Fondements juridiques des dispositions relatives à la propriété industrielle dans l'accord d'association entre la Tunisie et la Communauté Européenne( Télécharger le fichier original )par Maher EL EUCH Université El Manar de Tunis - mastère professionnel en droit de la propriété intellectuelle 2008 |
Conclusion généraleA la fin de ce travail, nous pouvons conclure que la pluralité des fondements juridiques des dispositions relatives à la propriété industrielle dans l'accord d'association constitue une source d'ambigüité et d'incertitude. D'une part, leur origine essentiellement internationale est, dans la plupart des cas, déduite de la rédaction des articles qui renvoient implicitement et/ou indirectement au droit international. D'autre part, la tendance à la communautarisation desdits fondements risque d'être une source de «désordre» si elle n'est pas conditionnée par l'équilibre conventionnel lié aux obligations des parties contractantes. Un tel équilibre sera de plus en plus contesté si on se place au niveau des rapports entre le droit communautaire et le droit international économique, notamment le droit de l'OMC. En effet, la Communauté ou les Communautés Européennes et la Tunisie ne peuvent pas jouer le même rôle au sein de cette organisation qui constitue un vrai forum pour la promotion des intérêts communautaires sur le plan multilatéral. Les exemples que nous pouvons citer à propos de l'influence communautaire dans les négociations commerciales multilatérales sont nombreux. Ainsi, l'introduction de nouvelles questions ou sujets lors de la conférence ministérielle de Singapour en 1 99670 était le fruit d'une vision européenne basée sur le principe de généralité. Il en est de même pour le "principe de précaution" et "l'exception culturelle" qui tendent à donner un certain visage humain à la mondialisation. « Nul ne doute par ailleurs que, au sein de l'OMC, la Communauté s'efforce d'obtenir la transposition au plan international de certaines conceptions communautaires ».71 D'autre part, le caractère stratégique issu des instruments actuels de la coopération entre l'Europe et les pays du sud de la méditerranée (partenariat Euro-Med et nouvelle politique de voisinage) s'avère relatif si nous procédons à une comparaison avec d'autres cadres qui lient le vieux continent à d'autres pays en développement. Le cas du « partenariat stratégique » entre les pays de l'Union européenne et ceux de l'Amérique latine et des Caraïbes conformément au second sommet qui s'est tenu à Madrid en mai 2002 est illustratif. Dans ce cadre, un accord établissant une association entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et la République du Chili, d'autre part, a été signé le 18 novembre 2002 à Bruxelles. Pour les droits de la propriété industrielle, la rédaction de certains articles de cet accord reflète mieux l'esprit de partenariat, l'équilibre conventionnel et la différenciation. 70 Les nouveaux sujets ou « les questions de Singapour » touchent à l'investissement, la concurrence, la transparence des marchés publics et à la facilitation du commerce. 71 GAUTRON (Jean-Claude). «L 'ordre juridique communautaire et le droit international : quelles articulation ? ». In « Droit communautaire et mondialisation », actes de colloque organisé par le laboratoire de droit communautaire et de relations Maghreb-Europe. Centre de Publication Universitaires 2003. p 70. L'article 32 qui trace les grandes lignes de la coopération dans ce domaine prévoit que « les Parties conviennent de coopérer, selon leurs propres capacités, sur les questions ayant trait à la mise en oeuvre, la promotion, la diffusion, la rationalisation, la gestion, l'harmonisation, la protection et l'application efficace des droits de propriété intellectuelle, à la prévention des abus de tels droits, à la lutte contre la contrefaçon et la piraterie ainsi qu'à la création et au renforcement d'organismes nationaux de contrôle et de protection de ces droits ». Au niveau sectoriel, les rapports entre les droits de la propriété intellectuelle et le transfert technologique sont plus nets. L'article 36 relatif à la coopération dans le secteur des sciences et technologies stipule dans son alinéa 1er que « les objectifs de la coopération scientifique et technique, menée dans l'intérêt mutuel des deux Parties et conformément à leurs politiques, en particulier en ce qui concerne les règles d'exploitation de la propriété intellectuelle découlant de la recherche, sont les suivants :
L'exposé de motifs du projet de la loi française autorisant la ratification de l'accord établissant une association avec le Chili a qualifié cet accord d'« ambitieux mais réaliste compte tenu du niveau de développement du Chili et des progrès rapides de son économie ». (Sénat session ordinaire de 2003-2004. Annexe au procès-verbal de la séance du 29 octobre 2003). Nonobstant ses atouts de réussite, l'intégration euro-méditerranéenne souffre de quelques insuffisances. Un article publié récemment et intitulé « Méditerranée : d'un Euromed en panne à une région industrielle Nord-Sud »72 a fait un diagnostic de la situation. Face aux deux points forts de cette intégration, à savoir la convergence et l'intégration intra-zone, la Méditerranée est confrontée à deux faiblesses. La première faiblesse concerne la mobilité des personnes, dans la mesure où les Sud-méditerranéens en Europe sont quatre fois moins que les Mexicains aux Etats-Unis. La deuxième qui est la plus grande faiblesse, selon ces auteurs, est l'absence d'un système productif Nord-Sud. 72 http://www.strategie.gouv.fr/revue/IMG/pdf/article BeckoucheGuigou4.pdf Les perspectives du développement de la coopération bilatérale et régionale entre le nord et le sud de la méditerranée dans le domaine de la propriété industrielle ne dépendent pas uniquement du cadre juridique approprié et équilibré mais également de certains autres facteurs qui doivent se réunir afin de permettre la réalisation de l'objectif de partenariat : - un vrai volontarisme politique de la part de tous les acteurs; - la prise en compte du caractère stratégique de la coopération avec les pays du sud de la méditerranée lors de la préparation, de la conception et de la mise en place du projet de réforme des institutions européennes défendu par la France dans le cadre du rôle actif qu'elle veut jouer suite aux dernière élections présidentielles 73; - la réduction des disparités sud-sud dans l'objectif de faciliter la réduction des disparités qui existent entre les deux rives de la méditerranée. A ce propos, l'intégration entre la Tunisie, la Jordanie, le Maroc et l'Egypte dans le cadre la zone araboméditerranéenne de libre échange (processus d'Agadir) peut constituer un cadre opportun pour aider à réaliser cet objectif. L'élargissement de ladite intégration à d'autres pays arabes ayant conclu des accords d'association avec la Communauté Européenne est aussi souhaitable. Une relance de l'intégration maghrébine constitue également une priorité. Pour ce qui de la propriété industrielle, des efforts supplémentaires de la part de l'Europe et de ses partenaires et voisins du sud de la méditerranée sont indispensables. Du côté européen, deux principaux aspects nécessitent un effort soutenu d'appui au développement : le transfert technologique et l'assistance technique. Du côté sud-méditerranéen, un travail reste à faire pour l'effectivité de la protection des droits et la sensibilisation à l'importance de cette protection. En Tunisie, le dossier de la propriété industrielle nécessite une vraie impulsion. Dans cet objectif, les axes suivants peuvent être proposés :
La réalisation des objectifs nationaux liés à la promotion des droits de la propriété industrielle en Tunisie dépend de certains préalables, dont notamment la prise en compte du caractère stratégique, multidimensionnel et évolutif de la question. |
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