2-2) Analyse des résultats et enseignements
Les résultats apparaissent intéressants et
montrent l'existence d'un lien négatif mais non significatif entre le
PIB et la masse monétaire d'une part et le crédit domestique
fourni par le secteur bancaire d'autre part. Ceci va à l'encontre des
résultats de Romer (1989) qui souligne qu'une politique monétaire
restrictive déprime l'activité économique ; de Sarr et
Dingui (2000) qui montrent que les impulsions monétaires sont transmises
à la sphère réelle par le taux débiteur réel
des banques. Mais ces résultats vont dans le même sens que ceux de
King
(2000) qui aboutit à l'existence d'une corrélation
entre croissance de la quantité de monnaie et inflation et l'inexistence
d'un lien entre croissance monétaire et croissance du produit
réel.
En général, l'existence d'un lien statistique
entre deux variables ne nous renseigne pas sur la nature et le sens de cette
causalité. Il est tout à fait vraisemblable que la
causalité entre la masse monétaire et le PIB ne soit pas univoque
: l'augmentation de la masse monétaire constituant souvent une
conséquence de la croissance économique. Malheureusement, il
reste difficile d'un point de vue méthodologique d'effectuer la
recherche de causalité en données de panel. Il est seulement
possible de citer les travaux de Weinhold (1996)24.
Les résultats de l'estimation de notre équation
de croissance montrent que cette équation explique 77% de la variation
du taux de croissance du PIB. Il apparaît que la politique
monétaire axée sur le rôle joué par les
agrégats nominaux de monnaie et de crédit influence
négativement le PIB. Ainsi une augmentation du taux de croissance de la
masse monétaire d'une unité entraîne une diminution du taux
de croissance du PIB de 0,037948 de même qu'une augmentation de la part
dans le PIB, du crédit domestique fourni par le secteur bancaire d'une
unité entraîne une baisse du taux de croissance économique
de 0,473992 fois cette unité.
Le taux de croissance annuel de la dette publique (en
pourcentage de la masse monétaire au sens M2) influence
négativement la croissance économique. Ceci peut s'expliquer par
le fait que l'endettement public produit un effet d'éviction sur
l'investissement privé qui le moteur de la croissance économique.
Une augmentation du taux de croissance annuel de la dette publique d'une
unité conduit à une baisse du PIB de 0,037553 fois cette
unité.
Le taux d'intérêt débiteur influence
positivement la croissance économique contrairement à nos
attentes. En effet, une hausse de ce taux d'une unité entraîne une
augmentation du PIB de 0,529959 fois cette unité, toutefois, ce
résultat est non significatif. Ceci est contraire à la
théorie économique et est sans doute lié à la
situation de surliquidité des banques de la sousrégion.
L'investissement a un effet positif et non significatif sur la
croissance économique. C'est d'ailleurs la variable la plus
contributive à l'explication de la croissance économique en
zone CEMAC comme le montre les tests de significativité individuelle
présentés à l'annexe 4. Une
24 Weinhold,D., (1996) : « Tests de
causalité sur données de panel : une application à
l'étude de l'investissement et la croissance », Economie et
prévision, n°spécial : Analyse des comportements
économiques à partir de données de panel, n°126-5.
augmentation de la part de l'investissement dans le PIB d'une
unité entraîne une augmentation de ce dernier de 0,363778 fois
cette unité. Pour que la politique monétaire ait un effet positif
sur la croissance économique dans ces conditions, il faut qu'elle
favorise les investissements notamment par la promotion d'un cadre
macroéconomique stable et le maintien des taux d'intérêt
à des niveaux susceptibles d'attirer les investisseurs.
Le total des réserves en proportion de la dette
extérieure a un effet négatif et non significatif sur la
croissance économique. Une augmentation de cette variable d'une
unité entraîne une baisse du PIB de 0,071098 fois cette
unité. Ce résultat bien que contraire à nos attentes peut
s'expliquer par l'impact négatif et significatif de la dette publique
sur le PIB.
Le PIB de la période précédente a un
effet négatif et non significatif sur la croissance économique.
Une augmentation de cette variable d'une unité entraîne une baisse
du PIB de 0,112074 fois cette unité. Ce résultat est contraire
à nos attentes.
Les exportations ont un effet positif non significatif sur le
PIB, ceci est en accord avec la théorie économique. Une
augmentation de la part des exportations dans le PIB d'une unité
entraîne une augmentation de ce dernier de 0,607249 fois cette
unité. En effet les pays de la zone CEMAC sont largement
dépendants pour leur revenu, des exportations de matières
premières agricoles et minières.
D'une façon générale, ces
résultats soulèvent plusieurs implications. Concernant la
politique budgétaire (dépenses publiques, taux d'imposition,...),
elle sera menée de façon à favoriser ce qui donne de
l'impulsion à la croissance économique par exemple par des
exonérations fiscales pour encourager les entreprises privées
locales. La convergence des indicateurs macroéconomiques devrait
être effective concernant la dette publique afin de limiter son impact
négatif sur la croissance économique.
Toutefois, il n'est pas possible d'affirmer que le même
taux de croissance entraîne les mêmes bénéfices dans
les six pays de la sous-région. Il faut tenir compte par exemple, des
problèmes de redistribution, de gouvernance, d'effectif de la
population, des critères socioculturels propres à chaque pays,
des aspirations gouvernementales et autres aléas.
Théoriquement, ces résultats présentent
plusieurs perspectives. D'abord c'est une confirmation des résultats
théoriques obtenus par d'autres auteurs, au sujet d'autres pays.
Quelques limites peuvent toutefois être relevées, qui permettront
d'ailleurs de pouvoir mener d'autres études sur ce sujet en modifiant
l'orientation ou la méthode. L'on peut donc noter la présence de
données manquantes qui peuvent avoir une influence sur les
résultats qui restent
cependant assez précis si l'on en croit la
méthode d'inférence. D'autres variables peuvent être
ajoutées au modèle ; c'est le cas des données faisant
référence à la formation du capital humain ; à la
population etc...
Une autre optique serait de mener les estimations avec les
nouvelles méthodes qui permettent de déterminer les points de
rupture de la constance des coefficients et de déterminer les dates
d'occurrence desdits points.
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