I.3- L'injonction
La modalité injonctive est employée lorsqu'un
locuteur veut que quelqu'un fasse ou ne fasse pas quelque chose. C'est pourquoi
l'injonction peut être positive (ordre) ou négative
(défense). La situation de discours qui lui correspond normalement est
celle qui met en présence au moins deux interlocuteurs. Tomassone
(1996 :135) ajoute que le locuteur attend du destinataire un acte et
non une réplique : les seules répliques possibles sont
l'acquiescement, le refus ou le mépris.
La modalité injonctive implique donc
l'accomplissement d'un acte et possède par ailleurs plusieurs formes qui
méritent d'être étudiées.
I.3.1- La phrase impérative
Elle est la forme de l'injonction la plus récurrente
dans notre corpus avec 91 occurrences. Cela n'est guère étonnant
puisque, d'après Frontier (1997 :571), l'impératif
est le mode spécifique de l'injonction : l'employer c'est tenter de
modifier le comportement de son interlocuteur. A cet effet, la phrase de
type impératif est caractérisée par la forme du verbe
à l'impératif, l'absence du sujet qui est parfois mis en
apostrophe. Ce sujet représente le destinataire de l'injonction, celui
qui est censé accomplir l'acte indiqué par l'impératif.
Tout cela est illustré par les occurrences suivantes :
(44) Ne crains rien Nadia, dit-il en se
plaçant entre elle et Ivan Ogareff. (p.336)
(45) Approche donc qu'on te voie ! dit l'homme.
(p.58)
(46) Jure moi que rien ne pourra te faire avouer ni
qui tu es ni où tu vas ! (p.339)
Le locuteur dans les énoncés ci-dessus tente
d'agir d'une manière ou d'une autre sur l'allocutaire ; cependant,
celui à qui s'adresse l'injonction n'est pas présent dans ces
énoncés sauf en (44) où il est interpellé. C'est
dans cette optique que Le Goffic (1993 :126) affirme qu'avec la phrase
impérative, le locuteur
court-circuite en quelque sorte la
présentation normalisée d'une relation prédicative :
la phrase impérative procède d'un mouvement affectif et/ou d'une
volonté d'action, elle est en prise directe sur la situation
d'énonciation.
Ainsi, l'impératif est toujours porteur d'une
énergie qui oriente le discours vers l'interlocuteur.
Par ailleurs, le mode impératif dont se sert
très souvent l'injonction possède deux tiroirs verbaux :
l'impératif présent et l'impératif passé. Quant aux
personnes, l'impératif n'en possède que trois : la
deuxième personne du singulier et du pluriel, et la première
personne du pluriel. Les phrases suivantes du corpus explicitent nos propos
à l'aide des verbes conjugués fais, perdez, passons.
(47) D'heure en heure, général, fais
passer un télégramme à Tomsk. (p.13)
(48) Soit, repris Michel Strogoff, mais ne perdez pas
un instant. (p.123)
(49) Passons d'abord, et nous saurons bien trouver la
route d'Irkoutsk au-delà du fleuve. (p.262)
La modalité injonctive dans notre support
d'étude emprunte ses formes à l'impératif, mais aussi au
subjonctif.
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