7.2.3.3. Respect de la contre-indication
médicamenteuse chez la femme enceinte
Notre étude montre que 46
médicaments sur les 675 étaient contre-indiqués
soit un taux de 7% (Annexe 5). Par ailleurs, pour 16 %
des médicaments prescrits, l'innocuité au cours de la
grossesse n'est pas établie.
Parmi les médicaments contre-indiqués, 6
avaient une contre-indication absolue et étaient
composés de 4 antiseptiques iodés, 1 Anti-inflammatoire non
Stéroïdien et un cas de rétinol prescrit à forte dose
(>5000 UI/Jour) dans la spécialité PLENYL®.
La majorité des médicaments
contre-indiqués était constituée de
benzimidazolés (32%), d'antalgiques
(15%), d'antihistaminiques anti H1 (15%) et
d'antiseptiques iodés (14%) (Tableau XVIII).
En considérant la voie d'administration des
médicaments, 16% des médicaments
contreindiqués étaient des médicaments topiques,
administrables par voie percutanée ou par voie vaginale. La
difficulté de prescription chez la femme enceinte est souvent
contournée par le
recours aux médicaments topiques, porteurs d'une fausse
image d'innocuité chez les professionnels de santé [38].
Cependant, ces médicaments topiques exposent à de réels
risques d'autant plus que la grossesse potentialise la résorption
systémique des médicaments [56 ; 79 ; 98]. Ainsi, les
antiseptiques iodés administrés par voie locale peuvent
être à l'origine de dysthyroïdies foetales [38 ; 78 ; 98].
La proportion de 15% d'ordonnances médicales comportant
au moins une contreindication, suggère une exposition importante des
femmes au risque toxique des médicaments. En effet une extrapolation de
ce résultat donne une exposition de 113 grossesses sur 1000
au risque toxique dans les FS de la CUO.
Néanmoins, les médicaments reconnus comme
toxiques au cours de la grossesse ne font pas l'unanimité. Une
controverse existe autour de la prohibition de certains médicaments chez
la femme enceinte. Selon une étude menée par Addis et
collaborateurs [1], sur 286 médicaments classés par 3
systèmes différents (Suède, Australie et USA) en fonction
du risque tératogène, il ressort que seulement 61
médicaments (soit 26%) étaient rangés
dans des catégories correspondant au même degré de risque.
Cette étude met en évidence des divergences dans
l'appréciation du risque tératogène d'un pays à
l'autre. En outre, les informations concernant l'utilisation des
médicaments chez la femme enceinte sont souvent très parcellaires
voire inexistantes du fait de l'exclusion des femmes enceintes aux essais
cliniques pour des raisons évidentes d'éthique. Les études
chez l'animal quant à elles ne sont pas toujours transposables à
l'homme [22 ; 35]. Dans une étude conduite par Lo et Friedman aux USA,
il ressort que sur 468 médicaments approuvés par la Food and Drug
Administration (FDA) entre 1980 et 2000, le risque tératogène est
resté indéterminé pour 91,2 % des substances
étudiées [54].
Le manque d'informations fiables peut entraîner un
retrait à tort de certains médicaments de la liste des
médicaments disponibles pour la prise en charge d'une pathologie
donnée chez la femme enceinte. L'inverse serait une exposition de la
femme enceinte avec des médicaments non appropriés du fait de la
non documentation de leur risque tératogène.
Pour Saulnier [78], il faut trouver un juste équilibre
entre l'obligation de moyens à laquelle on est soumis et le
célèbre principe primum non nocere.
Les différences qui caractérisent les approches
méthodologiques rendent difficile la comparaison brute du degré
d'exposition d'une étude à l'autre. En fait, seule la comparaison
des résultats d'études utilisant des méthodes
différentes permet d'apporter des informations fiables sur les
différents aspects de l'exposition des femmes enceintes aux
médicaments [18 ; 52]. Toutefois, il faudrait garder en vue les
différences des caractéristiques
épidémiologiques des zones d'études. Dans
une étude transversale, Hérique et collaborateurs [38] ont
trouvé dans le département de l'Aube (France), une proportion
5,6 % de médicaments contre-indiqués. Cette
valeur est inférieure à la notre qui est de 7 %.
Dans une approche prospective, Zoungrana (1993) à Ouagadougou trouvait
une valeur de 10,9 % [100]. Schirm et collaborateurs (2003)
dans une étude cas/témoins notaient 10
% de médicaments contre-indiqués dans les prescriptions
destinées aux femmes enceintes aux Pays-Bas [80]. Dans une approche
longitudinale Susan et collaborateurs (2004) aux USA,
rapportaient une valeur de 8,4 % [86].
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