Gouvernance et création de valeur( Télécharger le fichier original )par Fatma Ben Moussa Ecole Supérieure de Commerce de Tunis - mastère finance 2005 |
2-1-2 : La taille du conseil d'administration76(*)Selon Olubunmi Faleye (2004), un conseil est tout simplement un groupe d'individus qui travaillent ensemble pour accomplir un objectif commun. D'où, son succès dépend de la dynamique de ce groupe et de leur interaction. La taille de ce conseil est une caractéristique très importante dans la mesure ou elle peut avoir un impact sur cette dynamique.La taille du conseil d'administration a fait l'objet de diverses critiques. Diverses questions ont été posées. Combien de membres doivent siéger au conseil d'administration? Faut-il limiter le nombre d'administrateurs? Existe-t-il un manque de cohérence dans les conseils composés d'un nombre trop élevé d'administrateurs? Ainsi, un aspect crucial de l'organisation du conseil est le choix d'un nombre optimal d'administrateurs. Jensen (1993) et Lipton et Lorsch (1992) ont trouvé que les entreprises ayant un conseil d'administration de grande taille sont poins performants que les autres cela réside dans la difficulté de résolution des problèmes d'agence. Ces auteurs concluent donc que les entreprises ayant un conseil d'administration de petite taille sont plus performantes et produisent plus de valeur. La proposition stipule que même si les capacités du conseil augmentent avec sa taille, ces avantages sont contrebalancés par des coûts additionnels, comme une prise de décision lente, de discussions peu franches à propos de la performance de l'entreprise et des biais en défaveur de la prise de risque. De la même façon, Business Roundtable (2002) conclut que «les conseils de taille réduite sont souvent plus cohésifs et travaillent plus efficacement que les grands conseils.» En associant la taille du conseil à des mesures de performance de l'entreprise, Yermack (1996) a démontré qu'il existe une relation négative considérable entre la taille du conseil d'administration et la valeur de l'entreprise mesurée par le ratio Q de Tobin. Des études plus récentes faites par Eisenberg, Sundgren et Wells (1998) pour analyser la taille du conseil d'administration dans un échantillon de presque 900 petites et moyennes entreprises en Finlande. Ils ont trouvé que l'augmentation de la taille du conseil de 3 à 4 membres se traduit par une diminution du Return On Assets (ROA) d'environ 0.02%. Par contre, Ferris, Jagannathan, et Pritchard (2003) trouvent une relation positive entre la taille du conseil et la valeur de l'entreprise mesurée par le ratio market/book pour un large échantillon d'entreprises américaines homogènes. De même, Mak et Li (2001) ont prouvé statistiquement une relation positive entre la taille du conseil d'administration et la valeur de l'entreprise mesurée par le ratio Q de Tobin pour des entreprises à Singapore, alors que Bhagat et Black (2002) ont fait plusieurs études sur un échantillon de grandes entreprises américaines et ils n'ont pas réussi à prouver l'existence d'une relation entre la taille du conseil d'administration et la performance de la firme. Les résultats de Olubunmi Faleye (2004) suggèrent qu'il y a une relation négative entre le turnover du PDG et la taille du conseil d'administration. Ainsi, Hermalin (2004) et Huson et al. (2004) suggèrent que plus le conseil est de taille petite plus il sera capable de prendre des décisions au profit des actionnaires. En résumé, on peut conclure que les administrateurs élus ont la responsabilité de promouvoir et de protéger les intérêts des actionnaires. Un conseil de trop grande taille a pour conséquence de diluer le pouvoir de vote de chacun de ses membres et pourrait réduire l'efficacité de l'organisme. Par contre, un conseil de trop petite taille pourrait ne pas être en mesure d'exercer ses responsabilités de façon satisfaisante, ce qui est préjudiciable au rendement général de l'entreprise. Le nombre de participants au conseil doit être suffisant pour que celui-ci fonctionne de façon efficiente et efficace. 