B) Quel média pour quel objectif de
communication ?
Aujourd'hui, le modèle d'allocation des moyens de
communication évolue et les médias numériques cherchent
à concurrencer directement les médias traditionnels au lieu de
les compléter. Dans un contexte concurrentiel, ces derniers ont
néanmoins de sérieux arguments à faire valoir
auprès des annonceurs.
Pour Michel Gotlib, directeur commercial et marketing de
Coca-Cola : « Les médias dits traditionnels ont
de beaux jours devant eux. La télévision n'est pas morte, bien au
contraire ! Pour le lancement d'un produit, la diffusion en
télévision reste majeure, comme l'affichage ou la presse le sont
pour montrer le produit, ou la radio pour développer des habitudes de
consommation ».
Aujourd'hui, la tendance publicitaire se focalise sur les TICN
mais lorsque ces supports seront arrivés à maturité, les
annonceurs devront adopter une vraie réflexion quant au meilleur plan
média à adopter au lieu d'utiliser un discours du type :
« Tout le monde parle des médias numériques, moi aussi
je veux être vu en passant par ces supports ».
A chaque objectif de l'annonceur, et en fonction du budget
alloué, correspondent un ou plusieurs médias. Evidemment, opter
pour une stratégie publicitaire à 360° est le mix de
communication idéal, mais les contraintes budgétaires ne
permettent qu'à un nombre infime d'entités de l'utiliser. Le
tableau suivant met en avant l'opportunité d'investir dans tel ou tel
média selon l'objectif de l'annonceur.
Le premier enseignement est que la télévision et
la presse se détachent nettement des autres médias. Ce sont
incontestablement les supports à privilégier pour toute campagne
publicitaire quel que soit l'objectif. Ceci explique ainsi l'investissement
massif des annonceurs sur ces 2 supports (2/3 des investissements publicitaires
en 2007).
La radio et l'affichage restent intéressants mais
connaissent des lacunes sur certains objectifs : le cognitif pour
l'affichage et l'affectif pour la radio.
Le second enseignement à tirer est que les
médias numériques ne sont pas actuellement des supports en mesure
de répondre seuls à des objectifs de communication complexes.
Seul Internet pourrait apparaître comme un outil relativement efficace
pour résoudre certaines problématiques.
La situation évoluera très certainement dans une
dizaine d'années lorsque la publicité sur la
téléphonie mobile arrivera à maturité et qu'une
majorité de foyers seront connectés au web très haut
débit.
C
e début de 21ème siècle a
été un véritable tournant dans le mode de consommation des
médias qui se répercute logiquement sur un modèle
publicitaire relativement stable depuis des lustres (même si la
montée en puissance de la communication hors média et l'adoption
de la loi Sapin ont aussi modifié ce modèle).
L'adolescent du 3ème millénaire est en phase
avec cette brusque mutation : pendant qu'il fait ses devoirs, la
télévision est allumée, il tchatte avec ses amis en
téléchargeant des vidéos, écoute de la musique et
téléphone sur son mobile. Ce phénomène à
peine exagéré est appelé : « cross
média ».
Les médias numériques ont fait leur apparition
et ne sont pas prêts de disparaître. Internet a désormais
pris son envol et actuellement le gros chantier est de démocratiser la
publicité sur les téléphones portables, jusqu'ici
utilisée presque exclusivement par les opérateurs
téléphoniques et les sociétés de
téléchargement (logo, sonneries...).
Le téléphone portable est devenu un enjeu majeur
pour tous les acteurs de ce secteur, qui regardent avec envie les
investissements publicitaires sur mobile aux Etats-Unis ou au Japon. Cependant
ces pays ont plusieurs années d'avance dans ce domaine, ont une vraie
culture high-tech (alors qu'en France les consommateurs peinent à
utiliser la 3G), et ce n'est pas avant 2015 que les portables viendront jouer
les troubles-fêtes parmi les supports publicitaires français.
En 2007, les médias numériques sont
incontestablement des médias complémentaires, offrant des
opportunités exceptionnelles, mais ne pouvant pas, à l'heure
actuelle se substituer aux médias traditionnels, d'un point de vue
publicitaire (exception faite du cinéma).
Hormis pour certaines problématiques très
particulières (susciter l'achat en ligne, inciter au
téléchargement...), ou pour des petits annonceurs, les TICN ne
peuvent, pas être considérées comme des supports principaux
dans un plan média. Deux études réalisées par
GFK et TNS Sofres confirment ce statut en indiquant que
« Les médias numériques sont différents et
complémentaires. Autant la télévision s'impose pour faire
connaître une marque, renforcer sa notoriété, exprimer sa
personnalité, ou lui donner une dimension créative, autant les
TICN occupent des positions fortes quand il s'agit de promouvoir des discours
promotionnels interactifs, d'apporter des informations sur une marque ou
d'innover ».
Ayant conscience de cette complémentarité entre
médias numériques et classiques, les principaux acteurs de ces 2
univers cherchent à diversifier leur offre de contenu ou leurs
dispositifs publicitaires pour proposer des approches à 360°, et
surtout ne pas se laisser distancer par la concurrence (annexe 4).
