La diversité culturelle dans le procès international relatif aux droits de l'homme( Télécharger le fichier original )par Titine Pétronie KOUENDZE INGOBA Université Catholique d'Afrique Centrale - Master en Droits de l'homme et Action Humanitaire 2004 |
CONCLUSION GENERALEQu'elle est la portée et la valeur d'un procès international lorsque la norme internationale sur laquelle se fonde le juge international ne s'articule pas avec les réalités culturelles en cause ? Quel intérêt doit-on accorder à une décision qui n'est autre que le reflet des conceptions que l'on pourrait qualifier de discriminatoires ? Telles sont les questions qui ressortent des réflexions effectuées autour de notre question centrale à savoir, si la non-prise en compte par le juge des particularismes culturels au cours d'un procès ne pourrait compromettre la justice pénale internationale? Ces analyses et réflexions nous ont permis de comprendre et de découvrir que le procès international malgré ses nombreux avantages est le terrain de sérieuses difficultés, particulièrement sur les questions de la diversité culturelle. Il faut reconnaître que la valeur, la portée et l'intérêt à accorder à ses décisions, sont très mitigés. C'est pourquoi, nous convenons que la justice internationale peut être remise en cause. La question de la diversité culturelle dans le procès international relatif aux droits de l'homme a été examinée en deux périodes importantes, à savoir le juge et les difficultés pratiques qu'il rencontre au cours du procès, et les discussions sur certaines alternatives. Ces réflexions ont été faites sur la base de deux méthodes d'analyse, la méthode stratégique et la méthode systémique. Les stratégies employées par le juge, de même que les systèmes de la justice internationale ont donc été étudiés dans ce travail. Toutes ces analyses sont parties d'une hypothèse principale, à savoir : La non-prise en compte, tant par la norme internationale que par le juge, de la diversité culturelle pourrait compromettre la justice internationale. Avant de rappeler les hypothèses subsidiaires, il sied de relever que cette hypothèse a était confirmée. La justice internationale pourrait effectivement être compromise s'il n'y est pas apporté certains aménagements. Rappel des hypothèses secondaires - Le juge s'approprie les faits culturels qui constituent les circonstances d'une affaire. Le juge pourrait à cette occasion rencontrer des difficultés. Cette première hypothèse a été étudiée à travers l'observation des stratégies dont use le juge afin de comprendre et de faire siennes les réalités culturelles qui entourent les faits qu'il est amener à juger. Cette étude a permis de démontrer que le juge international rencontre de nombreuses difficultés lorsqu'il essaie de s'approprier les faits culturels d'une affaire. Il découle de cette démonstration que le juge se perd très souvent et s'oblige à faire des adaptations qui se trouvent trop souvent en inadéquation avec les réalités en cause. - Le juge pourrait être conduit, compte tenu de ces difficultés, à se confiner dans l'application stricte du droit. Cette seconde hypothèse a été étudiée dans différents cas, tant dans le procès devant les Tribunaux pénaux internationaux que devant les juridictions internes de compétence universelle. L'observation a démontré que les difficultés de communication d'interprétation et d'articulation de la norme internationale aux réalités culturelles en cause, ont conduit le juge à écarter certains faits culturels importants de ses analyses. Cela peut être assimilé à une violation du principe de reconnaissance des identités et des particularismes existants. Finalement, l'on peut affirmer que la non prise en compte de ces particularismes comme viennent de le démontrer ces deux hypothèses, compromet la justice pénale internationale. Cependant, il faut relever qu'il est possible de pallier cette situation pour permettre à la justice pénale internationale de se former et de s'accomplir plus promptement. En effet, l'on ne saurait rejeter en bloc l'oeuvre de la justice pénale internationale, car comme il a été démontré dans ce travail, la justice interne ne saurait répondre aux exigences qui ont poussé la mise en place d'une nouvelle forme de justice pénale. Il n'est pas certain d'attendre d'elle qu'elle lutte contre l'impunité et qu'elle accomplisse véritablement la protection des droits de l'homme, malgré tous les avantages dont elle dispose, à savoir la possibilité de répondre sans difficultés aux questions culturelles. C'est pourquoi de nouvelles perspectives et alternatives doivent être proposées à la justice pénale internationale, afin qu'elle soit désormais en mesure d'évacuer tout cet amas de difficultés qui l'asphyxie. Il est intéressant d'examiner des propositions comme celles de Almiro Simoels Rodriguez, exprimées à l'occasion d'un colloque international sur « la justice pénale internationale » à Limoges en 2001 : « Beaucoup de formules sont possibles : création de tribunaux (internes) à vocation internationale composés de façon mixte ; observateurs internationaux envoyés auprès des tribunaux locaux » Cette possibilité, il le précise, pourrait quand même poser un certain nombre de problèmes tels, « l'unité du droit applicable, la jurisprudence, la procédure ou la formation des juges. »148(*) Mais, ces dernières difficultés sont, à notre avis, plus simples à résoudre, il est donc possible que ce genre de proposition puisse permettre à la justice pénale internationale de pallier certaines insuffisances. La lutte contre l'impunité dans un cadre international n'est pas toujours chose aisée, même s'il faut reconnaître que c'est bien le meilleur moyen de libérer l'humanité de ces criminels qui la privent de paix. Mais, comment lutter promptement contre l'impunité sans tenir compte des particularismes culturels qui entourent les événements et les violations pour lesquelles on recherche réparation? Cette étude ne nous a malheureusement pas permis, compte tenu des limites que nous nous étions assignés, de répondre à cette question. Il s'agissait jusqu'ici de démontrer comment la diversité culturelle pouvait constituer un obstacle à la lutte contre l'impunité dans un cadre international. Ainsi, sous la base des discussions, qui ont fait l'objet de notre dernier chapitre, un nouveau thème d'étude pourrait intégrer les réflexions scientifiques, à savoir : comment aménager la justice internationale tout en tenant compte des particularismes culturels existants ? La norme pénale internationale encore au stade de formation, il est toujours possible de la construire de manière à exclure toutes discriminations possibles. L'aménagement des dispositions existantes, tout en tenant compte de la diversité culturelle est un moyen qui servirait grandement à élaguer la majeur partie des difficultés que nous avons relevé dans ce travail. Le Comité de droit international (CDI) pourrait examiner avec un peu plus d'intérêt ce genre de propositions. Les juges internationaux investis d'une mission législative peuvent également examiner la question pour préparer l'avenir de la Cour pénale internationale. Par ailleurs, c'est à la science d'inspirer un peu plus afin de répondre à cette question si importante. * 148 Rodriguez A.S., Synthèse, Gaboraiux.S. et Pauliat.H., La justice pénale internationale, Limoges, Pulim, 2001, p. 117. |
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