L'influence des facteurs structurels sur le choix de mode de présence( Télécharger le fichier original )par Moujib Errahmen Ismaili FSEG-MAHDIA (Tunisie) - Maitrise en management 2004 |
Chapitre II :La Joint Venture : une forme de coopérationL'économie mondiale connaît un perpétuel changement de structures, lié notamment au progrès technique et à la globalisation croissante des marchés. Cela présente aux entreprises un défi dans tous les domaines (technologique, marketing, management, finances), défi qu'elles ne peuvent assumer isolément. La coopération entre les entreprises devient une solution indispensable. La joint venture, une forme de coopération, est un passage obligé dans des pays très fermes qui l'imposent légalement et qui interdisent la création de sociétés détenues à cent pour cent par des étrangers. La création d'une filiale commune (joint venture) avec des entreprises locales est également souhaitable pour pénétrer durablement et efficacement certains marchés caractérisés par des législations, des contraintes administratives, des différences culturelles ou commerciales, des réseaux de distribution,...qui les rendent trop complexes. Section 1 :Définition et caractéristiques de la joint venture1-Définitions Les définitions relatives aux joint ventures, proposées dans la littérature économique sont multiples. Nous citons quelques-unes : « Au moins deux entreprises souveraines, n'appartenant pas à un même groupe, s'entendent pour poursuivre un but conjoint dans un espace spécifié, mettant en commun ou échangent des ressources pour obtenir des résultats avantageux, tout en restant indépendantes en dehors de l'alliance. Celle-ci prend forme à travers la mise en place d'une entité organisationnelle conjointe distincte. En revanche, l'acquisition d'une entreprise par une autre, l'octroi unilatéral d'une licence, la recherche sous contrat ou la fusion totale sont des opérations qui ne répondent pas à la définition proposée. »36(*) « La joint venture implique une association avec un partenaire industriel extérieur et porte sur un projet déterminé en commun ; elle comporte la mise en commun de moyens et de risque. Son caractère est contractuel : même si la joint venture a besoin d'un support, sous forme d'une entité juridique, le « contrat » (accord des parties) l'emporte sur la « structure » (personne morale régie par le droit des sociétés). Elle est un « mariage » qui implique, en principe, un égal accès aux décisions, indépendamment des contributions respectives des partenaires : la joint venture est fondée sur le principe de parité. La cohésion et la solidité de l'affaire résident, en définitive, dans l'équilibre résultant d'intérêts réciproques, dans des rapports de complémentarités parfaitement définis. »37(*) « Entités qui jouent un rôle de plein droit sur le marché et sont détenues ou contrôlées par deux personnes au moins qui ne sont pas des investisseurs ordinaires et ne sont pas non plus sous contrôle commun. »38(*) Ainsi, la joint venture est le résultat d'une association entre deux ou plusieurs entités économiques indépendantes, mais qui n'abandonnent pas leur indépendance du fait de l'accord. Les partenaires participent à la direction de l'entreprise et contribuent de manière significative aux décisions, par leur droit de vote. 2-Caractéristiques de la joint venture 2-1-Aperçu historique Les premières formes de la coopération inter-entreprises étaient essentiellement des joint ventures (JV). Ce sont des filiales crées dans des pays cibles par des multinationales (généralement américaines) qui cherchent à pénétrer dans une nouvelle zone géographique. Le principe de la joint venture consiste à partager le capital de la filiale avec un partenaire « autochtone ». L'activité de la société commune et normalement limitée à la commercialisation et éventuellement, à la fabrication des produits de la multinationale dans le pays d'accueil. Cette forme d'accord inter-entreprises a progressé rapidement vers un nouveau type de coopération, dont le poids et les implications stratégique pour les entreprises concernées dépassaient de loin ceux des joint ventures traditionnelles. Les alliances stratégiques étaient nées. a-Joint ventures et mutinationalisation Si l'on cherche à comprendre comment ont évolué les activités réelles des joint-ventures internationales, on constate un changement fondamental à partir de 1975. Dès cette époque alliances d'un type nouveau, proche des partenariats stratégiques actuels, apparaissent parmi