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I. INTRODUCTION GENERALE
Bernard MANDEVILLE, médecin et philosophe du
17eme siècle a écrit une fable des abeilles en 1994
sur les vices privés qui font le bien public. Cette fable va connaitre
un grand ralentissement au 18e siècle avec un mélange
des critiques et d'injures. Mais nombreux auteurs dont les grands
économistes vont voir par la suite une anticipation du
libéralisme économique.1
On dira plus tard qu'à travers cette fable il a
été le visionnaire du libéralisme économique et
politique. Cette fable repose sur l'idée que les vices privés
font les richesses de nations.
Le recours à la force et à la coercition, mais
il faut le laisser faire, dans les grandes sociétés, ces vices
privés assurent automatiquement le bien public. Ces vices sont donc
aussi facteurs de la cause de prospérité mais la tromperie est
l'un des inconvénients qui accompagnent naturellement un commerce actif,
les autres sont les luxes et l'orgueil.
Cette fable aurait inspiré la théorie de la main
invisible développé par Adam Smith, qui, en poursuivant leurs
intérêts particuliers, les hommes travaillent aux biens communs.
D'où, la doctrine de l'harmonie naturelle.
On a une logique libérale voir ultra-libérale
qui est poussé à l'extrême et qui postule l'absence de tout
Droit Pénal dans le Droit des Affaires, il faut laisser donc les vices
parce que naturellement cela conduira au bien commun. On a l'idée d'une
autorégulation du marché.2
Le libéralisme économique est la plus importante
des pensées modernes. Plus ou moins de libéralisme
économique, par la reforme ou par la révolution, est le
problème politique central de toutes les sociétés
modernes. Mieux, le libéralisme économique a créé
le monde actuel. Il est le principe de base de la modernité : on si
définit en lui ou contre lui. Cette dernière position est celle
du marxisme. A tout problème social, le libéralisme moderne offre
des solutions se réclamant de la liberté individuelle et
promettant l'efficience économique.
1 Bernard MANDEVILLE, cité par Prof Laurent
NGOY NDJIBU, cours de Droit du Commerce International et Contrats Commerciaux,
inédit, Unilu, L2 Droit, 2019-2020, p6
2 Prof. Laurent NGOY NDJIBU, Cours de Droit
Commercial II : Droit du Commerce International et Contrats Commerciaux,
inédit, Unilu, L2 Droit, 2019-2020, p.6
2
L'on comprendra donc selon les libéralistes comme Kolm
Serge-Christophe et Mandeville Bernard, que le droit économique apparait
comme un obstacle préoccupant au plein épanouissement de la
liberté d'entreprendre ; c'est un domaine qui, selon eux, doit
s'autoréguler lui-même, mais l'on doit retenir que même si
l'on fonctionne dans le principe de liberté du commerce, cette
liberté n'aura de sens que s'il y a un minimum d'éthique ou de
morale, on ne peut donc pas avoir raisonnablement une économie dans
laquelle serait absente totalement toute moralité.
Certes, il convient de s'interroger sur les facteurs qui
expliquent les performances du libéralisme économique par rapport
aux autres doctrines. La réponse généralement
réservée à cette question fait presque l'unanimité
: le marché par le mécanisme de la concurrence serait plus
efficient. La concurrence garantissant que chaque ressource est utilisée
de façon la plus efficace, c'est-à-dire qui permette de produire
la plus grande quantité possible (out put) et à partir de la plus
faible quantité possible (input).3
La République Démocratique du Congo offre le
paradoxe d'un pays potentiellement riche aux habitants extrêmement
pauvres. « À l'indépendance, le Congo atteignait le
même niveau que le Canada, la Corée et le Brésil mais
aujourd'hui on la classe parmi les derniers pays en développement.
Marie MALAURIE VIGNALE souligne que : « la concurrence
porte en elle-même sa propre destruction ». « Le plus
compétitif l'emporte sur ses adversaires (Concurrents). Il peut alors
dicter sa loi à ses concurrents et consommateurs ». Il s'ensuit que
l'on peut escompter les effets bénéfiques de la concurrence que
si parallèlement à l'instauration de la liberté des
opérateurs économiques sur le marché, des normes encadrent
cette liberté.
La République Démocratique du Congolais par sa
loi Organique n°18-020 du 20 juillet 2018 relative à la
liberté de prix et la concurrence en son article premier dispose :
« la loi a pour objet de fixer les règles applicables à la
liberté de prix et organiser la libre concurrence. Elle définit
les dispositions de protection de la concurrence afin de stimuler la
transparence, la régularité et la loyauté des prix ainsi
que la lutte contre les pratiques restrictives et la hausse illicite des
prix... »4
3 SERGE CHRISTOPHE KOLM, le libéralisme
moderne, PUF, Paris, 1984, p11
4 Art 1er de la loi n°18-020 du 18
juillet 2018 relative à la liberté de prix et de la
concurrence
3
Cette liberté reconnue par la loi de 2018 a
été consacrée par la Constitution de la République
Démocratique du Congo en son article 35 qui dispose : « l'Etat
garantit le droit à l'initiative privée tant aux nationaux qu'aux
étrangers, »5
Pour André DELAUBADERE et Pierre DELVOVE, la
liberté d'entreprendre ne correspondrait qu'à une seule facette
qu'avait acquise le principe de la liberté du commerce et de l'industrie
dans la jurisprudence du Conseil d'Etat, celui-ci considère que la
liberté du commerce était à la fois une liberté
d'accéder aux professions et une protection des initiatives
privées contre la concurrence que pourrait leur faire les initiatives
publiques d'une part et d'autre part, la protection contre la
règlementation et une protection contre les prestations
concurrentielles. La liberté d'entreprendre serait donc limitée
au premier volet.6
Dans cette perspective, le Droit de la concurrence est
aperçu comme le régime juridique de l'exercice du commerce et en
conséquence, ce Droit est au coeur de la problématique du
développement économique dans le cadre ou il encadre la
concurrence, mécanisme conférant au libéralisme son
efficience et son efficacité.
Voulant établir le lien existant entre
développement économique et concurrence, il est
compréhensible que le Droit de la Concurrence suscite un
intérêt de la part de chercheurs corrélativement on se pose
la question de savoir s'il existe un rapport de cause à effet entre le
développement économique d'un pays et son ordonnancement
juridique économique.
En examinant l'ordonnancement juridique des pays
développés, émergents et en développement, l'on
observe qu'une disparité considérable quant aux contenus du Droit
de la Concurrence. Paradoxalement, il se remarque que contrairement au concept
en vogue de dérèglementation ou dérégulation qui
sous-entend qu'un Etat Liberal n'ait en matière économique qu'une
législation « minimale ».7
5Art 35 de la constitution de la RDC telle que
révisé à ce jour
6 André DELAUBADERE et P. DELVOVE, cité
par CHEROT Jean Ives, Droit public économique, Economica,
2e éd, Paris, 2007, p26
7 Marie MALAURIE V. cité KALOMBO BONGALA,
le Droit Congolais de la Concurrence à l'ère de la
mondialisation : « Contribution à l'étude du cadre
normatif et institutionnel » Thèse de doctorat, inédit,
2013-2014, p.1
4
On remarque que les pays dits développés se
distinguent par un arsenal juridique complexe à telle enseigne que l'on
vient à se demander si les problèmes économiques des pays
pauvres n'ont pas de rapport avec la carence leurs législations en
matière économique ?8
C'est dans cette option que nous nous proposons d'entreprendre
l'étude d'un thème : « problématique du
libéralisme économique comme cause de la concurrence
déloyale en RDC ».
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