Développement financier et croissance économique au Tchad de 1982 à 2007( Télécharger le fichier original )par Ahamat Djabre Genson Université de Douala - DEA 2008 |
CONCLUSION DU DEUXIEME CHAPITRECe chapitre a mis en évidence l'évolution des différents indicateurs du système financier. Les crédits bancaires ont évolué en fonction de l'évolution des dépôts bancaires au cours des ces dernière années. La contrainte de liquidité apparaît ainsi être un bon indicateur de mesure de l'efficacité du système financier, surtout pour le pays en développement. Comme le souligne Fry (1997), le système financier de ce pays se caractérise par le poids prépondérant des banques dans le système de finance formelle. Un système bancaire plus efficace se traduit par une diminution des ressources improductives, au profit de l'investissement productif, élément qui favorise le développement à long terme. Toutefois, l'amélioration de la situation politique et économique du pays influence le système bancaire en matière de mobilisation et d'allocation efficace de l'épargne permettant d'assurer un meilleur développement de l'économie.
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
Au terme de cette partie nous avons mis en évidence l'apport de modèle de croissance endogène dans une économie, en l'occurrence celle du Tchad, ensuite une synthèse de l'évolution historique de cette secteur a été donné. De manière générale la stabilité du secteur réel est particulièrement importante dans les pays en développement, dont les structures de production sont souvent très sensibles à des chocs intérieurs et extérieurs. Il est presque évident que la stabilité macroéconomique est importante pour la solidité du système bancaire et financier.La solidité du système financier exige essentiellement un contexte macroéconomique stable, un secteur privé dynamique, un cadre juridique favorable permettant une bonne administration interne des institutions financières et une discipline externe exercée par le marché, ainsi qu'une réglementation et un contrôle rigoureux. La mise en place et le maintien d'un système bancaire solide ne sont possibles que si les prix et d'autres variables nominales de l'économie évoluent de manière relativement stable et si l'activité économique progresse à un rythme raisonnable. C'est pour cette raison que l'instabilité du secteur réel a toujours entraîné celle des systèmes financiers dans les pays en développement et que la stabilisation macroéconomique a été considérée comme une condition préalable clé de la restructuration des banques dans les pays en développement après la crise bancaire. Un environnement macroéconomique sain et la croissance économique sont indispensables au développement d'un système bancaire viable. Ce double apport permet à présent de rechercher les moyens de vérification de relation reciproque entre les deux secteurs comme nous l'avons supposé dans nos hypothèses.
DEUXIEME PARTIE : DETERMINATION DU LIEN ENTRE LE DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE AU TCHAD Le lien entre la croissance économique et le développement financier a été reconnu dans la littérature économique depuis plus de trois décennies: Bagehot (1873), Schumpeter (1912), Goldsmith (1955, 1969), Gurley et Shaw (1955, 1960) en furent les précurseurs. Rapidement la structure financière devint même un des éléments de la stratégie de développement économique sous l'impulsion des auteurs comme Gurley et Shaw (1967),Mckinnon (1973, 1991), et récemment King et Levine (1993). Dans toutes ces études, les conclusions confirment qu'un sytème financier efficient active la croissance économique tout en l'orientant. Cependant la corrélation est largement admise, mais le sens de causalité reste contesté11(*) opposant, d'une part, le développement financier exogène (conduit par l'offre du services financiers) et, d'autre part, le développement financier endogène ( induit par la demande de services financiers). Ainsi cette partie a pour objectif d'estimer la relation entre le développement financier et la croissance économique ( Chapitre III) et de mettre surtout en évidence la nature du lien entre le développement financier et croissance économique au Tchad et les mesures de politiques économiques à envisager ( Chapitre IV). CHAPITRE III: LA DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE LA MISE EN EVIDENCE DU LIEN ENTRE LE DEVELOPPEMENT FINANCIER ET LA CROISSANCE ECONOMIQUE AU TCHAD