C. Mes propositions pour améliorer la prise en
charge
Le travail de confiance mis en place se voit
écorché à chaque réponse négative par tous
ces refus de soins, de prise en charge, d'aide vis-à-vis du mineur
isolé étranger.
Ces décisions qui paraissent souvent injustes et
inadaptées contribuent à fragiliser encore plus les adolescents
qui vivent une situation instable.
Ce refus les rend plus vulnérables et ils ne croient
plus en rien.
Ces jeunes, qui avaient rêvé d'une vie meilleure
en France déchantent rapidement face à la lourdeur des
démarches administratives. Le manque de considération et le rejet
dont ils ont le sentiment peuvent s'ajouter à leur mal être, et
dans certains cas amener le jeune à disparaître dans la nature.
D'autres jeunes, du fait certainement de la frontière
culturelle, ne saisissent souvent l'ampleur des enjeux que lorsqu'ils doivent
quitter le centre pour aller au SAMU social (115), où les conditions de
prise en charge ne sont pas spécifiques aux mineurs mais à toutes
les personnes en difficultés.
Pour d'autres mineurs, la situation en guerre de leur pays
aidant, sont orientés vers les structures pour les demandeurs
d'asile ; certains jeunes, déçus par la réponse
administrative et judiciaire, ont tenté le passage à l'acte.
C. originaire, d'un pays en guerre, s'est enfui après
l'assassinat de toute sa famille. Arrivé en France sans documents, celui
-ci devra subir un examen d'âge osseux pour prouver sa minorité.
Il me demande si c'est parce que ses parents ne peuvent plus répondre
que l'on demande à une machine de dire son âge. Il me jure qu'il
est mineur et que si je le crois une machine ne peut pas dire le contraire.
C. sera déclaré majeur à plus de 18 ans
et il me dit avoir 16 ans.
Le soir même, le jeune a tenté de se suicider.
Une succession de passages à l'acte par des jeunes m'a
poussé à réfléchir avec l'équipe sur des
propositions en vue de l'amélioration de la prise en charge des mineurs
isolés étrangers.
Travailler sur un accueil véritable et un
accompagnement avec un début et un avenir et non un début et une
fin de prise en charge. On n'envisage pas l'avenir du jeune. La
problématique est connue, il existe une cellule de l'ASE de Paris qui
s'occupe des mineurs étrangers. Le mineur pris en charge par l'ASE
devrait bénéficier d'une évaluation tous les 6 mois, au
lieu de disparaître lors de la prise en charge et apparaître
à 18ans. On devrait réfléchir à la
possibilité pour le mineur d'avoir un avenir en France ou de renter chez
lui dans de bonnes conditions. L'administratif doit l'aider à
bénéficier de mesures indispensables à son
intégration en France et à se projeter, de même pour les
éducateurs qui ont besoin d'avoir une visibilité dans le temps
pour inscrire le jeune dans un projet de vie. L'action éducative qui est
mis en place n'est efficace que si le jeune est rassuré par sa
situation
La décision judiciaire ne devrait pas se focaliser sur
le danger et uniquement sur le travail éducatif. Il doit tenir compte de
l'environnement à l'origine de ce danger. On sait que le danger qui
pèse sur le mineur isolé est diffus dans la mesure où il
est lié à sa présence sur le territoire et aux motifs de
son départ du pays d'origine. Si on part du principe que les mineurs
isolés sont une spécificité en France, par la
création de la CAMIE (cellule d'accueil des mineurs isolés), au
sein de l'ASE de Paris, cela démontre une prise de conscience de la
spécificité de ces jeunes vis-à-vis des jeunes
réguliers en France. J'ai pu constater que la CAMIE ne dispose pas de
moyens spécifiques, et donne l'impression d'être un lieu de
stockage et de statistique sur les flux. Dès que la décision de
justice est prononcée en faveur du jeune, celle-ci doit être
accompagnée de moyens permettant l'intégration dans le projet de
son choix. Un mineur isolé n'a pas de papier, pourtant il lui faut des
papiers qui lui permettent de poursuivre une formation en alternance. Un titre
de séjour même provisoire lui permettrait de poursuivre sa
formation.
Pour le retour du jeune dans son pays, la formation lui
permettrait d'être actif dans son pays. Ce retour devrait se faire
à la demande du jeune et non de manière forcée comme c'est
le cas actuellement.
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