DEUXIEME PARTIE :
PRESENTATION, ANALYSE ET DISCUSSION
DES RESULTATS
Chapitre 3 : Procédés traditionnels de
transformation, qualité microbiologique et commercialisation de l'huile
de palmiste dans la région maritime
Section 1 : Transformation traditionnelle des noix de
palmiste en huile de palmiste et la qualité microbiologique de
l'huile
1.1 Transformatrices
La transformation traditionnelle des noix de palmiste en huile
de palmiste est une activité exclusivement réservée aux
femmes. En effet soit 100% de nos enquêtées sont des femmes. Ces
dernières ont appris le métier de la transformation auprès
d'une parente : mère (60%), grand-mère (20%), ou une autre proche
parente (20%). Elles ont une moyenne d'âge de 43,5 ans. Le taux de
scolarisation de cette population est de 20% et ne dépasse pas le cours
primaire. Les 80% restants n'ont jamais mis pied à l'école.
1.2 Technologie traditionnelle de transformation
Il existe sur le terrain une seule procédure
traditionnelle de transformation. Les techniques de cette technologie
diffèrent dans leur exécution par le degré de
modernisation des moyens de production. L'étude actuelle est faite
auprès des transformatrices disposant de moyens rudimentaires. Dans ce
cas, l'extraction se fait par la cuisson d'une pâte d'amande à une
température avoisinant les 100° C et les transformatrices ne
possèdent même pas une presse artisanale. Avec ces moyens
rudimentaires, la durée de la transformation varie de trois jours
à une semaine et même plus en utilisant des noix de palmiste non
concassées. Les étapes de la transformation sont : la
réception, le séchage et le concassage des noix de palmiste, le
triage des coques et des amandes, le lavage et le séchage des amandes,
la torréfaction des amandes, la mouture, l'extraction proprement dite de
l'huile. Il est à noter que le concassage n'est plus totalement la
charge des transformatrices elles-mêmes. Il se vend de plus en plus des
noix préalablement concassées par un groupe de personnes devenant
incontournables dans le processus de transformation.
1.2.1 Réception et séchage des noix de
palmiste
Les transformatrices affirment acheter leurs matières
premières principales sous forme de noix (c'est-à-dire l'amande
entourée d'une coque) ou sous forme d'amande (c'est-à-dire la
noix débarrassée de sa coque). Quand il s'agit des noix, elles
sont séchées pour permettre une diminution du taux
d'humidité afin qu'elles soient facile à concasser.
Elles affirment aussi qu'une huile de bonne qualité
doit provenir des amandes de qualité (amandes non blessées) lors
du concassage. Les noix sont réceptionnées dans des sacs de jute
ou des sacs d'engrais. Quand il s'agit plutôt des amandes, elles sont
triées, lavées puis séchées avant de passer
à la torréfaction. Le séchage des noix se fait à
même le sol et celui des amandes sur des espaces protégés
du sol (un terrain cimenté, une bâche étendue au sol, un
panier,...) à la température ambiante. Dans le premier cas, il
permet une diminution de l'humidité des amandes qui s'enlèvent
plus facilement des coques. Ceci permet d'éviter des écorchures
sur les amandes lors du concassage et d'avoir ainsi une huile de bonne
qualité. Dans le second cas, le séchage permet
l'assèchement des amandes humidifiées lors du lavage afin de
minimiser la quantité d'énergie à utiliser pour la
torréfaction.
1.2.2 Concassage des noix
Il s'agit d'une opération qui consiste à
libérer l'amande de la coque. Elle peut se faire manuellement ou
grâce à un concasseur. Dans le cas où elle se fait
manuellement, la noix est déposée sur une pierre de taille plus
ou moins grande et est cassée avec une autre pierre de taille plus ou
moins petite. Lorsque la coque se casse et libère l'amande,
l'exécutant de l'opération procède immédiatement au
triage en séparant les coques des amandes. Cette opération est
fastidieuse et requiert une grande patience à cause de sa longue
durée (une ou plusieurs jours selon la quantité). Dans le cas
où on utilise un concasseur moderne, l'opération se fait sous
forme de service payant. Elle prend quelques minutes à quelques heures
selon la quantité de noix à concasser. Quand on verse la noix
dans la trémie du concasseur, il en sort des amandes
mélangées à des débris de coques. Les
transformatrices procèdent elles-mêmes au triage en versant de
l'eau et du sable argileux sur le mélange de coques et d'amandes.
