3.3.3. Analyse du contenu de la presse écrite dans
ses articles concernant les manifestations théâtrales
Quand nous avons demandé aux responsables des
théâtres de nous faire parvenir les articles de presse, nous
pensions inconsciemment aux articles critiques. Pourtant aucun
théâtre ne nous a envoyé que des articles critiques. Il
semble que les responsables de presse dans les théâtres aient
retenu chaque article paru, quel qu'il soit.
L'article d'information a-t-il supplanté l'article
critique ? C'est ce que pense François Roche qui se demandait, dans le
cadre des rencontres du Grand Jardin, s'il y avait
« encore une place, aujourd'hui, dans la presse
écrite, pour un commentaire critique sur la création artistique ?
»159
Parmi tous ceux qui nous ont été transmis, dans
leur majorité, les articles développent un point de vue critique.
Mais il est évident que nous ne disposons pas de
l'intégralité de tous ceux parus pour Gurs et
Learning Europa dans les sept villes de représentation.
Cependant, pour Gurs, sur quarante-sept articles publiés dans
les journaux à Séville, Nice, Luxembourg, Paris et Berlin,
vingt-quatre proposent un point de vue critique sur le spectacle, si minime
soit-il. Et pour Learning Europa à Hambourg et à
Francfort, sur dix-neuf articles, seuls cinq sont uniquement informatifs.
Comme, nous l'avons déjà expliqué
ci-dessus, pour la suite nous relèverons les critères repris dans
nos analyses en tableaux (selon Patrice Pavis) et nous terminerons par
l'application du schéma de W. Sauter.
3.3.3.1. Informations concernant le « contexte
culturel », la « théâtralité en contexte »
et la « culture du jeu »
D'une manière plus générale, nous
présentons ci-dessous quelques graphiques rendant compte de la place
réservée dans le contenu des articles, à l'information sur
les conditions de production de l'oeuvre. Ils se rapportent à ce que W.
Sauter nomme « le contexte culture ». Nous y montrons aussi l'espace
réservé à l'auteur, au metteur en scène et aux
acteurs, donc à « la théâtralité en contexte
». Nous prenons la mesure de l'information sur le texte (thème,
langue, forme) et sur la fable (contexte, personnages, résumé),
partie intégrante de notre histoire commune, relevant de nos habitudes
en matière de jeu. Tous deux s'intègrent donc dans « la
culture du jeu ».
Pour commencer, fort heureusement, pour Gurs et
Learning Europa, le titre du spectacle et le lieu de
représentation sont formulés dans 100% des cas160.
Dans ces articles d'opinion, il est très important, de
l'avis général, que le journaliste critique signe son texte. Si
c'est le cas, pour Gurs, à Séville, Nice et Berlin,
seuls 75% des
159 ROCHE, François dans Culture Europe : Revue de
presse internationale des professionnels de l'art et de la médiation
culturelle. Dossier « La chronique culturelle dans la presse
européenne », N° 45, hiver 2005- 2006, page 1.
160 Dans le tableau, pour l'article du Pac Hebdo
à Paris, le nom de l'auteur n'est pas pris en compte dans les calculs
car cette information ne se trouve pas dans l'article critique mais bien dans
l'interview le précédent (dans le même journal). Nous
pouvons établir la même remarque pour le lieu qui n'est pas
mentionné dans l'article du Luxemburger Wort du 17
décembre 2004, mais cet élément est renseigné dans
l'information publiée le jour précédent.
articles sont signés à Luxembourg et 43%
à Paris. Pour Learning Europa, à Hambourg, seul un avis
n'est pas signé, 57% portent la signature du journaliste et 29%
uniquement ses initiales. A Strasbourg, 75% des articles sont signés et
25% présentés par des initiales. À Wiesbaden, l'article
est signé mais pas à Luxembourg.