2-1-3 : La structure et la composition du conseil d'administration : Un des principes fondamentaux de la gouvernance cité par Kath et Kim (2003)77(*), est le fait de « structurer le conseil pour ajouter la valeur » c'est à dire avoir un conseil d'une composition efficace, de dimension adéquate pour que chacun puisse assumer ses responsabilités et ses devoirs. En effet, un conseil efficace facilite l'accomplissement effectif des devoirs imposés par la loi sur les directeurs et permet de créer la valeur. Ainsi, les investigateurs de la composition du conseil d'administration ont exploré de nombreuses caractéristiques du conseil y compris le nombre d'administrateurs dans le conseil, le pourcentage d'administrateurs externes, la structure de propriété, la structure du comité du conseil, et le nombre des réunions tenues annuellement. La facette de la composition du conseil d'administration la plus étudiée par les chercheurs est le nombre d'administrateurs externes (Hermalin et Weisbach, 2000)78(*). Selon Agrawal et Knoeber (1996), on a intérêt à introduire plus d'administrateurs externes dans le conseil d'administration pour des raisons politiques. Ces auteurs suggèrent que la présence des administrateurs externes tend à affecter négativement la performance de l'entreprise. Ils ont aboutit à ce résultat à travers une étude empirique mettant en relation le nombre d'administrateurs externes présents dans le conseil d'administration et la performance de l'entreprise mesurée par le ratio Q de Tobin. Hermalin et Weisbach (1991), en régressant la composition du conseil d'administration sur des variables mesurant la performance de la firme, conclurent qu'il n'y a pas de corrélation significative entre la présence d'administrateurs externes et la performance. Bhagat et Black (2000) ont montré qu'il n'y a aucune relation entre la performance de l'entreprise et la fraction d'administrateurs extérieurs. De même, Lawrence et Stapledon (1999) n'ont pas pu trouver une relation logique entre la présence des administrateurs indépendants dans le conseil et le fait de créer ou de détruire la valeur. Barnhart et Rosenstein (1998) ont examiné la performance de la firme, la structure de propriété et la composition du conseil d'administration dans un système de trois équations et ils ont trouvé que ces variables sont déterminées conjointement. BYRD et HICKMAN (1992) ont examiné la relation entre les caractéristiques du conseil et la richesse des actionnaires et ils ont conclut de leur part que le rôle disciplinaire du conseil d'administration est d'autant plus effectif qu'il comprend des administrateurs externes. Hermalin et Weisbach (2003)79(*) ont trouvé de leur part que les administrateurs externes ont tendance à rejoindre les conseils d'administration des entreprises après que celles-ci aient réalisé de mauvaise performance. En effet, les administrateurs externes peuvent assurer aussi bien la fonction de contrôle que de conseil surtout lorsqu'ils sont des personnes expertes dans des domaines liés à l'activité de l'entreprise. Hermalin et Weisbach soutiennent encore que les conseils d'administration sont généralement une combinaison entre les administrateurs externes et internes dont les motivations sont différentes, et selon que la fraction des administrateurs externes ou internes soit plus ou moins importante, le conseil sera plus ou moins indépendant. Andrew K Prevost et Christine Panasian (2004) ont étudié la relation entre la composition du conseil d'administration et la performance des firmes à partir d'une liste d'entreprises de Toronto Stock Exchange et en choisissant celles qui encouragent l'indépendance des conseils. Il conclut que l'existence des administrateurs externes affecte positivement la performance des entreprises, celle ci est mesurée par le ratio Q de Tobin. Dans un article de Kenneth Biggs (2004)80(*) une définition de la gouvernance d'entreprise efficace a été proposée par Purdy Crawford : «la gouvernance créatrice de valeur». Selon lui, « le but de la société est d'accroître la valeur à long terme pour les actionnaires ». Ce type de gouvernance peut être obtenu grâce à des administrateurs qui sont capables de réfléchir et de s'exprimer en toute indépendance, ont un sens aigu des affaires, sont intéressés et veillent aux intérêts des actionnaires. Le fait que la loi exige que le comité de vérification se compose de personnes autonomes, possédant des connaissances financières, permet de penser qu'on cherchera à doter les conseils d'administration de personnes répondant à ces critères. Un conseil d'administration doit être essentiellement composé d'administrateurs de ce calibre, ayant pour mission de créer et de maintenir des systèmes grâce auxquels la gouvernance créatrice de valeur pourra se concrétiser. Par exemple, c'est avec l'aide d'administrateurs indépendants que doivent être élaborés la vision, les buts et les stratégies globales qu'adoptera l'entreprise pour créer de la valeur. 