II.2. Les défis et les perspectives de la gestion
durable des ressources forestières dans le contexte de la
variabilité et du changement climatique
En dépit de l'intervention de l'Etat et des partenaires
à travers les politiques de développement en milieu rural, le
problème de dégradation des ressources naturelles demeure
important. Pour LOMPO O. (2004) « La politique de conservation
exclusive a été conduite au Burkina Faso et en particulier au
parc W, jusqu'au lendemain des années 80. Mais l'échec de cette
politique « conservationniste » trouve son fondement dans des
facteurs tant exogènes qu'endogènes ». Les populations
riveraines de la forêt de Gonsé ont régulièrement
participé aux travaux d'aménagements et de
réaménagement avec le colonisateur et l'État après
les indépendances. Toutefois ces acteurs locaux n'arrivent pas à
se responsabiliser effectivement après la fin des projets. Les effets
des variabilités climatiques compliquent davantage la gestion des
ressources naturelles.
Les politiques de gestion durable des ressources doivent tenir
compte de ces changements et mieux intégrer les savoirs locaux de
gestion car le paysan maîtrise mieux son milieu d'existence que
quiconque. Pour cela, de nombreux défis sont à relever pour une
gestion durable des ressources forestières.
II.2.1. Les défis de la gestion concertée
des ressources naturelles
La gestion concertée s'inscrit dans le contexte de la
gestion durable des ressources naturelles entreprise par les différents
Etats sahéliens en réponse à la crise climatique des
années 70. Le manque de prise en charge réelle des besoins des
populations a quelque peu entravé la réussite de ces initiatives
mises en place par les autorités.
II .2.1.1. Les politiques
environnementales
Après les indépendances, le Burkina Faso,
à l'instar des pays de l'Afrique subsaharienne, a mis en place des
politiques visant à résoudre les problèmes
environnementaux. Ces politiques environnementales ont été
renforcées par de nombreux textes pour permettre une gestion rationnelle
et durable des ressources naturelles. La sécheresse des années 70
a vu la création du CILSS, permettant aux Etats signataires de
s'intéresser à la dégradation continue des ressources
naturelles. Des axes de développement intégrant l'environnement
comme maillon clé ont ainsi été tracés avec un
ensemble de textes et de lois. C'est ainsi que le Burkina a adopté en
1991, un Plan d'Action National pour l'environnement(PANE). Ce plan a
été relu en 1994 suite à la conférence des
Nations
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![](Variabilite-climatique-et-gestion-des-ressources-naturelles-Cas-de-la-fort-classee-et-reserve110.png)
Unies sur l'Environnement à Rio de Janeiro en 1992. A
ce plan se greffent d'autres politiques jugées plus pertinentes et mieux
orientées comme la Lettre d'Intention de Politique de
Développement Humain Durable (LIPDHD) en 1995, le Cadre
Stratégique de Lutte contre la Pauvreté (CSLP) en 2000. Le pays
siège également dans plusieurs institutions régionales et
internationales oeuvrant dans la conservation et la protection des ressources
naturelles pour un développement durable.
Des politiques communes ont ainsi été
élaborées. Entre autres il y a le Nouveau Partenariat pour le
Développement de l'Afrique (NEPAD), le Plan d'Action Régional de
la Gestion Intégrée de Ressources en Eau (PAGIRE), la
Communauté des Etats Sahélo-Sahariens (CEN-SAD), etc.
Également, sur le plan juridique, la constitution (article 14) certifie
que les richesses et les ressources naturelles appartiennent au peuple et elles
sont utilisées pour l'amélioration de ses conditions de vie
(...).
Des textes législatifs existent sur la gestion de
l'environnement; à cet effet, la loi n°006-97/ADP du 31 janvier
1997 portant code forestier au Burkina Faso, est l'une des lois permettant une
réglementation de l'exploitation des ressources naturelles notamment
celles forestières. Chaque secteur de l'environnement physique,
politique, social, économique et culturel dispose de textes et lois
réglementant sa gestion. De ce fait, le Burkina Faso est « riche
» en matière de texte et lois dans le domaine de l'environnement.
Cependant, la dégradation des ressources naturelles restent croissantes
et les populations à la base peinent toujours à chercher une
conciliation entre gestion de leur patrimoine et amélioration de leurs
conditions de vie. Les textes réglementaires sont souvent conçus
sans un diagnostic préalable des besoins des populations.
Certaines lois sur le domaine foncier non comprises par les
populations sont ainsi perçues comme une expropriation de leur
patrimoine. Face à ces situations, elles développent des
stratégies de sabotage et un esprit d'ensemble de
désintérêt.