La question du titre de l'article nous a paru également
digne d'intérêt. En effet, le journaliste annonce souvent son avis
dans le titre. Pour Gurs, à Berlin, dans 100% des cas, les
titres sont originaux. À notre avis, les journalistes sont souvent
ouverts à la discussion sur un point particulier, sans oser
émettre un véritable jugement de valeur. En revanche, à
Luxembourg, 50% des articles proposent un titre original. Ils y annoncent un
avis, dans ce cas négatif. A Paris comme à Nice, dans la
majorité des articles, le titre de la pièce est
intégré systématiquement : Gurs ou
tragédie européenne, voire les deux, parfois suivi d'un
sous-titre annonçant le thème. Seul l'article Internet
Avoir-alire évoque un avis, négatif encore, dans son
titre. A Séville, trois articles sur quatre affichent un titre original
annonçant le thème ou un avis positif, négatif ou
nuancé.
Pour Learning Europa, 86% des articles de Hambourg
présentent un titre original qui se rapporte à un avis, favorable
ou non ; à un thème de réflexion sur la pièce
(« Les cris insupportables du voisin », « Dérangement
fort » « Le coeur du continent » « Ensemble » ; et un
sous-titre : « un agrandissement de l'est artistique ») , 100% des
titres à Francfort reprennent véritablement des
éléments marquants, des impressions générales sur
le spectacle (« La blague, la satire, sans signification plus haute »
, « Un petit pays de dormeurs heureux », « Une Europe sauvage
», « Nous construisons une cabane », « Un désordre
organisé »). L'article luxembourgeois se nomme, modestement «
Learning Europa ».
(1) Informations concernant la production de
l'oeuvre
Dans cette catégorie, nous verrons quels sont les
éléments concernant la production qui sont diffusés dans
la presse : les subventions accordées par Culture 2000, au programme
« Réfugiés », sur le thème «
Théâtre en Europe: miroir des populations déplacées
», organisé par le réseau de la CTE. Ces pièces (sur
commande) sont réalisées en coproduction avec plusieurs
théâtres membres de la CTE, ce qui permet de mettre en commun des
moyens financiers et artistiques. Les deux pièces ont été
jouées lors du septième Festival de la CTE à Nova Gorica
et sont ensuite parties en tournée dans les théâtres
producteurs, parfois invitées par d'autres.
+ Gurs, une tragédie
européenne
Il convient de rappeler que Gurs a été
jouée deux ans après sa création, à Paris et
Berlin. Il semble, en effet, que les informations concernant la production de
l'oeuvre se soient diluées au cours du temps. A Berlin, aucun article
critique ne mentionne les trois théâtres coproducteurs, omettant
même de préciser qu'il s'agit d'une coproduction, en passant sous
silence des actions de la CTE et de l'UE. A Paris, la situation n'est pas plus
glorieuse, puisque seul un article mentionne la CTE et le programme particulier
: « Théâtre en Europe: miroir des populations
déplacées », et deux (sur sept) précisent que le
texte de Jorge Semprún est une oeuvre de commande. Dans les trois autres
pays, la situation est plus homogène, bien que les informations les plus
complètes se trouvent à Séville, première ville de
représentation après Nova Gorica et seule ville où ce
festival est mentionné dans 25% des cas161. Séville
est aussi la seule qui précise que ce projet est en lien avec les
activités de l'Union européenne (dans 50% des articles). Nous
remarquons que le rôle de la CTE dans la production de cette
pièce, à travers un programme particulier, est mentionné
uniquement dans les pays membres du réseau (à Paris, un article
sur sept l'évoque). Il est également opportun de signaler
qu'à Séville, 50% des articles annoncent la tournée future
de la pièce dans les autres pays producteurs. Cette information est
réduite de moitié à Nice et atteint 0% à
Luxembourg.
Le tableau ci-dessous représente, en moyenne pour chaque
ville, l'espace occupé par ces informations dans les articles
critiques.