Les principales études économétriques cherchant à étudier l'impact des systèmes financiers sur la croissance proviennent des travaux précurseurs de Goldsmith [1969], Mc Kinnon (1973) et Shaw (1973). Leur problématique cherchait à mesurer les conséquences en termes de croissance des politiques de répression financière mises en place après les différents conflits mondiaux et la crise des années 30. Le secteur financier accélère la croissance économique et améliore les performances d'une économie en facilitant le déplacement de capitaux vers les secteurs les plus productifs. Pour Mc Kinnon, l'essor des marchés financiers et l'approfondissement de l'intermédiation aident le développement économique, en opposition à la situation où les investisseurs sont contraints de s'autofinancer intégralement. Ce chapitre s'article autour de deux points. La première section présente la méthodologie concernant la modélisation de la relation entre le secteur financier et le secteur réel. La seconde section, quant à elle, présente les considérations méthodologiques liées aux propriétes statistiques des indicateurs et aux procédures d'estimation. SECTION 1: Les considérations méthodologiques liées à la modélisation de la relation entre le secteur financier et le secteur réel. Les liens entre le développement financier et la croissance économique ont fait l'objet de nombreux travaux empiriques dans les années récentes. Leurs conclusions sont relativement concordantes quant à l'impact positif du développement financier sur la croissance. 1.1. les différentes analyses empiriques Goldsmith (1969) est l'un des pionniers dans l'étude des liens entre croissance et développement financier. Son étude portée sur un échantillon de 35 pays sur la période 1860-1963 a abouti au fait qu'il existe une liaison entre le secteur financier et le secteur réel. Son étude cependant présente des limites : d'abord il ne tient pas compte des variables de contrôle pouvant influencer la croissance économique et ensuite il n'identifie pas le sens de causalité. King et Levine (1993), en voulant remédier à ces faiblesses, ont porté leur analyse sur un échantillon de 80 pays développés sur une période allant de 1960 à 1989 en examinant l'ensemble des facteurs financiers susceptibles d'influencer la croissance à long terme. Dans leur conclusion, ils notent une contribution positive et statistiquement significative des variables financières sur le secteur réel. A cet effet, ils ont considéré comme variables financières trois indicateurs qui sont : les engagements liquides du secteur financier rapportés au PIB et représentés par le ratio (M2/PIB) ; les dépôts auprès des banques commerciales rapportés à ces même dépôts majorés des dépôts des banques commerciales auprès de la banque centrale et enfin le montant des crédits accordés aux entreprises privées toujours rapportés au PIB. A travers le premier indicateur, ces deux auteurs ont démontré une forte corrélation positive entre le PIB réel par tête qui représentait la variable endogène et la taille du système financier. Par le biais du second, ils mesurent le degré avec lequel les banques de dépôts et la banque centrale allouent les crédits. Mais cet indicateur présente deux faiblesses dû au fait que dans un premier temps les banques ne sont pas les seuls intermédiaires financiers pouvant accorder des crédits à l'économie surtout dans les pays en développement et en particulier dans les pays d'Afrique subsaharienne. Deuxièmement, celles-ci peuvent aussi financer les dépenses publiques comme c'est le cas dans les pays en développement. Le dernier indicateur répond à son tour positivement et significativement à l'accroissement du PIB réel par tête. Levine et Zervos (1998) ont essayé dans leur étude d'évaluer l'incidence de la bourse et le développement du secteur bancaire sur la croissance économique. Ils ont utilisé à cet effet un échantillon de 49 pays sur la période 1976-1993 et ont considéré comme variables financières : le ratio de rotation des actifs, le ratio de capitalisation boursière, la volatilité du marché et les indicateurs du développement bancaire. Ils considèrent comme variables endogènes: le taux de croissance du PIB réel, du capital, de la productivité et de l'épargne comme l'ont considéré King et Levine (1993). Leur résultat met en lumière l'impact des variables financières sur la croissance économique. Selon la conclusion de ces deux auteurs, il existe