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Evaluation de la durabilité des amendements organiques et calcaires sur le procédé de phytostabilisation de GCM/Penga Penga dix ans après


par Achille Nkulu
Université de Lubumbashi - Master 2019
  

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1.3. Mécanismes de réhabilitation des sols contaminés en métaux lourds

La découverte des flores d'espèces métallicoles des gisements naturels a permis le développement des technologies vertes de réhabilitation des sols contaminés en métaux lourds. Ces techniques sont réunies sous le vocable `Phytoremédiation' (Cunningham &Ow,1996; Pilon-Smits, 2005). Elles présentent l'avantage d'être moins onéreuses et plus conformes avec les normes environnementales comparativement aux méthodes `traditionnelles' de traitement des sols contaminés en métaux lourds (Schnoor, 1997; Cunningham & Berti, 2000). Selon la technique utilisée, la phytoremédiation a pour objectif d'éliminer, contenir ou rendre inoffensifs les contaminants environnementaux présents dans les sols et les eaux (Salt et al., 1995 ; Cunningham & Ow, 1996 ; Pilon-Smits, 2005). Les principales techniques utilisées en phytoremédiation des sols contaminés en métaux lourds sont les suivantes (Pilon-Smits, 2005) : la phytoextraction,la rhyzofiltration, la phytostabilisation et tant d'autres.

1.3.1. Phytoextraction

L'objectif de la phytoextraction est d'extraire les métaux du sol via leur accumulation dans les parties aériennes des plantes. Celles-ci sont régulièrement fauchées et incinérées pour récolter les métaux qui peuvent ensuite être revalorisés dans l'industrie (ce procédé est appelé phytomining). Les plantes hyperaccumulatrices conviennent donc mieux pour la phytoextraction.

1.3.2. Rhizofiltration

Cette technique utilise des plantes tolérantes pour filtrer les eaux contaminées en métaux lourds. Dans cette technique les plantes sont utilisées pour créer une barrière hydraulique dans letraitement des eaux pour réduire la dispersion verticale ou horizontale des métaux.

1.3.3. Phytostabilisation

En phytostabilisation l'objectif est de réduire la mobilité et la dispersion des métaux dans l'environnement par ruissellement ou par les vents. Les métaux sont contenus dans le site via l'installation d'un couvert végétal dense et permanent. Cette technique est généralement utilisée dans le traitement des sols sujets à une contamination de nature polymétallique et à des concentrations excessives des métaux dans le sol.

La phytostimulation ou rhyzodégradation ainsi que la phytodégradation sont deux autrestechniques de phytoremédiation principalement utilisées pour le traitement des solscontaminés par des polluants organiques. Dans le premier cas, le polluant est dégradé dans larhizosphère par les microorganismes alors que dans le second cas le polluant est transloquédans les feuilles où il est dégradé par des enzymes (Pilon-Smits, 2005).