Luxembourg
Séville
Berlin
Paris
Nice
0% 2% 4% 6% 8% 10% 12% 14% 16% 18% 20%
0%
1,6%
Informations sur la production de
GURS
4,5%
3,0%
9,2%
+ Learning Europa
Cette pièce a été jouée uniquement
dans les six pays coproducteurs. Il est frappant de constater le fait que la
pièce est une coproduction entre six metteurs en scène de six
161 Aucune des autres villes ne le mentionne.
théâtres européens, chacun
accompagné de deux acteurs, est présenté dans 100% des cas
dans toutes les villes. Le nom des institutions théâtrales
participant au projet est uniquement mentionné à Luxembourg. Ces
théâtres font tous partie de la CTE. Pourtant ce réseau qui
a permis au spectacle d'exister n'est renseigné que dans 100% des cas
à Luxembourg, 71% à Hambourg et 25% à Francfort. Aucun
journaliste n'évoque le programme « Théâtre en Europe,
miroir des populations déplacées ». De plus, les subventions
accordées par l'Union européenne pour ce projet sont
signalées dans 14% des journaux à Hambourg et 25% à
Francfort, 0% à Luxembourg et Wiesbaden. Après la
représentation de Hambourg, la future tournée du spectacle, dans
les cinq autres villes, n'est annoncée que dans 29% des articles
à Hambourg, 50% à Francfort et 100% à Wiesbaden et
Luxembourg.
Dans le graphique ci-dessous, il apparaît clairement que
les journalistes luxembourgeois sont ceux qui réservent le plus d'espace
aux informations sur la production.
Luxembourg
Hambourg
Francfort
0% 10% 20% 30% 40% 50%
Informations sur la production de LEARNIG
EUROPA
10%
15%
46%
(2) L'auteur, le metteur en scène et les
acteurs
Dans cette section, nous regroupons les informations concernant
les personnes ayant participé à la création de la
pièce : les données biographiques, bibliographiques,
scénographiques, rôles précédents, leurs
réputations, leurs styles particuliers.
+ Gurs, une tragédie européenne
o Le nom de l'auteur
Jorge Semprún est inscrit partout. L'écrivain a,
en outre, l'honneur de voir apparaître quelques renseignements sur sa
biographie, ses oeuvres et sa réputation162. Comme nous le
visualisons dans le graphique, ceux-ci occupent en moyenne 15% de l'espace
à Séville dont il est originaire. Vient ensuite Paris, son lieu
de résidence actuel.
162 Sauf dans la presse parisienne.
C'est à Luxembourg que l'auteur semble le moins
populaire. A Nice, cette information est assez bien représentée.
Il faut ajouter que dans cette ville, deux articles sont
précédés d'une interview entièrement
consacrée à l'auteur163. A Berlin, l'auteur est
cité. On ne développe pas vraiment sa biographie mais les
journalistes insistent sur sa réputation européenne, ses
capacités à se mesurer au maître, Bertolt Brecht.
Luxembourg
Séville
Berlin
Paris
Nice
0% 5% 10% 15% 20%
Informations sur l'auteur: JORGE SEMPRUN
5%
7%
9%
10%
15%
+ Learning Europa
Armin Petras est à la base du scénario original
de Learning Europa. Son nom est présent dans tous les articles,
sans exception. En tant que metteur en scène, il est affilié au
théâtre de Hambourg, mais il est également auteur
dramatique, sous le pseudonyme de Fritz Kate. La presse locale (de Hambourg)
mentionne des éléments bibliographiques dans 14% des cas. 29% des
journalistes évoquent la réputation de cet homme de
théâtre. Aucune information de ce type n'est
développée dans les autres villes, les journalistes se contentant
de citer le nom du responsable du projet.
Luxembourg
4%
Francfort
1,3%
Hambourg
4%
0% 2% 4% 6% 8%
Informations sur l'auteur: ARMIN PET RAS
163 Le Pac Hebdo et Art jonction sont
précédés d'une interview.
o Le metteur en scène
+ Gurs, une tragédie
européenne
Daniel Benoin est uniquement mentionné à 100%
à Nice, sa ville d'origine, à 86% à Paris164,
67% à Berlin. Au Luxembourg, seul un article y fait allusion. A
Séville, le metteur en scène est cité dans les
informations générales, en début ou fin d'article. De
plus, aucun écrit ne fait mention de sa biographie, de sa
scénographie, sa réputation 165 ou de son
style166. La situation des assistants du metteur en scène,
est encore plus triste (75% à Séville, 25% à Nice -dont
ils sont originaires - mais seulement 14% à Paris et 0% à
Luxembourg comme à Berlin). Le plus souvent, ils sont cités dans
un cadre informatif reprenant tous les artistes ayant participé à
l'événement.
