V.2. Analyse de la
persistance des chocs
V.2.1.
Enseignements de la décomposition de la variance
Rappelons que la décomposition de la variance de
l'erreur de prévision a pour objectif de déterminer pour chacun
des chocs, sa contribution à la variance de l'erreur en pourcentage
d'une variable endogène. Quand une innovation explique une part
importante de la variance de l'erreur de prévision d'une variable
endogène, l'on en déduit que l'économie
étudiée est très sensible aux innovations affectant cette
série. La décomposition de la variance (voir annexe pour une
présentation plus détaillée) indique que :
Tableau 2 :
Décomposition de la variance des résidus de prévision de
la série LNPIB
Variance Decomposition of LNPIB:
|
Period
|
S.E.
|
Supply
Shock
|
Demand
Shock
|
Monetary Shock
|
1
|
1.000000
|
100.0000
|
0.000000
|
0.000000
|
2
|
1.848167
|
99.74537
|
0.254621
|
6.55E-06
|
3
|
2.584312
|
99.54171
|
0.458268
|
1.96E-05
|
4
|
3.171585
|
99.43276
|
0.567202
|
3.76E-05
|
5
|
3.607548
|
99.38756
|
0.612384
|
5.50E-05
|
6
|
3.909779
|
99.37576
|
0.624173
|
7.00E-05
|
7
|
4.104905
|
99.37941
|
0.620510
|
8.15E-05
|
8
|
4.221296
|
99.38831
|
0.611596
|
8.99E-05
|
9
|
4.284509
|
99.39714
|
0.602765
|
9.54E-05
|
10
|
4.314985
|
99.40350
|
0.596405
|
9.88E-05
|
11
|
4.327421
|
99.40683
|
0.593069
|
0.000101
|
12
|
4.331285
|
99.40762
|
0.592276
|
0.000101
|
13
|
4.331949
|
99.40676
|
0.593136
|
0.000102
|
100
|
4.336789
|
99.39931
|
0.600585
|
0.000102
|
200
|
4.336789
|
99.39931
|
0.600585
|
0.000102
|
500
|
4.336789
|
99.39931
|
0.600585
|
0.000102
|
1000
|
4.336789
|
99.39931
|
0.600585
|
0.000102
|
|
4.336789
|
99.39931
|
0.600585
|
0.000102
|
ü concernant le PIB, le choc d'offre explique
l'essentiel de sa dynamique. De façon instantanée, 100 % de la
variance de l'erreur de prévision du PIB est dû au choc d'offre.
(voir 1ère ligne tableau ci-dessus) le choc
monétaire n'a pas d'effet statistiquement non nul sur le PIB.
Globalement, 99,3993 % de la variance des erreurs de prévision du PIB
sont dues aux propres innovations de l'offre ; 0,6006 % sont attribuables
au choc de demande et le reste % est le fait du choc monétaire. C'est dire que l'impact
des effets monétaire sur l'activité réelle est totalement
négligeable. Ce résultat infirme notre Hypothèse N°2
selon laquelle, toute variation du taux d'intérêt de la BEAC a
un impact significatif sur le PIB et le niveau des prix au cameroun. Ceci
peut trouver une explication dans le caractère « hors
banque » des banques régionales, celles-ci ne
réagissent presque pas aux modifications de taux d'intérêt
de la Banque Centrale. On n'oublie pas non plus le paradoxe de nos banques
commerciales (surliquidité mais pas de crédit bancaire
offert). Toutefois, bien que l'ordre d'entrée de nos variables dans
ce SVAR contribue à cette conclusion, les données à notre
disposition ne suffisent cependant pas pour conclure à une non
neutralité totale des grandeurs monétaires sur les grandeurs
réelles. Tant il est vrai que d'autres canaux de transmission de la
politique monétaire ne sont pas explorés dans cette
étude.
