1.3. Syndromes
Ainsi qu'énoncé précédemment, un
syndrome dissociatif est observé. La personne atteinte n'éprouve
plus le sentiment d'être un être humain et ressent une impression
de dislocation et de morcellement de sa personnalité. Elle perd alors le
contact avec la réalité. Le syndrome de dissociation
générant beaucoup d'angoisse, deux mécanismes
d'auto-compensation ou de compensation phénoménologique face
à l'expérience indicible de la dislocation de l'unité du
Soi, et donc de l'explosion des relations entre le Soi et le monde
extérieur, entrent en jeu : un syndrome autistique et une
activité délirante paranoïde.
1.3.1 Syndrome dissociatif
L'approche clinique contemporaine organise la dissociation
psychique autour de trois pôles, pensée, affects et comportements,
recouvrant à peu près ceux proposés par Chaslin
(délire, émotions, mimique) (Haouzir, Bernoussi, 2005, p.21).
a) Dissociation de la pensée ou idéique : elle
se traduit par une altération du cours de la pensée. Les
idées se dispersent, deviennent chaotiques. La pensée peut
s'arrêter de manière brutale d'où la conséquence sur
l'arrêt du discours que l'on nomme barrage (Kraepelin). On remarque
également des persévérations, sortes d'idées
répétitives venant gêner le cours de la pensée, une
diminution de l'attention et de la concentration, une lenteur
d'idéation, un appauvrissement des idées. Il peut aussi s'agir de
troubles du langage tel que le mutisme ou semimutisme, des impulsions verbales,
des apartés. On relève également un langage
maniéré, fait de paralogisme (utilisation de mots
détournés de leur sens) ou de néologisme (création
de mot). Parallèlement à ces anomalies grammaticales, il est
possible de noter aussi des anomalies syntaxiques sur la construction et
l'architecture des phrases. Quant au timbre de la voix, on note un fading
mental (amenuisement du son de la voix type decrescendo) ainsi que des
intonations
bizarres. La pensée est déconnectée par
rapport à la réalité, elle semble « tourner à
vide ». Par ailleurs, on souligne l'ambivalence (sensation
d'éprouver psychiquement des valeurs positives et négatives
simultanément) de la personne schizophrène.
b) Dissociation des affects ou thymique : elle consiste en
une absence de participation affective à des événements ou
à des situations dont la charge émotionnelle ne peut laisser
indifférent. On relève une froideur affective dans le contact,
une anhédonie (incapacité à éprouver du plaisir),
un émoussement affectif, des rires inappropriés, des signes de
négativisme, un refus de communication, un appauvrissement de la mimique
voire une inexpressivité du visage, qui peut être associée
au concept d'athymhormie (Guiraud et Guiraud), apparent
désintérêt affectif généré par la
perte de l'élan vital (Bleuler).
c) Dissociation des comportements et dissociation motrice :
elle consiste en un désintérêt et une adaptation
insuffisante à l'environnement. Elle comprend également une forme
de maniérisme et d' « ambitendance » (ambivalence de la
volonté) qui se traduit par une sorte de perpétuelle
hésitation lors de certains gestes initiés et interrompus
invariablement. On relève également divers
phénomènes moteurs, tels que : paramimie discordante (mouvements
non adaptés), gestes auto ou hétéro agressifs, actes
cocasses ou absurdes, mouvements stéréotypés ou gestes
ritualisés. A ceux-ci s'associe au paroxysme des symptômes
catatoniques (comportement moteur plus ou moins permanent qui ne répond
pas de manière adaptée aux stimulations du milieu et qui
s'accompagne souvent d'impulsions et de stéréotypie) une forme de
catalepsie (comportement caractérisé par une rigidité
musculaire particulière dite rigidité plastique).
d) Dissociation entre les sphères idéique,
affective et comportementale : les pensées sont
déconnectées des idées et des comportements, et le sujet
en vient à faire toutes sortes de bizarreries, comme être
soulevé d'un rire immotivé à l'annonce d'un
événement grave. De même les émotions ne sont plus
liées aux raisonnements et deviennent indépendantes des
comportements, engendrant froideur affective, ambivalence, paralogisme, ainsi
ce père de famille, patient de
Binswanger, qui offre un cercueil pour cadeau de Noël
à sa fille cancéreuse (Tatossian, 2002, p.79).
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