deux mécanismes à travers lesquels l'impact du développement financier se manifeste:Le premier concerne l'augmentation de l'efficacité du capital, grâce à la meilleure allocation des ressources ; le second concerne la mobilisation de l'épargne qui accroît le volume d'investissement. Ils concluent enfin dans leur étude que les économies ayant un niveau élevé de développement financier présentaient des taux de croissance assez importants. Anne Joseph, Marc Raffinot et Baptiste Venet (1998) dans une étude intitulée «l'approfondissement financier et croissance : analyses empiriques en Afrique sub-saharienne », pour la période 1970-1995 ont conclu que l'approfondissement financier joue un rôle dans la croissance réelle d'une grande majorité des pays de l'U.E.M.O.A, ainsi que dans le cas du Cameroun entre 1963 et 1995. Ils ont utilisé dans leur étude d'une part, la croissance économique mesurée par le PIB réel par tête comme régresseur et d'autre part, les variables financières telles que : le ratio M2/PIB étant donné le faible nombre d'institutions financières non bancaires dans les pays d'Afrique sub-saharienne ; le ratio quasi-monnaie/M2, variable destinée à rendre compte des progrès de l'intermédiation financière dans la mesure où c'est au travers de la croissance des dépôts à terme et d'épargne que les intermédiaires financiers sont supposés pouvoir pleinement jouer leur rôle de promoteur de l'accumulation de l'épargne domestique et d'orientation des ressources vers l'allocation optimale des ressources ; l'encours nominal de crédits au secteur privé et l'encours réel de crédit par habitant. Ils concluent à partir de leur résultat qu'il existe dans six cas sur sept (non compris la Guinée Bissau dû à son intégration récente à l'union), un lien de causalité au sens de Granger entre approfondissement financier (mesuré par M2/PIB) et croissance de la sphère réelle. Seul le Niger n'exhibait aucun lien de causalité significatif (ce résultat n'implique pas forcément l'absence de lien économique entre les deux secteurs dans ce pays). Pour ce qui concerne le Togo dans cette étude, les deux auteurs ont conclu qu'il existait un lien unidirectionnel allant du secteur réel au financier. Saint Marc en 1972 avait montré que les pays les plus riches de l'UMOA se caractérisaient par des ratios d'approfondissement financier plus élevés. En effet, en 1992, Spears dans une étude sur 10 pays africains sur la période 1966-1986 a obtenu une corrélation proche de l'unité entre approfondissement financier et croissance dans 9 pays. L'auteur a utilisé trois indicateurs de développement financier tels que le ratio des dépôts à vue et des comptes d'épargne rapportés à M2, et les agrégats monétaires M2 et M3 en proportion du PIB. Malheureusement, l'absence de certaines variables (variables de contrôle) peut laisser supposer un problème d'identification, et donc une surévaluation de l'impact du développement financier sur la croissance économique. Ouédraogo Idrissa (1985) conclut à partir de ses résultats que de façon générale, l'hypothèse de complémentarité de McKinnon qui stipule que « la détention d'encaisses monétaires est un préalable à l'investissement et donc qu'il existe une complémentarité entre la demande d'encaisses monétaires réelle et l'investissement » n'est pas vérifiée dans son analyse au sein de l'UMOA. L'auteur affirme également que ses résultats sont contradictoires et le justifie par la non prise en compte des réalités spécifiques particulières à chaque pays en développement qui composent son échantillon. Il préconise qu'il faut abandonner les modèles de développement propices aux pays à économie développée, c'est-à-dire de rompre avec le « capitalo-centrisme ». Berthélemy et Varoudakis (1998) ont porté leur analyse sur la contribution du développement financier à la croissance économique en utilisant des données de Panel. Ils ont considéré 82 pays pendant six périodes quinquennales dès le début des années soixante jusqu'aux années quatre vingt dix. Ces deux auteurs utilisent comme variable explicative le taux de croissance comme il a été utilisé par Mankiw, Romer et Weil (1992). Toutefois, ils traitent différemment la variable M2 / PIB considérée comme un indicateur de développement financier d'un pays. En effet, le traitement de cette variable est modifié par rapport aux travaux antérieurs dans la mesure où ils introduisent le rôle de la répression financière. Ils ont choisi de