Dans ce contexte, TF1 Publicité est parti
à l'offensive pour conquérir des parts de marché
publicitaires sur Internet. La régie publicitaire de la plus grande
chaîne de télévision d'Europe est désormais en
mesure de proposer une audience publicitaire de masse (7 millions de visiteurs
uniques) sur Internet à travers ses sites et ses plateformes
communautaires (tf1.fr, eurosport.fr, lci.fr, metro.fr, wat.tv et
overblog.com).
De l'autre côté de l'Atlantique, Google
fait la démarche inverse et tente d'exporter son approche dans la
publicité télévisée. En effet, le géant
mondial a signé un accord avec Echostar (le 1er
opérateur américain de chaînes payantes pour gérer
une partie de ses espaces publicitaires. Après avoir exporté son
modèle de commercialisation de publicité en radio et en presse,
Google tente une percée sur le petit écran dans un
marché très juteux (54 milliards de dollars investis par les
annonceurs à la télévision).
Google vendra ses espaces publicitaires
télévisés via des enchères en ligne, les annonceurs
surenchérissant sur le prix qu'ils sont prêts à payer pour
un millier de téléspectateurs. Le géant du web s'engagera
à calculer l'audience exacte des spots afin de facturer
précisément l'annonceur en fonction de sa visibilité.
Google, maître incontesté d'Internet
(moteurs de recherche et vidéo en ligne), place progressivement ses
pions dans le complexe échiquier médiatique :
téléphonie mobile, radio, presse et désormais
télévision. 8 ans après sa création, l'entreprise
est devenue la marque la plus puissante du monde et a pris la place de
Microsoft dans l'imaginaire collectif. Le groupe annonce vouloir
numériser l'ensemble du savoir de la planète pour le rendre
disponible au monde entier. Certain spécialistes pensent que
Google pourrait, à terme devenir un média à part
entière.
Autre support prédit à un bel avenir :
Joost. Joost est la dernière création des
inventeurs de Skype (téléphonie gratuite via Internet),
et de KaZa (échange gratuit de fichiers musicaux).
Cette technologie permettra dès 2008 aux Etats-Unis de
regarder gratuitement sur son ordinateur, son portable où sa
télévision une multitude de programmes vidéo à la
demande (en partenariat avec de grands fournisseurs de contenus du type
Warner) qu'il sera possible de commenter en direct avec d'autres
Internautes, de mettre le programme en pause, d'accélérer la
diffusion... «C'est quasiment l'avènement du marketing direct
en télévision ! Les annonceurs pourront toucher des millions
de personnes de façon différenciée. Si un utilisateur
regarde les émissions de golf et Desperate Housewives, il sera
possible de lui adresser des messages publicitaires pour des articles de golf
au milieu de sa série » explique Eric Clémenceau,
directeur commercial de Joost Europe.
A un échelon bien inférieur, on trouve des
innovations technologiques qui tendent à combiner les
caractéristiques de la télévision avec celle d'Internet.
En Belgique par exemple, Alcatel expérimente un service permettant
d'alimenter une chaîne de télévision locale via Internet.
Le principe est simple : des particuliers mettent en ligne des
vidéos qui, une fois contrôlées, sont diffusées sur
une chaîne de télévision, My own TV.
Tous ces rapprochements conduiront inévitablement
à une totale convergence des supports. Dans un futur proche (2015-2020),
les consommateurs auront alors à leur disposition à domicile un
écran sur lequel ils regarderont la télévision et des
vidéos gratuites à la demande, surferont sur Internet, liront la
presse et écouteront la radio. Cette technologie existe à l'heure
actuelle mais n'est absolument pas démocratisée en France. Et en
dehors de leur foyer ils possèderont un téléphone portable
grâce auquel ils pourront effectuer exactement la même chose...et
téléphoner. Les supports de communication deviendront
plurimédias. A côté de ça, les affiches
possèderont des dispositifs numériques permettant d'envoyer des
promotions aux passants, de télécharger des bandes
annonces...Seul le cinéma semble difficilement pouvoir se renouveler, ce
qui explique l'effritement des investissements publicitaires dont il
bénéficie.
Pour ce qui est du contenu publicitaire, la tendance ira au
pull (publicité sollicitée), plutôt qu'au push
(publicité imposée), et à toujours plus
d'interactivité.
Inévitablement on assistera à une
standardisation de la publicité puisqu'elle sera diffusée sur le
même support. Cependant les campagnes seront beaucoup mieux
ciblées puisqu'elles seront adressées à des destinataires
qui en ont fait la demande préalable ou qui ont déjà
montré un intérêt au produit, au service où à
la marque.
Dans les 5 prochaines années, les médias
classiques conserveront leur leadership, mais en terme d'investissement
publicitaire, Internet aura rattrapé l'affichage et la
téléphonie mobile deviendra un support de communication enfin
intéressant pour les annonceurs. Cependant les TICN resteront des
médias complémentaires.
Il faudra probablement attendre quelques années de plus
pour qu'elles deviennent des supports de communication principaux. La notion de
médias principaux et complémentaires sera alors devenue assez
floue puisque, convergence oblige, les médias seront devenus hybrides et
fragmentés.
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