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Politique monétaire et croissance économique en zone CEMAC: une évaluation empirique en données de panel

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par SIMONYANNICK FOUDA EKOBENA
Université de Yaoundé II - DEA / Master 2 2010
  

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a)La politique monétaire de la BEAC de 1973 à 1990

Durant cette période, l'objectif final de la politique monétaire n'était pas explicitement énoncé
dans les statuts de la BEAC. En effet, les statuts de la BEAC de 1972 ne définissent pas
clairement l'objectif de la politique monétaire. Mais la pratique de la conduite de la politique

7 République Centrafricaine.

8 La Guinée-équatoriale rejoint la BEAC en 1985.

monétaire de cette période semble indiquer que celle-ci visait à la fois la promotion de la croissance économique, le plein emploi et la préservation de la parité fixe du Franc CFA.

Les instruments utilisés par la BEAC entre 1973 et 1990 peuvent être regroupés en trois catégories selon qu'ils consistent à agir sur les taux d'intérêt, qu'ils affectent directement le volume global du crédit ou qu'ils tendent à l'orienter vers les opérations économiques et les secteurs jugés prioritaires par les pouvoirs publics. Il s'agit notamment de l `administration des taux d'intérêt ; la fixation des plafonds globaux de réescompte et de la sélectivité du crédit.

La politique des taux d'intérêt visait en général deux objectifs à savoir, agir indirectement sur le volume global du crédit d'une part et sur les mouvements de capitaux avec l'extérieur d'autre part grâce aux différents taux d'escompte. Par le contrôle quantitatif du crédit, les autorités monétaires de la BEAC visaient à contenir la masse monétaire dans les limites compatibles avec le développement économique des Etats membres. Deux facteurs dominent la politique du taux d'escompte de la BEAC à savoir : l'environnement extérieur (situation des taux dans le reste du monde) ; et la situation interne de distribution du crédit. Le caractère évolutif de ces facteurs condamne tout immobilisme du taux d'escompte.

La modification des taux d'escompte a été longtemps considérée comme le principal instrument d'action dans le domaine monétaire, mais l'expérience a conduit à tempérer cette conviction, il peut être fait recours à d'autres procédés de contrôle pour parvenir à une régulation quantitative de la distribution du crédit. C'est le cas notamment, dans le cadre du contrôle par le réescompte, de la fixation des limites absolues aux concours de la Banque Centrale ou plafonds de réescompte.

La fixation des plafonds globaux de réescompte aux banques permet de mieux contrôler la progression des crédits. C'est une technique de dissuasion particulièrement efficace, elle a pour objet principal de doser quantitativement le volume des crédits distribués et permet en outre de prendre en considération, au moment où elle est décidée, le critère de l'utilité économique des opérations appelées à bénéficier des crédits.

Le contrôle quantitatif, quelqu'efficace qu'il puisse être, ne permet pas de résoudre tous les
problèmes qui peuvent se poser à l'occasion de la distribution du crédit, il doit être complété
par un contrôle qualitatif des crédits distribués. Ce contrôle qualitatif a pour objet de favoriser

une orientation du crédit, en fonction de l'intérêt que présente les diverses catégories d'opérations économiques au regard du développement.

La sélectivité des taux est la pratique par l'Institut d'Emission de taux discriminatoires. La BEAC procédait à une orientation dans le cadre de ses interventions de réescompte en pratiquant des taux plus ou moins avantageux selon la nature des opérations auxquelles elle apportait son appui. .

D'autres mesures de contrôle qualitatif du crédit étaient mise oeuvre par la BEAC à savoir la sélectivité des plafonds de réescompte9, la sélectivité par le choix des accords de mobilisation10 et le coefficient d'emploi des dépôts en crédit non réescomptables11.

La crise du milieu des années 1980 a révélé la fragilité de la politique monétaire et l'inefficacité de celle-ci. L'entrée dans la crise s'est traduite par l'apparition d'importants déficits publics pour se situer en moyenne à environ 15% du PIB (Bekolo-Ebe, 2001), des déficits de la balance des opérations courantes, l'effondrement du système bancaire et des tensions inflationnistes. En 1988 par exemple, le déficit de la balance des opérations courantes était chiffré (en millions de Franc CFA) à 85776 au Cameroun, 10664 en RCA, 132702 au Congo, 183345 au Gabon et 5908 en Guinée-équatoriale.12 En ce qui concerne le système bancaire de la sous-région, il était composé au début des années 1980 d'une quarantaine de banques commerciales. La crise a entraîné la liquidation de quatorze banques, le reste a été soit privatisé soit restructuré. Quant aux tensions inflationnistes, elles sont apparues dans certains pays notamment au Cameroun où l'inflation se situait à 13,15% en 1987, au Gabon et en RCA avec une inflation respectivement de 7,36% et 10,4% en 1985 (Mondjeli, 2008).