synthétiser son incidence par une variable indicatrice binaire qui vaut 1 pour les périodes précédentes à la réforme financière et 0 pour les périodes suivantes y compris la période de sa mise en place. Ces auteurs ont ajouté donc cette variable pour différencier l'impact du développement financier selon les périodes de répression financière et de libéralisation financière. Ils ont obtenu une influence minimale de la croissance du système financier en période de répression financière. Le coefficient associé à cette variable indicatrice multiplié par le ratio (M2 / PIB) est négatif et significatif. De là, les deux auteurs ont conclut q'un système financier réprimé, semble avoir une influence nuisible sur la croissance. Ce résultat confirme la position des défenseurs de la libéralisation. Par ailleurs, les deux auteurs ont constaté que le développement du système financier n'a pas un effet significatif sur la croissance. Le seul effet mis en évidence est un effet négatif lorsqu'il est associé à un régime de répression financière. L'explication proposée pour interpréter cette situation concerne la possibilité d'existence d'équilibres multiples de croissance en liaison avec le niveau du développement financier. Les mécanismes qui expliquent ces équilibres multiples reposent sur l'existence d'externalités réciproques entre la sphère financière et la sphère réelle: le développement du secteur financier accroît l'efficience de l'investissement et renforce la croissance, mais en même temps, la croissance de la sphère réelle favorise l'épargne et le développement financier, ce qui exerce un effet positif sur l'efficacité de l'intermédiation financière. Cette conclusion milite en faveur de la position de Patrick (1966) qui soutient une causalité inverse. Dans le cas d'existence d'équilibres multiples, la relation estimée pourrait être simplement Taux de croissance LM2 * * * * * * * * une régression aberrante permettant de confirmer un impact positif de (M2/ PIB) sur la croissance comme la montre la figure suivante : Figure_8 : Illustration d'équilibres multiples de l'impact entre finance et croissance Berthélemy et Varoudakis (1998) Des interactions de ce type génèrent deux équilibres stables : Un « équilibre haut » avec forte croissance et développement normal du système financier et un « équilibre bas » avec faible croissance, où l'économie ne réussit pas à développer son secteur financier. Entre les deux, il y a un équilibre instable qui définit un effet de seuil du développement du système financier sur la croissance. Au-delà de ce seuil, l'économie converge vers l'équilibre avec forte croissance, alors que, en déça de celui-ci, elle reste bloquée dans une situation de piège de pauvreté. Le deuxième mécanisme à travers lequel le développement du système financier peut influencer la croissance est la meilleure mobilisation de l'épargne qui entraîne l'augmentation du ratio d'investissement. A cet égard, Berthélemy et Varoudakis (1998) ont estimé une régression pour le ratio d'investissement pour le même échantillon. Ces deux auteurs ont retrouvé le même résultat que celui vu au premier mécanisme : le développement financier ne semble pas influencer le comportement d'investissement. L'existence d'équilibres multiples de croissance implique que l'effet du système financier sur le volume d'investissement ne se manifeste pas sous une forme linéaire mais plutôt à travers un effet de palier analogue à celui identifié précédemment en ce qui concerne la croissance. Par le biais de cette analyse, ils ont validé l'idée suivant laquelle l'impact de l'approfondissement financier sur la croissance ne se manifeste qu'à partir d'un certain seuil (M2/PIB) au moins égal à 36,5%. Cela signifie que dans les pays ayant un faible ratio (M2/PIB) l'impact du développement financier sur la croissance ne sera pas significatif. Face à cette explication théorique, la recherche empirique a mis en oeuvre parallèlement une démarche très différente, fondée sur l'analyse statistique de causalité (le test le plus utilisé dans ce cas celui de Granger, 1983). Plus récemment, Gelbard et Leite ( 1999), Collier et Gunning (1999), et Ndikumana (2001) arrivent à la même conclusion que le développement financier a un impact positif sur la croissance économique en Afrique. L'étude de Gelbard et Leite (1999) est d'autant plus intéressante que les auteurs ont construit un indicateur composite de développement financier