4.4. Critiques et
remarques
9 patients sur 11 (82%) formulent des critiques à
l'égard du CRESOP : sur le contenu du programme lui-même pour
6 patients et sur d'autres points pour 6 autres.
Cependant, comme on va le voir, ces critiques portent
plutôt sur des améliorations à faire que sur une remise en
question du programme proposé par l'unité.
Les critiques sont systématiquement assorties d'un
contrepoint sur les bénéfices ressentis :
« Ça m'a chamboulé un peu quand même parce
que c'est bien mais... ce en quoi je croyais s'est effondré plus ou
moins. Par contre ça a renforcé des fois certains sentiments, sur
le respect dans la communication. » (4) ;
« Ben c'est un peu rébarbatif, parce que c'est souvent la
même chose mais on se rend compte qu'on a des facilités à
exécuter les exercices. Et dans la vie quotidienne ça m'a
vraiment servi... » (11)
Elles sont aussi toujours adoucies avec des modalisations du
type : un peu, pas tellement... : « Sinon, dans la
remédiation il y a des trucs plus ou moins rébarbatifs, des trucs
plus intéressants que d'autres, des trucs qui sont un peu
longuets. » (5) ; « Ce qui était
peut-être un peu difficile... » (9) ; ou par des
attitudes non verbales qui neutralisent le propos : « Les
tests, ça voilà, sont un peu déroutants
(rire). » (1).
Il ressort des entretiens qu'il n'est pas question pour les
patients d'attaquer le CRESOP qui est vraiment perçu comme un lieu
ressource.
Critiques sur les programmes de soin
(remédiation, groupe PACT)
|
Nb de patients
|
Autres critiques
|
Nb de patients
|
Difficulté (remédiation, tests)
|
4
(36%)
|
Manque de feed-back
|
3
(27%)
|
Un peu simpliste (remédiation)
|
1
(9%)
|
Bouleversant (PACT)
|
2
(18%)
|
Parfois rébarbatif (remédiation)
|
2
(18%)
|
Aspect pratique
(coûteux en temps, difficile d'accès)
|
2
(18%)
|
Pas assez personnalisé, pas adapté pour tous
(PACT, remédiation)
|
2
(18%)
|
|
Nombre total de patients qui formulent une ou plusieurs
critiques sur les programmes de soin
|
6
(54,5%)
|
Nombre total de patients qui formulent d'autres
critiques
|
6
(54,5%)
|
Nombre total de patients formulant des
critiques
|
9
(82%)
|
4.4.1. Critiques sur les
programmes de soins
6 patients (55%), font des remarques sur le contenu du
programme de soins lui-même.
La remédiation cognitive (pour 3 patients) et les tests
(pour 2) sont qualifiés de difficiles par 4 patients en tout :
« Les tests étaient difficiles et
éprouvants » (9) ; « La
remédiation c'était dur. Les exercices, ça demande
beaucoup d'attention et de concentration, c'est fatigant. Mais ça m'a
été utile c'est sûr. » (4) Cette
difficulté du programme est évoquée avec l'idée que
malgré cela ils y sont arrivés, et qu'ils ont pu progresser. Loin
d'être une critique, ce point est plutôt à mettre en lien
avec la notion de valorisation soulignée plus haut.
Programme PACT d'information sur la maladie
Fatigue
Plusieurs fois, lors du premier tour de table qui permet
de savoir comment vont les uns ou les autres, des patients ont parlé de
leur fatigue. « J'ai failli ne pas venir »,
disent-ils.
Juliet nous explique que parfois, l'angoisse
l'empêche carrément de sortir de chez elle. Elle a fait l'effort
de venir autant qu'elle a pu, parce que le groupe lui plaisait et qu'elle y
était à l'aise, puis, à la 8ème
séance, elle a arrêté de venir.
|
La remédiation paraît au contraire trop simple
pour le patient 5 : « Un peu surpris par la
simplicité du truc. Je m'attendais à un peu autre chose, à
des exercices plus travaillés, à quelque chose de plus
sophistiqué. ».
Comme le fait remarquer le patient 4 :
« Tout dépend des patients avec qui on se trouve. On
n'avance pas à la même vitesse. »
Programme PACT d'information sur la maladie
Dynamique de groupe
Une bonne dynamique de groupe s'instaure dès la
première séance. Une certaine
hétérogénéité ne nuit pas, au contraire. Les
échanges sont d'autant plus riches que les vécus sont
différents. Les tours de table permettent de repérer des points
communs. Les signes d'alertes par exemple, nous font repérer deux
groupes : ceux chez qui tout commence par un repli sur soi et ceux chez
qui apparaît plutôt une accélération (insomnie,
sentiment de toute puissance...). Romain et Farid sont de ce dernier groupe.
