6/ Fécondité : l'amorce d'une diminution ?
L'Indice Synthétique de fécondité (ISF)
est obtenu à partir du cumul des taux de fécondité par
âge 18
d'une année du calendrier. Il correspond au nombre
moyen d'enfants vivants que mettrait au monde une femme à la fin de sa
vie féconde, si elle subissait toute sa vie les taux de
fécondité par âge observés l'année
d'observation. Cet indice repose donc sur le raisonnement d'une
génération fictive. Pour le calculer, on utilise donc les taux de
fécondité par groupes d'âge quinquennaux, que l'on
additionne, et l'on multiplie le résultat par cinq. La descendance
finale correspond quant à elle au nombre moyen d'enfants nés
vivants qu'a eu effectivement une femme au cours de sa vie. La descendance
finale est mesurée en demandant lors d'une enquête aux femmes en
fin de vie féconde (45-49 ans), le nombre d'enfants vivants qu'elles ont
mis au monde. La mesure de l'ISF comme celle de la descendance finale,
comprennent des biais relatifs à la mémoire des
évènements, où au fait que les individus confondent
parfois mortinatalité (enfant mort-né) et mortalité
néonatale précoce (enfant mort au cours de la première
semaine).
D'une façon générale, l'ISF a peu
baissé au Burkina Faso si l'on compare le chiffre en 1950 (6,1) et en
2010 (5,94), selon les Nations Unies. En fait, selon les chiffres, l'ISF aurait
même connu une hausse entre 1950 et 1985 (jusqu'à 7) pour baisser
par la suite.
Evolution de l'Indice Synthétique de
Fécondite, Burkina, 1950-2050
7,02 7,06 6,94
6,7
6,71
6,56
6,35
6,4
6,1
6,24
6,14
5,94
nombre d'enfants par femme
Source : Nations Unies.
Selon les chiffres des différentes enquêtes et
recensements nationaux cette-fois, l'ISF baisse depuis 1985, mais mois
rapidement. Ainsi, de 7,2 en 1985, il passe à 7,3 en 1991, 6,9 en 1993,
6,8 en 1998-1999, 6,2 en 2003, et 6,2 en 2006. L'ISF au Burkina Faso demeure
ainsi les des plus important d'Afrique Sub-saharienne, avec le Niger et le
Bénin notamment.
Le graphique suivant nous permet de comparer l'ISF avec la
descendance finale, en 2006, selon le milieu de vie. Au niveau national, l'ISF
est très légèrement inférieur à la
descendance finale, ce qui indique une baisse de la fécondité.
Mais cette évolution générale, comme souvent, recouvre des
disparités. Ainsi, en milieu urbain, l'écart est plus
prononcé, la diminution de la fécondité est donc plus
importante. C'est le cas pour la capitale, comme pour les autres villes,
même si la fécondité reste inversement proportionnelle
à la taille de la ville. Au contraire, en milieu rural, l'ISF est
supérieur à la descendance finale, ce qui indique une
fécondité en hausse. Ce phénomène peut être
interprété, en partie au moins, comme l'effet de certains
déstructurations sociales dues à la modernisation en cours
(augmentation de la sexualité avant la mariage, éloignement des
méthodes traditionnelles de contraception, mais non-adoption des
méthodes modernes).
Source : à partir des données du RGPH 2006.
Le Burkina Faso adopte une politique de population en juin 1991,
reprenant les résolutions
des conférences du Caire et de Pékin. Mais cette
politique a eu jusqu'à présent peu d'impact au niveau national.
C'est au niveau des zones urbaines nous l'avons vu, que les évolutions
sont les plus visibles. La majorité de la population continue de vivre
du secteur agricole. Les enfants constituent alors une main d'oeuvre dont on
peut difficilement se passer. Ils représentent aussi l'assurance maladie
et l'assurance vieillesse, que ne fournit pas l'Etat. Par ailleurs, des
facteurs anthropologiques expliquent la persistance d'une
fécondité élevée : en milieu rural, les valeurs
traditionnelles demeurent prépondérante, même si les
valeurs modernes commencent à s'imposer, notamment par le truchement du
développement de l'éducation (le taux brut de scolarisation au
primaire est passé de 30% au début des années 90 à
près de 80% aujourd'hui). Mais une descendance nombreuse reste un
marqueur de statut social pour l'homme, et notamment le fait d'avoir des
garçons est important (dans les sociétés
patrilinéaires). Ainsi, tant qu'une femme n'a pas de garçon, elle
doit continuer de faire des enfants. Mais au-delà de ça, les
enquêtes récentes montrent aussi que 29% des besoins en
matière de contraception ne sont pas satisfaits. Les politiques
publiques doivent donc intervenir pour une meilleure prise en compte des
difficultés d'accès à la contraception.
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