2-1-4 : La dualité La dualité est indicatrice de la structure du pouvoir dans le conseil d'administration lorsque le manager occupe en même temps la poste de président du conseil d'administration. Dans ce cas, il aura un fort pouvoir dans le choix des administrateurs dans le conseil, dans le processus de planification stratégique et dans la nomination et la révocation des dirigeants dans l'entreprise. Selon PEI SAI FAN (2004) 81(*), les chercheurs ont des suggestions contradictoires concernant la question si le président du conseil et le dirigeant devait être la même personne. A cet effet, Fama et Jensen (1983), Vance (1983) et Jarrell, Brickley et Netter (1988) ont suggéré que la dualité est reliée négativement à la performance et à la valeur de la firme. Selon Faleye (2003), aucune situation n'est idéale pour qu'elle soit applicable à toutes les entreprises. Selon lui, la structure de la direction du conseil d'administration dépend des caractéristiques spécifiques de l'entreprise tel que la complexité d'organisation, la disponibilité d'autres contrôles sur l'autorité du PDG, la réputation du PDG et son pouvoir. Faleye (2003) a fait une étude sur un large échantillon d'entreprises américaines, il trouve que les entreprises dont les opérations et les activités sont complexes (ce qui implique la nécessité d'avoir un PDG pour faire des actions rapides), ont besoin d'avoir un dirigeant qui a une bonne réputation plutôt d'avoir recours à la dualité. Uma. V. Sridharan et Allan Marsinko (1997)82(*) ont démontré que la dualité réduit l'indépendance du conseil d'administration et se traduit par des coûts dus aux conflits entre le conseil et le manager. Anderson et Anthony (1986), Stoeberl et Sherony (1985) et Alexander, Fennell et Halpern (1993) suggèrent qu'il existe une relation positive entre la dualité et la valeur marchande de la firme. Ainsi, la non-dualité va diluer le pouvoir au sommet de la direction et donc va créer des conflits d'intérêts entre la manager et le conseil d'administration. Par contre Boyd (1994) a démontré que la dualité se traduit effectivement par une perte de performance de l'entreprise. Christine Panasian (2004)83(*) suggère que la dualité n'est pas un facteur signifiant dans l'explication du niveau de la performance de l'entreprise. 2-2 : La structure de propriété La structure de propriété constitue, à notre avis, le levier de gouvernance le plus important dans l'entreprise dans la mesure où elle détermine la part du capital détenu par le manager et par les investisseurs institutionnels et qui influencent largement la qualité de gouvernance de l'entreprise et donc sa valeur. 2-2-1 : La séparation entre la propriété et le contrôle Les recherches théoriques et empiriques sur la relation entre la structure de propriété et la performance de l'entreprise ont été motivées par la séparation entre la propriété et le contrôle (Berle et Means, 1932) et, plus récemment, par théorie de l'agence (Jensen et Meckling, 1976, Fama et Jensen, 1983). L'étude de Walid Ben Ammar et Paul André (2005)84(*) contribue ainsi à la récente littérature qui évalue l'impact de la concentration de la propriété et de la séparation entre les droits de propriété et de contrôle sur la valeur de la firme (Claessens et al., 2002 ; Cronqvist et Nilsson, 2002 ; Anderson et Reeb, 2003). Les résultats obtenus montrent que la séparation entre les droits de propriété et de contrôle n'affecte pas négativement la valeur de la firme. Ces résultats contredisent ceux obtenus par des études testant une telle question dans des juridictions offrant peu de protection juridique aux actionnaires minoritaires (Bigelli et Mengoli, 2001 ; Bae et al., 2002). Leurs résultats font ressortir l'importance de la protection juridique offerte aux actionnaires minoritaires comme moyen de limitation des possibilités d'expropriation offertes aux actionnaires dominants (Holderness et Sheehan, 2000). Les résultats suggèrent également que la séparation entre la propriété et le contrôle ne nuit pas toujours à la performance de l'entreprise. En effet, la séparation entre les droits de propriété et de contrôle peut assurer la croissance de l'entreprise sans que les dirigeants/ fondateurs n'en perdent le contrôle. Attari et Bannerjie (2002) montrent que la séparation entre les droits de propriété et de contrôle permet d'éviter le problème de sous-investissement. L'émission d'actions à droits de vote inférieurs permet aux dirigeants l'obtention du financement nécessaire à leurs projets d'investissement tout en conservant le contrôle des droits de vote. Dans une telle situation, la séparation entre les droits de propriété et de contrôle pourrait améliorer la valeur de la firme. 