Le tableau ci-dessous nous permet de remarquer que, si le
metteur en scène et ses assistants sont plus populaires à Nice et
souvent mentionnés, c'est à Paris que les journalistes leur
accordent le plus d'espace. Notons également que deux articles
niçois éditent une photo du metteur en scène, l'un pour la
représentation de Nice, l'autre avant celle de Paris, où l'on
voit le metteur en scène en compagnie de l'auteur, Jorge Semprún.
La visibilité de l'artiste, dans les journaux français, est sans
doute à mettre en relation avec le fait que les critiques
s'intéressent principalement aux artistes locaux.
Luxembourg
Séville
Berlin
Paris
Nice
0% 1% 2% 3% 4% 5%
informations sur le metteur en scème: DANIEL
BENOUIN
1,2%
1,4%
1,6%
3,0%
4%
+ Learning Europa
La particularité du projet Learning Europa est
que le metteur en scène est différent dans chaque ville. Pour
Hambourg, il s'agit d'Annette Pullen. Son nom est cité seulement
164 Seul un article de l'Impact Medecin omet cette
information.
165 Seul un article du Pac Hebdo à Nice
évoque sa réputation en parlant du « vrai metteur en
scène ».
166 Mis à part un article du Lëtzebuerger
land qui parle de la « griffe du metteur en scène ».
dans 43% des articles critiques, mais ils ne
développent aucunement sa biographie, ni ses travaux
précédents. Seul un article informatif mentionne trois mises en
scène antérieures. A Francfort, le metteur en scène est
Turneim qui n'est évoqué que par un journaliste, sans aucun
détail supplémentaire. A Luxembourg, le critique épingle
le nom du metteur en scène, Beryl Koltz, mais sans plus, comme à
Francfort. Notons que dans Die Tageszeitung, une photo
présentant les six metteurs en scène accompagne l'article.
Le tableau ci-dessous se passe de commentaires. Signalons
toutefois, que de nombreux journalistes allemands connaissant Armin Petras et
son originalité se méprennent et annoncent ce dernier comme
metteur en scène de la pièce. Nous n'avons pas
comptabilisé cette information erronée.
Luxembourg
Hambourg
Francfort
0% 1% 2% 3% 4% 5%
Informations sur les metteurs en scène Annette
Pullen, André Turheim et Beryl Kolz
0,3%
0,6%
2%
o Les acteurs
+ Gurs, une tragédie
européenne
Parmi tous les articles critiques dont nous disposons, aucune
ville ne cite dans 100% des articles les six acteurs167 et quand ils
y sont, c'est souvent dans un cadre informatif situé en début ou
fin d'article. La Française Sophie Duez est nommée à Nice
et à Paris, alors que les Luxembourgeois parlent de leurs acteurs,
Germain Wagner et Patrick Hastert. Les Espagnols n'épinglent, parmi
leurs trois acteurs enrôlés dans le projet, que Manuel Seda.
Notons cependant, que la réputation de Sophie Duez semble un petit peu
plus européenne puisqu'elle est également mentionnée
à Séville et à Luxembourg. Nous n'avons rencontré
aucun article présentant brièvement la carrière d'un ou
des comédiens. Seuls deux articles sur vingt-deux annoncent la
distribution dans la pièce.
167 Les acteurs sont tous cité dans 75% des cas à
Séville, 50% à Nice, 25% à Luxembourg, 14% à Paris
et 0% à Luxembourg et à Berlin, souvent dans le cadre
informatif.
Le tableau ci-dessous permet de se rendre compte du faible
espace consacré uniquement à la mention du nom des acteurs. Et de
nouveau, les autochtones sont cités dans quelques journaux
régionaux.
