7-2- Accès des populations riveraines au bois
énergie et conservation de la biodiversité : les AVIGREF
sont-elles la solution ?
Dans le souci de permettre aux populations de jouir des fruits
de la RBP, les AVIGREF ont été créées. Elles
constituent un cadre où les populations pourraient participer aux
actions de gestion. Cela permettrait de rendre plus efficaces les actions de
conservation de la RBP par le CENAGREF et de prendre en compte la dimension
humaine dans les actions de conservation. En effet, la complexité des
relations entre la dégradation des ressources forestières et la
pauvreté impose de réconcilier la préservation de ces
ressources et le développement économique des populations
concernées par leur utilisation. C'est donc dans cette perspective que
l'implication des populations riveraines dans la gestion participative des
ressources forestières est de plus en plus promue par le CENAGREF. Aussi
ces actions de conservation ont-elles de plus grandes chances de réussir
si les populations riveraines se les approprient et y sont activement
impliquées. Mais l'environnement dans lequel évoluent ces
populations influe beaucoup sur leur comportement. Cet environnement a une
histoire qui doit être également prise en compte.
7-2-1- Cadre légal et institutionnel
7-2-1-1- Evolution du cadre légal et
institutionnel
Jusqu'à un passé récent, la RBP
était intégralement « préservée » contre
les actions dites destructrices des populations riveraines. Pendant que les
coutumes ont toujours reconnu aux populations locales le droit d'exploiter les
ressources de leur environnement, le cadre juridique étatique les
empêchait de jouir de ce droit. Le rôle confié aux services
des eaux et forêts était de créer des aires de loisir et de
récréation pour les fonctionnaires coloniaux et protéger
le patrimoine forestier pour le tourisme (Kiansi, 2005). Ces raisons ont
justifié pendant longtemps des actions de répressions envers les
populations qui se sont vues expropriées. Le domaine actuel de la
Réserve de Biosphère de la Pendjari a été
classé parc national en 1961. Les populations se sont ainsi vues
déplacées des domaines sur lesquels elles avaient des droits de
culture, de chasse,
de pêche, de collecte de bois énergie etc.
Pendant longtemps les agents forestiers ont réprimé les
populations riveraines et une atmosphère conflictuelle a longtemps
régné entre les deux parties. Mais les approches
répressives ainsi que la réglementation par l'Etat de
l'utilisation des ressources ont montré leurs limites Ainsi les
résultats décevants obtenus dans la préservation de la RBP
a emmené le PGRN à changer de stratégie. En effet, les
forestiers exerçaient une gestion à but économique des
ressources de la réserve pour leur profit, en recourant souvent à
des méthodes policières. Les préoccupations des paysans,
qui sont bien entendu intéressés au bois, mais aussi aux autres
PFAB et surtout à la forêt comme réserve de terres
cultivables, n'étaient guère prises en compte. Situation
d'injustice majeure qui poussait les paysans au pillage des ressources
forestières, voire à la révolte ouverte contre le service
forestier. Les nouvelles politiques forestières mises en place ces
dernières années, notamment avec le PGRN à partir de 1993,
attachaient beaucoup d'importance, parmi d'autres éléments,
à la notion de partenariat, gage de durabilité, qui implique la
participation de tous les acteurs à la planification de la gestion de la
RBP. Mais il faut remarquer que ces changements ont eu lieu sous la pression de
milieux extérieurs à la foresterie, les organismes internationaux
jouant à ce propos un rôle non négligeable. C'est ainsi que
le programme sur l'homme et la biodiversité (MAB) lancé en 1971
par l'UNESCO a permis en 1986 de classer le parc national de la Pendjari,
Réserve de Biosphère (Photo 14). La
Conférence des Nations Unies sur l'Environnement et le
Développement (CNUED), tenue à Rio en 1992, a
entraîné la prise en compte, dans les principes du programme MAB,
de la conservation de la biodiversité et des ressources biologiques avec
leur utilisation.
Photo 14: Inscription du parc national de la
Pendjari comme Réserve de Biosphère
Cliché : Abdelaziz LAWANI
Pour être retenue comme Réserve de Biosphère
par l'UNESCO, l'aire protégée doit contenir trois zones
(CENAGREF, 2005)1 :
ü une ou plusieurs aire(s) centrale(s) : une zone
de protection intégrale où les activités humaines sont
restreintes à la recherche et à la surveillance ;
ü une zone tampon où certaines
activités de gestion, en particulier le tourisme, sont possibles ;
ü une aire de transition ou zone de
développement où une utilisation durable des ressources
naturelles est possible.