2-2-2 : L'effet du niveau de la participation du dirigeant sur la valeur de la firme 85(*) Plusieurs études ont obtenu des évidences empiriques sur la relation entre la performance de l'entreprise et la structure de propriété. Ces études essaient de tester quelques hypothèses dans les différents systèmes de gouvernement d'entreprises. La structure de propriété d'une entreprise a un impact sur sa performance. Leland et Pyle (1977) suggèrent que la structure de la propriété est un signal de la valeur de la firme. La propriété d'une entreprise consiste en propriété managériale, propriété institutionnelle et propriété individuelle. Si nous considérons que les managers ou les investisseurs institutionnels comprennent mieux la valeur de la firme. La proportion de parts possédée par les dirigeants ou les investisseurs institutionnels transporte un signal au sujet de la valeur de l'entreprise aux investisseurs extérieurs. Par conséquent, le cours des actions réagit au changement de la structure de la propriété. Cependant, l'effet du changement de la structure de propriété sur la performance est indécis. L'augmentation de la propriété managériale devrait transporter un signal positif à la valeur de la firme parce que l'avantage des actionnaires est connecté à l'avantage des dirigeants internes. C'est le coût de l'agence qui est réduit pour élever la valeur de la firme quand les dirigeants possèdent plus de parts dans la propriété. De l'autre côté, l'augmentation de la propriété managériale permet aux dirigeants d'avoir plus de pouvoir pour contrôler l'entreprise. La valeur de la firme devrait décliner s'il n'y a aucun malfaiteur potentiel pour défier le titulaire de l'entreprise. La structure de la propriété managériale est en rapport avec la performance de la firme. Cependant, son effet sur la performance est double. La théorie des coûts d'agence et la théorie de contrôle d'entreprise examinent le rapport entre la structure de propriété et la performance de la firme de deux manières différentes. Fondamentalement, la théorie de l'agence et la théorie de signal suggèrent que l'augmentation de la propriété managériale, fait augmenter la valeur de l'entreprise. La théorie du contrôle d'entreprise est contre l'implication de théorie de l'agence, et implique que le haut niveau de la propriété managériale détruit la valeur de la firme. Morck, Shleifer et Vishny (1988) ont montré qu'il y a un rapport non - linéaire entre la propriété managériale et la valeur de l'entreprise. Quand la propriété managériale est à un niveau bas, elle est reliée positivement avec la valeur de la firme. Mais, quand la propriété managériale est à un haut niveau, elle est reliée négativement avec sa valeur de la firme. Oswald et Jahera (1991), Makhija et Spiro (2000) et Cole et Mehran (1998) ont trouvé des évidences pour supporter l'idée de l'existence d'une relation positive entre la valeur de l'entreprise et la part détenue par les managers. De l'autre côté, Jensen et Rubuck (1983) suggèrent que plus haut est la propriété managériale, plus bas est la valeur de l'entreprise. Si la baisse de la propriété managériale est malfaisante à la valeur de la firme, les investisseurs institutionnels réduiront leur propriété pour éviter le déclin de la valeur de la firme dû aux coûts d'agence qui résultent de l'augmentation de la propriété managériale (Jensen et Meckling, 1976). J.R. Davies, David Hillier et Patrick McColgan (2004)86(*) suggèrent que la relation entre la valeur de la firme et la propriété managériale peut être étudiée selon la zone où se situe le pourcentage de capital détenu par les managers. Ainsi, Pour des bas niveaux de propriété managériale, la discipline externe, les contrôles internes et les mécanismes d'incitations peuvent dominer le comportement des managers[Fama (1980), Hart(1983), et Jensen et Ruback (1983)]. Empiriquement, Morck et al. (1988), McConnell et Servaes (1990) et Hermalin et Weisbach (1991) rapportent des résultats logiques avec ce comportement pour la relation entre la propriété managériale et la valeur d'entreprise. Jensen et Meckling (1976) suggèrent que les managers détenant une faible participation dans le