II. LES FACTEURS DE RISQUE
Dans le cadre des épidémies de choléra, les
déterminants sont tous les facteurs influençant favorablement ou
défavorablement l'évolution d'une épidémie (3,
24,29) :
2.1. DETERMINANTS ECONOMIQUES
Les grandes épidémies de choléra arrivent
toujours dans les pays pauvres du monde. Les épidémies de
choléra surviennent surtout dans les zones pauvres de ces pays, cumulant
plusieurs facteurs de risque : densité de la population,
promiscuité, dégradation des conditions d'hygiène,
problèmes d'assainissement et d'accès à l'eau potable.
2.2. DETERMINANTS DEMOGRAPHIQUES ET
SOCIOLOGIQUES
Les déterminants démographiques et sociologiques
sont favorisés par l'activité et le comportement humain. Parmi
ces facteurs, l'on peut citer :
o L'augmentation de la population : surtout dans les
grandes villes, associée à une paupérisation et une
urbanisation sauvage, constitue un facteur essentiel dans l'apparition
présente et future des épidémies de choléra ;
o Les mouvements de population : déplacements
de population à la suite de guerres, de catastrophes naturelles, de
famine favorisant l'émergence des épidémies de
choléra en zone d'endémie (la malnutrition, le stress,
l'épuisement, la promiscuité favorisent la contamination) ;
o Les grands rassemblements (pèlerinages,
fêtes, rites, coutumes) favorisant la promiscuité et le manque
d''hygiène constituent des déterminants habituels et connus d'une
flambée épidémique. Il suffit d'un cas importé par
avion et l'épidémie se propage vite. Les axes de communication de
l'épidémie de choléra sont toujours terrestres, maritimes,
fluviaux mais de plus en plus aériens.
2.3. DÉTERMINANTS GÉOGRAPHIQUES,
ÉCOLOGIQUES
Les déterminants géographiques et
écologiques entrant dans l'explosion du
cholera sont :
2.3.1. Le climat
Le cholera se recrute le plus souvent en zone humide,
intertropicale, pendant la saison des pluies .C'est le cas de la région
des Grands Lacs en Afrique Subsaharienne et du delta du Gange qui sont, des
régions endémiques bien connues. Mais on peut aussi avoir des
épidémies de choléra en région
semi-désertique pendant la saison sèche. C'est le cas des
épidémies dans le Sahel, en Afrique, de 1970 à 1980, puis
en 1983.
2.3.2. La pluviométrie
L'arrivée de la saison des pluies ou de cyclones peut
favoriser l'émergence ou la recrudescence d'une épidémie
de choléra en région endémique humide. Toutefois, en
région sèche ou semi-désertique, l'arrivée de la
pluie peut arrêter l'épidémie de choléra en
dispersant la population, jusque là concentrée sur les rares
points d'eau et en permettant une meilleure hygiène.
2.3.3. La température de l'eau
Le vibrion se développe bien dans les eaux saumâtres
plutôt chaudes, mais survit aussi des années dans les eaux
profondes.
2.3.4. La température de l'air
Le vibrion cholérique est plus fragile à l'air
ambiant que dans son milieu aquatique habituel. Il peut toutefois survivre
quelques jours à la surface des fruits, légumes, poissons et
crustacés contaminés.
2.3.5. La topographie
Les épidémies de choléra débutent
habituellement par les zones côtières des pays, parfois autour des
lacs. Les estuaires, les deltas, les marigots et les mangroves, avec la
présence d'eau saumâtre et de végétation aquatique,
sont les principales zones à risques. A partir de ces
zones, les épidémies diffusent vers tous les
terrains : plaines, plateaux, en zone montagneuse, et même en haute
altitude à des hauteurs de 2000 à 4000 mètres.
2.3.6. La nature du sol
Le terrain argileux toujours humide est un facteur aggravant :
l'eau stagne, les latrines débordent. Paradoxalement, un sol volcanique
constitué de lave qui favorise le ruissellement et l'infiltration dans
les nappes souterraines, peut être un facteur aggravant ; en effet, il
peut y avoir contamination de la nappe, donc des puits, en cas
d'épidémie de choléra.
