- Défaillances en matière de gestion des
ressources financières
A côté des faiblesses tenant à la
mobilisation de ressources par la commune d'Ibanda, il y a aussi des
imperfections liées à leur gestion. Dans ce cadre, nous pouvons
stigmatiser les multiples cas d'allocation irrationnelle de ressources, de
détournement de fonds publics et d'absence de sanctions
appropriées.
- Imperfections en matière d'allocation des
ressources et déficit de contrôle
Dans l'exécution des dépenses (exercice 2009 et
2010), on peut constater un niveau fort élevé des dépenses
politiques et de fonctionnement au détriment des dépenses
d'investissement qui n'arrivent pas à atteindre le 10% des
dépenses totales engagées par la commune d'Ibanda.
Plusieurs projets (achat véhicule terrestre, plantation
des arbres ornementaux, constructions des ponts reliant les avenues...) sont
toujours prévus dans les budgets de la commune (exercices 2009, 2010 et
2011), mais ne sont pas exécutés. La question qu'on peut se poser
à ce niveau est de savoir la destination des fonds prévus pour
financer ces projets. La réponse est plutôt simple : ces
fonds sont chaque fois prévus dans le budget de la commune mais servent
par contre à financer les dépenses politiques des
autorités communales (différentes primes et indemnités,
frais de logement...)
Les détournements des deniers publics ont depuis
longtemps caractérisé la fonction publique congolaise et
réduisent les chances de réalisation effective de la
décentralisation au plan financier. La commune d'Ibanda ne saurait
échapper à cette mauvaise coutume.
L'enlisement de la décentralisation tant organique que
financière de la commune d'Ibanda est davantage exacerbé par le
déficit de contrôle et de sanctions exemplaires en cas de
dérapages.
Il sied de voir dans le paragraphe qui suivra la nature des
contrôles exercés sur la commune d'Ibanda avant d'envisager dans
le dernier chapitre de notre travail des stratégies pour
l'émergence d'une commune d'Ibanda autonome et efficace tant sur le plan
organique que financier et capable de favoriser au mieux le
développement socio économique de la population locale.
§3. L'Exercice des
contrôles sur la commune d'Ibanda
Rappelons utilement, que la commune d'Ibanda est une
entité territoriale décentralisée dotée d'une
personnalité juridique et jouissant d'une autonomie administrative et
financière.
La constitution de la RDC avait déjà
rappelé ce principe à son article 3. Cet article dispose en effet
que les ETD de la RDC sont dotées de la personnalité juridique et
sont gérées par les organes locaux. Elles jouissent de la libre
administration et de l'autonomie de gestion de leurs ressources
économiques, humaines, financière et technique.
Cette autonomie financière et organique reconnue aux
ETD ne s'aurait être exercée par la commune d'Ibanda en dehors de
tout contrôle devant limiter les différents abus et excès
du pouvoir. Les autorités communales oeuvrant en dehors de tout
contrôle, risqueraient de vite confondre l'intérêt de la
population locale, avec leurs propres intérêts.
Nous avions déjà démontré dans
notre chapitre théorique que la loi organique n?06/016 de 2008 portant
organisation et fonctionnement des ETD, avait déjà prévu
à son article 95 qu'un contrôle de tutelle devrait être
exercé par le gouverneur de province sur les actes des autorités
locales.
Nous avions aussi fait remarquer qu'en plus de ce
contrôle administratif (de tutelle), la constitution de 2006 a
prévu un contrôle du juge constitutionnel sur la
régularité des actes des autorités communales aux
dispositions constitutionnelles (article 162 alinéa 2), un
contrôle de juge judiciaire de la légalité de l'acte
administratif de l'autorité communal (article 153 alinéa 4). Nous
avions aussi souligné qu'un autre contrôle peut être
effectué par le juge administratif étant donné qu'il est
le juge naturel des actes administratifs unilatéraux de
l'administration.
En dehors de ces contrôles administratif et
juridictionnel, la loi sur l'organisation et fonctionnement des ETD de 2008 a
prévu à son article 39 un contrôle strictement financier
portant sur l'exécution du budget de la commune d'Ibanda. Ce
contrôle est effectué par les organes de la commune
elle-même (conseil communal surtout), par le parlement et la cour de
comptes, et enfin par le département du budget et des finances.
Des informations récoltées lors de notre
descente sur terrain, nous avons décelé que le contrôle
réellement effectué sur la commune d'Ibanda est essentiellement
d'ordre financier.
Chaque fin du mois le service du budget de la commune
d'Ibanda donne des statistiques des dépenses engagées et des
recettes réalisées à la division du budget de la mairie et
de la province. Sur base de ces statistiques, la commission budgétaire
de la province évalue si les réalisations ont respecté les
prévisions. Au cas où les prévisions n'ont pas
été atteintes, l'autorité provinciale descend sur terrain
pour se renseigner sur les causes de non réalisation de
prévisions par la commune d'Ibanda. La plupart de fois, c'est
l'assemblée provinciale qui effectue ce contrôle. Malheureusement
ce contrôle n'est pas régulier ; le dernier est intervenu au
mois de mai de cette année 2011.
Il y a aussi des cas où l'autorité de tutelle
(provinciale) envoie des experts pour vérifier la façon dont les
ressources sont manipulées par la commune. Le service du budget de la
commune d'Ibanda complète régulièrement un carnet de visa
des dépenses et des recettes qu'il met à la disposition de ces
experts provinciaux lors de leur décente à la commune. En dehors
de ce carnet de visa, la cellule du budget de la commune dresse
régulièrement et met à la disposition des experts
provinciaux des fiches intercalaires des engagements qui permettent de voir
l'évolution des dépenses engagées enfin d'éviter
tout dépassement.
En avril 2011, une équipe de la Mairie composée
du mandataire Urbain au budget et de ses vérificateurs, a
été envoyée par l'autorité provinciale pour
effectuer un contrôle sur la comptabilité et le budget de la
commune d'Ibanda.
Les différentes informations que nous avons pu
récolter lors de notre décente à la maison communale, nous
poussent à conclure que les contrôles (administratif et
juridictionnel) qui devraient normalement être exercés sur la
commune d'Ibanda conformément aux textes organisant la
décentralisation en RDC, n'ont pas été rendus effectifs.
Le seul contrôle effectif est essentiellement financier et porte, comme
nous l'avions démontré ci haut, sur l'exécution du budget
par la commune.
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