à l'aide de six indices représentant les caractéristiques majeurs des systèmes financiers des pays africains( la structure de marché et la compétitivité du système financier, l'éventail des produits financiers disponibles sur le marché financier, le degré de libéralisation financière, la qualité de l'environnement institutionnel, le degré d'ouverture financière et le degré de complexité des instruments de politique monétaire). L'enquête couvre 38 pays de l'Afrique subsaharienne entre 1987 et 1997. Les résultats des estimations économétriques montrent une relation positive entre l'indice composite de développement financier et la croissance du PIB par tête. Toutes ces études empiriques ont porté sur un échantillon de plusieurs pays. Les données en panel utilisées dans ces analyses peuvent ne pas refléter l'impact exact de l'approfondissement financier sur la croissance avec beaucoup de précision. En effet certaines études en séries temporelles portant sur un seul pays ont été menées pour valider ou non l'existence d'un lien de causalité entre le développement financier et le secteur réel. Boujelbène Younes et Chtioui Slim (2006) ont réalisé une étude sur la libéralisation et l'impact du développement financier sur la croissance économique en Tunisie. S'inspirant des travaux de Levine et Renelt (1992), King et Levine (1993), et Levine (1997), les deux auteurs confirment l'étroite liaison positive entre les variables financières et réelles, après avoir tenu compte des variables de contrôle comme les dépenses publiques, l'ouverture commerciale, le capital humain et le taux d'investissement national constituant des facteurs aussi fondamentaux dans une équation de croissance économique. Leurs résultats vérifient la relation positive et statistiquement significative entre les indicateurs de développement financier mesurés par : la surface de l'intermédiation financière rapportée au PIB, la disponibilité du système bancaire, la part des crédits alloués au secteur privé rapportée au PIB nominal, la liquidité de la bourse et la mesure de la croissance économique reflétée par le PIB réel par tête. Ils déduisent que le système financier peut donc contribuer à la performance de l'économie en Tunisie à partir des équations à correction d'erreurs analysées. Comme King et Levine (1993), les deux auteurs ont considéré le ratio du crédit bancaire accordé par les banques commerciales sur la somme de ces crédits et le montant de refinancement accordé par la banque centrale aux banques commerciales. En effet, depuis 1994, date de la dévaluation du franc CFA, la plupart des banques commerciales dans les pays de CEMAC sont surliquides, et la politique de refinancement par la banque centrale n'est tellement utilisée. 1.2: Limites des analyses empiriquesLes différentes analyses empiriques qui ont fait l'objet de la revue de littérature de cette analyse présentent deux grandes limites qu'il convient de souligner. Primo, dans la plupart des études empiriques, ce sont les données de panel qui sont utilisées et la relation de causalité n'est pas clairement mise en évidence. En effet, ces analyses précisent l'étroite liaison positive entre la finance et la croissance mais le sens de causalité reste moins clairement défini. La relation entre les deux secteurs est-elle uni ou bidirectionnelle ? C'est pour essayer d'apporter une réponse à cette question que Patrick (1966) par ses travaux s'interroge sur l'existence d'un lien de causalité inverse : en quoi le développement économique peut-il induire le développement financier ? Secundo, certaines études empiriques ont considéré le ratio du crédit bancaire accordé par les banques commerciales rapporté à la somme de ces crédits et le montant de refinancement par la banque centrale aux mêmes banques commerciales. Cet indicateur de développement financier ne semble pas adéquat pour cette analyse concernant le Tchad car depuis la dévaluation du franc CFA, le refinancement des banques commerciales par la banque centrale n'est plus propice comme politique monétaire car la presque totalité des banques commerciales étant surliquides n'ont plus besoin de refinancement. Il serait donc anormal d'utiliser cette variable comme indicateur. Parmi les modèles de croissance endogène permettant de formuler les interactions entre secteur financier et croissance, on trouve celui de Pagano (1993). Ce modèle explique les mecanismes par lesquels l'approfondissement financier accélère la croissance lorsque l'épargne augmente. 