Tableau 3 :
Décomposition de la variance des résidus de prévision de
la variable LNPRIX
Variance Decomposition of LNPRIX:
|
Period
|
S.E.
|
Supply
Shock
|
Demand Shock
|
Monetary Shock
|
1
|
1.012121
|
2.380742
|
97.61926
|
0.000000
|
2
|
1.347043
|
1.347251
|
98.65267
|
7.53E-05
|
3
|
1.497829
|
1.310173
|
98.68940
|
0.000422
|
4
|
1.561662
|
1.309278
|
98.69005
|
0.000669
|
5
|
1.588960
|
1.278147
|
98.72102
|
0.000834
|
6
|
1.603333
|
1.632261
|
98.36683
|
0.000913
|
7
|
1.616561
|
2.675104
|
97.32396
|
0.000939
|
8
|
1.632520
|
4.363786
|
95.63528
|
0.000936
|
9
|
1.650786
|
6.401252
|
93.59783
|
0.000919
|
10
|
1.669269
|
8.443665
|
91.55544
|
0.000900
|
11
|
1.685925
|
10.23967
|
89.75945
|
0.000882
|
12
|
1.699503
|
11.66760
|
88.33153
|
0.000868
|
13
|
1.709628
|
12.71073
|
87.28841
|
0.000859
|
14
|
1.716574
|
13.41576
|
86.58338
|
0.000852
|
15
|
1.720961
|
13.85664
|
86.14251
|
0.000848
|
16
|
1.723499
|
14.11016
|
85.88899
|
0.000846
|
17
|
1.724828
|
14.24239
|
85.75676
|
0.000845
|
100
|
1.725855
|
14.34294
|
85.65621
|
0.000845
|
200
|
1.725855
|
14.34294
|
85.65621
|
0.000845
|
500
|
1.725855
|
14.34294
|
85.65621
|
0.000845
|
1000
|
1.725855
|
14.34294
|
85.65621
|
0.000845
|
|
1.725855
|
14.34294
|
85.65621
|
0.000845
|
ü Concernant le niveau des prix : la
décomposition de la variance de l'erreur de prévision des prix
indique que de manière instantanée, 97,62 % de celle-ci est
dû au choc de demande contre 2,38 % pour le choc d'offre. Les effets du
choc monétaire ne sont significatifs ni à court terme ni à
long terme. Cela est tout de même paradoxal, puisque selon une conception
bien connue de la politique monétaire, l'inflation serait partout et
toujours un phénomène monétaire. Le rejet de notre
hypothèse N°2 se trouve conforté par ce constat : la
politique du taux d'intérêt se trouve dès lors
inefficace.
Tableau 4 :
Décomposition de la variance des résidus de prévision de
la variable TXFR
Variance Decomposition of D(TXFR):
|
Period
|
S.E.
|
Supply
Shock
|
Demand Shock
|
Monetary Shock
|
1
|
1.110989
|
0.330549
|
18.65161
|
81.01784
|
2
|
17.89529
|
50.60429
|
49.08341
|
0.312297
|
3
|
25.70632
|
73.93450
|
25.91176
|
0.153741
|
4
|
32.73214
|
82.65706
|
17.24800
|
0.094938
|
5
|
37.74307
|
86.74424
|
13.18436
|
0.071405
|
6
|
41.16152
|
88.72049
|
11.21943
|
0.060078
|
7
|
43.29943
|
89.75856
|
10.18713
|
0.054308
|
8
|
44.54211
|
90.29878
|
9.649885
|
0.051335
|
9
|
45.19605
|
90.57044
|
9.379691
|
0.049868
|
10
|
45.49980
|
90.69452
|
9.256268
|
0.049210
|
11
|
45.61709
|
90.74231
|
9.208730
|
0.048959
|
12
|
45.65006
|
90.75513
|
9.195983
|
0.048889
|
13
|
45.65435
|
90.75540
|
9.195716
|
0.048880
|
14
|
45.65514
|
90.75369
|
9.197428
|
0.048879
|
15
|
45.66033
|
90.75366
|
9.197476
|
0.048868
|
16
|
45.66981
|
90.75561
|
9.195547
|
0.048847
|
17
|
45.68098
|
90.75866
|
9.192514
|
0.048824
|
18
|
45.69141
|
90.76187
|
9.189329
|
0.048801
|
19
|
45.69974
|
90.76460
|
9.186613
|
0.048784
|
20
|
45.70561
|
90.76662
|
9.184612
|
0.048771
|
21
|
45.70928
|
90.76792
|
9.183312
|
0.048763
|
22
|
45.71132
|
90.76868
|
9.182565
|
0.048759
|
23
|
45.71231
|
90.76905
|
9.182192
|
0.048757
|
24
|
45.71271
|
90.76921
|
9.182037
|
0.048756
|
100
|
45.71304
|
90.76932
|
9.181929
|
0.048755
|
500
|
45.71304
|
90.76932
|
9.181929
|
0.048755
|
|
45.71304
|
90.76932
|
9.181929
|
0.048755
|
ü Pour ce qui est de la variance des erreurs de
prévision du taux d'intérêt, nous voyons bien que
dès la première période 81 % de variabilité sont le
fait du choc monétaire contre 18.65 % pour le choc de demande et 0.33 %
pour le choc d'offre. Ceci était tout à fait prévisible,
puisqu'il s'agit de la variable directement liée au choc
monétaire. Cette tendance se renverse dès le second trimestre et
le choc monétaire n'explique plus que 0.31 % de la variabilité
des erreurs du taux d'intérêt.