2.3.7. L'écologie - l'environnement
Le changement des écosystèmes dû au
réchauffement de la planète, la pollution atmosphérique,
la déforestation entraînant des inondations, les
sécheresses ou autres catastrophes climatiques pourrait être
à l'origine de la recrudescence épidémique du
choléra. Ces facteurs environnementaux pourraient aussi favoriser
l'émergence de nouvelles souches de vibrio
cholerae.
De ce qui précède, il importe de stigmatiser le
fait qu'il n'existe pas de profil type climatique ou géographique pour
une épidémie de choléra. On peut voir des
épidémies de choléra sous de nombreux types de climats, en
montagne ou en zone désertique, etc.
2.4. DETERMINANTS SANITAIRES
Les déterminants sanitaires sont liés (3 ,24) :
- Au manque de ressources sanitaires du pays ;
- insuffisance de structures de santé, de personnel
soignant par ailleurs bien formé et de financement ;
- A la désorganisation des services de santé et
d'accès aux soins en cas d'épidémie de choléra ;
- Au manque de politique de santé bien définie ;
- A l'état de santé précaire de certaines
populations.
Le niveau sanitaire d'un pays est un déterminant
essentiel dans le contrôle d'une épidémie de choléra
et dans son extension. Elle est très facilement stoppée dans les
pays développés où les ressources sanitaires sont
suffisantes.
2.5. DÉTERMINANTS HISTORIQUES
Au début d'une épidémie de choléra
dans une région ou un pays, il est important de connaître
l'histoire des précédentes épidémies de
choléra, car elle permettra de comprendre plus vite les modalités
épidémiques, le cheminement de l'épidémie et le
comportement dés populations (3,24).
2.6. DÉTERMINANTS BIOLOGIQUES
Parmi les déterminants biologiques l'on distingue (3,24) :
2.6.1. Sensibilité génétique :
L'âge, le sexe n'interviennent qu'indirectement en
fonction du milieu social et des activités. Mais il existerait une
sensibilité génétique au choléra : un facteur
génétique dont le support pourrait être l'équipement
d'un individu en gangliosides intestinaux intervient certainement.
2.6.2. Facteurs biologiques favorisants :
La sensibilité individuelle à contracter la
maladie dépend aussi de la physiopathologie et du mode de contamination.
En effet, pour être pathogène, le vibrion doit passer la
barrière de l'estomac (l'acidité gastrique le détruit au
fur et à mesure). Deux conditions lui permettront d'atteindre le
jéjunum où il deviendra pathogène :
- une forte dose infectante (108 à
1011 vibrions/ml) ;
- un pH gastrique alcalin (chez les malades présentant une
hypochlorhydrie, les gastrectomisés, ...).
2.7. DETERMINANTS EPIDEMIOLOGIQUES
Les épidémies de choléra touchent des
communautés à immunité faible ou nulle. Dans un pays
vierge de choléra, la première vague épidémique
touche l'ensemble de la population, tous âges confondus, en fonction
surtout de ses activités.
Dans un pays ou une région d'endémie de
choléra où les vagues épidémiques se
succèdent, la population restante s'immunise plus ou moins et les
réémergences saisonnières ne concernent que les jeunes non
immunisés et les personnes ayant perdu leur immunité acquise.
2.8. DETERMINANTS ANTHROPOLOGIQUES
Les grands rassemblements favorisant la promiscuité et le
manque d'hygiène sont des déterminants importants d'une
flambée épidémique (3,24) :
· Les rites funéraires ;
· Les lieux de prières ;
· Les cérémonies occasionnant les grands
rassemblements ;
· Le rôle important de la médecine
traditionnelle est un facteur favorisant la diffusion et l'extension de
l'épidémie en retardant l'arrivée des malades et en
diminuant l'impact des messages de prévention.
L'approche ethnosociologique, la connaissance des pratiques
culturelles, les comportements et attitudes devront être
étudiés pour comprendre l'évolution de
l'épidémie et adapter au mieux la prévention.
2.9. DETERMINANTS POLITIQUES
Un climat d'instabilité politique, les guerres
chroniques engendrent des conditions de vie et d'hygiène
désastreuses, un appauvrissement du pays, une destruction des ressources
sanitaires et parfois un déplacement de la population. Tous ces facteurs
peuvent favoriser les épidémies de choléra.
CONCLUSION
L'émergence des épidémies de choléra
dans un pays ou une région donnée est donc, le résultat de
l'interaction de facteurs complexes liés.
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