9 La Banque Centrale pratiquait la sélectivité des plafonds selon l'utilité économique des demandes de crédit qui lui sont présentées. Une distinction était faite entre le plafond des opérations courantes et le plafond des opérations indexées. Si le premier était fixé de manière absolue, le second, destiné à couvrir les besoins de financement des campagnes agricoles que les pouvoirs publics privilégiaient, était en revanche variable en fonction du volume de la production et du prix d'achat au planteur.

10 Pou être mobilisable auprès de la BEAC, les opérations de crédit devaient avoir obtenu un accord préalable de réescompte. Par ce biais, la Banque Centrale opère une sélection des demandes de crédit en fonction de la situation financière de l'entreprise, de son secteur d'activité, cherchant particulièrement à favoriser la clientèle nationale.

11 Le but est d'orienter les ressources bancaires vers les opérations économiques et les secteurs prioritaires.

12 Les statistiques sont issues des bulletins d'études et statistiques de la BEAC.

La politique monétaire n'a pas été efficace au sens de Bakkus et Driffil (1985)13. Elle n'a pas eu les effets escomptés ou du moins a commencé à présenter des signes de faiblesse en particulier sur l'objectif final de développement économique. En effet, le taux de croissance du PIB/tête se situe sur la période 1985-1989 autour de -0,98% dans la sous-région avec des taux respectivement de -2,23 ; -2,7 ; -3,56 ; -1,09 et -1,86% respectivement au Cameroun, Gabon, Congo, RCA, et en Guinée-équatoriale (Mondjeli, 2008). La politique des taux d'intérêt, pratiquement administrés, s'est révélée peu souple par rapport aux fluctuations incessantes du marché intérieur de la liquidité et des marchés monétaires et financiers extérieurs auxquels les économies de la Zone se sont connectées. La politique sélective du crédit n'a pas eu les effets escomptés ; elle a plutôt introduit des distorsions au niveau de l'allocation des ressources (Mondjeli, 2008).

Au niveau théorique, la politique monétaire de la BEAC entre 1973 et 1990 repose sur les postulats de la répression financière14. Selon la théorie de la répression financière, les économies doivent encourager une politique des taux d'intérêt administrés et de faible coût de la liquidité pour favoriser certains investissements entraînant un processus de croissance économique. Cette thèse a été vivement critiquée par Mckinnon (1973) et Shaw (1973). L'idée de ces auteurs est que la politique de répression financière crée des distorsions dans l'allocation des ressources favorisant des secteurs peu rentables à l'instar du secteur public ; ce qui a favorisé l'apparition d'importants déficits internes et externes.

S'agissant de l'aspect pratique, Bekolo-Ebe (2001) fait quatre constats ayant caractérisé le fonctionnement de la politique monétaire à cette période.

Le premier est ce que l'auteur appelle le statisme de la politique monétaire. Celle-ci a toujours eu pour objectif de développer une économie de production de cultures de rente ou d'exploitation minière et de favoriser les importations de produits manufacturés. Le second fait référence au contrôle de l'activité des banques et des établissements de crédit dont les mécanismes s'avèrent inefficaces, caractérisés par un manque d'indicateurs permettant d'évaluer la santé des banques. Le troisième constat concerne le poids important de l `Etat dans les ressources des banques commerciales dont la conséquence a été de graves difficultés de trésorerie enregistrées par ces banques au fur et à mesure que les tensions de liquidité se faisaient ressentir au niveau des finances publiques. Le quatrième constat enfin est relatif à la

13 Bakkus et Driffil (1985) définissent une politique monétaire efficace comme celle qui produit l'effet attendu et dans ce cadre, l'effet attendu est l'objectif final.

14 Pour un exposé sur la théorie de la répression financière lire Guillaumont (1998).

structure des créances de l'économie par des activités d'intermédiation et de spéculation au détriment des activités de production.

L'ensemble de ces contraintes ne pouvait mener qu'à la crise et amplifier les conséquences de celle-ci. La réforme de la politique monétaire de la BEAC était donc impérative au regard du contexte de l'heure.

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