Chapitre I : Cadres théorique, conceptuel et
méthodologique de l'étude
L'objet de ce chapitre est dans un premier temps, de faire le
point sur les théories et réflexions théoriques entourant
la problématique du travail des enfants, tout en évoquant des
travaux empiriques qui ont traité de la question. Ensuite, une mise au
point sur les termes et notions qui seront utilisées dans cette
étude, sera faite afin d'éviter tout équivoque. Enfin, la
démarche méthodologique ayant servie de base à la collecte
et à l'analyse des données sera exposée.
I.1 Revues théorique et empirique
La recherche théorique et empirique sur le travail des
enfants est relativement ancienne14. La littérature
économique propose divers modèles et théories traitant de
ce sujet. Il en est proposé ici, un exposé sommaire et
critique.
I.1.1 Les prémisses des réflexions
théoriques sur le travail des enfants
Le phénomène du travail des enfants a des
origines anciennes (Basu, 1999). Mais, les premières réflexions
et autres débats théoriques, de même que les premiers
modèles, remontent au 18e siècle. Les
précurseurs en la matière furent respectivement Karl Marx, Alfred
Marshall et Arthur Pigou. Les écrits de Marx interviennent à une
époque où la prévalence de la main d'oeuvre enfantine
était au plus fort dans les usines. Dans son ouvrage de
référence, «le Capital», publié en
1867, il élabore un modèle explicatif du travail des enfants.
Dans un contexte marqué par une machinisation accrue et une
taylorisation qui tend à devenir la norme, il explique le
phénomène par un besoin de plus en plus croissant des usines, en
main d'oeuvre "souple"15, plus adaptée aux nouveaux modes de
production. Les femmes et les enfants présentant
généralement une constitution physiologique se prêtant
à cette souplesse désormais requise, ils seront priorisés
par les industriels, dans leur quête inlassable de profits. Par ailleurs,
Marx explique que cette machinisation croissante qui aurait pu libérer
du temps pour plus de loisir, du fait d'une substitution du travail humain par
celui des machines, produira plutôt l'effet inverse. En effet, avec
l'utilisation des machines, la demande en "travail humain" des usines
décroît, ce qui fait baisser les salaires. Le coût de la
main d'oeuvre (facteur travail) devenant alors très faible, les
industriels deviennent disposés à embaucher d'avantage afin
d'augmenter leurs profits. Aussi, le salaire du seul chef de ménage
14 Dès le début du 18eme
siècle.
15 Corps flexibles au sens propre du
terme.
n'étant plus suffisant (car, trop faible), il sera
obligé de faire travailler toute sa famille, et partant, ses enfants.
Cette dynamique donne lieu à des équilibres multiples puisque
tous les enfants deviennent alors des travailleurs potentiels. Marx met
également en évidence les conséquences d'une telle
situation sur le niveau d'endettement des ménages qui ne peut que
s'élever, vu la nécessité pour ces derniers, d'assurer
leurs besoins fondamentaux. Cette analyse de la dette sera affinée par
Marshall (1920) qui identifiera, en outre d'autres causes explicatives du
phénomène du travail des enfants notamment le manque
d'éducation des parents qui a tendance à perpétuer le
phénomène de génération en
génération.
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