3.4.2. Akata : le Japon comme
nouveau modèle culturel
Label dirigé par un homme aux idées
engagées, Dominique Véret, Akata est avant tout une nouvelle
chance de mettre en oeuvre ce qui selon lui a échoué aux
éditions Tonkam : publier des oeuvres fortes destinées
à un public de jeunes adultes.
Dominique Véret a en effet pris conscience que ce qui a
été communément appelé par les médias la
«génération manga» a mûri. Tout ce pan de la
population a désormais entre vingt et trente ans et les oeuvres qu'Akata
souhaite publier s'adressent avant tout cette cible non hostile aux productions
nippones.
Se positionnant en marge des éditeurs opportunistes
qui ont vu dans le manga une manne providentielle, l'équipe d'Akata veut
se rapprocher de la mission traditionnelle de l'éditeur :
élever son lectorat vers le haut en lui proposant des titres
culturellement enrichissants, ne se présentant pas d'emblée comme
des best-sellers potentiels.
Le catalogue Akata est très diversifié,
proposant une variété de genres à travers six collections
avec néanmoins une prédominance de titres destinés aux
jeunes adultes :
- la collection « Také : Initiation de papier au
masculin », sept titres destinés majoritairement aux jeunes
garçons ;
- « Sakura : les desseins du manga... au
féminin », sept publications s'adressant aux jeunes
filles ;
- « Ôbon : Bienvenue dans le monde des
esprits », deux oeuvres d'horreur pour jeunes adultes ;
- « Gingko : La tradition sous l'écorce de la
modernité », quatorze titres destinés aux plus de 20
ans ;
- « Fukei : Paysages intérieurs, une
manière de lire la vie », trois séries basées
sur la réflexion s'adressant au même public que les deux
collections précédentes ;
- « Jôhin : Des femmes se dévoilent... sans
fausse pudeur », sept publications pour un lectorat adulte et
plutôt féminin.
Au lieu de nous attarder sur les diverses collections et de
décrire point par point le catalogue, nous nous sommes penchés
sur celles dont le contenu est véritablement innovant d'un point de vue
thématique, les publications jôhin.
Ces dernières proposent en effet des récits
ayant pour personnage central une héroïne, ce qui est peu courant
dans les manga pour adultes paraissant en France mais également dans la
production franco-belge.
Cette collection est avant tout l'occasion pour
l'éditeur de promouvoir la qualité d'une bande dessinée
produite par et pour les femmes. Elle est également un moyen de
présenter une nouvelle image de la femme japonaise, qui sait revendiquer
à la fois son identité et sa sexualité.
Les titres proposés sont au nombre de sept parmi
lesquels cinq sont l'oeuvre de la mangaka* Mari OKAZAKI. Chacune de
ses nouvelles ont pour thème central l'amour. Cependant, sa
réflexion sur les sentiments est poussée à l'extrême
et invite sa lectrice à découvrir de multiples façons
d'exprimer ses passions.
BX est une histoire d'amour entre deux opposés,
deux manières profondément différentes de concevoir
l'existence. Une aventure compliquée commence, notamment pour Nenohi
l'héroïne qui s'accroche au jeune Usagi qui, lui, ne connaît
que la boxe.
C'est avant tout elle que l'on verra évoluer, car c'est
de son point de vue que l'on perçoit l'histoire. D'une jeune fille
volage, incapable d'aimer, elle deviendra une femme incroyablement patiente et
prête à l'abnégation de ses sentiments pour celui qu'elle
aime.
Dans Déclic amoureux, la passion des personnages
est poussée jusqu'à l'extrême, leur ôtant toute
humanité et toute compassion les uns envers les autres.
12 mois propose un récit d'amour à sens
unique tandis que Le Cocon développe une perspective inhabituelle
de la passion, celle pour un être absent.
Un autre titre de la mangaka est à paraître en
juillet 2005, Sex no ato Otoko no Ase wa hachimitsu no Nioi ga suru
(Après l'amour, la sueur des garçons sent le miel, titre
provisoire). L'incapacité de l'être humain à vivre seul est
au centre de ce recueil de cinq histoires courtes.
Subaru est l'héroïne éponyme du
manga de Masahito SODA, femme déchirée entre drame personnel (son
petit frère est atteint d'une tumeur au cerveau) et ascension sociale
(devenir danseuse professionnelle).
Enfin, Initiation de Haruko KASHIWAGI n'est pas un
manga pornographique bien qu'il peut apparaître comme tel quand on le
feuillette. Fondé sur des recherches de l'auteur notamment sur
l'ère Meiji (1868-1912), cette bande dessinée évoque ce
que la culture japonaise a toujours su aborder sereinement et sans tabou, le
sexe, qui a une fonction à la fois éducative et sociale.
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