B - Un constitutionnalisme qui progresse dans le temps
Selon Maldonado61, les processus constituants
latinoaméricains du 21e siècle doivent être
observés dans le cadre du dépassement d'une tradition
juridico-politique coloniale, marquée historiquement par la violence,
l'exclusion et la domination des peuples originaires. Dans ce processus de
transformation, le domaine juridique est devenu un élément
fondamental pour la compréhension des propositions de changement dans le
continent, car les pays qui sont passés par ces changements ont choisi
de les faire à partir du spectre constitutionnel. En effet, nous avons
pu constater que les mouvements autochtones initiés dans les
années 70 ont été l'épicentre des changements
constitutionnels en Bolivie et en Équateur. À la suite des crises
du modèle néolibéral, il y eut des revendications de
nouveaux droits sociaux parmi toutes les franges de la population, ces droits
incorporent la vision autochtone, comme le droit à l'eau, le buen
vivir, la sécurité alimentaire ou les droits de la nature
hors de l'optique occidentale62. Ces mouvements furent
initiés dans les années 70, mais les constitutions qui consacrent
ces droits, revendiqués surtout par les peuples autochtones dans les
rues, ne furent promulguées que dans les années 2000 (2008 pour
l'Équateur et 2009 pour la Bolivie). Les mouvements autochtones ont donc
eu besoin de presque 40 ans pour consolider un État plurinational,
État que nous étudierons plus profondément dans la
prochaine section. Comme les mouvements autochtones sont la raison et le
fondement du NCL, il est logique que ce dernier ait pris lui aussi 40 ans pour
se développer.
Pastor et Dalmáu63 nous enseignent que,
malgré les avancées du constitutionnalisme européen
à partir du constitutionnalisme démocratique des premières
décennies du 20e siècle, compris comme le
constitutionnalisme qui exprime la volonté du peuple et non plus un
constitutionnalisme de limitation de pouvoir, c'est en Amérique latine
que nous trouvons les tentatives de réalisation pratique du
constitutionnalisme démocratique, fruit des conditions sociales et
politiques présentes dans certains pays.
61 MALDONADO E. Emiliano, « Reflexões
críticas sobre o Processo Constituinte Equatoriano de Montecristi
(2007-2008) », Revista brasileira de políticas
públicas, vol. 9, n. 2, 2019, p. 133.
62 FAJARDO Raquel, « El horizonte del
constitucionalismo pluralista: del multiculturalismo a la
descolonización », in GARAVITO César Rodríguez
(dir.), El derecho en América Latina Un mapa para el pensamiento
jurídico del siglo XXI, Buenos Aires : Siglo Veintiuno Editores,
2011, p. 149.
63 MARTÍINEZ DALMÁU Rubén et
VICIANO PASTOR Roberto, « El nuevo constitucionalismo latinoamericano:
fundamentos para una construcción doctrinal », Revista General
de Derecho Público Comparado, n. 9, 2011, p. 5.
45
Malgré les divergences avec le constitutionnalisme
européen d'après-guerre, également appelé
néoconstitutionnalisme, il est possible d'affirmer que, dans les
années 80 et 90, la plupart des pays d'Amérique latine ont suivi
les grandes tendances du constitutionnalisme démocratique contemporain,
principalement en raison de l'élargissement du catalogue des droits
fondamentaux et de nouvelles garanties juridiques qui ont été
insérées dans les textes constitutionnels. Cependant, le
constitutionnalisme en Amérique latine a reçu de nouvelles
idées et perspectives, notamment avec la promulgation des Constitutions
du Venezuela (1999), de l'Équateur (2008) et de la Bolivie
(2009)64.
Selon Fajardo65, nous pouvons classer ce nouveau
constitutionnalisme en trois cycles : le constitutionnalisme multiculturel, qui
s'est développé entre 1982 et 1988 ; le constitutionnalisme
pluriculturel, qui s'est développé entre 1989 et 2005 et enfin le
constitutionnalisme plurinational, qui s'est développé entre 2006
et 2009. Les trois cycles du mouvement constitutionnel latinoaméricain
ont remis en cause, progressivement, les éléments centraux qui
servaient à définir les États latinoaméricains tels
qu'ils ont été dessinés dans le XIXe
siècle, ce qui constitue un projet majeur de décolonisation de
l'État.
