CADRES THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE DE L'ETUDE
CHAPITRE I :
SECTION I : CADRE THEORIQUE DE L'ETUDE
Nous présentons dans cette section les aspects
théoriques de la gestion des déchets ménagers.
1.1 Problématique et intérét de
l'étude
Les problèmes environnementaux provoquent, ces
dernières décennies, l?inquiétude de l?opinion publique.
La protection de l?environnement est primordiale et ne doit donc pas être
reléguée au second rang d?autant pus que beaucoup de
défaillances économiques trouvent leur explication dans les
multiples atteintes sur l?environnement. La croissance économique, si
elle s?accompagne d?une exploitation accélérée des
ressources naturelles, son corollaire, la production des déchets est par
définition inévitable. Plus qu?une question théorique,
cela pose un énorme problème logistique et économique aux
administrateurs des villes surtout dans les pays en développement.
Selon l?OCDE (2006), la gestion des déchets
ménagers dans les pays en développement figure parmi les
principaux défis environnementaux. Compte tenu, notamment, de ses
impacts sur la qualité de l'environnement et sur la santé
publique, la gestion durable des déchets est devenue un sujet important
depuis une quinzaine d'années (Gareau et al., 2006). Nombreuses sont les
études mettant en évidence divers risques environnementaux et
sanitaires pour les communautés environnantes exposées aux
émissions des lieux d'élimination des déchets
(incinérateurs et lieux d'enfouissement sanitaire), y associant
notamment des effets néfastes sur les systèmes reproducteur,
neurologique, immunitaire, ainsi que des cancers et des risques psychosociaux
(Crighton et al., 2003; Elliot et al., 2004).
Plusieurs secteurs d?activité génèrent
des déchets. Les déchets ménagers, les déchets des
marchés, ceux des gares, des hôpitaux, les déchets des
boutiques et centres commerciaux et des industries, les déchets
électriques, électroniques et chimiques ; ceux de
l?économie informelle et formelle sont mal gérés et sont
autant de nuisances surtout dans les agglomérations urbaines de
l?Afrique de l?Ouest.
Le terme de ½déchets½ est
généralement abordé en termes d?externalités. Ils
représentent une part inévitable du processus de consommation des
ménages et se traduisent par la détérioration de la
qualité de l?environnement naturel et de la santé publique. Ils
constituent une nuisance et en tant que tels ils sont considérés
comme des externalités négatives. Les
déchets ménagers font également l'objet de
tri. Ils peuvent être valorisés et donc
échangés sur le marché à travers un prix et
contribuent à l?amélioration des profits d?autres agents
économiques (autres ménages et entreprises). Il
s?agit alors des externalités positives, technologiques et donc
pécuniaires (Scitovsky, 1954). Considérés comme
une nuisance sur l?environnement (tout au long de l?étude), comment les
appréhender afin d?envisager les solutions efficaces du financement de
leur élimination ?
L?environnement est un bien collectif ou bien public. Il se
caractérise par le fait que son accès est ouvert à tous
sans limites (non rivalité) ni contraintes (non exclusivité), de
sorte que rien n?incite à le ménager. Il n?est pas aisé de
persuader (essentiellement dans les PED), à priori, quelqu?un sur sa
pollution (par exemple)-alors qu?il pense que ceci restera toujours comme tel-
encore moins de lui faire payer un prix pour y accéder. Cela pose
le problème du financement par le ménage des dommages
environnementaux créés par les déchets qu'il
produit. La mauvaise prise en compte de ces coûts
environnementaux peut amener à des situations sous optimales.
La réparation des dommages causés à
l?environnement et l?indemnisation des victimes se faisaient traditionnellement
par recours aux fonds publics. Depuis Pigou (1920), une alternative consiste
à rendre légalement responsables les agents économiques
à l?origine du dommage. Cette solution retient aujourd?hui l?attention
aussi bien des théoriciens que les décideurs à travers des
instruments de politiques environnementales.
