Section 2 : Des alternatives avec des enjeux
multiples.
Plusieurs enjeux interviennent dans l'évolution
professionnelle et sociale de la personne handicapée au travail. Ces
enjeux peuvent lui retirer une partie de son autonomie qu'il avait auparavant
lorsqu'il assurait des décisions qui ne sortaient pas du cadre du milieu
protégé. Trois enjeux sont à prendre en
considération, d'une part les freins à son évolution vers
un milieu semi-protégé et d'autre part le rôle des
opérateurs d'insertion dans le suivi de ces travailleurs. Et pour finir
l'autonomie du travailleur comme pivot central de la mise à disposition
ou de la prestation de service.
2.1 Le passage vers un milieu
semi-protégé.
Les structures de travail protégé et en
particulier les ESAT, apportent à ces travailleurs une
sécurité de l'emploi, de rémunérations et des
conditions de travail qui sont transférables lors d'activités de
mise à disposition ou de prestation de service. Cela est important pour
ces individus car malgré leur évolution ils ont encore besoin
d'être dans un cadre qui leur offre un minimum de protection. Mais l'on
constate également que les entreprises ordinaires qui accueillent ce
type de prestations n'ont pas forcément une image très positive
des travailleurs handicapés. Elles redoutent une insuffisance
professionnelle, des réactions imprévisibles et
l'intolérance de leurs propres employés. Il est donc difficile
parfois de collaborer avec certaines entreprises et de leur faire accepter les
travailleurs handicapés avec parfois des individus ayant des
capacités de rendements aussi élevée que les ouvriers de
milieu ordinaire.
De plus les travailleurs handicapés eux même
parfois redoutent le milieu de travail semi protégé. La perte de
leurs repères ne les incite pas à s'y engager malgré le
soutien qu'ils peuvent y trouver pour évoluer.
2.1.1 La place des familles
Les familles quant à elles peuvent à la fois
être un frein mais aussi une source de motivation pour que le travailleur
handicapé accède au milieu semi-protégé.
Le constat est général, les personnes
handicapées au travail qui arrive à évoluer
professionnellement et socialement ont des familles qui les soutiennent
fortement, et qui suivent leur évolution de prés tout en les
laissant prendre les décisions les plus importantes pour leur avenir. De
plus se sont des familles qui ont toujours refusé un travail
dégradant pour leurs enfants. Ces éléments qui peuvent se
révéler positif pour un individu peuvent être vécus
comme de manière négative pour un autre.
En effet certaines familles ou tuteurs légaux pensent
que la personne handicapée au travail sera beaucoup mieux dans un milieu
semi protégé voir même un milieu ordinaire, alors que cette
personne malgré un effort de formation n'atteindra probablement jamais
le niveau requis pour accéder au milieu semi protégé et
encore moins au milieu ordinaire. Le cas des familles peut aussi poser
problème, lorsque l'adulte handicapé possède les
capacités d'accéder à des mises à disposition ou
à des prestations de service, mais la famille possède une
certaine réticence à voir l'adulte handicapé
évoluer dans un milieu ouvert, elle n'a pas envie de changer son mode de
fonctionnement, et a des craintes sur la capacité d'autonomie de
l'adulte.
C'est pourquoi le plus souvent les familles sont
prévenues des actions que l'adulte veut mettre en place, mais leurs
accords n'ont aucunes valeurs. Cela permet à l'adulte d'être libre
dans ses choix malgré qu'il puisse être fortement influencé
par les personnes qui l'entourent.
La place des familles dans les choix de l'adulte
handicapé est un problème récurrent. Les
établissements et services d'aide par le travail ne veulent pas
impliquer les familles pour ne pas dévier de leur logique d'action, car
si tous les avis étaient pris en compte, le développement
professionnel et social de l'adulte serait fortement perturbé.
2.1.2 Le niveau d'autonomie
Un autre élément est fédérateur de
l'insertion dans un milieu semi protégé c'est l'autonomie du
travailleur handicapé. L'autonomie est le facteur principal du passage
du milieu protégé à un milieu semi protégé
et surtout pour l'insertion en milieu ordinaire si cela est possible.