Le premier cycle : le constitutionnalisme
multiculturel (1982-1988)
Ce premier cycle de l'horizon du nouveau constitutionnalisme
latinoaméricain fut marqué par l'émergence du
multiculturalisme et par les nouvelles demandes des peuples autochtones, qui
renforçaient leur identité. « Deux constitutions
centraméricaines, celle du Guatemala en 1985 et celle du Nicaragua en
1987, s'inscrivent dans cet horizon, cherchant à réconcilier
leurs sociétés et à répondre aux revendications
autochtones dans le cadre des processus de guerre »66. Ces deux
constitutions ont reconnu la formation multiethnique, multiculturelle et
multilingue de leurs pays et elles ont reconnu également certains droits
spécifiques à des groupes autochtones. La constitution
brésilienne de 1988 adopta également une vision multiculturelle
de son pays en reconnaissant des droits spécifiques aux peuples
autochtones, comme le droit collectif et originaire à la terre et le
droit aux peuples autochtones de gérer seuls les ressources naturelles
que se trouvent dans leurs territoires. C'est durant cette époque de
renforcement
64 DE SOUZA Lucas Silva, DO NASCIMENTO
Valéria Ribas et BALEM Isadora Forgiarini, « O novo
constitucionalismo latino-americano e os povos indígenas: A visão
do direito a partir dos caleidoscópios e dos monóculos »,
Revista Brasileira de políticas públicas, vol. 9, n. 2,
2019, p. 582.
65 FAJARDO Raquel, op.cit., p. 140-141.
66 Ibid., p. 141.
46
de l'identité autochtone que les peuples autochtones
ont pu s'organiser politiquement en Bolivie et en Équateur, notamment
à travers la CIDOB et la CONAIE.
Le deuxième cycle : le constitutionnalisme
pluriculturel (1989-2005)
Ce cycle de la transformation constitutionnelle
latinoaméricaine fut marqué par le développement d'un
constitutionnalisme pluriculturel dans la région. Les constitutions
promulguées dans cet espace de temps ont affirmé le droit
individuel et collectif à l'identité culturelle et à la
diversité culturelle introduites dans le premier cycle et sont
allées plus loin encore : ces constitutions développèrent
les concepts de nation multiculturelle et d'État
pluriculturel. Cette définition de la nature de la population
marqua l'avancée vers une redéfinition ou transformation de
l'État. Le pluralisme et la diversité culturelle se sont
convertis en principes constitutionnels et ont permis de fonder les droits des
autochtones, ainsi que les droits des afrodescendants et d'autres groupes
minorisés67. Les constitutions de ce cycle ont
été également influencées par la Convention 169 de
l'OIT (1989), qui prévoit pour les peuples autochtones, entre autres
droits, le droit à l'éducation bilingue, le droit collectif
à la terre et le droit à la consultation préalable libre
et informée.
Le changement le plus important de ce cycle fut cependant
l'introduction du pluralisme juridique, qui a causé une rupture avec
l'idée du monisme juridique. Ainsi, les constitutions de ce cycle ont
reconnu les autorités autochtones, leurs normes, leurs procédures
et leur justice, autrement dit, leur droit consuétudinaire. À
partir de cette reconnaissance des autorités autochtones, l'idée
classique de souveraineté, de monopole du droit par les organes ou
pouvoirs souverains de l'État et de violence légitime est remise
en cause. Les sources du droit et de la violence légitime sont «
pluralisées », puisque ces derniers peuvent être
exercés non seulement par l'État, mais aussi par les
autorités autochtones de chaque peuple autochtone, toujours sous
contrôle constitutionnel. Nous pouvons citer comme exemple de
constitution pluriculturelle les constitutions de Colombie (1991), Paraguay
(1992), Pérou (1993), Argentine (1994), Bolivie (1994), Équateur
(1996 et 1998) et Venezuela (1999), ainsi que la réforme
constitutionnelle mexicaine de 1992.
La reconnaissance du pluralisme juridique durant ce cycle fut
possible dans un contexte caractérisé par plusieurs facteurs : la
demande
67 Ibid., p. 142.
47
autochtone de reconnaissance de leur propre droit, le
développement du droit international sur les droits autochtones,
l'expansion du discours du multiculturalisme et les réformes
structurelles de L'État et de la Justice68.
