2.1.4.2. La notion de statut ethnolinguistique chez
Giles et al. (1977)
Giles, Taylor et Bourhis (1977) ont défini la notion de
statut ethnolinguistique en proposant le concept de vitalité
ethnolinguistique (Jürgen, 1996). Ces auteurs définissent la
vitalité ethnolinguistique (VE) comme étant un ensemble de
facteurs socioculturaux qui font qu'un groupe est susceptible de se comporter
comme une entité distincte et active dans ses rapports avec d'autres
groupes ethniques. La V.E. est définie par trois variables
structurales : 1) le statut social des groupes; 2) les variables
démographiques; 3) le support institutionnel.
Le statut d'un groupe ethnolinguistique se
définit en fonction du prestige social, économique, et
linguistique du groupe. Il peut être estimé en considérant
les facteurs comme la langue de travail dans les entreprises, la langue d'usage
dans les échanges commerciaux, le niveau socio-économique des
membres de la communauté.
Les variables démographiques sont celles qui
reflètent le nombre des membres d'une communauté sur un
territoire, la proportion relative de cette population par rapport à la
population totale ou par rapport à un groupe dominant et la
concentration de la population sur le territoire.
Le support institutionnel selon Giles et al.
(cités par Jürgen, 1996), se mesure en fonction du degré et
de l'étendue de la représentation formelle et informelle d'un
groupe au sein des institutions de la société. Il peut
être aussi mesuré en analysant le statut de la langue sur le plan
juridique, la langue de l'affichage public, les postes occupés dans la
fonction publique etc. ; ou en observant le degré d'accès
à l'éducation dans la langue première, l'accès aux
différents médias culturels etc. À cet
effet, Jürgen (op.cit. : 64) a aussi précisé que:
« ... plus un groupe contrôle ses propres institutions ou
exerce du pouvoir au sein d'organisations sociales importantes, plus
élevée sera la vitalité linguistique du groupe et plus la
langue sera utilisée sur les plans social et institutionnel. »
Dans le même sens, Hamers et Blanc (2000 : 216)
considèrent en outre que : « ...plus un groupe a
de vitalité, plus il a de chances de survivre en tant que groupe
distinct, avec une langue distincte; inversement, moins il fait preuve de
vitalité, moins il aura de chances de survivre. »
Ainsi, il appert que la vitalité globale d'une
communauté linguistique est le résultat de l'interaction des
trois sortes de variables : le statut social du groupe, sa force
démographique et sa représentation sur le plan institutionnel.
À cet égard, Jürgen (1996) souligne que l'interaction de ces
variables crée le contexte social et socio-institutionnel dans lequel
s'installe la dynamique des relations intergroupes.
Plusieurs recherches empiriques se sont appuyées sur
cette théorie de Giles, et al. (1977) et ont montré que les
compétences langagières et le désir d'intégrer leur
communauté chez les membres d'un groupe linguistique sont davantage
déterminés par la vitalité de leur communauté que
par les qualités personnelles des individus (Landry et Allard, 1990,
2000 ; Hamers & Blanc, 2000 ; Clément, 1984). Ainsi, les
groupes ayant un faible degré de vitalité ethnolinguistique,
selon le construit théorique de Giles et ses collaborateurs, auraient
tendance à graduellement cesser d'utiliser la langue et à
s'intégrer culturellement à un ou à différents
groupes dominants. D'une manière inverse, les groupes ayant davantage de
vitalité ethnolinguistique auraient tendance à maintenir
l'utilisation de la langue et à demeurer une entité collective
distincte et active au sein de la société.
Ces travaux s'avèrent intéressants pour notre
recherche. En ce sens qu'ici on ressort le lien entre les attitudes et
comportements langagiers de l'individu et des facteurs sociaux qui sont le
degré de vitalité ethnolinguistique de sa communauté. Nous
pouvons traduire dans notre étude la vitalité
ethnolinguistique par l'expression « promotion sociale
de la langue ».
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