Le déclassement de la forêt de Gonsé par
décret ministériel le mercredi 4 juillet 2007, a
été mal interprété par les populations riveraines.
Elles pensent à une confiscation de leur patrimoine à des fins
touristiques par l'Etat. Mais ce décret précise que la
forêt classée de Gonsé change de destination et de statut
de forêt classée en devenant forêt classée et
réserve partielle de faune. Ce nouveau statut qui veut faire de la
forêt un site touristique vise les objectifs ci-après;
· conserver la diversité biologique en permettant
une gestion rationnelle et une utilisation durable des ressources
naturelles;
· promouvoir l'éducation environnementale, la
recherche et la surveillance continue de l'environnement ; préserver les
pratiques traditionnelles compatibles avec les objectifs de la zone et soutenir
le développement local.
Pourtant, la population mal informée reste
réticente à tout aménagement dans la forêt. Aussi
toute activité qui se mènera dans la forêt sans une prise
en compte de sa préoccupation est vouée à
l'échec.
De ce fait, les politiques environnementales doivent
être élaborées de concert avec les acteurs à la
base. Ils sont les mieux indiqués pour organiser leur cadre de vie. La
prise en compte totale et non partielle de tous les secteurs de
développement est nécessaire dans les périphéries
de la forêt de Gonsé. La dégradation ou la
non-productivité des autres secteurs de développement peut
entrainer un recours aux produits forestiers pour la satisfaction des
besoins.
Parmi les personnes interrogées, 75,41 % affirment
qu'il y a 50 ans, la recherche des ressources ne nécessitait pas de
rentrer dans la forêt. Cela veut dire que la disponibilité des
ressources était évidente. Si les populations riveraines arrivent
à satisfaire leurs besoins vitaux sans avoir recours aux produits de la
forêt, cela constituerait une voie de réussite des politiques
environnementales mises en place.
Les observations de terrain, montrent que tous les
investissements tels que la récupération des zones nus
dégradées, les reboisements et la protection des espèces
végétales, sont exécutés principalement
dans la forêt. Mais les terres aux alentours se
dégradent et deviennent impropres aux cultures d'oàle recours aux
zones plus propices (forêt) pour la satisfaction des moindres besoins.
Les zones nues
prennent de l'ampleur aux alentours de la forêt.
En effet, les politiques de gestion antérieures n'ont
pas tenu compte de l'environnement immédiat de la forêt. Ce volet
bien intégré pourrait permettre un développement de
l'ensemble de la localité et partant un début de
résolution des problèmes de dégradation des ressources
forestières. La protection de la forêt doit passer d'abord par la
satisfaction des besoins primordiaux des acteurs locaux.
II.1.1.2. Les acteurs à la
base
![](Variabilite-climatique-et-gestion-des-ressources-naturelles-Cas-de-la-fort-classee-et-reserve111.png)
Les acteurs locaux ont toujours été
sollicités par les autorités pour l'exécution des
politiques de développement. Leur compréhension des politiques
gouvernementales sont divergentes. Les populations riveraines de la forêt
de Gonsé ont été employées comme manoeuvre ou
ouvrier par les projets de gestion. Depuis la période coloniale
jusqu'à nos jours, les populations ont régulièrement
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![](Variabilite-climatique-et-gestion-des-ressources-naturelles-Cas-de-la-fort-classee-et-reserve112.png)
participé à l'exécution des travaux
d'aménagement de la forêt. L'engouement et le dévouement
à la gestion que celles-ci ont constamment manifesté ne sont plus
les mêmes à la fin des projets. Cela peut s'expliquer par
l'intérêt que les populations accordent aux gains procurés
qu'à la protection de leur environnement. La préservation des
ressources forestières n'est pas considérée comme une
priorité par les populations. Mais cette attitude des populations est
due à la mauvaise façon qu'adoptent les autorités pour les
faire accepter leurs politiques. De nos jours aucun paysan ne veut s'engager
dans les travaux de la forêt sans être payé.
Avant tout projet de développement, il est
nécessaire de le faire adopter par les bénéficiaires. Ils
doivent décider en collaboration avec l'administration en place de sa
mise en oeuvre. Les actions de sensibilisation doivent être menées
en vue d'amener les populations à faire face à la fatalité
et à s'investir dans la restauration du potentiel naturel de production.
Cela constituerait à l'heure actuelle une stratégie d'adaptation
aux conditions climatiques précaires.
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