Le courant néo structuralistes, avec pour chef de fil
Taylor [1983] rejettent l'argument souvent avancé selon lequel la
structure financière des PED serait la cause de leur sous
développement. Pour eux, les marchés informels
(caractéristiques de sous développement financier)
déterminent le taux d'intérêt nominal qui provient de
l'égalisation entre l'offre et la demande de crédit serait un
facteur de croissance économique, et loin d'être un handicap au
développement économique. Ainsi, Fry [1988] stipule formellement
les fondements théoriques du courant néo structuraliste en ces
termes :
« les modèles structuralistes reposent sur cinq
assertions radicalement différentes de celles de Mac Kinnon :(1)Les
salaires sont déterminés d'une manière exogène (ou
institutionnelle) au travers de conflits entre les classes sociales
;(2)l'inflation est déterminée par les poids relatifs des
capitalistes et des travailleurs( qui sont eux-mêmes influencés
par l'état de l'économie) ;(3)l'épargne se
détermine comme une fraction des profits et non des salaires ;(4)le
niveau général des prix est déterminé par des
marges fixes sur les coûts du travail,les importations et le financement
du capitalproductif(taux d'intérêt) ;(5)les pays en voie de
développement dépendent de façon critique de leurs
importations de matières premières,des biens d'équipement
et des biens intermédiaires ». (op. cité,page 87).
Taylor [1983], souligne le caractère compétitif
du secteur informel en expliquant que sur ces marchés, les
détenteurs de monnaie servent de banques et jouent le rôle
d'intermédiaires financiers entre les épargnants et
investisseurs. En effet, dans les modèles néo-structuralistes
[inspiré de l'analyse de Tobin]11 les
ménages ont accès à trois types d'actifs financiers :
·l'or ou la monnaie,
10
12 op. cité, p85
11 Tobin. J [1947]. Son analyse traite des
marchés financiers et de leurs liens avec les décisions des
agents économiques en matière de consommation, d'emploi, de
productive et des prix. Sa théorie de sélection du portefeuille a
pour objectif d'analyser les décisions des agents
détenant des actifs réels et financiers et contractant
simultanément des emprunts. À la différence du
modèle keynésien, Tobin ne considère pas seulement la
monnaie mais l'ensemble des actifs et des dettes. En montrant comment les
décisions résultent d'un arbitrage entre la prise de risque et le
taux de rendement anticipé, il énonce son théorème
de séparation.
· les dépôts bancaires,
· les prêts sur les marchés informels.
Par conséquent, les prêts sur ces marchés
apparaissent comme une alternative aux, dépôts bancaires dans la
mesure où les capitaux sont supposés circuler librement entre les
deux secteurs. En terme d'efficacité du secteur non officiel sur le
secteur bancaire pour les néo structuralistes, Taylor [1983]
et Wijnbergen [1983] avancent trois arguments qui sont spécifiques
consécutive à l'échec des politiques de
libéralisations financière dans les PED en montrant les avantages
que peuvent procurer les économies non organisées:
· L'existence des normes réglementaires en
matière de réserves obligatoires peut entraîner une baisse
de l'intermédiation financière; par contre, sur le
marché financier non organisé, il n'existe pas d'obligation de
réserve. Les réserves obligatoires constituées par les
banques sont, dans les modèles néo structuralistes, un obstacle
à la l'intermédiation financière. En effet, elles
réduisent l'offre réelle totale de crédit pour les
entreprises.
· L'augmentation du taux d'intérêt sur les
dépôts entraîne un changement des actifs du secteur
financier informel vers le secteur financier structuré de crédit,
elle peut réduire la demande d'encaisses monétaires, ce qui
affecterait de fait l'offre de prêts sur les marchés financiers
informel, provoquant ainsi une augmentation du taux d'intérêt
nominal sur le marché informel.
· La hausse des taux d'intérêt
accroît le coût du capital du capital productif, ce qui conduit,
à une augmentation du niveau général des prix (inflation
par les coûts) et à une baisse de l'investissement et de la
demande réelle. De plus, une augmentation de la progression à
épargner peut faire baisser davantage la demande effective. Ce qui
réduit le taux de croissance de l'économie.
Ainsi, si nous nous referons à Mac Kinnon qui suppose
que la libéralisation financière se traduira par une augmentation
des taux sur les dépôts, elle aura des effets nocifs sur la
croissance selon les néo structuralistes. Ils soulignent le fait qu'un
niveau élevé des taux d'intérêt qui vise la
rémunération réelle des dépôts bancaires
accroît l'inflation à court terme à travers la hausse
coûts de production et ralentit la croissance, qui à son tour
réduirait le volume de crédit à l'économie.
Par ailleurs pour, les néo structuralistes, c'est
l'effet de substitution qui l'emporte sur l'effet revenu puisque l'augmentation
des taux d'intérêt servis sur les dépôts
consécutive à la libéralisation financière
entraînerait une hausse de la demande de biens de consommation, qui
à son tour fera monter l'inflation qui affecterait négative la
croissance économique.