L?autorité de contrôle doit d?une part effectuer
les contrôles nécessaires pour s'assurer que les agents
économiques respectent la politique environnementale mise en vigueur et
d?autre part repérer les fraudeurs et, le cas échéant,
appliquer les sanctions prévues. La capacité à mettre en
oeuvre un dispositif de contrôle et de sanction efficace pourra
être un élément important pour lutter contre la
détérioration de la qualité de l?environnement. La mise en
oeuvre de mesures appropriées de contrôle d?une part, et de
sanction d?autre part, peut dissuader les auteurs des activités
polluantes de respecter les politiques publiques d?environnement. Le respect
des mesures de protection de l?environnement permet de réduire les
dommages causés.
L'agent économique est moins enclin à
commettre une infraction, lorsqu'il sait que la probabilité de
détection est élevée et qu'il sera soumis à une
sanction sévère en cas de détection. Les comportements de
dégradation excessive de l'environnement diminuent lorsque
l'intensité de la dissuasion s'accroît. Dans la pratique,
les agents pollueurs ne respectent pas généralement la
réglementation pour deux raisons principales : soit pour éviter
des coûts
supplémentaires de mise en conformité, soit
parce que le contrôle du régulateur est aléatoire (Bontems
et Rotillon ; 2002).
De manière générale, l?efficacité
de la politique de protection de l?environnement est liée en dehors du
choix de l?instrument, aux questions relatives à l'effet dissuasif des
sanctions et des contrôles. Il s'agit alors d'identifier les
paramètres de la politique susceptibles d'influer sur le comportement
des pollueurs.
Dans les villes de l?Afrique de l?Ouest, l?explosion urbaine
conjuguée à la crise économique accentue les
difficultés des autorités locales à mettre en place des
infrastructures et services efficaces dans le domaine de la gestion des ordures
ménagères. La collecte et l?élimination appropriées
des déchets ménagers constituent une préoccupation
quotidienne des autorités locales. En effet, faisant face à des
difficultés économiques de taille, les gestionnaires des villes
sont obligés de procéder à une hiérarchisation dans
le choix des investissements sociaux et la priorité n?est toujours pas
à la gestion des déchets ménagers.
L?analyse de la structure des dépenses de l?exercice
2004 de la municipalité de Porto-Novo, fait apparaître que le
fonctionnement de l?administration municipale occupe 97% des charges de
fonctionnement, l?entretien des voies urbaines consomme 50% des dépenses
utiles et les réalisations des équipements sociocommunautaires
dans la ville occupent 52%(Monographie de la ville de Porto-Novo,2006).
La croissance démographique et l?urbanisation rapide
que connaît actuellement la ville de Porto-Novo (223.552 habitants en
2002 avec un taux d?accroissement annuel de la population de 2,3% selon le
RPGH3 de 2002), conjuguées à un changement de comportement des
modes de production et de consommation sont à l?origine de
l?augmentation constante des quantités de déchets ménagers
générés. Selon la Direction des services
opérationnels de la ville de Porto-Novo (DSO, 2008) la production des
déchets ménagers actuelle dans la ville est de 1,7 litre (soit
650 g/jour/habitant). Pour la très grande majorité des
collectivités locales béninoises, la gestion des déchets
ménagers reste très problématique. Les pressions sur
l?environnement comme sur la qualité du cadre de vie des populations et
les conditions sanitaires deviennent de plus en plus alarmantes, notamment au
niveau des zones urbaines et périurbaines où se concentrent les
populations.
Moins de 40% des déchets ménagers sont
collectés dans la ville de Porto-Novo. Les pratiques dans ce domaine ont
des impacts désastreux, à court et à long terme sur la
santé des populations, le sol et les ressources halieutiques. Le
problème des ordures ménagères est devenu
une caractéristique du nouveau paysage urbain et il est
difficile d?y échapper. La quasi-totalité des déchets
générés dans la ville est rejetée dans les
décharges sauvages sans aucun aménagement ou infrastructures de
base permettant de protéger la santé des populations avoisinantes
et l?environnement. Ce problème est d?autant plus critique que les
décharges sauvages sont souvent créées près des
habitations avec des risques élevés d?exposition des
populations.