Luxembourg
Séville
Berlin
Paris
Nice
0% 1% 2% 3% 4% 5% 6%
Informations sur les acteurs dans
GURS
0,6%
1,9%
2,0%
2,8%
5,3%
+ Learning Europa
A Francfort et Luxembourg, tous les articles évoquent
les comédiens. Ils sont douze et tous issus, par couple, des
théâtres participant au projet. En revanche, cette information
n'est visible que dans 57% des articles hambourgeois. Le nom des acteurs est
encore moins visible que pour Gurs : quelques noms (entre deux et
cinq) apparaissent dans 29% des articles de Hambourg, 50% à Francfort et
100% à Luxembourg. Notons que le nom des acteurs locaux est souvent
mentionné dans les articles de la même ville, d'autant que le
projet leur accorde un rôle de médiateurs entre la scène
multilingue et la salle. L'identité des autres acteurs est écrite
en légende des photos, (et il s'agit, le plus souvent, d'acteurs «
étrangers »)168 ou s'ils ont particulièrement
séduit le journaliste. Comme pour Gurs, aucun article ne fait
référence à la carrière des acteurs, à leurs
formations....
Dans le tableau ci-dessous, nous constatons que c'est au
Luxembourg que l'information sur les acteurs est la plus précise. Nous
devons nuancer cette observation car tous les acteurs sont cités dans le
texte, avec entre parenthèses le théâtre auquel ils sont
affiliés. Cette description succincte occupe, en effet, une place
importante dans l'article.
168 Notons que dans deux journaux de Francfort, la
légende qui accompagne la photo des acteurs ne donne pas leur nom, mais
seulement leur nationalité : Frankfurter Rundschau Kultur
RheinMain et Frankfurter Neue Presse Kultur.
Luxembourg
Hambourg
Francfort
Infomations sur les acteurs dans LEARNING
EUROPA
0% 2% 4% 6% 8% 10%
2,3%
3%
6%
(3) Le texte dramatique
Nous chercherons si les principales caractéristiques se
retrouvent dans les articles. A savoir, s'il y a plusieurs langues, un
thème spécifique, un genre particulier, la forme de texte.
+ Gurs, une tragédie
européenne
Quant au texte dramatique, le thème
est développé partout, seul l'article du « Berliner Zeitung
» fait l'impasse. Que le texte soit en plusieurs langues est
également bien représenté (100% à Séville,
75% à Nice, 71% à Paris, 50% à Luxembourg), sauf en
Allemagne où cette spécificité n'est reprise que dans le
Tagesspiegel.
Les commentaires sur la forme dramatique que Semprún a
donnée à son texte sont assez confus. A Séville, les
journalistes critiques qualifient l'oeuvre de pédagogique, de
pièce à thèse. Les Français évoquent son
didactisme. Seul l'article du Pac Hebdo développe largement le
genre du Lehrstück, forme officielle du texte. Au Luxembourg, cette
particularité n'est pas évoquée. A Berlin, la pièce
a été donnée dans le cadre de la Fête de Brecht
à qui Semprún emprunte la forme de son texte, et ce fait est
évoqué dans 67% des cas. Il nous semble évident que cette
forme est mieux connue en Allemagne qu'ailleurs, mais cela ne
mérite-t-il pas justement une information plus importante ? Les
journalistes ne semblent pas de cet avis. La mention du genre de la
pièce est assez imprécise. En effet, certains journalistes
semblent confondre le sous-titre de la pièce « tragédie
européenne » avec le genre de la tragédie. Cependant,
d'autres considèrent que Gurs est une tragédie par
rapport au sujet sombre qu'elle évoque.
Nous devons spécifier que le graphique ci-dessous rend
compte des trois catégories précédentes globalement.
Nous pouvons affirmer qu'en Allemagne, où cette section est
majoritairement représentée, c'est l'information
sur la forme dramatique brechtienne qui est la plus
développée.
Luxembourg
Séville
Berlin
Paris
Nice
0% 5% 10% 15% 20% 25%
Informations sur le texte de JORGE SEMPRUN
2%
8,1 %
14%
14%
21%
+ Learning Europa
Comme pour Gurs, le thème est
l'élément le plus souvent invoqué dans les commentaires :
100% à Hambourg, à Wiesbaden et Luxembourg, et 50% à
Francfort. Contrairement à Gurs, la particularité d'un
spectacle en plusieurs langues est très peu mise en évidence dans
la presse critique : seulement deux journalistes, l'un de Hambourg et l'autre
de Luxembourg signalent que les langues utilisées sont celles des
acteurs issus de six pays européens. De plus, celles-ci sont
plutôt inhabituelles puisqu'il s'agit du slovène, slovaque,
lituanien, et bien sûr, de l'allemand. La pièce est jouée
sans surtitrage. Les Allemands seraient-ils plus ouverts à ce genre de
pratique, au point qu'en faire la remarque ne les effleure même pas?