les joint ventures traditionnelles. En effet, l'activité de certaines firmes multinationales ne se limite plus à la commercialisation locale de produits déjà développés et fabriqués par la maison mère américaine ; elle s'élargit au développement de nouveaux produits et à l'exportation vers de nouveaux pays. Ainsi, il apparaît clairement que les joint ventures internationales se dégagent progressivement du modèle traditionnel, qui en faisait un simple mode d'exportation, pour évoluer vers davantage d'autonomie stratégique, voire concurrencer les activités de la maison mère. On voit ainsi apparaître, à travers l'évolution des joint ventures de multinationalisation, le phénomène actuel des alliance stratégiques. Toutefois, cela ne signifie pas que les classiques joint ventures d'expansion internationale soient vouées à disparaître. Au contraire, les groupes multinationaux continuent à en créer, notamment dans les pays en voie de développement et dans les pays de l'Europe de l'Est où la législation impose qu'un certain pourcentage du capital des sociétés soit détenu par des actionnaires locaux39(*). b-Joint ventures et concurrence Alors que l'objectif initial des études sur les joint ventures internationales était de comprendre les différents modes de multinationalisation des entreprises, le but de recherche sur les joint ventures entre firmes d'un même pays est en général d'en évaluer les effets anticoncurrentiels. La plupart des études réalisées aux Etats-Unis dans les années 1960 et 1970 tendent à démontrer que les accords entre firmes américaines sont conclus dans un but de collusion et ont des effets anti-concurrentiels. Il apparaît d'ailleurs que, dans la majorité des cas, les joint ventures associent des firmes concurrentes entre elles, ce qui semble bien prouver leur caractère collusif. Pourtant, vers la fin des années 1970, des analyses radicalement différentes commencent à apparaître. Certains auteurs se mettent à plaider en faveur des alliances en montrant que celles-ci peuvent répondre à des objectifs parfaitement légitimes, allant dans le sens du progrès économique. En effet, de nombreuses joint ventures sont motivées par la volonté d'acquérir et de combiner des savoir-faire, ce qui permet d'innover et de mieux satisfaire les clients. En nouant des alliances, les entreprises n'ont donc pas systématiquement pour objectif premier d'accroître les prix, de réaliser des profits immédiats ou d'améliorer leur sécurité, elles recherchent plutôt une alternative à la recherche et développement (R&D) interne40(*). 2-2-Les raisons d'être Il existe une multitude de raisons qui motivent des entreprises à s'associer en vue de créer une filiale commune. Les principales sont généralement d'exercer sur une base commune des activités de production ou de distribution et vente de produits. a-La mondialisation D'après Garrette et Dussauge (1995)41(*), la mondialisation de l'économie (ou globalisation) est générale et se produit dans toutes les activités. Les technologies de l'information (informatique, télécommunications, télécopie...) ont énormément évolué, facilitant ainsi les communications internationales au sein d'une même entreprise. Il est ainsi désormais possible pour les entreprises de faire travailler ensemble des équipes situées sur tous les continents et d'accéder à toutes sortes de ressources techniques sur un plan mondial. Par ailleurs, on assiste à une certaine uniformisation des modes de vie et des comportements de consommation, surtout dans les trois zones les plus développées du monde : Les Etats-Unis, l'Europe et le Japon. b-Accélération du changement technologique La rapidité des changements ne permet pas de rester en contact avec toutes les innovations. L'entreprise doit se concentrer sur son activité et se garantir l'accès à d'autres domaines essentiels à l'aide de coopérations interentreprises. Dans les secteurs où la technologie est une source importante d'avantages concurrentiels, il n'est plus possible aux entreprises d'assumer seules les dépenses en recherche-développement, ni de développer seules l'ensemble des compétences nécessaires pour mener une stratégie parfaitement autonome. Les perspectives de recherche sont plus nombreuses et de ce fait plus coûteuses alors que les résultats deviennent plus aléatoires. L'importance des ressources à investir ainsi que la complexité des technologies à développer incitent les entreprises à s'allier, afin de combiner des compétences variées et complémentaires. Les joint ventures permettent donc, en répartissant les travaux de R&D entre partenaires, de multiplier les pistes explorées, de partager les coûts et de combiner les compétences42(*). c-Les obstacles au commerce Les variations de change, les diversités de conditions nationales et les obstacles tarifaires et non-tarifaires toujours persistants obligent à mettre en place des structures internationales appuyées sur des partenaires qui disposent d'une expérience et de contacts dans la communauté d'affaires et auprès des autorités locales43(*). 