La politique de gestion des déchets ménagers
dans la ville de Porto-Novo est caractérisée par une large
défaillance alors que la ville voit la quantité moyenne de
déchets générés quotidiennement par une personne
augmenter sans cesse. La défaillance de la collecte des
déchets ménagers apparaît visible au regard des tas
d'ordures non ramassées et des poubelles débordantes dans
l'ensemble de la ville. Ces ordures peuvent rester des semaines avant
d'être collectées. La collecte n?est souvent pas
assurée et les déchets sont souvent déversés dans
les bas-fonds.
Cette situation d'insalubrité de la ville de
Porto-Novo amène à s'interroger sur la perception de
l'environnement par les ménages. La qualité de l'environnement
a-t-elle un prix pour ces ménages? Sont-ils-disposés à
participer au financement d'un programme d'amélioration de la
qualité du service de gestion des déchets ménagers
?
Au Bénin, la problématique de la gestion des
déchets ménagers consiste à débarrasser les
ménages de leurs déchets quotidiens afin d?assurer
l?hygiène et la propreté des foyers. Ce qui se résume
à une simple évacuation sans tarification spécifique.
La préservation de l'environnement n'est pas prise en compte. Si
le coût direct d'élimination (collecte, transport et traitement)
est évaluable, les coûts externes (pollutions de
l'atmosphère, du sol, de l'eau, etc.) voire sociaux ne sont pas
monétairement mesurables.
En effet, le secteur des déchets ménagers
comporte d?importantes externalités empêchant le marché
d?atteindre lui-même l?optimum (Baumol et Oates ; 1988). Ces
externalités se situent à un double niveau. D'une part le
producteur de déchets ne fait pas face à l'ensemble des
coûts techniques et environnementaux liés à
l'élimination des déchets ménagers. D'autre part, ceux qui
ont en charge la gestion des déchets ménagers (les
municipalités) ne tiennent pas compte des coûts environnementaux
dans le traitement des déchets ménagers.
Ainsi, du point de vue du décideur public, une
politique d?amélioration de la qualité de la gestion des
déchets ménagers se justifie si les bénéfices qui
résultent de cette politique sont supérieurs aux coûts.
Dans la réalité, il est difficile pour les décideurs
publics d?appréhender la valeur des coûts externes liés
à la mauvaise qualité de la gestion des déchets
ménagers. La plupart des études évaluent les
bénéfices d'une amélioration de la qualité de
gestion des déchets ménagers en termes de dommages
évités (pollution de l'air, du sol et de l'eau) négligeant
souvent les désutilités, autrement dit les nuisances
causées aux ménages.
L?évaluation monétaire des
désutilités des ménages liées à la gestion
des déchets ménagers constituerait un bon indicateur. Elle
permettrait de connaître les préférences des ménages
pour une amélioration de la qualité de gestion des
déchets.
A Porto-Novo, comme dans la plupart des villes de
l'Afrique subsahariennes, les coûts externes causés par les
déchets ménagers sont surtout liés à leur mauvaise
gestion. Face à ces différentes nuisances, nous supposons qu'une
amélioration du service d'élimination des déchets
ménagers entraîne nécessairement des effets sur le
bien-être des individus.
Evaluer monétairement les dommages causés par
les déchets ménagers revient à déterminer la valeur
des bénéfices induits par une amélioration de la
qualité du service. Evaluer cette modification du bienêtre induit
par l?amélioration du service constitue un outil d?arbitrage important
pour le décideur public qui cherche une gestion optimale des
déchets. Mais comment attribuer une valeur monétaire à des
biens qui ne s?échangent pas sur un marché et n?ont pas de prix
?
Dans cette situation où aucun marché ne permet
la révélation indirecte des préférences, les
économistes ont recours à des méthodes
d?évaluations spécifiques (la méthode d?évaluation
contingente, méthode des prix hédoniques, méthode de
transport etc.). La recherche d'une mesure économique des
nuisances causées par les déchets ménagers constitue une
étape préalable susceptible de générer des
indicateurs pertinents nécessaires à une meilleure prise de
décision publique de tarification des services d'élimination des
déchets ménagers.
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