Après quelques temps, les amandes flottent à la surface de l'eau
alors que les coques restent dans le sable formant un dépôt au
fond du contenant. Les femmes recueillent alors les amandes avec de petits
paniers et les mettent à sécher à l'air libre.
Lorsqu'elles deviennent sèches, elles sont torréfiées.
1.2.3 Torréfaction
Elle consiste à verser les amandes
séchées dans une marmite portée au feu contenant une
petite quantité d'huile (photos 2, 3). On tourne
régulièrement les amandes dans l'huile pour éviter leur
carbonisation. On entend en ce moment des sons provenant des éclatements
d'amandes. Lorsque les amandes deviennent friables et prêtes à
être utilisées pour la suite de l'opération, les sons
d'éclatement ne se font plus entendre.
Elles sont alors recueillies grâce à un petit
panier et mises en refroidissement à la température ambiante
(photo 4). Il reste dans la marmite une huile de couleur noire
qui est aussitôt récupérée dans une bassine. Cette
huile est impropre à l'alimentation. Elle est utilisée par les
tradithérapeutes dans la composition de nombreux médicaments.
Cependant certaines transformatrices la mélange
à l'huile de palmiste obtenue à la fin de la transformation. Il
s'agit essentiellement des cas où l'huile est destinée aux
unités savonnières.
1.2.4 Mouture des amandes
Il s'agit de l'opération qui consiste à moudre
les amandes torréfiées au moulin. En effet l'on verse les amandes
torréfiées dans la trémie du moulin pour en tirer de la
pâte de palmiste (photo 6). Cette dernière sert
à l'extraction de l'huile proprement dite.
1.2.5 Extraction de l'huile
La pâte obtenue au moulin est mélangée
avec de l'eau dans une marmite portée au feu (photo 7,
8). La transformatrice se met alors à tourner le mélange
avec un bâton afin d'éviter la carbonisation de la pâte de
palmiste. A la température d'ébullition de l'eau soit 100°C,
l'huile commence par sortir des cellules de la pâte d'amande et flotter
à la surface de l'eau. Après 40 à 50 minutes, il
apparaît à la surface de l'huile des bulles de gaz permettant
à la transformatrice de savoir que l'huile est prête pour
être utilisée. Elle est alors écopée grâce
à une petite assiette ou à une petite calebasse et recueillie
dans une bassine (photo 5). Lorsque l'huile commence par se
raréfier, il se retrouve au fond de la marmite une pâte boueuse.
Cette dernière, séchée, constitue les tourteaux qui
serviront soit à l'alimentation animale, soit à servir de
combustible lors des prochaines transformations.
![](Transformation-traditionnelle-et-commercialisation-de-lhuile-de-palmiste-cas-de-la-region-maritime12.png)
![](Transformation-traditionnelle-et-commercialisation-de-lhuile-de-palmiste-cas-de-la-region-maritime13.png)
Photo 4 Photo 5 Photo 6
Photo 7 Photo 8 Photo 9
Photo 10 Photo 11 Photo 12
Photo 1 Photo 2 Photo 3
![](Transformation-traditionnelle-et-commercialisation-de-lhuile-de-palmiste-cas-de-la-region-maritime14.png)
N B : Photo 1 : Amandes de palmiste dans le
bol « Lomégban » ; Photo 2 : Amandes en
torréfaction ; Photo 3 : Transformatrice
procédant à la torréfaction des amandes ; Photo 4
: Amandes torréfiés et en refroidissement à l'air
libre ; Photo 5 : Huile de palmiste noire obtenue à la
torréfaction des amandes ; Photo 6 : Pâte de
palmiste ; Photo7 : Foyer à trois pierres avec la
marmite et le bâton qui sert à remuer le mélange ;
Photo 8 : Une transformatrice remuant le mélange de
pâte de palmiste et l'eau sur le feu ; Photo 9 :
Quelques unités d'huile de palmiste destinées à l'analyse
au laboratoire ; Photo 10,11 : Colonies de moisissures dans
une boîte de Pétri ; Photos 12 : Colonies de
levures dans des boîtes de Pétri
![](Transformation-traditionnelle-et-commercialisation-de-lhuile-de-palmiste-cas-de-la-region-maritime15.png)
Méthode 1
Torréfaction des amandes avec une faible