Ils ont remarqué au fil des séances qu'ils avaient beaucoup de
symptômes en commun, puis ils ont pu se poser directement la
question : « Tu as une schizophrénie dysthymique, toi
aussi ? ». A la suite de quoi Hervé a
enchaîné : « Moi, mon médecin m'a dit que
j'avais une schizophrénie paranoïde ».
Les patients se soutiennent et s'encouragent. Ainsi, quand
Hervé annonce finalement qu'il a repris son traitement, tout le groupe
le félicite.
Presque tous (sauf Roger...) souffrent de se sentir
toujours fatigués. C'est un point sur lequel le groupe se solidarise,
d'autant plus que certains de ses membres ont vécu des
expériences difficiles : proches qui ne comprennent pas,
difficultés au travail, difficulté à simplement se lever
le matin...
Les séances qui font intervenir des intervenants
extérieurs (et notamment les familles) sont des moments sensibles dans
lesquels le groupe est fragilisé. Ce sont des temps où les
animateurs doivent déployer une grande énergie pour renforcer des
défenses qui peuvent être mises à mal.
|
2 patients parlent plutôt du groupe PACT pour regretter
l'hétérogénéité des participants et auraient
peut-être eu besoin d'un programme plus personnalisé
: « On n'avance pas à la même vitesse. J'ai
l'impression d'être un avion et eux des escargots. Moi je veux aller trop
vite en fait. Je trouve qu'ils se complaisent dans leur souffrance :
« Je suis heureux dans ma souffrance même si ça
ne va pas. ». » (4) ; « C'est
comme à l'école, on apprend des généralités,
c'est pas du cas par cas. Chacun a sa propre expérience de la maladie,
ça n'apporte pas forcément de réponse à toutes les
questions qu'on se pose. On n'est pas enclin à parler devant tout le
monde de ses problèmes. » (11). Le patient 11
reconnaît ne pas être encore prêt à poser toutes les
questions qui le travaillent.
Il est assez intéressant que les patients puissent
être en demande de plus de personnalisation des activités. Cela
signe sans doute un investissement important de ces soins, pour lesquels ils
ont des exigences importantes. Cela permet aussi de les orienter vers des soins
plus individuels, qui sont une autre étape de la prise en charge.
Le patient 4 a par exemple fait la demande d'une prise en
charge individuelle : « Une thérapie individuelle
pour me focaliser sur moi, pour avancer, progresser davantage avec une personne
qui s'occupe seulement de moi. Mais j'avais besoin de passer d'abord par le
groupe, par des activités en groupe, pour en être
capable. »
Programme PACT d'information sur la maladie
Vulnérabilité
La question de la vulnérabilité fait l'objet
de plusieurs séances.
Le film parle de sensibilité, plutôt que de
vulnérabilité. Le mot fait écueil. Difficile de faire la
part des choses entre ce qui serait « faiblesse » et ce qui
pourrait plutôt être qualifié de « qualité
d'âme ».
Plusieurs patients évoquent leur enfance, le
sentiment d'avoir toujours été un peu différent :
plus timide, plus sensible...
La question du stress est aussi évoquée
longuement : comment reconnaître le stress, comment s'en
préserver ? Y a-t-il de bons stress ? Il s'agit en fin de
compte d'apprendre à se connaître soi-même, avec ses forces
et ses faiblesses, être capable de se faire aider dans les moments
difficiles, accepter de se faire ré-hospitaliser.
Faridah a décompensé à la naissance
de son premier enfant.
Elle pose directement cette question : « Est-ce
que je peux transmettre la maladie à mon enfant ? ». Les
soignants lui répondent avec honnêteté et avec les
réserves qu'imposent les limites de nos connaissances.
Bertrand met tout son espoir dans les découvertes
à venir de la science. Il supporte la maladie parce qu'il veut croire
qu'un traitement finira par être trouvé, même s'il doit
attendre 20 ans.
La séance de questions au médecin va
l'angoisser. Il y entend en effet que des anomalies sont retrouvées dans
la structure cérébrale. Il se rassure un peu lorsque l'on aborde
de la notion de plasticité cérébrale et de
l'intérêt des techniques de réhabilitation.
Il est en colère contre le premier médecin
qui l'a reçu et qui n'a pas posé le diagnostic de
schizophrénie, retardant d'un an la mise en place d'un traitement. Il
est envahi de questions : « et si j'avais eu ce traitement plus
tôt...? ».
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2 patients enfin trouvent la remédiation un peu
rébarbative (dont le patient 5 qui la trouve aussi trop simple). Mais
ils reconnaissent tous les deux qu'elle leur a permis de reprendre confiance en
leurs capacités : « Ben c'est un peu
rébarbatif, parce que c'est souvent la même chose mais on se rend
compte qu'on a des facilités à exécuter les
exercices. » (11).
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