Bien que Taylor [1983] signale le caractère
compétitif des marchés informels : ces marchés sont
souvent «complétifs et agiles» (op.cité.page 10), car
les modèles structuralistes restent basés sur cette
hypothèse ; ce qui ne correspond pas tout à fait à la
réalité. En effet, un certain nombre de problèmes se pose
vu qu'une autre caractéristique des modèles néo
structuralistes est qu'ils ne font pas de différence entre les
investissements productifs et les investissements non efficients (non
productifs) qui eux accroissent les coûts du crédit. De plus en ce
qui concerne l'hypothèse d'efficacité du secteur
informel dans l'allocation des ressources et la constitution
systématique de réserves obligatoires par le système
bancaire elles paraissent peu satisfaisantes. Même si nous convenons avec
eux que la contribution du secteur informel à l'augmentation du revenu
national reste indéniable dans beaucoup de PED. Il est estimé
à près de 40% du PIB du Burkina-Faso par exemple, cependant il
n'y pas de secteur financier informel homogène. On parle
plutôt d'une multitude de micro-marchés qui force est de le
reconnaître on peut de rapport entre eux et prennent diverses formes
(tontines, préteurs individuels....). Par conséquent, il parait
compliqué de parler de taux d'intérêt unique
d'équilibre sur ce secteur non officiel car il n'est pas
homogène. G. Christensen [1993] qui tente de montrer que le secteur
financier informel n'exerce pas réellement d'activité
d'intermédiation financière. Par ailleurs, pour ce qui est de
l'intermédiation bancaire, il faut noter qu'elle exerce par le canal de
deux fonctions que sont : la mobilisation de l'épargne et le financement
de l'activité (prêts d'investissement.). En effet, elle transforme
les ressources courtes en emplois long tandis que les intermédiaires du
marché informel ne remplissent pas cette condition car les prêts
du secteur informel ont une maturité courte et sont d'un faible montants
ce qui induirait des coûts de transactions élevés.
Cependant, on constate toutefois une relative spécialisation de leur
part dans l'activité de collecte de l'épargne et de
l'activité de prêts.
Kapur [1992] estime que les réserves détenues
par le secteur formel, contrairement aux conclusions des néo
structuralistes sont un gage de liquidité à court terme et donc
sources de sécurité supplémentaire pour le système
officiel. Car lui procurant un avantage de liquidité, et que si le
secteur informel souhaite accroître sa sécurité, il doit
lui aussi constituer des réserves. Il rajoute qu'en l'absence de
réserve, les agents courraient un risquent d'illiquidité
élevé qui
expliquerait le haut niveau des taux d'intérêt
sur le marché informel. Ce qui le conduit à pensé que dans
une économie où le secteur financier formel est
déchargé de ses contraintes, les agents vont posséder
à la fois des actifs du secteur non officiel (moins liquides mais mieux
rémunérés) et des dépôts bancaires. Les
idées de Kapur nous semblent judicieuses dans la mesure où elles
mettent en évidence la complémentarité entre les secteurs
financiers officiels et informels.
Kapur avance trois arguments en faveur du secteur informel qui
constitue ses principaux avantages :
· sa bonne implantation géographique dans les zones
où il est difficile au secteur bancaire officiel de s'implanter compte
tenu des coûts.
· L'absence d'asymétrie d'information
entre prêteurs et emprunteurs dans la mesure où les prêts ne
sont accordés qu'aux individus membres de la communauté (village,
quartier...) où l'information circule très vite.
· Enfin, la faiblesse du risque d'aléa de
moralité car le mauvais débiteurs risquent l'exclusion pure et
simple de la communauté.
En définitive, au delà des oppositions
d'approche entre le courant néolibérale et celui des néo
structuralistes sur le bien fondé ou non de la libéralisation
financière en tant que facteur accélération de la
croissance, il faut convenir avec Cho [1990], que « les deux approches ne
s'a~~rontent pas sur la libéralisation, mais sur l'approche de celle-ci
»12. Mais plutôt sur le secteur à favoriser le
développement compte tenu de l'efficacité qu'ils accordent de
manière différente à chaque secteur financier. Les «
Mac Kinnoniens » veulent qu'en à eux permettre le
développement du secteur bancaire tandis que les
néo-structuralistes veulent qu'ils en soient du secteur non-officiel.
Compte tenu de l'application effective de la
libéralisation financière, nous aurons ultérieurement
l'occasion d'apprécier son impact réel du développement de
cette politique dans les pays où elles été mise en place.
Car comme nous le signalions, les recommandations de Mac Kinnon et Shaw ont
reçu un écho très favorable aux près des
institutions internationales tels que le Fmi et la Banque mondiale qui ont vu
un moyen efficace de sortir un certains nombre d'économies du sous
développement. (Exemple l'argentine dans le milieu des années 70,
suivie de la chili pour ne citer que cela).
Cependant, il faut souligner que les nouvelles approches de
la libéralisation financière tiennent compte maintenant des
imperfections qui règnent sur les marchés financiers
12
1990, p447
(Asymétrie d'information, sélection
adverse...), Mac Kinnon « admet donc que l'administration des taux peut
avoir lieu même si les taux peut se justifier dans certaines conditions
et que le développement économique peut avoir lieu même si
les taux sont régulés» (op. cité Demetriades (1993)
,298).
King et Levine [1992,1993] à partir d'un modèle
de croissance endogène « schumpétérien
»13d'intermédiation financière, soulignent
l'importance du facteur financier sur la croissance et le
développement.14En somme, avec la libéralisation, on a
le principe que le développement financier peut conduit au
développement et contrairement à l'approche traditionnelle de
celle-ci, la monnaie et le capital puissent être complémentaire
que substituables dans une économie peu monétarisé. De
plus que le développement du secteur financier puisse accroître le
bien être des agents.
Du coup, comment expliquer, sans se référer
à la répression financière, la concomitance d'une
épargne bancaire nette et d'un rationnement du crédit ?