2. Prise de distance avec la belle famille.
Une première remarque vient du fait que la vie de
couple n'est pas toujours évidente. Et lorsqu'on y ajoute la belle
famille, cela peut devenir ingérable. En effet, dans un contexte de
mutations sociales affectant toutes les structures de la société,
la tradition cède la place au modernisme. La société
gabonaise se modernise et se développe maintenant sous l'influence de
l'Occident : les téléfilms, les cd importés
accélèrent le processus d'acculturation dans toutes les familles
urbaines et rurales. De plus, internet et la téléphonie mobile ne
sont pas en reste. Ce qui fait que le cliché européen de
l'incompatibilité d'humeur entre belle-mère et bru sème le
trouble dans la relation traditionnelle de ces deux acteurs.
En son temps, les devoirs de la bru envers sa belle famille
étaient de rigueur. Mais cette autorité s'émousse de jour
en jour. Les rapports conviviaux se font de plus en plus rares. Les couples
aspirent à plus de liberté d'où la décision d'aller
vivre loin la maison familiale. Car la cohabitation familiale entraîne,
comme nous l'avons vu dans les sections précédentes, la
surveillance de la vie du couple par la belle famille dont parle madame Y.H et
les autres brus que nous avons rencontrées, et qui suscite toujours des
conflits ; en particulier entre bru et belle-mère.
Ainsi la bru, influencée par un ensemble de valeurs
occidentales telles les téléfilms, l'école, l'urbanisation
; l'économie monétaire et pourquoi pas l'entourage, provoquent en
elle des transformations considérables et partant, les pratiques
culturelles africaines.
Disons aussi que la soif de liberté ou d'individualisme
a fait naître un nouvel esprit qui met en évidence l'ego,
l'égoïsme, le moi. Celles qui n'étaient pas mariées
étaient soumises après le mariage, montrent leurs « vrai
visage » en prenant donc des distances avec la belle famille ; ou pour
celles qui ne cohabitent plus dans la maison familiale montrent
également « leurs vrais visages ». En fin de compte, la belle
famille perd son autorité sur le fils et la bru ; et les obligations des
belles-filles vis-à-vis d'eux disparaissent. D'où leur avis selon
lequel « il n'est pas souhaitable de vivre avec sa belle-mère
parce qu'elle voudra se mêler des affaires du couple et prendre la part
de son fils ; la bru aura l'impression d'être gérée dans le
foyer par une tiers personne.»300 En résumé,
si la bru prend des distances avec la belle famille alors elle pourra mieux
s'approprier son foyer. En témoigne A.A.J « j'attire
l'attention de ma femme, cette relation j'attire l'attention de ma
femme ; cette relation il faut faire attention ; c'est mon devoir de l'avertir.
Mon pieds c'est son pieds, là où je dois mettre les pieds c'est
là où tu mets les pieds.»
Egalement, « moi-même j'ai dis à ma
femme que c'est inutile d'aller rendre visite à mes parents. Je lui dis
1 fois tous les 3 mois, tu leur dis que t'es juste de passage vous dire
bonjour. C'est pour garder les bons rapports.»301 Enfin,
monsieur I.S nous dit que « Personne ne vient manger chez moi.
Même mes neveux ne connaissent pas chez moi. Il n'ya pas que la
belle-mère, il ya aussi les grandes soeurs.»302
300 ,Il s'agit là du point de vue que partagent toutes les
brus quant à la question de savoir si il est souhaitable de vivre avec
sa belle-mère ?
301 Propos de monsieur E.J.F, Myènè, cadre
retraité de Tractafric SHO/Gabon, 59 ans, 5 enfants, marié
à la coutume à une Sénégalo-gabonaise, habitant la
Sni/Owendo, entretien réalisé en avril 2009.
302 Propos de monsieur I.S, 49 ans, 3 enfants, marié
à l'état-civil, à une mauricienne, enseignant du
supérieur et conseiller du Ministre des mines.
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