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Les procédés de modalisation dans l'oeuvre romanesque de jules verne: le cas de Michel Strogoff

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par Bauvarie Mounga
Université Yaoundé I - DEA 2007
  

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I.1- La mise entre guillemets

Ce terme s'emploie lorsqu'un mot ou un syntagme est encadré par les guillemets. Très discrète, la mise entre guillemets est l'une des formes privilégiées de la modalisation autonymique dans notre support d'étude. Plusieurs raisons justifient son emploi : la non prise en charge du terme cité par le sujet énonciateur, le soulignement d'un mot ou d'un syntagme, l'emploi des termes étrangers, les figures de l'emprunt.

I.1.1- La non prise en charge des termes cités

L'emploi des guillemets par le narrateur dans Michel Strogoff est, dans certaines situations, un moyen pour lui de prendre ses distances par rapport aux propos des énonciateurs qu'il met en scène. Dans ces conditions, Catach (1996 :78-79) pose que les guillemets  permettent au scripteur de prendre ses distances à l'intérieur de la phrase avec n'importe quelle portion de texte non assumée par le locuteur. 

La prise de distance dont parle Catach (1996) peut s'expliquer par la volonté du locuteur de montrer clairement que les termes encadrés ne sont pas de lui. La non prise en charge a aussi pour cause le désir d'indiquer qu'il ne partage pas le point de vue du locuteur premier. De toutes les façons, les segments guillemetés, comme le constate Herschberg (1993 :101), s'apparentent à un objet montré au récepteur, tenu à distance au sens où l'on tient à bout de bras un objet que l'on regarde et que l'on montre. Le locuteur se sert donc des guillemets pour isoler un terme du reste de la phrase et indiquer de cette façon au lecteur qu'il n'en est pas l'auteur, mais le rapporteur. Soit les énoncés suivants :

(153) Alcide Jolivet parlait comme s'il eût été à l'opéra, et tirant sa lorgnette de son étui, il se prépara à observer en connaisseur « les premiers sujets de la troupe de Féofar. » (p.231-232)

(154) De quel journal, ou de quels journaux, il ne le disait pas, et lorsqu'on le lui demandait, il répondait plaisamment qu'il correspondait avec « sa cousine Madeleine ». (p.18-19)

(155) Puis, par une pente naturelle, elle revenait à celui auquel elle devrait d'avoir revu son père, à ce généreux compagnon, à ce « frère » qui, les Tartares repoussés, reprendrait le chemin de Moscou, qu'elle ne reverrait plus peut-être ! (p.300)

Tous ces énoncés constituent des pensées, des discours repris par le locuteur (narrateur) au style indirect libre. En effet, le narrateur relate au lecteur les propos et les sentiments de certains énonciateurs (personnages) tout en encadrant des termes et groupes de mots dont il tient à se démarquer; soit parce qu'il ne partage pas le point de vue du personnage, soit parce qu'il veut tout simplement signifier qu'il n'est pas l'auteur des propos rapportés. C'est pourquoi Fromilhague et Sancier (1991 :103) soutiennent que  le narrateur ne prend pas à son compte l'énonciation de ces lexies qu'il délègue à une instance autre. La mise entre guillemets est donc un procédé au moyen duquel le locuteur exclut de son propre point de vue certains termes de l'énonciateur. Il emploie un terme tout en montrant qu'il n'est pas de lui.

Par ailleurs, les guillemets sont souvent un moyen dans notre corpus pour le locuteur de bien faire savoir au lecteur que le mot encadré n'a pas son sens usuel et qu'il n'aurait peut-être pas dû être utilisé à la place où il se trouve. D'une façon significative, les guillemets apparaissent comme un signal que l'auteur adresse au lecteur. Wagner (1980 :175) traduit de la manière suivante la consigne de l'auteur à l'égard du lecteur : prenez garde à ce mot, semble dire l'écrivain, il va peut-être vous surprendre. Les guillemets permettraient donc non seulement au locuteur d'émettre des réserves vis-à-vis du terme encadré, mais également d'avertir le lecteur que son sens est connoté. Analysons à cet effet cet échange entre Harry Blount et Alcide Jolivet.

(156) -Pour moi, il m'a paru rayonnant, répondit Harry Blount qui voulait peut-être dissimuler sa pensée à ce sujet.

-Et, naturellement vous l'avez fait « rayonner » dans les colonnes du Daily Telegraph.(p.21)

Les guillemets dans cet exemple indiquent que le terme "rayonner" n'est pas d'Alcide Jolivet, mais du personnage Harry Blount. Il semble que le narrateur a encadré ce mot pour montrer au lecteur qu'il n'a pas dans cet énoncé son sens usuel. En effet, Alcide Jolivet se sert du terme employé par son interlocuteur pour mieux le ridiculiser. Il s'agit ici d'une distanciation ironique, car en fait Alcide Jolivet dit le contraire de ce qu'il pense vraiment.

Il convient de noter cependant que dans notre support d'étude, les guillemets apparaissent aussi comme une mise en valeur des propos cités.

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