Les conditions de fonds propres minimums peuvent se
révéler coûteuses à moins que l'institution ne soit
parvenue à l'autosuffisance financière, car il lui sera difficile
dans un premier temps d'attirer les investisseurs et de contracter les emprunts
commerciaux juste après sa transformation. A ce titre, les
expériences montrent que la transformation résout une partie des
problèmes liés au financement mais ne fait pas attention aux
problèmes de propriété et de gouvernance qui en
découlent ou qui sont sous jacent. De plus, les IMF sont
confrontées à des problèmes d'administration liés
à leur transformation. En effet, lorsqu'une institution se crée
en tant que ONG, on sait que la participation des membres au conseil
d'administration ne procède pas à la recherche d'un gain
pécuniaire mais plutôt à une volonté
d'accroître leur compétence et leur image de marque ou prestige.
De fait des conseils sont parfois composés de représentants du
secteur privé aminé par une forte volonté de
responsabilité sociale à l'égard de la clientèle
ciblée ou parce qu'ils se sentent redevable de la société
de manière générale.
La transformation en intermédiaire financier implique
pour le conseil d'assumer de nouvelles responsabilités juridiques. Nous
pouvons nous interroger si les membres du conseil ont les compétences
requises pour administrer une institution financière plus
sophistiquée ? Sont- ils en adéquation avec les nouveaux
objectifs du nouvel établissement qui combine mission sociale et la
recherche du profit?
De façon générale, cela pose
d'énormes difficultés aux membres du conseil qui comprennent mal
la nécessité de concilier les deux objectifs. Ainsi, la
composition globale du conseil doit refléter un équilibre entre
ces deux objectifs.
Le terme gouvernance est d'un usage récent dans le
monde du développement. La gouvernance au-delà des effets de mode
ou de nouveauté est devenue un concept incontournable depuis des
années 90 pour traiter des problèmes de développement
économique et social. A l'échelle d'un pays, une bonne
gouvernance conduisant à une gestion efficace des organisations et
activités, repose sur un certain nombre de principes de droit, de
participation directe (par le biais d'institutions légitimes et
démocratiques), de transparence (libre circulation de l'information et
possibilités d'y accéder pour le plus grand nombre),
d'équité, de responsabilisation, de décentralisation et de
légitimité.
Les aspects théoriques de la gouvernance s'appuient
essentiellement sur les notions de la théorie
néo-institutionnelle. En effet, la séparation entre la gestion de
l'entreprise et sa propriété entraîne un problème
d'agence et des conflits d'intérêts possibles entre les dirigeants
et un actionnariat dispersé ou entre actionnaires exerçant le
contrôle. En outre, en l'absence de mécanismes de
régulation, la séparation de la propriété et du
pouvoir laisse aux dirigeants salariés responsables de la gestion une
grande latitude pour poursuivre leurs objectifs spécifiques
indépendamment de ceux de l'entreprise. Le but sera alors d'identifier
les risques de comportements opportunistes (moral hasard), d'encourager les
mécanismes de régularisation c'est-à-dire de marché
et le contrôle interne exercé par différentes parties
prenantes, ainsi que de réduire les asymétries d'information dont
jouissent les managers internes et enfin de compte de favoriser la mise en
place de systèmes d'incitations et de rémunérations
conduisant ces derniers à poursuivre les objectifs de l'entreprise.
L'étude de la gouvernance en microfinance est encore
récente, et s'inscrit dans un cadre de réflexion large de
rapports de pouvoir et d'intérêts au sein de projet de
développement. Dans les écrits de la microfinance, le terme
gouvernance, popularisé à partir de 1996[Clarkson, Deck, 1996] se
concentre sur le rôle et le mode de fonctionnement du conseil
d'administration des IMF. La gouvernance est définie comme « le
processus utilisé par le conseil d'administration pour aider une
institution à remplir sa mission et protéger l'actif de cette
institution au fil des années» [Rock et al. 1998] .Or le « bon
fonctionnement » du conseil d'administration n'est pas lui seul le garant
de la mission et des actifs d'une IMF. L'étude sur la gouvernance dans
le cadre des IMF nécessite d'être élargir pour prendre en
compte l'ensemble des acteurs enjeu (salariés, dirigeants, clients,
bailleurs, banques partenaires, Etat etc.) et des formes d'organisations
destinées à « gouverner » (systèmes comptables
et d'information, mode de prise de décision et modes d'organisation,
capacité d'exécution, systèmes de contrôles,
etc.).
Il s'agit alors de comprendre comment ces
éléments peuvent être combinés dans des contextes
socio-économiques différents. Comment les IMF étendent
leur portée, augmentent leurs actifs, à travers une gestion
claire, transparente et surtout efficace. La gouvernance est alors une
préoccupation forte pour les IMF. Par ailleurs, la gouvernance est
identifiée comme une cause majeure des crises récentes des IMF et
constitue une priorité dans leur réussite. En outre, les
critères de performance de la gouvernance jugent alors des
capacités à définir les grandes orientations, à
tenir le cap (notamment pour la microfinance public concerné, les
produits financés et le type d'institution), à s'adapter
rapidement aux modifications de l'environnement et surmonter les crises.
Toutefois, les auteurs évoquent cependant les
responsabilités insuffisantes des acteurs, la confusion de la
propriété ou encore le flou et la complexité des processus
de décisions comme des facteurs qui amplifient les crises des IMF. En
effet, les études de cas font apparaître, à partir des
échecs, des crises et aussi des réussites, un socle commun de la
gouvernance, condition sine qua non d'un bon pilotage de l'institution. Ce
socle commun s'identifie au niveau des « techniques d'information »
et des « principes d'organisation ». Pour ce qui concerne les
techniques d'information, on peut relever qu'aucune IMF ne fonctionne
convenablement sans une comptabilité efficace, rapide, fiable et un
système de suivi-évaluation, de contrôle interne et externe
qui valide la qualité des informations. Les principes d'organisation
sont assez classiques et ne sont pas spécifiques à la
microfinance. Comme nous l'avons déjà souligné il s'agit
en autres de la clarté des objectifs ou des missions à moyen
terme, de la cohérence entre les objectifs, activités et moyens
avec une claire répartition des taches et des responsabilités
(organigramme, degré de dégradation, décentralisation,
profil de postes, etc.), la politique de ressources humaines (niveau
adéquat de recrutement, formation, niveau de salaire, etc.),
système d'incitations positives (promotion, prime etc.) et
négatives(sanctions, licenciement, etc.), modes de coordinations, modes
de contrôles. Tout existe dans la littérature du management mais
est peu adapté ou peu enseigné dans la réalité des
IMF en Afrique car souvent centré sur les grandes entreprises
américaines et européennes.