2. L'évolution jurisprudentielle
-
- Auparavant, la jurisprudence a consacré la notion (pas encore le
principe) de l'indépendance de la clause compromissoire en
matière d'arbitrage international90(*). Le principe d'autonomie de la convention d'arbitrage
a été, pour la première fois, dégagé par un
arrêt de principe rendu par la Cour de cassation en 1972. Il s'agit de
l'arrêt Hecht91(*) dans lequel la Cour de cassation a retenu dans un
attendu peu précis qu' « ayant rappelé le
caractère international du contrat liant les parties et rappelé
qu'en matière d'arbitrage international, l'accord compromissoire
présente une complète autonomie, l'arrêt attaqué en
a justement déduit que la clause litigieuse devait en l'espèce
recevoir application ». Les enseignements tirés de cet
arrêt ne sont pas très clairs.
-
- Ultérieurement, afin de rendre le principe un peu plus
éclairé, la Cour d'appel a rendu un autre arrêt dans lequel
elle a retenu que « compte tenu de l'autonomie de la clause
compromissoire, instituant un arbitrage dans un contrat international, celle-ci
est valable indépendamment de la référence à toute
loi étatique92(*) ». Encore, plus précis la cour
indique qu' « en matière d'arbitrage international le principe
d'autonomie est d'application générale en tant que règle
matérielle internationale consacrant la licéité de la
convention d'arbitrage, hors de toute référence à un
système de conflits de lois, la validité de la convention devant
être contrôlée au regard des seules exigences de l'ordre
public international ».
- Avec une série d'arrêts datant de 1990 à 1991,
l'ordre public international réapparaît. La solution est devenue
ensuite constante en la jurisprudence qui considère la
contrariété à l'ordre public international comme l'unique
cause de nullité de la convention d'arbitrage93(*). Cependant, on aura
intérêt de faire une étude sur la référence
à l'ordre public dans la jurisprudence la plus importante dans l'affaire
Dalico.
- Dans cette jurisprudence94(*), très commentée et abordée, le
problème de droit était celui de l'existence et de la
validité en la forme de la clause compromissoire. La cour de cassation
confirmant l'arrêt de la cour d'appel a rejeté le pourvoi
formé par la Municipalité d'El Mergeb, tout en décidant
que la Cour d'appel a souverainement retenu que les parties avaient
manifesté leur volonté commune de se soumettre à la clause
d'arbitrage et rejette en conséquence le pourvoi.
- On peut ainsi tirer quelques enseignements de cet arrêt dont la
formule fait penser immédiatement à un arrêt de principe
puisque la juridiction suprême a entendu consacrer un principe de
portée générale d'existence et d'efficacité de la
clause d'arbitrage95(*).
Deux conditions de validité sont : l'existence d'un consentement
des parties, d'une part, et l'absence de contrariété aux
règles impératives du droit français et à l'ordre
public international, d'autre part. Dans cette optique, dès que l'accord
de volonté suffit à valider la clause et le raisonnement
conflictuel classique étant banni96(*), faut-il conclure qu'il s'agit d'un contrat sans
loi ?
- Bien évidemment, la réponse est négative,
c'est-à-dire que l'ordre public devient la seule limite à la
validité de la convention d'arbitrage dès lors que la
volonté des parties ne heurte pas l'ordre public international. Il n'est
donc pas question de contrat sans loi, mais de contrat sans conflit de
lois97(*).
* 90 Civ., 1re, 7
mai 1963.
* 91 Cass. 1re
civ., 4 juill. 1972, Hecht : Rev. crit. DIP. 1974, p. 82, note P.
LEVEL.
* 92 C.A Paris, 13
déc. 1975, Menicucci: Rev. Arb. 1997, p. 147, note Ph. FOUCHARD.
* 93 Jean-Baptiste Racine,
L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999. p.
187.
* 94 Cass. 1re Civ.,
20 décembre 1993, Dalico, JDI 1994.432, note G.
Gaillard.
* 95 Jean-Baptiste Racine,
L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999. p.
189.
* 96 Nicolas
NORD, Ordre public et lois de police en droit international
privé, thèse pour le doctorat en droit, 2003. 132.
* 97 J. Béguin, G.
Bourdeaux, A. Couret, B. Le Bass, D. Mainguy, M. Menjucq, H. Ruiz Fabri, C.
Seraglini, J.M. Sorel, Traité du droit du commerce
international, Litec, 2005. p. 873.
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