1.2.2 La création des « Chambres des
métiers »
Le projet de loi Courtier ne plaît pas à la
Chambre de commerce de Lyon. Aucune distinction n'est faite jusque là
entre les artisans et les industriels. Les artisans sont donc
régulièrement inscrits au registre du commerce, et doivent verser
une taxe destinée au fonctionnement de la Chambre de commerce. Celle-ci
est donc tout à fait hostile à la création de Chambres de
métiers artisanales qui feraient perdre un nombre non négligeable
de ressortissants à la Chambre de commerce. C'est ce qui la pousse
à promouvoir la création de « Chambres des métiers
» qu'elle contrôlerait.
Ce n'est pourtant pas le risque de sécession de
l'artisanat qu'elle met en avant dans son rapport
19. [ADR 9M30]
20. Lettre du 30 juillet 1924 de M. Wiernsberger au
préfet, transmise par celui-ci au sous-secrétaire d'État
à l'enseignement technique le 4 août 1924 [ADR 9M30].
21. Lettre du 30 juillet 1924 de M. Wiernsberger au
préfet, transmise par celui-ci au sous-secrétaire d'État
à l'enseignement technique le 4 août 1924 [ADR 9M30].
22. Lettre de la préfecture à M. Wiernsberger, le
6 octobre 1924 [ADR 9M30].
23. Transmission des statuts des nouveaux « Conseils de
métiers » au sous-secrétaire d'État à
l'enseignement technique par le préfet, le 24 octobre 1924 [ADR
9M30].
de février 1923 sur les Chambres de métiers
24 . Son argumentation est d'abord légaliste: l'organisation
de l'apprentissage est une des prérogatives des Chambres de commerce
prévue par la loi du 9 avril 1898. Des « Chambres de métiers
» ayant pour but l'organisation de l'apprentissage et de l'enseignement
professionnel ne peuvent donc s'organiser indépendamment des Chambres de
commerce. Les Chambres de commerce doivent donc mettre en place de telles
«Chambres de métiers », et décider de la forme qu'elles
doivent prendre.
La Chambre de commerce propose donc un modèle de «
Chambre des métiers ». Chacune doit être strictement
professionnelle, créée par les syndicats de chaque branche. Ce
seraient des chambres paritaires, composées à part égales
de patrons et d'ouvriers, mais comportant en sus un membre de la Chambre de
commerce. La Chambre de commerce exercerait un contrôle sur chacune de
ces Chambres par l'intermédiaire d'une Commission supérieure de
l'apprentissage et de l'enseignement technique. En échange chaque
Chambre aurait droit à un siège au sein de ce comité.
A la suite de ce rapport, trois « Chambres des
métiers » sont créées dans le Rhône, sous la
tutelle de la Chambre de commerce lyonnaise. La « Chambre des
métiers de la métallurgie », la «Chambre des
métiers de la soie » et la « Chambre des métiers de la
bijouterie » sont créées par les syndicats patronaux de leur
branche respective25. Leur conformité aux dispositions prises
par la Chambre de commerce le 22 février 1923 est reconnue par la
Chambre de commerce dès qu'elle a reçu leurs statuts 26
. Le contrôle de la Chambre de commerce est exercé par un de
ses membres, nommé pour faire partie de la « Chambre des
métiers »27. En contrepartie le
président de chaque « Chambre des métiers » fait partie
de la Commission supérieure de l'apprentissage et de l'enseignement
technique de la Chambre de commerce. Ces « Chambres des métiers
» reçoivent une subvention de la Chambre de commerce égale
au tiers de leur dépense28.
La Chambre de commerce rejette toutes les demandes faites par
des groupements qui n'ont pas encore créé leur « Chambre des
métiers » 29 : ce sont aux syndicats patronaux seuls de les
créer, la Chambre de commerce ne se veut qu'une instance de
contrôle, sans responsabilités financières. Elle reste
libre d'accorder ou de refuser des subventions.
Le nombre de « Chambres des métiers »
n'augmente plus par la suite. Jusqu'en 1925, les
24. Plaquette reproduisant ce rapport, voté dans sa
séance du 22 février 1923 [ADR 9M30].
25. Compte-rendu des travaux de l'année 1923, pages
485-491. Ce sont la Chambre syndicale des industries métallurgiques, le
Syndicat des fabricants de soieries et la Chambre syndicale des fabricants et
commissaires bijou-tiers [ACCL CR 1923-1925].
26. Compte-rendu des travaux de l'année 1923, pages
485-491. Lettres de la Chambre de commerce aux « Chambre des
métiers » du 1er avril (soie), 5 et 17 mai
(métallurgie), entre le 15 juin et le 11 octobre 1923 (bijouterie) [ACCL
CR 1923-1925].
27. Compte-rendu des travaux de l'année 1923, pages
485-491. Séance du 31 mai 1923 (soie et métallurgie);
séance du 11 octobre 1923 (bijouterie) [ACCL CR 1923-1 925].
28. Compte-rendu des travaux de l'année 1923, pages
485-491. Séance du 19 juillet 1923 (soie et métallurgie),
séance du 11 octobre 1923 (bijouterie) [ACCL CR 1923-1925].
29. Compte-rendu des travaux de l'année 1923, pages
485-491. Séance du 14 juin 1923: M. Chaleyssin, président de
l'atelier-école d'ébénisterie, demandait des subventions
en vue de la création d'une « Chambre des métiers de
l'ébénisterie »; Le patronage des apprentis tailleurs de
Lyon aussi, pour créer une « Chambre des métiers de
l'aiguille» [ACCL CR 1923-1925].
trois « Chambres des métiers »
créées en 1923 continuent de fonctionner normalement, et sont
toujours subventionnées par la Chambre de commerce30. En
1924, il est décidé de leur demander de se déclarer comme
associations loi de 1901 afin qu'elles obtiennent la personnalité
civile, qu'elles puissent acquérir des immeubles nécessaires
à leur fonctionnement, et qu'elles puissent recevoir des cotisations de
leurs membres supérieures à 500 F31.
L'objectif de ces « Chambres des métiers »
est de contrôler et d'organiser l'apprentissage, en particulier en
faisant partie du jury des CAP La « Chambre des métiers de la
métallurgie » considère en outre qu'une école est
indispensable, et elle est à la recherche de fonds pour la
création de celle-ci. Elle projette en août 1924
l'établissement de liens avec l'enseignement technique « dès
octobre 1934 » 32, sans qu'on sache ci ceux- ci ont
réellement été établis, ni comment.
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