I.3- La typologie de Le Querler
La modalité, selon Le Querler
(1996 :61), peut être perçue comme une expression
de l'attitude du locuteur par rapport au contenu propositionnel de son
énoncé. Cette définition exclut l'assertion simple
qui ne contient aucun marqueur de l'attitude du locuteur. L'assertion simple
est constative ou informative sans aucun marqueur explicite de modalisation.
Après avoir défini la modalité, Le Querler (1996) propose
un classement des modalités qui s'organise autour du sujet
énonciateur.
-La modalité subjective : elle est l'expression du
rapport entre le sujet énonciateur et le contenu propositionnel, et
correspond aux modalités épistémique et
appréciative. Plus concrètement, Laurendeau (2004 :4) parle
de modalité subjective lorsqu'il est question d'une
fluctuation du savoir ou de la prise de parti du sujet
énonciateur. En d'autres termes, la modalité subjective
est présente dans un énoncé si le locuteur y exprime un
savoir ou une prise de position.
-La modalité intersubjective : elle renvoie au
rapport établi entre le sujet énonciateur et un autre sujet
à propos du contenu propositionnel. Autrement dit, c'est l'ensemble des
attitudes susceptibles de mettre en relation un locuteur et son allocutaire
à propos d'un énoncé.
-La modalité objective : Le Querler
(1996 :64) pense que cette modalité n'intervient que si
le sujet énonciateur subordonne le contenu propositionnel
à une autre proposition. Il s'agit d'une modalité qui ne
dépend ni du jugement de l'instance énonciative, ni de son
appréciation, ni de sa volonté.
Au regard de cette sous-catégorisation de Le Querler
(1996), Vion (2001 :218), estime qu'au niveau de la modalité
objective, il paraît inacceptable de présenter les
rapports entre propositions comme des phénomènes objectifs
indépendants d'un sujet parlant.
Il n'est donc pas évident d'admettre qu'il
puisse exister des énoncés qui soient purement constatifs. Aucun
énoncé ne saurait se limiter à décrire une
réalité si l'on prend en compte que, le simple fait de nommer
passe par les filtres de la perception, de l'interprétation, de la
catégorisation. C'est pourquoi, pour classifier les
procédés de modalisation, des linguistes tels que Galatanu (2002)
se limitent au recensement des phénomènes linguistiques
témoignant d'un jugement ou d'un commentaire du locuteur sur son
discours.
I.4- La typologie de Galatanu
Galatanu (2002) regroupe les domaines modaux en quatre
classes :
-Les valeurs ontologiques : elles sont incluses
dans ce que Galatanu nomme la zone modale des valeurs existentielles. Cette
linguiste (2002 :22) soutient que ces valeurs sont relatives
à la perception de l'existence du monde naturel et de la
société tels qu'ils sont représentés dans et par le
discours. Les valeurs ontologiques sont composées des
domaines aléthique et déontique. Galatanu (ibid.) insiste sur le
fait que les valeurs aléthiques
concernent l'appréhension du fonctionnement des lois
naturelles. En mots plus simples, l'aléthique permet d'indiquer si
un fait est nécessaire, possible, impossible ou aléatoire.
-Les valeurs de jugement de
vérité : elles sont constituées de
l'épistémique qui relève du savoir et des valeurs
doxologiques qui relèvent du croire.
-Le jugement axiologique, quant à lui, comme
l'affirme Picavez (2003 :54), est un jugement de valeur
organisé selon une logique binaire, chaque jugement comportant deux
pôles, positif et négatif. Le jugement axiologique comprend
quatre domaines : l'esthétique (beau et laid), le pragmatique
(utile et inutile), l'intellectuel (intéressant et
inintéressant), l'affectif (heureux et malheureux).
-Le domaine des valeurs finalisantes est
constitué du désidératif et du volitif.
La classification de Galatanu (2002) organise les
valeurs modales en un système cohérent et fini. Néanmoins,
on se demande pourquoi cet auteur considère la modalité
déontique comme une valeur ontologique dans la mesure où cette
modalité renvoie surtout aux notions d'obligation et de permis et non de
l'être. Par ailleurs, Galatanu n'explique pas pourquoi le
désidératif et le volitif sont considérés comme des
valeurs finalisantes.
Jusqu'ici, les différentes typologies de
procédés de modalisation présentées nous ont paru
parfois contradictoires et pas très compréhensibles, c'est
pourquoi nous avons également analysé la classification de
Gardes-Tamine et Pelliza (1998).
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