Section II : Mise en évidence de la
relation dette extérieure et croissance économique au
Bénin
Dans cette section, il sera procédé
à l'analyse des résultats issus des estimations (paragraphe 1),
puis à la vérification des hypothèses (paragraphe 2) et
enfin aux recommandations (paragraphe 3).
Paragraphe 1 : Analyse des résultats
L'écriture du modèle de court terme est
justifiée car le coefficient de la force de rappel à
l'équilibre â8 = -0.860276 est
négatif et est significativement différent de zéro au
seuil de 5% avec son test de student (-4,7627) qui est supérieur
à 2,042 en valeur absolue. Il existe un mécanisme à
correction d'erreurs. A long terme les déséquilibres entre
l'encours de la dette par rapport au PIB et les variables explicatives du
modèle se compensent de sorte que les séries ont des
évolutions similaires. â8 représente la vitesse
à laquelle tout déséquilibre entre les niveaux
désirés et effectifs de l'encours de la dette au PIB est
résorbé dans l'année qui suit tout choc.
â8 = -0.8602 implique que l'on arrive à ajuster 86,02%
du déséquilibre entre les niveaux désirés et
effectifs de l'encours de la dette par rapport au PIB. Les différents
tests effectués au niveau de ce modèle ont été
concluants. En effet le R² ajusté = 0.804782; la statistique de
Fisher est égale à 8,9701 ; ce qui permet de dire que le
modèle reste globalement significatif. Egalement la distribution est
normale, les erreurs sont homoscédastiques et non corrélés
au seuil de 5%.
Sans oublier le test de Ramsey qui nous rassure quant à
la bonne spécification du modèle (voir annexe pour les
différents).
Maintenant qu'en est-il du modèle de long
terme ?
La relation de long terme lie d'une part positivement le taux
du déficit budgétaire (LTDB), le taux de change (LTCH), le taux
d'investissement public (LTINVP) et le degré d'ouverture commerciale
(OUVC) et d'autre part, négativement le service de la dette par rapport
aux exportations (LSDEXP), le taux de croissance du PIB (LTCROIS) et les
variations des termes de l'échange (LVTE). L'endettement du Bénin
est expliqué par le modèle de long terme avec un coefficient de
détermination de 0,905757 au seuil critique de 5%.
Ainsi, nous pouvons faire les observations suivantes :
- Le taux d'investissement public a eu un impact positif et
reste significatif au seuil de 5% sur l'encours de la dette du PIB. On note
que le signe obtenu correspond au signe attendu ; de plus une augmentation
de un point du taux d'investissement public entraîne une augmentation de
l'encours de 1,535. Les études similaires ne confirment pas le
même résultat, notamment celle de Séné (2006) dans
le cas des pays de l'UEMOA, qui trouve une relation négative et
significative.
- Les variations des termes de l'échange ont un impact
négatif sur l'encours de la dette au PIB au Bénin et son
coefficient reste significatif et son signe est contraire à celui
attendu. Ce signe montre que la dégradation des termes de
l'échange réduit le taux de croissance du PIB et donc en
cherchant à maintenir ce taux à un niveau acceptable, le pays va
s'endetter et ceci davantage. Mais cette idée sera rejetée par
Yapo L. (2002), Cashin P. et Potillo (2000) qui trouvent que cette
dégradation des termes de l'échange n'explique pas forcement
l'endettement. La controverse de ce résultat pourrait s'expliquer par le
fait que la détérioration des termes de l'échange n'a
sûrement pas encore atteint le point où les recettes en devises
fléchissent en dégradant la situation financière et
économique du pays.
- L'ouverture commerciale est significative, et son signe est
conforme à celui attendu. Le signe du coefficient traduit ainsi que
l'ouverture commerciale a d'impact sur la productivité à travers
les transferts de connaissances et des bénéfices efficients et de
façon consécutive sur la croissance du Bénin. Cette
significativité explique bien l'encours de la dette au Bénin. Le
résultat controverse de Raffinot M. et Venet B. (2001) qui ont conclu
une inexistence de relation entre l'endettement et l'ouverture commerciale, ne
semble pas être vérifié pour le Bénin. Le lien entre
l'endettement extérieur et l'ouverture commerciale est
intéressante, puisqu'une économie qui s'endette à
l'extérieur doit avoir le souci de préserver sa
solidarité. Néanmoins, ceci peut sans doute s'expliquer par le
fait que le Bénin n'emprunte qu'auprès d'organismes publics qui
sanctionnent avec rigueur les défauts de paiement.
- Le service de la dette n'a pas le signe attendu et reste
non significatif. Il contribue à la réduction de l'encours de la
dette par rapport au PIB, ce qui se traduit par un coefficient de -0,089. Donc
le ratio service de la dette est un facteur de
décélération de l'encours de la dette par rapport au PIB
comme en témoigne son élasticité. Mais ce résultat
peut trouver une validation théorique au regard de la théorie
économique. En effet le service de la dette désigne les paiements
d'amortissements et d'intérêts qu'assure le débiteur en
conséquence des emprunts effectués. Aussi lorsque les ressources
issues des exportations sont insuffisantes pour faire face au remboursement des
emprunts contractés, alors le pays accumule des arriérés
de payement jusqu'à une certaine période. Face aux montants
élevés des arriérés et les pressions des
créanciers dans le long terme le pays se voit obliger de s'endetter pour
rembourser les anciennes dettes contractées, ce qui accroît le
service de la dette extérieure et ralentit la croissance du PIB. Cette
non significativité pourrait être également
expliquée par le fait que le Bénin a entrepris une politique de
désendettement qui réduit d'importantes sommes de sa dette
extérieure.
- Le taux de croissance du PIB évolue dans le sens
contraire de l'endettement avec un coefficient de (-1,66) mais reste non
significatif au seuil de 5%. Ce résultat est contraire aux
résultats de Ojo (1989) et Yapo (2001) qui trouvent que le taux de
croissance est négatif et significatif. Ce signe montre que
l'endettement du Bénin semble avoir un impact négatif sur
l'investissement surtout l'investissement privé (effet de
surendettement).
- Le taux de change a le signe attendu (positif). IL est
également non significatif. Ceci implique que, lorsque le taux de change
s'apprécie de 1%, l'encours de la dette par rapport au PIB subit un
accroissement de 0,0118%, toutes choses étant égales par
ailleurs. Notre résultat est le même que ce que N'Diaye a
trouvé pour le Sénégal. Ce non significativité
n'explique pas l'encours de la dette par rapport au PIB.
- Le taux du déficit budgétaire a eu un impact
positif et est significatif au seuil de 5% sur l'encours de la dette du PIB.
On note que le signe obtenu correspond au signe attendu et il explique bien
l'encours de la dette. Cette significativité peut s'expliquer par le
fait que les politiques du gouvernement et du budget ont un impact positif, ce
qui peut être dû au remboursement des arriérés des
dettes contractées par le pays.
Certains facteurs plausibles, non économiques
liés à des biais bureaucratiques (déficiences
administratives), à des considérations d'ordre politique, au
poids dans la sous région, aux conflits socio-politiques et à la
gouvernance pourraient expliquer en partie l'endettement extérieur du
Bénin. En effet, certains pays ont contracté leur dette
extérieure au moment où les recettes d'exportation étaient
paradoxalement abondantes et leurs balances commerciales étaient pour le
moins excédentaires. Le cas du Bénin comme d'autres pays est
assez révélateur de ce point de vue. La dette extérieure
du pays a quadruplé entre 1975 et 1980, alors que les exportations
connaissaient une forte croissance dans la même période.
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