Pourtant, ce cycle fut également marqué par
l'implémentation de réformes néolibérales dans le
cadre de la globalisation.
En d'autres termes, l'adoption simultanée des approches
néolibérales et des droits autochtones dans les Constitutions,
entre autres facteurs, a eu pour conséquence pratique la neutralisation
des nouveaux droits conquis [...]. L'incorporation de nouveaux droits et
pouvoirs autochtones, ainsi que la ratification de traités de droits
humains qui sont devenus partie intégrante du bloc constitutionnel, ont
généré, en quelque sorte, une inflation des droits sans
correspondance avec les mécanismes institutionnels capables de les
rendre effectifs. Ces changements constitutionnels ont laissé en attente
la tâche encore incomplète de révision de l'ensemble du
droit constitutionnel, administratif, civil, pénal, etc., afin de rendre
compte des nouveaux droits et attributions publics reconnus aux peuples
autochtones [...]69.
Cela généra des disputes internes, p. ex., le
pouvoir législatif de nombreux
pays réclame qu'on lui attribue la souveraineté
d'édicter les lois sans être conditionné à
la consultation préalable des peuples autochtones. Il
en va de même pour la juridiction
autochtone, qui génère des disputes de
compétence et d'interprétation des droits humains.
Le troisième cycle : le constitutionnalisme
plurinational (2006-2009)
Le troisième cycle de l'horizon du constitutionnalisme
latinoaméricain est marqué par les processus constituants de la
Bolivie (2006-2009) et de l'Équateur (2008), dans le contexte de la
Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones de
2007. Ces deux constitutions innovent en prévoyant la
plurinationalité de façon expresse. Selon Fajardo70,
elles proposent une refondation de l'État à partir de la
reconnaissance expresse des peuples autochtones comme peuples originaires,
oubliés par la fondation républicaine, et avec cela elles posent
le défi historique de mettre fin au colonialisme. Les peuples
autochtones dans ce cycle ne sont plus compris comme une
68 Ibid., p. 144.
69 Ibid., p. 143.
70 Ibid., p. 149.
48
partie de la population de l'État avec une culture
différente, mais comme des nations originaires du continent
américain, ayant le droit à l'autodétermination. Autrement
dit, les autochtones sont reconnus comme des sujets politiques collectifs qui
ont le droit de déterminer leur propre futur, de s'autogouverner et de
participer à de nouveaux accords avec l'État, qui dès lors
réunit diverses nations71.
Les revendications autochtones pour la création de
nouveaux droits qui incorporerait la perspective autochtone dans la
constitution, comme le droit fondamental à l'eau, le buen
vivir, entre autres, ont gagné en force lors de la crise du
modèle néolibéral installé en Amérique
latine durant les années 90 et ont finalement pu être satisfaites
par les processus constituants de ce troisième cycle. Les constitutions
du troisième cycle s'inscrivent de manière explicite dans un
programme décolonisateur et affirment le pluralisme juridique, la
dignité de tous les peuples et cultures ainsi que
l'interculturalité.
Un constitutionnalisme toujours en
transition
Le constitutionnalisme latinoaméricain est
considéré comme un constitutionnalisme de transition. De plus,
selon Boaventura de Sousa Santos72, les mouvements sociaux des
années 80, 90 et 2000 ont subverti les fondements des transitions «
canoniques », autrement dit occidentales. Selon ces fondements, une telle
transition est achevée lorsque toutes les caractéristiques de la
démocratie représentative sont présentes. Pour les peuples
autochtones, la transition a une durée plus étendue, elle
commence avec la résistance au colonialisme et elle se termine seulement
lorsque l'autodétermination des peuples est pleinement reconnue. Les
transformations se situent donc dans un contexte beaucoup plus large de
l'émancipation et de la libération. De plus, les transitions
« canoniques » ont une conception de temps linéaire, qui va du
passé vers le futur et les peuples autochtones demandent une transition
vers leur passé ancestral et précolonial. Finalement, les
transitions « canoniques » se passent au sein de «
totalités homogènes »73 : l'alternance entre
dictature et démocratie en tant que régimes politiques
modernes.
