L'ESSOUFFLEMENT PREVISIBLE DE L'IMPACT PUBLICITAIRE SUR
LES MEDIAS NUMERIQUES
I Publicité sur supports numériques, des
messages pas si facilement acceptés
Tout n'est pas toujours rose sur la planète
numérique. Malgré les efforts faits pour démocratiser
l'utilisation des TICN, et surtout de l'intégralité de leurs
contenus, l'offre reste bien supérieure à la demande (A), et
cette publicité est en passe de saturer les consommateurs (B)
A) Une offre de contenu qui dépasse la
demande
Reconnus comme des « contenants »
très intéressants d'un point de vue technologique,
esthétique, pratique... les médias numériques tendent
à diversifier leurs contenus pour attirer de nouveaux clients et
susciter l'intérêt des annonceurs.
Dans ce domaine, Internet peut être
considéré comme un média relativement mature car il
propose une multitude de contenus avec une audience à la clé.
Cependant l'équilibre offre de contenu / demande du consommateur ne se
retrouve pas sur tous les TICN.
L'exemple le plus flagrant concerne la
téléphonie mobile, qui malgré les efforts de tous ses
acteurs (opérateurs, moteurs de recherche, chaînes de
télévisions...) parvient très difficilement à
convertir ses abonnés en utilisateurs d'Internet ou de
télévision mobile. L'échec du WAP (Wireless Application
Protocol) en France en est l'illustration.
Grâce aux téléphones mobiles 3G, les
français devaient pouvoir surfer sur le Web comme ils le font de plus en
plus à domicile. Cependant les utilisateurs sont difficiles à
convaincre. Selon l'hébergeur de site Hostway, 73% des
utilisateurs ne vont toujours pas sur Internet en utilisant leur mobile.
Chargement trop long, navigation difficile, écran trop petit, prix
jugé trop élevé...les raisons sont nombreuses.
« Actuellement, les sites Web ne sont pas
conçus pour être consultés sur un mobile. Prenez le site
d'un grand distributeur de livres ou le site de vente de billets d'un grand
transporteur, leur utilisation sur le mobile est rédhibitoire. Un grand
chantier s'ouvre pour les acteurs de l'Internet : développer des
versions de leurs sites adaptées au mobile » explique
Jean-Noël Tronc, directeur général d'Orange
France.
La télévision mobile est également
très peu consommée par les utilisateurs 3G. Aujourd'hui, cette
sous-consommation par rapport à nos voisins anglais (8% des
abonnés français contre 12% des abonnés anglais), peut
s'expliquer par la qualité de réception médiocre des
contenus proposés (streaming). Cette caractéristique sera
résolue au printemps 2008 par la généralisation des normes
techniques, mais la consommation de vidéos via le mobile
décollera-t-elle pour autant ? On peut être sceptique quant
à l'explosion de la télévision mobile à court terme
pour au moins 2 raisons.
La première est d'ordre économique :
exceptés les programmes exceptionnels (évènements
sportifs, concerts privés...), le consommateur sera-t-il disposé
à payer une dizaine d'euros par mois en plus, soit près de 25%
d'une facture moyenne, pour consulter des vidéo qu'il pourra visionner
gratuitement chez lui sur Internet ou enregistrer à la
télévision ? L'utilisateur de la 3G se connecte très
rarement sur Internet, il y a donc peu de chance qu'il adhère rapidement
à la Télévision mobile.
La deuxième est d'ordre qualitatif : payer
plus...pourquoi pas, mais pour voir quoi ? Le CSA n'a pas encore
désigné les chaînes autorisées à diffuser sur
la Télévision Mobile Personnelle. Va-t-il privilégier les
grandes chaînes nationales pour rendre la TMP attrayante ou favoriser la
diversité des offres (ce qui est une de ses missions principales).
De plus, les différents acteurs de la TMP n'ont pas
tous les mêmes intérêts et ne semblent pas opter pour une
collaboration. Il y a de fortes probabilités pour que les conflits
d'intérêts freinent l'essor (déjà balbutiant) de la
télévision mobile.
Comme l'explique Michel Sasportes, consultant pour
OC&C : « Chacun défend ses
intérêts propres qui ne vont pas dans le sens du marché.
Les opérateurs penchent vers un modèle payant, veulent produire
leurs propres contenus et sont partisans d'une couverture indoor. Les
chaînes de TV sont tentées par le modèle gratuit et font
pression pour éviter une couverture indoor qui viendra concurrencer la
TV classique. Les opérateurs de diffusion ont des réticences
à amorcer la pompe: 300 millions d'investissements pour couvrir deux
tiers de la population en cinq ans ».
L'offre de contenu de la téléphonie mobile a du
mal à satisfaire les attentes de ses utilisateurs, et les acteurs de ce
marché tergiversent à trouver une offre qui puisse satisfaire
tout le monde (consommateur, fournisseur de contenu, diffuseurs...).
Dans ce contexte, il n'est pas étonnant d'observer un
désintérêt des annonceurs qui par conséquent
communiquent sur ce support sans grande conviction. Il existe donc un large
fossé entre l'opportunité que représente la
téléphonie mobile en tant que support publicitaire et
l'investissement qu'y consacrent les annonceurs, sans parler pour le moment des
problèmes liés aux autorisations légales de diffusion.
|