C'est à approfondir.
Par contre, la mention d'une forme dramatique
particulière est beaucoup plus présente que dans les articles
consacrés à Gurs. N'oublions pas que Learning Europa
est une approche expérimentale et chacun, quelle que soit sa
culture, peut s' en rendre compte. En effet, on apprend que la pièce est
constituée de dix-neuf tâches pour lesquelles Armin Petras a
prescrit le matériel multidisciplinaire à utiliser : danse,
vidéo, jeu de théâtre, chant. Toutes les scènes sont
minutées. Dans chaque ville, les acteurs du théâtre
hôte endossent un rôle de médiateur. Cette information est
relayée dans 100% des cas à Luxembourg et Wiesbaden, 75% à
Francfort et 86% à Hambourg. Le genre du texte est également
assez bien précisé. De l'avis des journalistes, il s'agit d'une
pièce expérimentale, une non pièce, un jeu
international... Cette information est diffusée par le journaliste de
Wiesbaden, par 50% des journalistes de Francfort et par 43% de ceux de
Hambourg.
Luxembourg
Hambourg
Francfort
0% 5% 10% 15% 20%
Informations sur le texte de ARMIN PETRAS
7%
9%
13%
(4) La fable
Pour ce qui concerne la fable, nous retiendrons la mise en
contexte, la présence d'un résumé général,
la présentation des personnages... .Cependant, pour Learing Europa,
seul existe le résumé de l'oeuvre.
+ Gurs, une tragédie
européenne
Concernant la fable, le contexte général est
donné partout, dans 100% des articles, seul celui du Berliner
Zeitung fait l'impasse, intégrant cet élément dans le
résumé de l'histoire. Les journalistes allemands
développent très largement et précisément
l'intrigue. Au contraire, à Séville, les articles évoquent
tous le contexte historique, de manière plus ou moins précise
mais ne donnent aucune explication relative à l'intrigue. Entre le 0%
espagnol et le 100% allemand, Nice et Paris consacrent un espace variable au
développement de la fable (entre 1 et 23 lignes dans Pac
hebdo), soit 71% des articles parisiens et 75% des niçois. Les
Luxembourgeois évoquent la fable à 50%, occupant entre 6 et 14
lignes. La présentation des personnages fictifs est un peu plus
homogène : elle s'échelonne de 100% à Séville
à 43% à Paris. Nice et Luxembourg diffusent cette information
à 75% et Berlin à 67%.
En somme, comme le montre clairement le graphique ci-dessous,
l'espace consacré à la présentation de la fable est
important partout.
Luxembourg
Séville
Berlin
Paris
Nice
0% 10% 20% 30% 40% 50%
Informations sur la fable de GURS
11%
24%
32%
46%
42%
Luxembourg
Hambourg
Francfort
Informations sur la FABLE pour LEARNING
EUROPA
0% 20% 40% 60% 80% 100%
24%
62%
79%
+ Learning Europa
Nous ne pouvons pas aborder « la fable » de
Learning Europa de la même manière que celle de
Gurs étant donné sa forme dramatique. Il n'existe pas
véritablement d'histoire dans ce spectacle. Nous n'avons donc aucun
élément de contexte ou de présentation des personnages.
Cela est imputable à la forme de la pièce et non à une
omission du journaliste. Cependant, nous avons considéré la
description des nombreuses tâches composant le spectacle comme un certain
type de fable. Nous avons donc comptabilisé ces informations dans le
résumé de l'oeuvre. Cette dernière est d'ailleurs
représentée à 100% à Wiesbaden et Luxembourg, 75%
à Francfort et 71% à Hambourg et occupe une place de choix dans
les articles comme en témoigne le graphique.