V.2.2. Enseignements des
fonctions de réponse au choc monétaire
ü Réponse du PIB
(représenté par la variable LNPIB)
Figure V-5 : Représentation de la
réponse de la variable LNPIB suite à un choc
monétaire
L'analyse de la figure ci-dessus de la réponse du PIB
à un choc monétaire, fait ressortir que : une politique
monétaire expansive se traduit par un effet positif sur le PIB, effet
dont l'ampleur maximale se situe autour du 6ème trimestre. Le
Pib redescend ensuite pendant 9 trimestres, puis traverse sa tendance de long
terme et se stabilise à son niveau initial au bout de 6 ans
(25ème trimestres). Cela est tout à fait conforme aux
prescriptions théoriques62(*), sauf que l'on ne perd pas de vue que l'effet est
statistiquement nul puisque l'on peut remarquer que l'ampleur des effets reste
très insignifiante, de l'ordre de 0,002 % maximum. Et donc l'impact
d'un choc monétaire ne saurait avoir de persistance significative.
Ces résultats sont conformes à ceux obtenus par
Poddar, Sab, et Khatrachyan (2006) en Jordanie. Ils ont utilisé un
modèle comprenant outre le PIB, le niveau général des
prix, les réserves étrangères, le cours des actions, le
taux de change et le spread entre leur taux à trois mois et le taux des
Fonds Fédéraux des États-Unis. Ils n'ont trouvé
aucune évidence en ce qui concerne l'impact de la politique
monétaire sur le produit global. L'effet de la politique
monétaire sur le marché des actions a également
semblé insignifiant. D'autres canaux, comme ceux des prix des actions et
du taux de change, n'étaient pas significatifs pour la transmission de
la politique monétaire à l'activité économique.
ü Réponse du niveau des prix
(représenté par la variable LNPRIX)
Figure V-6 : Représentation de la
réponse de la variable LNPRIX suite à un choc
monétaire
Pour ce qui est de l'inflation, comme nous l'enseigne la
représentation graphique ci-dessus, l'impact d'un choc monétaire
sur l'inflation est instantanément négatif et atteint son niveau
maximum après 3 périodes avant d'amorcer son retour progressif
vers sa tendance de long terme, puis dépasse cette tendance avant de
s'estomper au bout de 5 ans (22 trimestres). Il est clair que l'impact d'un
choc monétaire provoque l'effet dépressif attendu sur les prix,
du moins pour ce qui est du sens attendu de la réaction. Nous n'oublions
pas que l'effet demeure statistiquement insignifiant.
ü Réponse du taux
d'intérêt (représenté par la variable
TXFR)
Figure V-7 : Représentation de la
réponse de la variable TXFR suite à un choc
monétaire
La figure précédente nous indique qu'un choc
monétaire se traduit par une hausse de presque 1 point du taux
d'intérêt, mais cet effet est très vite
résorbé puisque la variable revient très rapidement
à son niveau de long terme. Ceci est tout à fait normal, puisque
c'est ce choc (monétaire) qui traduit le mouvement du taux
d'intérêt, l'impact unitaire sur le taux d'intérêt
correspond à cet effet.