capital de la société qu'ils dirigent, ne réussissent pas à maximiser la richesse des actionnaires puisqu'ils seront incités à accroître leur consommation d'avantages en nature. A des niveaux moyens de propriété managériale, les intérêts des managers commencent à converger avec ceux des actionnaires. Or, plus grande est la propriété, plus grand serait le pouvoir sous forme de droits de vote. Les dirigeants peuvent, à ce niveau de propriété, maximiser leur richesse personnelle à travers les gratifications croissantes et garantir leur emploi aux dépens de la valeur de l'entreprise. Les études faites par Denis et al. (1997) dans les USA et Dahya, McConnell et Travlos (2002) au ROYAUME-UNI ont montré l'existence d'une relation inverse entre le chiffre d'affaire maximum et la propriété managériale. Lorsque les dirigeants détiennent des parts importantes de la propriété (mais moins de 50%), leurs objectifs convergent vers ceux des actionnaires. A un niveau moins de 50% les managers n'ont pas un pouvoir total de contrôle de la firme et les disciplines externes existent encore. Lorsque les niveaux de la propriété managériale sont au-dessus de 50%, les managers ont un contrôle complet de la compagnie. Mais, si les actionnaires soient incapables d'influencer des dirigeants, il peut exister un cartel de blockholders, allié avec les droits des actionnaires minoritaires qui sont capable de monter un défi aux managers s'ils manquent de prise des décisions dans l'intérêt des actionnaires. Finalement, lorsque les managers détiennent des parts très importantes, ils deviennent les seuls propriétaires de la compagnie. Morck et al. (1988), short et Keasey (1999) et Faccio et Lasfer (1999) suggèrent qu'au-dessus d'un certain niveau de propriété, les managers sont en face de pénalités financières très sévères dans le cas d'échec de maximisation de la valeur de l'entreprise, ils sont donc contraints à prendre des décisions qui maximisent cette valeur. 2-2-3 : Les investisseurs institutionnels : Au cours des cinquante dernières années, la structure de l'actionnariat a été profondément modifiée pour reposer aujourd'hui essentiellement sur l'existence d'investisseurs institutionnels (Sociétés d'assurances, Caisse des dépôts et consignations, banques, Organismes de Placements Collectifs en Valeurs Mobilières, Fonds de pension, Caisses de retraite). Les investisseurs institutionnels sont les acteurs qui détiennent aujourd'hui la fraction la plus élevée des titres cotés sur les marches financiers. Par exemple aux États-Unis l'investissement institutionnel croît de 6.1% en 1950 à plus que 50% en 2002. Les actifs détenus par les investisseurs institutionnels ont aussi augmenté dans plusieurs marchés. Par exemple, le total des actifs détenus par les investisseurs institutionnels dans l'Union Européenne croit de plus de 150% entre 1992 et 199987(*). 2-2-3-1 : Les investisseurs institutionnels et la valeur de l'entreprise Bathala, Moon et Rao (1994) et Seetharaman, Zane et Bin (2001) suggèrent que les investisseurs institutionnels jouent un rôle important dans les activités de management ainsi que dans la réduction des problèmes d'agence. Pound (1988) et McConnell et Servaes (1990) montrent La propriété institutionnelle sert comme un signal pour la valeur de l'entreprise. Ainsi, plus haut est la propriété institutionnelle, meilleure serait la performance de l'entreprise. 88(*) Pound (1988)89(*) présente trois hypothèses concernant la relation qui existe entre la propriété institutionnelle et la valeur de l'entreprise : l'hypothèse de l'efficience de la direction, l'hypothèse des conflits d'intérêt et l'hypothèse des stratégies d'alignement. D'après l'hypothèse de l'efficience de la direction, les investisseurs institutionnels ont une plus grande expérience et ils sont des contrôleurs plus efficaces que les actionnaires minoritaires sur le plan coût de contrôle. Donc cette hypothèse prédit l'existence d'une relation positive entre la propriété institutionnelle et la valeur de l'entreprise. D'après l'hypothèse des conflits d'intérêts, à cause d'autres relations d'affaires avantageuses avec l'entreprise, les investisseurs institutionnels sont contraints de voter leurs parts avec le management. L'hypothèse des stratégies d'alignement suggère que les investisseurs institutionnels et les managers trouvent que la coopération est mutuellement avantageuse. Cette coopération réduit les effets bénéfiques sur la valeur de l'entreprise qui pourrait résulter de la direction par les investisseurs institutionnels. Donc le conflit d'intérêt et les stratégies d'alignement prédisent une relation négative entre la propriété institutionnelle et la valeur de la firme. Gillan et Stark (2000)90(*) ont démontré que les stratégies qui sont acceptés par les investisseurs institutionnels sont celles qui seront entreprises par les firmes à travers l'accumulation d'un nombre important de votes lors de la réunion du conseil d'administration ce qui tend à privilégier les stratégies créatrices de la valeur au détriment de celles destructrices de la valeur aux actionnaires. 