quantité d'huile (23< t° < 35°C)
Amandes friables séchées
Huile de couleur brunâtre
Pâte de palmiste (brune)
Cuisson à eau à t°>1 00°
Mouture des amandes
Huile (couleur noire)
Tourteaux
Huile de palmiste de blanche
Pâte de palmiste (blanche)
Mouture des amandes
Cuisson avec de l'eau à t°>1 00°C
Méthode 2
Réception des noix de palmiste
Séchage des noix de palmiste à la
température ambiante (28°C) pendant 48 heures au moins
![](Transformation-traditionnelle-et-commercialisation-de-lhuile-de-palmiste-cas-de-la-region-maritime16.png)
Concassage des noix de palmiste
![](Transformation-traditionnelle-et-commercialisation-de-lhuile-de-palmiste-cas-de-la-region-maritime17.png)
Obtention d'un mélange d'amandes et de coques
![](Transformation-traditionnelle-et-commercialisation-de-lhuile-de-palmiste-cas-de-la-region-maritime18.png)
Triage du mélange d'amande et de coques et lavage des
amandes
![](Transformation-traditionnelle-et-commercialisation-de-lhuile-de-palmiste-cas-de-la-region-maritime19.png)
Amandes de palmiste obtenues au séchage à
la température ambiante (2 8°C) pendant quelques heures
NB : La méthode 2 de la figure n'est plus
utilisée car les meuniers refusent de moudre les amandes de palmiste non
torréfiées à cause des dommages causés aux
cylindres des moulins.
1.2.6 Efficacité de la transformation
Les transformatrices utilisent 25 bols d'amandes de palmiste
pour obtenir 1 bidon d'huile de palmiste de 25 litres avec une marge d'erreur
de 3 litres due à la qualité productrice des amandes de palmiste
servant de matière première. Le bol utilisé pour la mesure
des amandes de palmiste est celui du maïs de Lomé appelé
couramment « Lomégban » (photo 12). Or le
contenu de ce bol pèse 2,3 kg lorsqu'il est plein et 1 litre d'huile
pèse 0,75 kg. Le rendement est de (0,75×100) / 2,3 soit 32%. Ainsi,
il est utilisé 2,3 kg × 25 = 57,5 kg d'amandes de palmiste pour
obtenir (25#177;3) × 0,75 kg = 18,75#177;2,25 kg d'huile de palmiste. Ces
valeurs observées auprès des transformatrices permettent d'avoir
un rendement de transformation de 32%. En outre, ces valeurs ont servi dans le
calcul des comptes d'exploitation des unités de production
rencontrées.
1.2.7 Conclusion partielle sur la transformation
traditionnelle des noix de palmiste en huile de palmiste
Les résultats de l'étude montrent que les moyens
utilisés dans la transformation traditionnelle des noix de palmiste en
huile de palmiste restent toujours très rudimentaires dans la
région Maritime. Cette situation peut s'expliquer par les
difficultés d'approvisionnement en noix de palmiste dans la
région. En effet il y a lieu de remarquer que NIOTO déploie de
grands moyens pour la collecte des noix de palmiste dans la région afin
d'assurer la rentabilité technique et économique de ses
installations. NIOTO recrute des agents collecteurs de noix de palmiste dans
les préfectures à forte présence de palmier à
huile. Ces agents disposent suffisamment de moyens financiers leur permettant
d'attirer par des prix intéressants les ramasseuses de noix de palmiste.
Ces moyens qui manquent cruellement aux femmes transformatrices traditionnelles
les obligent à rester à la traîne. En outre la plupart des
champs de palmier à huile sont peuplés par des palmiers à
huile naturels à faibles productions. Les propriétaires de ces
champs ne sont pas aussi sujets à de grandes incitations pouvant les
amener à mieux prendre soins des palmiers à huile afin
d'augmenter leur production. Il y a donc un besoin urgent de stimuler
l'industrie du palmier à huile à travers les planteurs de
palmiers à huile afin de permettre une disponibilité des
matières premières de cette industrie (cas des noix palmistes
pour l'obtention de l'huile de palmiste).
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