Dans le cas des autochtones et des afrodescendants, les
transitions se produisent entre des civilisations différentes, des
univers culturels avec
71 En Équateur, le CODENPE (Conseil pour le
développement des nationalités et des Peuples de
l'Équateur) reconnait officiellement treize nationalités
autochtones. En Bolivie, la loi du régime électoral n. 26 de 30
juin 2010 reconnait 34 nationalités autochtones.
72 SANTOS Boaventura de Sousa,
Refundación del Estado en América Latina: Perspectivas desde una
epistemologia del Sur, Lima : Instituto Internacional Derecho y Sociedad,
2010, p. 63-64.
73 Ibid., p. 65.
49
leurs propres visions du monde dont le dialogue possible,
malgré tant de violence et tant de silences, n'est possible que par la
traduction interculturelle et toujours avec le risque que les idées les
plus fondamentales, les mythes les plus sacrés, les émotions les
plus vitales se perdent dans le transit entre différents univers
linguistiques, sémantiques et culturels. Autrement dit, lorsqu'elle est
réussie, la transition est dans ce cas aussi une transition
conceptuelle, qui se configure comme un métissage
conceptuel74.
Nous pouvons citer comme exemple le droit de la Pachamama
(la nature) dans la constitution de l'Équateur, qui fait le
dialogue interculturel entre le monde moderne occidental des droits et le monde
autochtone. De même, le buen vivir présent dans les
constitutions bolivienne et équatorienne est le résultat d'un
dialogue entre ces deux mondes.
Enfin, nous pouvons conclure que la transition
constitutionnelle du nouveau constitutionnalisme latinoaméricain sera
complète seulement lorsqu'il y aura effectivement dans ces États
une démocratie participative plurielle, interculturelle et
écologiquement soutenable. Cela ne pourrait arriver que lors de
l'expérimentation : selon Santos75, il n'est pas possible de
résoudre aujourd'hui tous les problèmes ou de prévoir tous
les accidents qui sont le propre d'un constitutionnalisme transformateur,
certaines questions vont rester ouvertes, probablement dans le but de laisser
les futures assemblées constituantes y répondre.
Section II - La plurinationalité et
l'interculturalité pour la transformation de l'État
La plurinationalité est apparue dans le
troisième cycle du nouveau constitutionnalisme latinoaméricain,
avec la promulgation des constitutions de la Bolivie et de l'Équateur.
À travers des assemblées constituantes représentatives des
peuples des pays et avec la participation directe de ces derniers à
l'élaboration et à l'approbation des nouvelles constitutions, les
constitutions de la Bolivie (2009) et de l'Équateur (2008) ont
innové en déclarant leurs pays comme des États
plurinationaux et interculturels. La plurinationalité, liée
à l'interculturalité, se révèle comme
l'élément le plus important pour
74 Ibid., p. 65.
75 SANTOS Boaventura de Sousa, op.cit., p.
110.
50
la transformation de l'État latinoaméricain
moderne. Cette transformation est synonyme de décolonisation et de la
refondation conséquente de l'État (A), qui passe par
l'émancipation sociale (B).
A - Une tentative de refondation de
l'État
La reconnaissance de l'État plurinational dans les
nouvelles constitutions de Bolivie et de l'Équateur est le
résultat de la recherche de dispositions institutionnelles qui rendent
possible la coexistence de différentes cultures, peuples ou nations au
sein d'un même État. L'État plurinational implique une
remise en cause radicale du concept d'État moderne, fondé sur
l'idée de nation civique et sur l'idée qu'en chaque État
il n'existe qu'une seule nation. « La plurinationalité est une
demande de la reconnaissance d'un autre concept de nation, la nation
conçue comme appartenance commune à une ethnie » ou à
une culture76.
