B / - Les effets sur le milieu environnemental
Outre la première série d'effets induits
(sécheresses et inondations) préalablement
abordée, les bouleversements climatiques vont
entraîner par ailleurs maints impacts sur les
milieux physiques. L'on observe bien souvent un
enchaînement d'aléas dont l'action
combinée contribuent à influer de manière
très nette les dynamiques des milieux
environnementaux.
1 / - Les glissements de terrain
Les excédents pluviométriques observés en
Equateur et au nord du Pérou lors des
épisodes El Niño favorisent en premier lieu le
ruissellement à l'origine des crues et des
inondations et en second lieu l'infiltration massive d'eau dans
les sols. Cette imbibition
excessive va être à l'origine d'une sursaturation
des formations superficielles en eau qui
contribue à réduire la résistance au
cisaillement des matériaux et à diminuer ainsi leur
cohésion. En conséquence, l'on enregistre une
occurrence de glissements de terrain beaucoup
plus élevée lors des phases négatives de
l'IOA dans les régions susmentionnées.
Néanmoins, la mise en mouvement de matière est
également conditionnée par bon
nombre de paramètres tels que la valeur des pentes, la
composition lithologique des
formations, la couverture végétale, la
répartition et la quantité d'eau précipitée...
Aussi, des
régions sont-elles plus susceptibles d'être
concernées. Par ailleurs, les anomalies
hydrométéorologiques
n'étant jamais identiques selon les
événements ENOA, l'apparition de
glissements de terrain ne s'effectuera pas nécessairement
aux mêmes endroits d'un épisode à
l'autre.
A. Rivera61 observe par exemple que la quantité d'eau
précipitée à Esmeraldas (au
nord de l'Equateur, voir figure n°15)62 entre janvier 1982
et février 1983 a été de 1 522 mm
contre 2 436 pour la même période en 1997-98. Il
poursuit en notant qu'il ne s'était pas
produit, il y a 16 ans, autant de glissements que lors du dernier
phénomène, période au cours
de laquelle plusieurs centaines d'accidents ont été
répertoriées. Il en conclue qu'en 1982-83,
la quantité d'eau précipitée a
été quasi-équivalente à la valeur de
l'évapotranspiration réelle et
qu'il n'y a pas eu les conditions de saturation
nécessaires à la déstabilisation des versants
comme cela a été le cas en 1997-98.
La carte de la page suivante (figure n°15) illustre à
titre d'exemple les impacts du El
Niño 1982-83 sur le milieu physique en Equateur (outre les
zones inondées, sont localisés les
secteurs affectés par des éboulements, des
glissements de terrain, des coulées boueuses,...).
Esmeraldas se situent dans un secteur sensible (les formations
sont en grande majorité
argileuses de type smectites, absorbantes et expansives).
L'érosion y est très active ce qui
explique la survenue de glissements de terrain compte tenu des
hauteurs d'eau précipitées lors
du dernier événement El Niño.
61 Ingénieur au Département Technique de la
Défense Civile Equatorienne.
62 RIVERA A.M., 1998a, Teoría del deslizamiento que
produjo la ruptura del oleoducto y poliducto en la ciudad
de Esmeraldas, in Revista del Colegio de Ingenieros
Geólogos de Minas y Petroleos, CIGMYP, N°12, 1p.
32
Figure n°15 - Carte localisant les impacts
du El Niño de 1982-83 sur le milieu physique en Equateur,
d'après Pourrut, 1993, «L'effet ENSO sur les
précipitations et les écoulements au XXème siècle
en Equateur »
Les enregistrements de la base de données DesInventar63
permettent par ailleurs de
montrer l'augmentation du nombre de glissements de terrain qui
surviennent en période El
Niño. Un graphique, avec en abscisse les années et
en ordonnée le nombre de mouvements en
masse, permet de visualiser cette relation (Figure n°16).
Toutefois, le rapport n'est pas
toujours direct et immédiat. Il peut en effet exister un
décalage. L'abondance des pluies peut
par exemple contribuer dans une premier temps à augmenter
l'instabilité des terrains.
63 Base de données de la Red, Réseau
d'études en sciences sociales pour la prévention des
désastres (voir
glossaire).
33
Au cours de l'année suivante des précipitations
même moyennes peuvent suffire à
mettre en mouvement les formations saturées au
préalable. Qui plus est, le graphique met en
exergue la hausse de ce type de manifestations au cours des 10
dernières années. On pourrait
l'expliquer tout d'abord par l'intensification de l'occurrence
des phénomènes El Niño, étudiée
dans le premier chapitre, ou en second lieu par un recensement
plus exhaustif des aléas64.
Figure n°16 - Nombre de glissements de
terrain recensés en Equateur depuis 1988, d'après les
enregistrements
de la base de données DesConsultar, fournis par Gloria
Roldán de la Defensa Civil de Ecuador.
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