III- LE DËONTIQUE
Le mot déontique dérive du grec
ta deonta qui veut dire ce qu'il faut. La modalité
déontique concerne le devoir et le droit en termes d'obligation et de
permission. Pour Laurendeau (2004 :5), le déontique correspond
à ce que je crois être nécessaire en sachant que ce n'est
pas, et que ce n'est même peut-être pas
désirable. Cette définition de Laurendeau (2004) met
surtout l'accent sur l'obligation morale, alors que le déontique ne
saurait se réduire à cet unique aspect. C'est pourquoi, nous
préférons la définition de Cresti (2002 :2) pour qui,
à travers la modalité déontique,
une situation est évaluée comme
permise ou interdite, suivant une logique d'obligation ; cette
modalité informe si la réalisation d'un état de choses est
requise, permise ou interdite, ou dans un sens plus large désirée
ou poursuivie.
C'est dire que la modalité déontique fait
essentiellement appel aux notions d'obligation, de permis, d'interdit, voici du
reste les occurrences de ces différentes valeurs du déontique
dans notre corpus :
Valeurs du déontique
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Occurrences
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Pourcentages
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Obligation
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80
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84,21%
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Permis
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8
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8,42%
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Interdit
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7
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7,36%
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Total des occurrences de la modalité
déontique : 95
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Ce tableau permet une visualisation de l'usage des
différentes valeurs du déontique présentes dans
Michel Strogoff. Ainsi, c'est l'obligation qui a le plus
d'occurrences. Le permis et l'interdit, quant à eux, sont très
peu usités. Examinons à présent comment ces valeurs sont
employées dans notre corpus.
III.1- L'obligation
Elle peut être entendue comme un engagement
imposé par une institution, une religion, la morale ou un individu. De
ce point de vue, on distingue l'obligation interne et l'obligation externe.
III.1.1- L'obligation interne
C'est un ensemble de contraintes que le locuteur
impose à sa propre personne, cette obligation ne dépend que du
locuteur et est de plusieurs ordres. On a ainsi l'obligation morale. Dans ce
cas, explique Charaudeau (1992 :602), le locuteur justifie son
projet de faire, au nom d'une valeur éthique. C'est le bon sens
qui commande l'action du locuteur. Il arrive que l'obligation soit aussi
d'ordre utilitaire. A cet effet, le locuteur justifie son action au nom d'une
valeur pragmatique. Les énoncés suivants nous permettront de
mieux expliciter notre propos:
(116) Le secret de mon fils, Nadia, puisqu'il ne l'a pas dit,
il faut que je le garde ! (p.212)
(117) Il pensa que, quelles que fussent les fatigues d'un
voyage à travers la steppe, sans chemin frayé, il ne devait
pas risquer de tomber une seconde fois entre les mains des Tartares.
(p.273)
(118) En tout cas, et plus que jamais, Michel Strogoff
devait fuir Ivan Ogareff et faire en sorte de ne point en être
vu. (p.149)
L'obligation interne est présente dans ces
énoncés à travers les semi-auxiliaires modaux
falloir et devoir. En (116), c'est le désir de tenir
sa parole qui guide la conduite du locuteur : c'est donc une obligation
morale. Dans les énoncés (117) et (118), les faits et gestes des
locuteurs sont plutôt gouvernés par la volonté d'atteindre
le but fixé, il s'agit d'une obligation utilitaire. Toutes les
obligations que nous venons de décrire ne sont imposées au
locuteur que par lui-même. Néanmoins, ce dernier peut aussi subir
des contraintes auxquelles il ne peut se dérober.
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