(5) « Contexte culture », «
théâtralité en contexte » et « culture des jeux
»
50%
45%
40%
35%
30%
25%
20%
15%
10%
5%
0%
Production des oeuvres
Tableau récapitulatif des informations
générales sur GURS
Auteur Metteur en scène Les acteurs Le texte La fable
Séville
Nice Luxembourg Paris
Berlin
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
La production des oeuvres
Tableau récapitulatif des informations
générales pour LEARNING EUROPA
Auteur Metteur en scène Les acteurs Le texte La fable
Hambourg Francfort Luxembourg
Dans les articles d'information mais aussi dans les critiques,
nous trouvons les mêmes éléments informatifs: fable, texte
dramatique, auteur, metteurs en scène, acteurs. Ils sont souvent issus
des communiqués de presse, d'interviews données par les
organisateurs, l'auteur, les comédiens ou des responsables politiques
soutenant l'événement. Nous retrouvons souvent, à peu de
choses près, les mêmes que sur les affiches et les papillons
publicitaires. Ces constatations poussent d'ailleurs Fabrice Larceneux à
dénoncer, en 2001,
« la participation directe de plus en plus fréquente
des critiques au système promotionnel des oeuvres
»169.
La « hiérarchie » des informations est
également la même dans les articles critiques et d'information :
en tête, l'auteur, la fable et le texte, à la fin, le metteur en
scène et les acteurs170. De plus, il est intéressant
de noter que, bien que notre démarche comme notre matériel soient
différents, Pascale Palmer et Jérémie Siska, arrivaient
aux mêmes conclusions171.
Notons que l'information dispensée par les articles
n'est pas toujours à considérer comme une valeur sûre. En
effet, nous avons rencontré au fil de nos analyses quelques erreurs.
Ainsi les Espagnols considèrent parfois Daniel Benoin comme le metteur
en scène affilié au théâtre de Luxembourg au lieu de
Nice. Mieux encore, ils ont rebaptisé le protagoniste historique de
Gurs, Hans Gunde au lieu d'Ernst Bush ! Pour Learning Europa,
comme nous l'avons déjà expliqué, la principale erreur des
journalistes est de considérer Armin Petras comme metteur en
scène alors qu'il n'est que le concepteur du projet et son
coordinateur.
Tous ces éléments, extérieurs à la
communication théâtrale, influencent la réception du
spectateur, la compréhension de l'intrigue, son jugement du spectacle.
Ils sont bien représentés. De plus, de nombreux articles leur
consacrent un petit cadre particulier reprenant ces informations et
également les points pratiques.
À Séville, notamment, trois articles sur cinq
offrent, avant le texte, l'équipe artistique et l'information pratique
élémentaire : le lieu de la représentation.
À Nice, la tendance est inversée : sur quatre
articles, trois ont recours au cadre informatif (que seul un journaliste ne
pratique pas172), avant le début du texte. Le dernier article
est quelque peu particulier. Publié dans un hebdomadaire (on line), il
apparaît après la fin des représentations niçoises
de Gurs et annonce la pièce à Luxembourg, en
précisant, et c'est le seul, le nom des acteurs. De plus, contrairement
aux autres articles, ces données sont indiquées en bas de
page.
169 DEBENEDETTI, Loc. Cit. p 3.
170 Les tableaux d'analyse concernant les articles d'information
se trouvent en annexe.
171 Nous joignons les résultats de leurs analyses en
annexe.
172 Le journaliste du Pac Hebdo.
À Luxembourg, la pratique des cadres informatifs n'est
pas courante. Seul le journaliste du Lëtzebuerger Land (1/4)
présente, en fin d'article, les membres de l'équipe artistique,
ainsi que le lieu de représentation. Et à Berlin, aucun
n'insère de cadre informatif.
A l'opposé, la pratique du cadre informatif est
pratiquement généralisée à Paris. Seul l'article
niçois consacré à la représentation parisienne fait
l'impasse. Plus étonnant encore, dans cette ville, seuls deux
journalistes y joignent des informations d'ordre « artistique ».
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