2-2-3-2 : Les investisseurs institutionnels et les principes de la corporate governance :91(*) Les investisseurs institutionnels présentent un certain nombre de traits fondamentaux similaires qui convergent vers l'exigence de développement de la « shareholder value ». Comme l'on a déjà vu, toutes les organisations doivent satisfaire aux principes de la corporate governance notamment, la transparence accrue en matière de gestion et d'information, l'implication forte des dirigeants, l'instauration d'un dialogue social entre actionnaires et dirigeants, l'optimisation des ressources financières et l'attribution des droits résiduels aux seuls actionnaires. L'application de ces principes est l'élément central du dispositif institutionnel permettant d'accroître la valeur actionnariale. L'action des investisseurs doit donc se limiter aux principes précédemment évoqués. A ce titre une étude conduite par Calpers, sur le marché américain, a montré que le respect des principes de la corporate governance et l'application par les investisseurs des droits de vote suffisent à accroître la rentabilité financière des firmes dans lesquels les minoritaires sont actifs. L'indicateur de mesure de la performance économique et financière des firmes aujourd'hui mis en avant par les investisseurs internationaux est celui de l'EVA-MVA. Dans cette optique, l'investisseur par la connaissance de l'EVA détermine à priori le montant des cash-flows libres dont dispose l'entreprise. Il le fait en appréciant l'écart entre le résultat d'exploitation net d'impôt et le flux de liquidité nécessaire pour la rémunération des capitaux investis. Théoriquement, l'investisseur peut exiger de l'entreprise le versement immédiat de la MVA (équivalent présent et certain des flux d'EVA futurs anticipés). Il peut ainsi bénéficier ex-ante de flux de revenus futurs, situation qui théoriquement se traduit par trois éléments : - Une hausse instantanée de la rentabilité financière dont bénéficie l'investisseur puisqu'il perçoit dans ses flux de revenus actuels des anticipations de croissance (la MVA). - Un transfert du risque économique de l'investisseur vers l'entreprise, puisque celle ci doit assurer par avance la rémunération du capital investi - Une incitation à la réalisation du niveau d'EVA anticipé par les investisseurs, puisque c'est la firme qui, en définitive, assume le risque de non-réalisation des anticipations de revenus futurs. Il en résulte alors une modification de la relation d'agence qui lie les dirigeants aux investisseurs. Ces derniers peuvent estimer le montant des EVA futures et ainsi anticiper le montant du rendement financier qu'ils ont la capacité d'exiger. Le modèle EVA-MVA ne réclame en aucune manière une information parfaite. C'est une trajectoire que les investisseurs peuvent imposer aux dirigeants comme ligne directrice de leur action. Il s'ensuit alors que l'excédent ainsi déterminé, l'EVA, présente les caractéristiques d'un revenu résiduel dont la théorie de l'agence énonce que ce revenu doit revenir aux seuls actionnaires. Dès lors la relution92(*) s'insère parfaitement dans le dispositif de « délivrer du cash ». Il est alors relativement aisé de montrer que toutes les techniques qui permettent de faire passer la valeur vers les actionnaires excipent d'un même principe qui consiste à renvoyer le risque économique vers l'entreprise. Dans la même optique, la technique du « demerger »93(*) est une des pratiques employées pour identifier et faire remonter les sources de cash vers les actionnaires. Par la mise en oeuvre de tels mécanismes, les investisseurs institutionnels maîtrisent la circulation des flux de liquidités auparavant gérés en interne par les directions d'entreprises. Section 3 : Etude de l'impact du processus du contrôle sur la création de valeur L'objectif de cette recherche est d'étudier l'effet des mécanismes de contrôle par le conseil d'administration et la structure de propriété sur la création de valeur aux actionnaires dans les entreprises tunisiennes. 