I-3 Les acteurs de la place financière
helvétique.
a) Diversité du paysage bancaire suisse.
Les quelques 356 banques suisses - définies par la
Banque Nationale Helvétique comme des établissements «qui
acceptent à titre professionnel les dépôts du public
ou font appel au public pour obtenir des fonds en
dépôt » - se divisent en groupes distincts tant par leur
taille que par leur spécialisation et leur culture d'entreprise.
· Les grandes banques
Au sommet de la hiérarchie se trouvent les
« grandes banques ». De huit dans les années 1930,
ces établissements ne sont plus que deux aujourd'hui : l'UBS et le
Credit Suisse Group. Fin 2002, ces deux banques représentaient à
elles seules 60% de la somme des bilans de toutes les autres banques suisses,
et employaient presque 55 000 personnes, alors que l'effectif total du
personnel des banques suisses en Suisse était de 104 000 personnes
environ. Leur position dans le paysage bancaire suisse est donc largement
dominante.
Si l'on s'en tient au seul secteur de la gestion de fortune
privée, cette domination est même écrasante. L'UBS est la
plus grande banque privée du monde : sa division
« private banking » gérait en 2001 quelques 718
milliards de CHF et comptait, en 2003, environ 350 000 clients
privés. Le Crédit Suisse comptait pour sa part environ
200 000 clients privés pour 473 milliards de CHF sous gestion. Ces
établissements sont très présents au niveau international
et constituent des concurrents sérieux pour les grands groupes bancaires
américains sur leur propre marché, y compris dans les secteurs
autres que la banque privée, comme le financement de fusions et
acquisitions et autres activités de « banque
d'affaires ».
Les deux grandes banques occupent une bonne moitié du
paysage bancaire suisse. Mais toutes les autres banques pratiquent, à
des degrés divers, la gestion de fortune privée et attachent donc
une importance particulière à la préservation du secret
bancaire. C'est le cas des 24 banques cantonales, établissements
à capitaux publics dont l'activité essentielle demeure le
prêt aux entreprises locales, mais qui occupent de 6% à 10% du
marché de la gestion de fortunes privée.
· Les banquiers privés
Mais les spécialistes incontestés sont ceux que
l'on nomme les « banquiers privés ». Ces derniers
dirigent moins des banques que des « maisons » dont les
plus anciennes ont été fondées au milieu du 18e
siècle. Les 15 établissements officiellement recensés
comme « banquiers privés » ne font pas appel au
public pour obtenir des dépôts et ne sont pas tenus de respecter
les obligations qui incombent aux autres banques en matière de
réserves obligatoires et de fonds propres. Ils ne sont pas non plus
tenus de publier leurs chiffres et demeurent, de ce fait, relativement
inconnus. Cependant, lorsqu'ils sont communiqués, les chiffres
révèlent des masses sous gestion considérables : en
2001, les banques privées genevoises Pictet & Cie et Lombard Odier
géraient respectivement 207 et 110 milliards de CHF. Pour son exercice
2003, la Banque Privée Edmond de Rothschild dépassait les 51
milliards de CHF sous gestion.
Les associés des banques privées
répondent de la bonne marche de leurs établissements sur leur
fortune personnelle : toute prise de risque intempestive est donc exclue,
et ce système apparemment archaïque explique en bonne partie
l'extraordinaire longévité de ces
« maisons ». La responsabilité personnelle des
associés explique également le caractère passablement
fermé de ce milieu. Pendant longtemps, les associés
étaient nommés à vie, et la notion de limite d'âge
n'est entrée dans les moeurs que récemment. La tradition
familiale revêt une importance centrale : par exemple, la banque
Lombard Odier Darier Hentsch & Cie, dont l'une des parties constituantes a
été fondée au 18e siècle par Jean
Gédéon Lombard, compte toujours un Lombard et un Odier parmi ses
associés. Il en est de même pour la Banque Privée Edmond de
Rothschild.
Boutiques de luxe de la finance internationale, les banques
privées sont très minoritaires en terme d'effectifs : en
mars 2001, elles ne comptaient qu'un peu plus de 4000 collaborateurs en Suisse.
En revanche, elles ont toujours été à la pointe de la
défense du secret bancaire.
· Les banques
étrangères
L'importance des étrangers pour les banques suisses -
ils représentent environ 60% de la clientèle - et la position de
la Suisse dans le système financier mondial expliquent la forte
présence de groupes bancaires internationaux sur le territoire
helvétique. En 2002, selon la Banque Nationale Suisse, les 143 banques
étrangères actives géraient environ 20% du total des fonds
déposés dans le pays. Plusieurs très grands groupes, tels
qu'HSBC, Deutsche Bank, Barclays, BNP Paribas, ont fait de la Suisse leur
centre mondial pour la gestion de fortune.
Ces établissements très disparates à
capitaux européens, américains, russes, japonais,
israéliens ou arabes, sont des banques servant d' «
antenne » suisse pour leur clientèle nationale, et leurs
dirigeants gèrent souvent leur établissement comme une
entité indépendante. Le secret bancaire interdit en effet
à la filiale d'une banque étrangère en Suisse de
communiquer à sa maison-mère le nom de ses clients.
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