1.3: Spécification économétrique Empiriquement, pour mesurer la contribution du développement financier sur la croissance, on peut retenir un modèle linéaire comme la théorie le formalise mais qu'on adapte par l'introduction des variables de contrôle et des variables financières. Pour cette analyse, la structure du modèle de Levine utilisée par Boujelbène et Slim (2006) sur la Tunisie est retenue. Ce modèle se présente comme suit : G(i) = á + âF(i) + uX(i) + åt [E5] Où: - G(i): indicateurs de développement réel (taux de croissance à long terme du PIB par tête, du stock du capital par tête, de la productivité). - F(i) : indicateurs de développement financier ; - X(i) : variables de contrôle (log du revenu par tête, Log du taux de scolarisation dans le secondaire, ratio des dépenses publiques au PIB, taux d'inflation, degré d'ouverture...) - åt : variable aléatoire, suivant une loi normale N(0 ;ó2). Le modèle qu'on veut estimer pour évaluer l'impact du secteur financier sur la croissance économique au Tchad de 1982 à 2007 se présente comme suit : Log(Yt) = áLog(Xt) + âLog(Zt) + åt [E6] Où : - Yt : PIB réel par tête - Xt : matrice des variables de contrôle dans une étude des déterminants de la croissance, il s'agit surtout du : taux d'investissement national, des dépenses publiques, de l'ouverture commerciale. - Zt : matrice des variables financières (indicateurs de développement financier) - åt : variable aléatoire, suivant une loi normale N(0 ;ó2). SECTION 2 : Les considérations méthodologiques liées aux propriétés statistiques des series d'indicateurs et aux procédures d'estimation Dans cette section, il sera question de présenter dans un premier temps les différentes variables financières et réelles retenues pour cette étude et, dans un second temps, la procédure d'estimation. 2-1 Présentation des variables financières et réelles retenues pour cette étude Cette sous-section se propose de présenter l'indicateur de croissance économique, les variables de contrôle associées au modèle et les variables financèires. 2-1-1 L'indicateur de croissance économique Conformément aux travaux empiriques de Levine (1997), on utilise comme variable endogène le produit intérieur brut réel par tête (PIBRT en dollar américain, constant 1995). Il est souvent considéré comme le meilleur indicateur synthétique qui permet de mesurer la croissance économique d'un pays. 2-1-2 Les variables de contrôle Partant des travaux de R. Levine (1997), cette analyse retient comme variables de contrôle qui sont les déterminants fondamentaux de la croissance économique au Tchad : le ratio des dépenses publiques rapportés au PIB nominal (dp) et l'ouverture commerciale (ouv). A cause de l'inexistence des données sur la variable taux d'investissement national concernant toute la période d'étude, celle-ci n'était pas prise en compte. 2-1-3 Les variables financières Comme variables financières, cette analyse retiendra : ü M2 rapporté au PIB nominal qui mesure la profondeur financière (m2) ; ü Crédits privés alloués au secteur privé rapportés au PIB nominal (csp) ; ü Le ratio du crédit accordé par les banques commerciales sur le PIB nominal (cbc) ; Ainsi notre modèle à estimer se présente comme suit: PIBRt = â0 + â1cbct + â2cspt + â3m2t + â4dpt + â5ouvt + åt 2-1-4 Sources des données Les données statistiques utilisées pour notre analyse sont des données secondaires. Elles ont été recueillies dans les bases des données de la banque mondiale et de la BEAC. Notre étude utilise des données annuelles couvrant la période de 1982 à 2007, soit une période de 25 ans. Pour des raisons d'homogéniété et de disponibilité des séries n'ont pas été prolongées jusqu'au déla de 1982, à cause notamment des différentes crises politiques et économiques qu'a connues le Tchad dans les années 70. 