1.4. Processus de Phytostabilisation

En phytostabilisation on ne décontamine pas les sols comme tel parce que les métaux ne sont pas extraits du site. Par contre, l'installation d'un couvert végétal en phytostabilisation a pour principal objectif de diminuer la dispersion des métaux dans l'environnement. En plus, comme les sols sujets à des concentrations excessives des métaux sont généralement dénudés ou présentent une faible couverture végétale, la phytostabilisation permet également d'améliorer les qualités paysagères et de restaurer un écosystème fonctionnel capable d'accueillir une flore et une faune diversifiées (Dubourguier et al., 2001). En phytostabilisation on fait généralement recours aux amendements afin de faciliter l'installation des plantes (De Villiers 1998). Leur utilisation vise à réduire la biodisponibilité des métaux dans le sol ainsi que d'en améliorer les qualités nutritionnelles et physiques. Ils sont de nature inorganique (la chaux, les oxydes de Fe et de Mn, les phosphates naturels, etc.) ou organique (compost, effluents municipaux, les sédiments riches en matière organique, (Shutcha et al., 2010). Le choix des plantes et des amendements est déterminant pour la réussite d'un projet de phytostabilisation. En plus d'être tolérantes aux métaux présents dans le site cible, les plantes utilisées en phytostabilisation ne doivent pas accumuler des concentrations élevées de métaux dans leurs parties aériennes car celles-ci peuvent être consommées par des animaux. Elles doivent également supporter les autres conditions hostiles du sol (pH bas, salinité, structure défavorable, sécheresse) qui limitent généralement la croissance des plantes. Les plantes utilisées en phytostabilisation doivent avoir un développement rapide pour établir un tapis végétal dans un bref délai, un système racinaire extensif et un port dense. Par ailleurs, elles doivent être faciles à établir et à entretenir, avoir une vie relativement longue et être apte à se propager et augmenter les effectifs d'elles-mêmes après la mise en culture par transplantation ou semis (Dubourguier et al., 2001 ; Mench et al., 2000, 2006). Les amendements utilisés en phytostabilisation doivent avoir un effet rapide sur la réduction de la mobilité des métaux dans le sol. Ils doivent également avoir un effet résiduel important sur les propriétés du sol et la performance des plantes. En outre, ils ne doivent pas être chers, ils doivent être faciles à manipuler et à appliquer, sans danger pour les manipulateurs, non toxiques pour la plante choisie, disponibles ou faciles à produire dans la région et ne doivent pas causer d'impacts environnementaux supplémentaire (Mench et al., 2000, 2006).

1.5. Flore cupricoles Katangais : source des plantes pour la phytoremédiation

1.5.1. Description

Les gisements métallifères hébergent une végétation toute particulière. Elle est le fruit de nombreuses années d'évolution sur des sols enrichis en métaux lourds. Ces substrats ont vu se développer des espèces végétales uniques, présentant des mécanismes biologiques leurs permettant de résister aux concentrations élevées en métaux lourds. Ces espèces constituent la flore métallicole. Les affleurements métallifères sont de hop stop qui nécessitent une protection particulière qu'il est nécessaire de protéger (Whiting et al., 2002 ; 2004). Leteinturier (2002) rapporte qu'à l'état actuel des connaissances, sur un total d'environ 280 collines métallifères, seules 70 collines ont été étudiées, soit seulement un quart. Sur les collines étudiées, il a été répertorié environ 548 espèces cupricoles reparties dans diverses famillesvégétales et parmi lesquelles selon Leteinturier et al. (1999), il a étérecensé plus ou moins42 endémiques des sites métallifères du Katanga, soit un taux d'endémisme d'environ 7.6 %. Dans cette flore il a également été établi qu'il y a 28 espèces hyper accumulatrices de cuivrequi ne sont connues que du Katanga. Dans la région Zambézienne ces plantes sont capables decoloniser les sites métallifères. La présence de cette flore métallicole est aussi due aux plus fortes concentrations en cuivre etcobalt dans le sol et cela a permis de crée des conditions écologiques particulière qui ont à leurtour occasionner l'apparition de ses espèces et leurs adaptations (Duvigneaud, 1958 ;Duvigneaud et Denaeyer De-Smet, 1963).

Figure 2. Origine de la flore cupricole Katangaise (Malaisse, 1983)

1.5.1.1. Intérêt de la flore du cuivre

L'intérêt de cette flore c'est dans la restauration des sites pollués par les activités minières, elle permet de conserver la diversité biologique de certains sites grâce à leurs caractéristiques biologiques dans l'accumulation des éléments traces métalliques et la conservation de la structure du sol(Leteinturier et al., 1999).

1.5.1.2. Plantes candidates à la phytostabilisation

La flore cupricole du Katanga constitue une importante ressource naturelle qui peut être utilisée pour la phytoremédiation des sols contaminés en métaux lourds. En effet, il y a des espèces qui possèdent des caractéristiques intéressantes qui peuvent être mises à profit pour le traitement des sols contaminés en métaux lourds. Par exemple, les plantes hyper accumulatrices de Cu et/ou Co peuvent être utilisées en phytoextraction alors que les graminées vivaces présentant une tolérance élevée au Cu peuvent être utilisées en phytostabilisation. Leteinturier et al. (1999) & Boisson et al.(2015) ont dressé une liste de 7 espèces candidates à la phytoremédiation sur base de leurs effets écologiques et leurs distributions le long des gradients du cuivre et de cobalt (tableau 1). Cette liste, qui n'est pas exhaustive, reprend effectivement des espèces comptées parmi les plus fréquentes sur les sites métallifères anthropisés les plus toxiques du Haut-Katanga tels que les remblais miniers et les friches industrielles à proximité des usines métallurgiques. Par ailleurs certaines espèces aux caractéristiques intéressantes et fréquemment rencontrées sur les remblais miniers peuvent également être de bonnes candidates à la phytostabilisation. C'est le cas de Monocymbium ceresiiforme et Eragrostis racemosa.