7-2-1-2- Cadre légal et institutionnel
actuel
La Réserve de Biosphère de la Pendjari est
gérée aujourd'hui par plusieurs acteurs (CENAGREF, 2005) :
ü la Direction des Forêts et Ressources Naturelles
(DFRN) est l'administration du Ministère de l'Environnement et de la
Protection de la Nature (MEPN) chargée des ressources forestières
nationales ;
ü le Centre National de Gestion des Réserves de
Faune (CENAGREF) créé par le décret 9673 du 2 avril 1996
qui a hérité des actifs du PGRN est chargé de conserver et
de gérer les aires protégées dont la RBP ;
ü quelques structures impliquées dans la gestion
des ressources naturelles : l'Agence Béninoise pour l'Environnement
(ABE), le Centre Béninois pour le Développement Durable (CBDD),
l'Agence Régionnale pour le développement du tourisme de
l'Atacora (ARDET).
Le cadre légal actuel prévoit les conditions de
« participation » des populations riveraines à la gestion de
la RBP. Il se veut un cadre législatif et institutionnel qui pourrait
permettre une collaboration effective et pacifiée entre les populations
riveraines et les structures en charge de la RBP. En effet le décret
d'application de la loi portant régime de la faune et de ses habitats en
république du Bénin prévoit en son article 23 que
«Les plans d'aménagement des aires protégées sont
élaborés ou approuvés par l'administration chargée
de la faune, en collaboration avec les services concernés au niveau
national et avec la participation des populations riveraines ».
1 Voir Figure3 : Carte de la
Réserve de Biosphère de la Pendjari
L'article 26 a prévu que « Les populations
riveraines organisées en structures appropriées sont
associées à l'exécution des plans d'aménagement des
aires protégées ». Concernant le bois énergie,
l'article 15 du code forestier de 1935 autorise expressément le
ramassage des bois morts. L'article 24 de la loi portant régime de la
faune en république du Bénin stipule que la zone tampon est
destinée à la réalisation d'activités ou
d'aménagements socio-économiques.
Dans le but de rendre cette participation effective, et
suivant les articles 23 et 26 sur cités, le CENAGREF a suscité la
création des AVIGREF. Ce sont des associations villageoises
constituées des populations riveraines de la RBP.
7-2-2- Mode d'organisation des AVIGREF et politique de
gestion du Bois Energie
7-2-2-1- Mode d'organisation
Les Associations Villageoises de Gestion des Réserves
de Faune (AVIGREF) sont des organisations des villages riverains de la RBP.
Créées à partir de la capitalisation des actions des
anciennes Associations Villageoises de chasse instituées par le PGRN,
elles ont pour but de (CENAGREF, op. cit.) :
ü sensibiliser les populations riveraines sur la
nécessité de préserver la faune et son habitat ;
ü informer les riverains sur la réglementation de la
protection de la nature et de l'exercice de la chasse ;
ü aider les services compétents à assurer la
surveillance de la Zone cynégétique de la Pendjari ;
ü veiller au respect de la réglementation en
matière de chasse et de protection de la nature ;
ü promouvoir une gestion durable de la faune qui soit
profitable aux communautés ;
ü participer à la gestion durable de la ZOC et de la
Zone Tampon ;
ü participer au développement économique du
village et de la zone riveraine.
L'adhésion est libre, volontaire et est ouverte
à toute personne résidant dans les villages riverains contre un
montant d'adhésion unique de 1000FCFA et une contribution annuelle de
500FCFA. Les AVIGREF sont regroupées en bureaux sur chaque axe
(Tanguiéta-Batia, Tanguiéta-Porga) et ces bureaux en union :
l'U-AVIGREF. Cette union est chargée d'assurer la coordination entre les
différents bureaux des axes, de faire circuler l'information au sein des
AVIGREF, de fmancer les activités génératrices de revenu
et la réalisation des infrastructures
socio-économiques. Elle trouve ses ressources
financières dans les recettes de chasse (30% des recettes
générées par la chasse sportive lui sont
reversées), les cotisations et frais d'adhésion, la vente de la
viande de chasse et les ristournes des auxiliaires villageois.
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