2-2 Procédure d'estimation La méthodologie utilisée pour atteindre l'objectif de l'étude consiste à utiliser les nouvelles méthodes économétriques. Ces méthodes économétriques ont remis en cause les résultats obtenus par les études utilisant les régressions des séries temporelles sans passer par la vérification de la stationnarité des séries par le test de l'existence de racine unitaire et leur cointégration et faire ressortir la dynamique de long terme. En effet, la plupart des variables financières et économiques sont générées par un processus non stationnaire. Pour se prémunir du risque du manque d'information de long terme par le biais de l'utilisation du test de Box et Jenkins pour la résolution du problème d'auto corrélation, on fait appel au concept de cointégration initié par Granger (1983) et Engel et Granger (1987) ou à celui de Johansen. Ces méthodes économétriques vérifient donc la stationnarité des séries temporelles et dans le cas échéant les rendent stationnaires avant de les appliquer aux techniques statistiques. L'idée qui sous-tend la cointégration est que deux séries non stationnaires peuvent diverger à court terme, mais évoluer dans le même sens à long terme. Généralement cette méthodologie d'estimation se déroule en trois étapes : La première étape consiste à estimer le degré d'intégration des séries à l'aide des test de Dickey et Fuller Augmentés et du test de Phillips Perron. La seconde étape consiste à tester la présence éventuelle de relation de cointégration qui relie à long terme les séries si elles sont intégrées du même ordre. L'ordre d'intégration étant le nombre de fois qu'il faut différencier une série pour la rendre stationnaire. La troisième étape consiste à tester la causalité des séries en question. 2-2-1 Ordre d'intégration des séries Pour déterminer l'ordre d'intégration d'une série, on utilise les tests de la racine unitaire dans les modèles Augmentés de Dickey et Fuller (ADF) comprenant successivement une tendance et une constante, en suite seulement une constante et enfin sans constante et sans tendance. Par le biais de ces tests, on met en évidence le caractère stationnaire ou non d'une série par la détermination d'une tendance déterministe ou stochastique.
Une condition nécessaire de cointégration est qu'il faut que les séries soient intégrées de même ordre, sinon elles ne peuvent pas être cointégrées. Ce test sera approprié que si les variables dans la première étape sont intégrées du même ordre. Il s'agit d'étudier surtout l'indépendance entre ces deux séries sans faire l'hypothèse à priori sur les valeurs des coefficients qui les relient. La cointégration signifie l'existence d'une ou plusieurs relations d'équilibre à long terme qui peut être combinée avec les dynamiques de court terme des séries. Dans ces conditions, on utilise un modèle à correction d'erreur.
Granger (1969) définit la causalité entre deux variables comme suit : on dit que la variable X est la cause de Y si la prédictibilité de Y est améliorée lorsque l'ensemble des informations relatives à X est pris en considération. La procédure utilisée par le test de causalité est celle de la représentation vectorielle autorégressive (VAR) d'ordre P. Le modèle à correction d'erreur a pour objectif de rechercher la liaison réelle entre les variables. Cette représentation est à la fois un modèle statique et un modèle dynamique. Autour de la relation de long terme, le modèle à correction d'erreur ( MCE ) permet d'intégrer les fluctuations de court terme. Le coefficient â qui doit être négatif, rend compte d'une force de rappel vers l'équilibre de long terme. Ainsi si le signe du â coefficient du résidu décalé estimé (force de rappel vers l'équilibre) est négatif et statistiquement significatif, on peut donc affirmer l'existence d'une relation de causalité à long terme allant de Xt à Yt. En plus le signe de â doit être négatif, pour qu'on puisse avoir un mécanisme à correction d'erreur (rattrapage qui permet de tendre vers la relation de long terme). â représente donc le coefficient de correction d'erreur qui mesure la vitesse d'ajustement de la variable endogène vers sa valeur d'équilibre stationnaire de long terme. Le MCE n'est valide que si la force de rappel est significativement négative. Le MCE présente un avantage économique puisqu'il permet de donner la dynamique de court et long terme pour une variable donnée. Le second avantage est de nature statistique puisque dans un MCE toutes les variables sont stationnaires et donc les tests classiques (Student, Fisher...) sont alors applicables et cela permet d'éviter toutes régressions fallacieuses. L'estimation d'un modèle à correction d'erreur ne pose donc pas de problème particulier et nécessite simplement le recours à une technique de moindres carrée ordinaire facile à manipuler. * 11 Voir St Hill R.L (1992) et H.Patrick (1966). On trouvera des éléments de vérification empirique et des tests de causalité chez Jung (1986) et Thornton ( 1991, 1994). |
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