Tableau 1. Critères évalués sur les sept espèces de Poaceae, utiles pour la phytostabilisation, y compris leurs effets écologiques et leurs distribution le long des gradients du cuivre et de cobalt

Figure 3. Les 7 espèces candidates à la phytostabilisation en image (Boisson et al., 2015)

1.5.1.3. Intérêt de l'utilisation de M. altera dans la phytostabilisation

Les potentialités de M. altera en phytostabilisation ont été bien décrites par Leteinturier et al. (1999). Elles se basent principalement sur les caractéristiques botaniques de l'espèce et sur sa fréquence sur les substrats cuprifères comptés parmi les plus toxiques. En effet, comme déjà évoqué dans la description, M. altera forme des touffes denses et compactes qui stabilisent bien le sol. La plante est également présente sur les substrats cuprifères les plus toxiques constitués par les remblais miniers et les friches industrielles à proximités des usines métallurgiques. C'est généralement l'espèce dominante dans ces milieux et y forme parfois des pelouses mono spécifiques. Par ailleurs, elle supporte bien le piétinement, une caractéristique fondamentale pour la pérennisation du couvert végétal en conditions de fortes pressions anthropiques comme celles de Lubumbashi. Par ailleurs, elle accumule peu de métaux dans les parties aériennes, 394 et 13 ug.g-1 respectivement de cuivre et cobalt dans la matière sèche des parties aériennes (Shutcha, 2010). Enfin, l'espèce M.altera semble facile à multiplier par voie végétative et a une croissance rapide (Shutcha et al., 2010).

1.5.2. Cas de Phytostabilisation appliquées aux milieux pollués

Au cours des dernières décennies, beaucoup d'articles rapportant des essais de phytostabilisation ont été publiés. Néanmoins, dans leur grande majorité ces études concernent principalement l'Europe et l'Amérique (Kozlov & Zverara, 2007). Certains projets de revégétalisation à grande échelle constituent des véritables modèles de réussite. C'est le cas de la réhabilitation des sites contaminés par les fonderies de Cu dans la région industrielle de Sudbury au Canada (Whinterhalder, 1996 ; Cooke & Johnson, 2002) ou celle à Harjavalta en Finland (Kiikkila, 2003). Dans ces régions, l'utilisation d'espèces métallicoles locale sur des sols contaminés amendés avec de la chaux et du compost ou de la chaux associée à un apport de fertilisant a permis la reconstitution d'écosystèmes fonctionnels. En particulier, dans la région de Sudbury, on a pu revégétaliser 3000 ha (Whinterhalder, 1996) à 17.000 ha (Cooke & Johnson, 2002) de sol contaminés avec réintroduction d'espèces ligneuses. Cependant, il existe très peu de documentations sur des projets de réhabilitation en Afrique, et particulièrement en Afrique Centro-australe où les activités métallurgiques ont pourtant causé les dégâts environnementaux considérables. Parmi les rares documents qui sont publiés, on peut citer des essais de revégétalisation des remblais miniers au Zimbabwe (Piha et al., 1995). L'utilisation de M. altera, plante cupricole locale dans la phytoremédiation des sols contaminés en métaux lourds par l'activité minière, plus particulièrement à la phytostabilisation des surfaces de sol dénudés du quartier Gécamines/Penga Penga à cause de la contamination en Cu, Co, Pb, Zn suite aux retombées des fumées de la fonderie de l'usine Gécamines de Lubumbashi dans le Haut-Katanga a été ajoutée par Shutcha (2010) à la liste des efforts de phytoremédiation en Afrique Centro-australe.

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