2-3-Avantages et inconvénients De multiples avantages et inconvénients sont liés au choix de la joint venture comme forme de coopération a-Avantages La création conjointe d'une filiale peut présenter les avantages suivants : -Pénétration des marchés plus facile et plus rapide pour une entreprise limitée en ressource financière et humaine. En effet, elle peut disposer des circuits de distribution déjà bien implantés localement de son partenaire, ce qui lui permet de réaliser un volume de ventes plus élevé en moins de temps ; -Diminution des risques financiers et des coûts qui sont théoriquement partagé entre les partenaires. La joint venture permet ainsi à certaines entreprises, grâce à la mise en commun de moyens, de financer des projets qui autrement auraient été inaccessibles ; -Diminution du risque commercial car l'entreprise peut bénéficier de l'expérience du marché (culture, réglementations, contacts...) et des compétences de gestion de son partenaire local. L'exportateur se familiarise et s'adapte en conséquence plus facilement aux conditions et aux besoins spécifiques du marché étranger ; -Naturalisation des produits. La joint venture n'étant pas perçue comme une entreprise étrangère, elle permet d'établir de meilleurs relations avec le gouvernement local et les syndicats et ainsi de simplifier les négociations et les formalités administratives ; -La souplesse d'organisation de la joint venture ; -La souplesse fiscale liée au choix du pays d'accueil de l'entreprise conjointe ; -L'indépendance et le dynamisme de gestion lié à une entité spécifique ; -La responsabilité limitée des partenaires ; -L'octroi d'une structure idéale pour la création de technologies nouvelles en commun. b-Inconvénients L'entreprise s'expose à un certain nombre de risques et d'inconvénients lorsqu'elle opte pour la création d'une filiale commune44(*) : -Les bénéfices potentiels sont moindres car ils doivent être partagés ; -Les coûts de création et, le cas échant, de dissolution de la société sont assez importants. Outre l'investissement financier, la création d'une joint venture exige un investissement en temps et en énergie beaucoup plus important que les autres formes de partenariats ; -Le formalisme de la structure est plus élevé que dans d'autres formes de partenariat. Le montage juridique est très délicat à mettre en place ; -Risque de mésentente à propos de la répartition des dividendes. L'évaluation des apports de chaque partenaire, vu leur nature à la fois matérielle ou intellectuelle, est une étape complexe et délicate ; -Risque de mésentente sur les philosophies managériales à appliquer (stratégie, gestion du personnel, politique marketing, recherche et développement,...) ; -Risque de conflit d'intérêt ; -Risque de manque de communication avant, pendant et après la formation de la joint venture ; -Risque d'affecter les opérations sur d'autres marchés. Si l'entreprise voulait créer une structure locale dans un pays tiers où la joint venture est active commercialement, elle devient alors un concurrent potentiel de la joint venture alors qu'elle en est encore partenaire ; -Outre l'avantage qu'elle apporte aux actionnaires, la responsabilité limitée au capital social limite la garantie apportée aux tiers. * 36 Jolly D (1995) « Manager un partenariat technologique », Expansion Management Review, Juin 1995. * 37 Libbey J (1990) L'entrepreneuriat en Afrique francophone, Editions AUPELF-UREF, 1990. * 38 Werden G ( 1998).« Antitrust Analysis of Joint Ventures: An Overview », Antitrust Law Journal, Vol. 66, * 39 Alain N & Philippe V & Michel W : « Les perspectives en management stratégique », Tome II, 1994-1995 * 40 Alain N & Philippe V & Michel W (1994-1995) Op-cit * 41 Garrette, B & Dussauge, P (1995) Op-cit * 42 Dussauge, P & Ramanantsoa, B (1987) « Technologie et stratégie d'entreprise, McGraw-Hill * 43 Langefeld W K (1992) Op-cit * 44Guédon S & Mélou C(2002), Op-cit |
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