2.2.8. ENJEU DE LA LIBERALISATION DU SECTEUR FINANCIER
Du point de vue théorique, le concept de
libéralisation financière apparaît au début des
années 70 dans les écrits de R.I. Mc-Kinnon (1973) et E.
Shaw (1973). Ces deux auteurs présentent la libéralisation du
secteur financier comme un moyen efficace et simple pour
accélérer la croissance économique des pays en voie de
développement. Cette théorie trouve rapidement un écho
favorable, tant auprès des grands organismes internationaux (F.M.I.,
Banque Mondiale) qu'auprès de certains pays en voie de
développement(Baptiste Venet ,2004).C'est alors que la
libéralisation financière, prônée par les
institutions internationales, était censée réduire le
rôle de l'Etat pour supprimer les distorsions liée à
l'économie administrée et, grâce au relèvement des
taux d'intérêt, devait permettre l'augmentation de
l'épargne nationale afin de relancer l'investissement sans recourir
à l'endettement extérieur (Banque mondiale, 1989 in
A-Coordination Sud,2008).
2.2.9. LES EFFETS DE LA LIBERALISATION DES ECONOMIES EN
AFRIQUE
Dans de nombreux pays du Sud, une large part du financement de
l'agriculture était jusqu'à présent publique (Wampfler,
2002 ; A-coordination Sud, 2008 ; Dufumier, 1996), sous différentes
formes : lignes de crédit et fonds de garantie gérés par
l'administration, banque publiques (agricoles ou de développement),
sociétés de développement, projets de
développement. Ainsi comme le note (Wampfler ;2002) La
libéralisation économique démantèle progressivement
cette offre publique de financement : les lignes de crédit direct
à l'agriculture gérées par les administrations ou
cogérées par les projets de développement, voire par les
OP, ont montré leurs limites (impayés importants,
difficulté de pérennisation) ; avec la diffusion des bonnes
pratiques en matière de financement, les bailleurs de fonds tendent
à limiter leurs investissements dans les projets de crédit. Les
sociétés de développement sont progressivement
privatisées ; leur fonction de financement est
transférée
avec difficulté aux banques, organisations paysannes et
aux IMF quand celles-ci existent. Les banques agricoles concentrent leur offre
de financement sur quelques secteurs sécurisés (cultures
d'exportations, productions irriguées, ...) et ne s'aventurent qu'avec
beaucoup de précaution dans les autres secteurs.
A cet effet, Abena Nguema(2006) note alors que, le brusque
désengagement de l'Etat et son remplacement par des réseaux
privés de distribution des produits agrochimiques et des semences n'a pu
réussir à satisfaire que la demande des grandes filières
des cultures industrielles et d'exportation manifestée par les grandes
sociétés ou entreprises agricoles publiques ou privées. En
outre, le non transfert aux paysans du savoir-faire des brigades
phytosanitaires du Ministère de l'Agriculture et du Développement
Rural (MINADER) s'est traduit par une recrudescence des grands fléaux
dans le Nord et une dégradation de l'état sanitaire des cultures
et plantations dans le Sud.
1) les conséquences de la libéralisation
sur la production.
La libéralisation signifiait la responsabilisation des
paysans et la fin des subventions de l'Etat. Dès lors les paysans sont
tenus de se procurer par leurs soins tout ce qui est nécessaire dans la
chaîne de production. En 1988-1989, la distribution gratuite des intrants
sera interrompue. Elle sera accompagnée de la suppression du
système de subventions aux engrais pesticides et herbicides. Le
programme de réforme du secteur engrais en 1993 imposera la
privatisation intégrale de la distribution des engrais. Pour ce qui
concerne le cacao et le café, on note ainsi l'entrée d'une
multiplicité d'acteurs privés dans le marché des
intrants.
Dans l'Ouest Cameroun, l'UCCAO, qui tirait donc ses ressources
de la vente du café arabica, connaît des problèmes
financiers et ses activités d'encadrement se ralentissent. L'Etat adopte
une politique dite de désengagement des activités assumées
auparavant en faveur du monde rural : fourniture d'intrants agricoles, conseils
techniques, commercialisation. Le secteur agricole connaît alors une
libéralisation sur fond d'abandon du soutien des fonds publics.
(Fongang, 2008).
Ainsi, l'affaiblissement considérable du rôle de
l'Etat lié à son retrait de l'appareil de production agricole,
sans une préparation suffisante pour assurer une bonne transition est
accentuée par la pénurie financière endurée par les
ministères en charge du secteur agricole et forestier, produit et
produira encore des conséquences néfastes sur la production du
secteur agricole au Cameroun Abena Nguema(2006).
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