Le droit de l'homme à l'alimentation en République du Bénin( Télécharger le fichier original )par Innocentia Gertruide APOVO Université d'Abomey- Calavi (Bénin) - DEA 2009 |
A- Parmi les droits civils et politiquesUne présentation exhaustive de tous les D.C.P ayant une connexion avec le droit à l'alimentation étant inconcevable dans le présent mémoire, nous limiterons l'étude au droit à la vie, au droit de ne pas être soumis à la torture et à la liberté de pensée, de conscience et de religion, car ces droits concourent plus que tout autre, au respect de la dignité de la personne humaine et sont l'essence même des D.H. Le droit à la vie192(*) a une « valeur suprême »193(*) dans l'échelle des D.H et est la condition indispensable à l'exercice de ceux-ci. Le juge européen dan l'affaire Osman C/ Royaume-Uni considère que ce droit fait peser sur tout Etat une obligation positive de s'abstenir de provoquer la mort de manière volontaire et irrégulière et de protéger les individus sous sa juridiction dont la vie est menacée de façon certaine et immédiate194(*). Cette jurisprudence inventive et hardie pourrait être imitée par les organes juridictionnels compétents en l'adaptant au domaine particulier du droit à l'alimentation. On pourra ainsi responsabiliser davantage les Etats à l'égard des millions de personnes qui perdent annuellement leur vie à cause du manque alimentaire. Cela se justifierait par la considération que le droit de ne pas mourir de faim est aussi fondamental que le droit à la vie, la vie elle-même faisant partie, au fond, de l'objectif du droit de ne pas être soumis à la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants195(*) est une norme de jus cogens qui impose aux Etats de prévenir et de réprimer la pratique de la torture et d'en réparer le préjudice subi. Selon la jurisprudence, le traitement inhumain est de nature à causer de vives souffrances physiques et morales pouvant entraîner de surcroît des troubles psychiques et le traitement dégradant vise à avilir l'individu et à briser éventuellement sa résistance physique et morale ; la torture s'en distingue principalement par la différence dans l'intensité des souffrances en ce qu'elle est une « spéciale infamie196(*) ». De tels traitements peuvent résulter d'une privation de nourriture197(*). A cet égard, les organes compétents devraient être en mesure de mettre en cause les Etats pour toute privation de nourriture, à eux imputable, ayant produit de tels effets, sur le fondement soit du droit à l'alimentation, soit de la torture. Le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion198(*) implique la liberté d'adopter, de manifester une conviction de son choix et d'en pratiquer les exigences, et traduit l'identité des croyants et leur conception de la vie199(*). Il présente des liens avec le droit à l'alimentation car c'est pour des raisons religieuses et culturelles que les musulmans200(*), ou d'autres groupes religieux, excluent certains éléments de leur alimentation. * 192- Il est notamment protégé par la D.U.D.H art. 3 ; P.I.D.C.P art. 6 ; Charte A.D.H.P art. 4 ; Convention I.A.D.H art. 2; Convention E.D.H art. 2. * 193- Comité des droits de l'homme, observation générale n° 6 sur le droit à la vie, para. 1 * 194- Cour E.D.H, aff. Osman c. Royaume-Uni, 28 octobre 1998, G.A.C.E.D.H, n° 10, para. 115-116. * 195- Il est garanti par la D.U.D.H art.5, le P.I.D.C.P art. 5, la Charte A.D.H.P art.5, la Convention I.A.D.H art. 5 para. 2, la Convention E.D.H art. 3; l'art. 3 commun aux 4 conventions de Genève du 12 août 1949 et la C.A.T des N.U du 10 décembre 1984. * 196- Cour E.D.H, aff. Selmouni c. France, 28 juillet 1999, para. 96. * 197- Cour E.D.H, aff. Irland c. Royaume-Uni, 18 janvier 1978. * 198- V° art.18 de la D.U.D.H, art. 18 du P.I.D.C.P, art.8 de la Charte A.D.H.P, art. 12 et 13 de la Conv. I.A.D.H et enfin l' art. 9 de la Conv. E.D.H. * 199- V° Berger Vincent, Jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, Paris, Sirey, 9e éd., 2004, p. 473 et ss. Il a commenté l'affaire Kokkinaki c. Grèce, arrêt du 25 mai 1993, série A n° 260-A. * 200- V° Coran, Sourate 5 Verset 1 et 4 ; le verset 1 dispose : Mahomet permet la consommation alimentaire de chameaux et de moutons, ces « animaux de troupeaux », mais prévient que certains animaux sont interdits ; quant au verset 4, il dispose : « Ce qui vous est défendu, ce sont les [animaux] morts d'eux-mêmes, le sang, la viande de porc, ce qui est sacrifié à un autre dieu qu'Allah (...). |
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