Des résultats des estimations que nous venons de
présenter, l'on peut tirer quelques enseignements :
ü Le constat selon lequel l'impact d'un choc
monétaire n'ait pas de persistance significative, nous permet de
conclure à l'absence de réaction du secteur réel à
une impulsion monétaire ni à court ni à long terme. Cela
est d'ailleurs confirmé par l'ampleur de l'effet puisque le maximum de
la réponse du PIB atteint au 6ème trimestre, se situe
à 0.0018 % de même que pour les prix dont le maximum en valeur
absolue, est voisin de 0.0028 %. Une autre explication tout aussi plausible
s'obtient de la décomposition de la variance des erreurs de
prévision. Le paragraphe précédent nous indique que seuls
0.102 ×10-3 % de la variabilité des erreurs de
prévision du PIB et 0.845×10-3 de variabilité des
erreurs du niveau des prix sont expliqués par le choc
monétaire ; ce qui est relativement infinitésimal.
ü Pour ce qui est de l'impact d'un choc monétaire
sur le niveau des prix, les effets se dissipent tout aussi rapidement que dans
le cas du PIB. Le sens de la réaction est bien conforme à la
théorie économique puisque c'est par le biais des réponses
données par la croissance économique aux variations du taux
d'intérêt qu'il est généralement convenu
d'interpréter le sens de l'évolution des prix : dans un contexte
de récession, la faiblesse de la demande exerce un effet
déflationniste. Ce canal de transmission de la politique
monétaire explique l'antériorité de la réponse du
PIB sur celle des prix suite à un choc monétaire. (Banque de
France (1998))
Le fonctionnement inefficace de la politique monétaire
au Cameroun tient tout aussi à un certain nombre de difficultés
d'ordre structurel :
· l'existence de circuits exceptionnels de
refinancement63(*),
nuisibles à l'efficacité de la politique monétaire ce qui
conduit à une atonie de la demande de refinancement du système
bancaire camerounais à la Banque Centrale.
· La Banque Centrale n'a pas vraiment
développée des stratégies pour inciter les banques
à aller sur le marché monétaire. Les banques
opérant dans le système restent « hors banque »
puisqu'elles sont des filiales de banques étrangères et se
contentent des bénéfices retirés des opérations de
gestion de comptes clients. Il se pose alors ici la question de la mesure
à mettre en oeuvre pour résorber ce type de
difficultés.
· Le caractère embryonnaire du système
financier de la sous région.
Toutefois il y a lieu de rester prudent face aux
résultats de l'étude, du fait du caractère
athéorique ou plus statistique qu'économique de la
modélisation SVAR, utilisée ici pour l'identification des
coefficients en dessous de la diagonale de la matrice de long terme. De plus,
la série du PIB a été obtenue par trimestrialisation de
Goldstein et Kahn (1976). Quoiqu'étant une technique robuste
d'estimation de données infra annuelles, elle ne peut guère se
substituer à la disponibilité réelle de données
brutes. Ce qui laisse forcément échapper de ce fait quelques
informations sur la série véritable.
En outre, il est bien connu que la politique budgétaire
et la politique monétaire devraient opérer en coordination. Il
aurait donc été souhaitable de prendre en compte la politique
budgétaire dans le modèle (notamment par une variable telle que
le rapport du solde budgétaire au PIB). Par ailleurs, cette étude
pourrait être étendue à tous les pays de la zone
d'émission.
Enfin, nous aurions aussi pu explorer le canal stricte du
crédit (canal du crédit bancaire) ce qui nécessitait
naturellement plus de temps et de connaissance en techniques quantitatives, et
pourrait éventuellement faire l'objet de réflexions futures.
* 62 Ce qui confirme notre
hypothèse N°1.
* 63 Par exemple le fait que
les banques commerciales qui sont en général des succursales de
banques étrangères s'adressent à leur siège central
pour les refinancements.
|