C'est pourquoi le soutien deuxième type est
très important il va permettre, comme il a été dit dans la
deuxième partie, de développer son autonomie sociale
c'est-à-dire la gestion du temps, le déplacement en transport en
commun...etc.
Sans ce développement social, le milieu semi
protégé est inaccessible, car les travailleurs handicapés
doivent en principe conserver une totale autonomie pendant l'exécution
des travaux de mise à disposition ou de prestation de service, par
rapport aux autres salariés de l'entreprise.
C'est pourquoi si l'on prend l'exemple de l'ESAT du Val de
Lorraine, malgré un large panel d'individu bénéficiant du
développement de l'autonomie par le centre de soutien, peu sont capables
d'évoluer en autonomie dans la vie quotidienne et professionnelle, c'est
pourquoi une seule équipe est détachée en entreprise, et
seulement une dizaine de personnes sont en prestation de service à
l'extérieur. L'autonomie est donc un pivot de l'insertion en milieu semi
protégé.
Mais il ne faut pas occulter le rôle des
opérateurs d'insertion dans les enjeux de la valorisation des
compétences.
2.2 Les opérateurs d'insertion
L'insertion dans le milieu semi protégé et
même l'accompagnement dans le développement des compétences
de la personne handicapée au travail est fortement corrélé
avec le rôle des différents opérateurs d'insertion. Les
missions des intervenants travaillant dans ce champ entre l'insertion et le
suivi, occupent une place à la fois capitale et discrète. Ces
opérateurs servent à la fois de passage et de modification d'un
état ou d'une situation initiale.
Comme il a été décrit plus haut, on
observe une certaine évolution dans le développement des
compétences du travailleur handicapé et par là même
une dynamique des opérateurs d'insertions, basées sur une
méthodologie rigoureuse, comme le projet individualisé ou le
modèle d'accompagnement personnalisé.
En effet la personnalisation des parcours implique de
mobiliser des compétences et des ressources diversifier. Autrement dit,
rendre la personne acteur de son parcours, repose sur la qualité des
contributions fournies par l'opérateur d'insertion en matière de
méthodes et de moyens.
En effet l'opérateur d'insertion doit découvrir
des potentialités et l'implication participative, de tout individu
porteur d'une demande même encore discrète, de recomposer ou
restaurer des liens distendus avec la vie collective c'est à dire
« de participer à la modification de la situation de
désinsertion vécue » (Dynamique d'insertion).
Ces acteurs ont un rôle à part entière,
ils ont pour principe d'accepter la personne telle qu'elle est, avec ses
désirs, ses acquis, ses manques, ses préférences et dans
le même temps que la personne accepte d'être aidée
c'est-à-dire qu'elle approuve l'intervention externe.
Le travailleur handicapé peut de lui-même
développer et valoriser ses compétences en devenant acteur de son
parcours professionnel et social, mais aussi grâce aux opérateurs
d'insertions comme les moniteurs d'atelier, la coordinatrice technique et
pédagogique, qui élaborent avec eux tout un schéma
d'évolution possible. Ainsi par son travail l'opérateur va
pouvoir permettre au travailleur handicapé d'entamer peut être une
phase en milieu semi protégé. L'opérateur va pouvoir
repérer les individus en capacité d'évoluer dans ce
milieu.
Les enjeux de ces alternatives professionnelles (la mise
à disposition et la prestation de service) n'ont pas uniquement que des
impacts sur le travailleur handicapé, ils ont des conséquences
sur la place des familles et les opérateurs d'insertion. Le milieu semi
protégé est donc une conséquence possible aux
évolutions des formations et des compétences professionnelles et
sociales de la personne handicapée.
Ces différentes dynamiques pour recentrer les
travailleurs au coeur du dispositif de l'action sociale, médicosocial et
professionnelle portent à croire que le travail est un facteur
d'émancipation et qu'il sert de dynamique contre la discrimination.
Ainsi les enjeux de la valorisation des compétences
professionnelles et sociales seraient également la reconnaissance du
travailleur handicapé au sein de la société
française.
Le travailleur se rendant acteur de son parcours et donc de
son avenir serait lui-même un acteur principal de la lutte contre
l'exclusion.
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