en construction, ces problèmes
été liés à l'instabilité du sol du
côté de la rue du Divan, d'où la présence des
contreforts en pierre taillée sur toute la longueur du mur de ce
côté ; suite à ces problèmes d'instabilité du
sol, des sondages ont été exécuté et « une
intéressante mosaïque fut trouvée, représentant des
têtes d'animaux et aussi des médaillons...Ces mosaïques, dont
une partie demeure sous les fondations de la Cathédrale, ont
été attribuées à d'anciens thermes romains
»73.
Les travaux de la façade se poursuivirent
jusqu'à la fin du XIXème siècle, et c'est la
proposition de l'architecte Albert Ballu en 1886 (Figure.8) qui fut
réalisé, après plusieurs propositions non retenues,
notamment celle d'Haroun Romaine « élaborée en 1856 et
qui correspond au plan qu'il établit en 1850 en tant qu'architecte
diocésain » (Figure.9) qui suggère déjà
l'idée de deux tours latérales. Ces tours d'inspiration
orientaliste qui s'élèvent aux deux extrémités de
la façade de la cathédrale «sont une réplique des
minarets de la mosquée El Nasser Mohammed à la citadelle du
Caire, et des minarets de la mosquée de Kaït-Bey» ;
D'ailleurs l'ensemble de l'édifice a été
réalisé dans un style architectural mélangeant
différentes influences, du romano-byzantin à l'orientalisme, ce
qui va donner naissance à l'architecture Néo-Mauresque en
Algérie dominante au début du XXème
siècle, et le bâtiment de la cathédrale fait son
entrée dans l'inventaire des monuments historique et est classé
en 1908.
Malgré les sommes colossale dépensées
pour la transformation du bâtiment de la cathédrale, dans le cadre
de qui été le plus grand projet de restauration après la
conquête, le résultat ne fut pas l'unanimité ni parmi les
fidèles, ni parmi les urbanistes de la ville ; que ce soit pour son
aspect architectural ou pour sa surface restreinte et son positionnement au
coeur de la Casbah d'Alger, ces problèmes se posent au cours des
aménagements urbains que subit la ville à la fin des
années 1850, ainsi on peut lire dans le rapport du projet de la nouvelle
ville d'Alger en 1858 : « la cathédrale actuelle, dont on
connait l'insuffisance à chaque réunion officielle et surtout aux
jours de grandes frtes, placées dans un endroit resserré ou il
y'aura toujours encombrement et plus tard du danger pour les piétons
lorsque les voitures pourront
73 Ibid.
y arriver, nous a paru, suivant les mouvement de la
population, devoir être construite dans la nouvelle enceinte. Un palais
digne du chef de la religion, serait établi près de ce monument
que nous plaçons à proximité de la ville actuelle
»74.
Installer dans la basse Casbah par la volonté du duc de
Rovigo, la cathédrale n'a jamais été véritablement
intégré dans cette partie de la ville ou la population est en
grande majorité de confession musulmane, de plus l'édifice
même après son élargissement était relativement
étroit pour accueillir les cérémonies de la grande
cathédrale d'Alger.
L'église Saint-Philippe garde sa fonction de
cathédrale de la ville d'Alger jusqu'à l'indépendance de
l'Algérie en 1962 ou elle fut reconvertit en mosquée et c'est
dorénavant la nouvelle église du sacré coeur construire en
1956 qui occupe la place de cathédrale de la ville.
74 VIGOUREUX, CAILLAT, « Alger, projet d'une
nouvelle ville », Alger, 1858, dans OULEBSIR Nabila, op.cit.
Figure 5 : Projet de restauration de la cathédrale
Saint-Philippe, Plan, Amable RAVOISIE, Alger, 1839.Source : OULEBSIR
Nabila, « Les usages du patrimoine », Éd. de la
Maison des sciences de l'homme, Paris, 2004.
Figure 6 : Projet de restauration de la cathédrale
Saint-Philippe, Façade principale, Amable RAVOISIE, Alger, 1839. Source
: OULEBSIR Nabila, « Les usages du patrimoine », Éd.
de la Maison des sciences de l'homme, Paris, 2004.
Figure 7 : Projet de restauration de la cathédrale
Saint-Philippe, coupe latérale, Amable RAVOISIE, Alger, 1839. Source :
OULEBSIR Nabila, « Les usages du patrimoine », Éd. de
la Maison des sciences de l'homme, Paris, 2004.
Figure 8 : Projet d'achèvement de I a façade de
I a cathédraI e Saint-Philippe, aquarelle d'Albert BALLU, Alger, 1886.
Source : KOUMAS Ahmed, NAFAA Chéhrazade, « L'Algérie et son
patrimoine », éditions du patrimoine, Paris, 2003.
Figure 9 : Projet d'achèvement de la façade de
la cathédrale Saint-Philippe, aquarelle de Romain HAROU, Alger, 1856.
Source : KOUMAS Ahmed, NAFAA Chéhrazade, « L'Algérie et son
patrimoine », éditions du patrimoine, Paris, 2003.
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