3-1 : Présentation du modèle On se réfère à l'étude de Panasian C et Andrew K. Prevost (2004)94(*). Ces auteurs ont mesuré la performance des entreprises par le ratio Q de tobin. Le modèle à tester se présente comme suit : Qi,t = á0 + á 1 ADMEXTi,t + á 2 LTCAi,t + á 3 KDIRi,t + á 4 KINSi,t + á 5 DUALi,t + á 6 TAILLEi,t + á 7 DETTEi,t + á 8 CAPEXi,t+ á 9 ROAi,tåi,t 3-2 : Définition des variables 3-2-1 : La variable dépendante Qi,t = nous allons mesurer la performance de l'entreprise par le ratio Q de Tobin. Il est calculé de la manière suivante : Qi,t = valeur de marché de l'entreprise + total actifs - valeur comptable des capitaux / total actifs 3-2-2 : Les variables indépendantes ADMEXTi,t : C'est le pourcentage des administrateurs externes dans le conseil d'administration mesuré par le rapport suivant : Nombre d'administrateurs externes / taille du conseil. LTCAi,t : C'est le logarithme népérien appliqué à la taille du conseil d'administration. KDIRi,t : C'est le pourcentage du capital détenu par les dirigeants, mesuré par le rapport suivant : Nombre d'actions détenues par les dirigeants / Nombre total des actions. Cette variable mesure l'importance de la propriété managériale et son influence sur l'amélioration de la performance. Une augmentation de la propriété managériale aura pour effet de réduire les conflits d'intérêt entre actionnaires et dirigeants. KINSi,t : C'est le pourcentage du capital détenu par les investisseurs institutionnels, mesuré par le rapport suivant : Nombre d'actions détenues par les investisseurs institutionnels/ Nombre total des actions. DUALi,t : C'est une variable muette qui prend la valeur (1) lorsque le manager occupe la position du président du conseil d'administration et la valeur (0) ailleurs. * 76 Faleye O(2004), « Are Large Boards Poor Monitors? Evidence from CEO Turnover» , Northeastern University, working paper. * 77 Kath et Kim, ABC, (2003) op cit. * 78 David A. Carter, Betty J. Simkins, et W. Gary Simpson, op cit. * 79 Hermalin, B., et M. Weisbach. (2003) op cit. * 80 Kenneth Biggs (novembre 2004) : « La réforme du conseil d'administration : création de valeur ou surveillance? » http://www.managementmag.com/index.cfm/ci_id/1429/la_id/2 * 81 PEI SAI FAN (mars 2004), op cit. * 82 Uma. V. Sridharan* et Allan Marsinko (2005), op cit. * 83 Christine Panasian (2004), op cit. * 84 Ben-Amar W et André P (2005) « Separation of Ownership from Control and Acquiring Firm Performance: The Case of Family Ownership in Canada» working paper. * 85 Chen A et Kao.L, (2005), «The Conflict Between Agency Theory and Corporate Control on Managerial Ownership: The Evidence from Taiwan IPO Performance», INTERNATIONAL JOURNAL OF BUSINESS, vol 10, N°1, 2005 PP : 39-61. * 86 J.R. Davies, Hillier D et McColgan P (2004) «Ownership Structure, Managerial Behavior and Corporate Value» University of Strathclyde Working Paper, http://ssrn.com/abstract=302596 * 87 Gillan, S. L., et L. T. Starks, (2003), « Corporate Governance, Corporate Ownership, and the Role of Institutional Investors: A Global Perspective »working paper, University of Delaware Weinberg Center for Corporate Governance and Baylor University. * 88 Chen A et Kao.L, (2005), op cit. * 89 John J. Mc Connell et Henri Servaes « additional evidence on equity ownership and corporate value » ; journal of financial economics 27 (1990), pp 595 - 612. * 90 Gillan.S.L et Starks.l.t (2000) « corporate governance proposals and shareholder activism : the role of institutional investors », journal of financial economics, vol 57 , (2000), pp: 275-305. * 91 Baudru.D et Kechidi.M « Stratégies financières des investisseurs institutionnels internationaux et comportement des firmes : le contrôle par le marché » www.google.com * 92La relution est une technique qui consiste dans le rachat par une société d'une fraction de son capital en vue de le détruire, l'emploi de cette technique permet de transférer de la valeur économique vers les actionnaires. * 93 La technique du « demerger » est la scission de sociétés en unités économiquement homogènes. * 94 Panasian C et Andrew K. Prevost (2004) «Board Composition and Firm Performance: The Case of the Dey Report and Publicly Listed Canadian Firms». http://college-of business.massey.ac.nz/commerce/Seminar_papers
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