Le concept d'État plurinational est apparu par la
première fois en Bolivie en 1983 dans le document intitulé «
Tesis Política » de la Confédération
syndicale unique des travailleurs paysans de Bolivie (CSUTCB). Cela
n'impliquait pas la fragmentation de l'État, ou le séparatisme,
mais la reconnaissance de l'existence de différentes nations autochtones
dotées d'autonomie comme condition pour parvenir à la
décolonisation. « C'était un changement radical dans la
manière dont l'intégration nationale était conçue,
non plus comme assimilation de l'indien, mais comme reconnaissance de son
identité et de la diversité de la société
bolivienne »77. Sous la revendication de la
plurinationalité, les mouvements ont convergé « dans la
revendication des aspects tels que la reconnaissance de leurs formes
traditionnelles de gouvernement, de leurs droits collectifs et de leurs
autonomies territoriales, entre autres »78.
En Équateur, avec le concept d'État
plurinational, les mouvements ont réussi à concilier le terme
« national autochtone » avec le caractère unitaire de
l'État.
Les dirigeants autochtones ont expliqué à
plusieurs reprises que la plurinationalité n'impliquait pas une
fragmentation de l'État ou la création d'États dans
l'État, mais plutôt une forme d'intégration nationale autre
que l'assimilation, qui reconnait leur différence
76 Ibid., p. 81.
77 RODRIGUEZ Edwin Cruz, op.cit., p. 57.
78 Ibid., p. 57.
51
culturelle et des espaces d'autonomie et d'autogouvernement,
comme condition de la décolonisation et de la construction de relations
équitables ou d'interculturalité entre les différentes
cultures qui peuplent le pays79.
Ainsi, la reconnaissance de la plurinationalité porte
en elle la notion d'autogouvernement et d'autodétermination, mais pas
nécessairement la notion d'indépendance. L'idée
d'autogouvernement qui est derrière l'idée de
plurinationalité a de nombreuses implications :
[...] un nouveau type d'institutionnalité
étatique, une nouvelle organisation territoriale, la démocratie
interculturelle, le pluralisme juridique, l'interculturalité, les
politiques publiques d'un nouveau type (santé, éducation,
sécurité sociale), de nouveaux critères de gestion
publique, de participation citoyenne, de service public et de fonctionnaires
publics. Chacun d'eux constitue un défi aux prémisses sur
lesquelles s'établit l'État moderne »80.
Un nouveau type d'institutionnalité
La plurinationalité implique la fin de
l'homogénéité institutionnelle de l'État.
C'est-à-dire qu'au sein d'une même institution, les
différents modes d'appartenance institutionnelle sont
représentés, en fonction des droits collectifs reconnus ; ou
qu'au sein d'un État les différences sont
représentées par une dualité d'institutions. Ainsi, les
différences dérivées de la reconnaissance de la
plurinationalité peuvent être incarnées de deux
manières : au sein d'une même institution ou, quand les
différences l'exigent, dans des institutions distinctes. En Bolivie,
nous pouvons citer l'Assemblée législative comme exemple
d'hétérogénéité au sein d'une même
institution : elle est composée de sept circonscriptions autochtones,
dont les représentants sont élus selon les règles de leurs
propres communautés, par le biais de l'équivalence entre les
différents critères de représentation politique des
différentes cultures ou nations. Un autre exemple en Bolivie est le
Tribunal constitutionnel plurinational (TCP), autrement dit la cour
constitutionnelle bolivienne, où les juges sont élus selon les
critères de plurinationalité, avec représentation non
seulement du système ordinaire de droit, mais aussi du système
autochtone. À propos
79 Ibid., p. 57.
80 SANTOS Boaventura de Sousa, op.cit., p.
81.
52
de la dualité d'institutions, nous pouvons citer comme
exemple les autonomies territoriales autochtones, qui impliquent le pluralisme
juridique.
Une nouvelle organisation territoriale
Dans l'État libéral moderne, « la
crédibilité de l'universel est renforcée par des
métaphores d'homogénéité, d'égalité,
d'atomisation, d'indifférenciation. Les deux plus importantes sont la
société civile et le territoire national »81. La
première fait référence à la population et la
deuxième à l'espace géopolitique, les deux se
correspondant. Le constitutionnalisme plurinational rompt radicalement avec
cette construction idéologique, la société civile est
recontextualisée pour la reconnaissance de l'existence de diverses
nations et peuples, et le territoire national devient, à son tour, la
référence géospatiale de l'unité dans la
diversité. Dans l'État plurinational, il y a donc des nations
autochtones organisées en autonomies justifiées par leurs
histoires ancestrales, qui ne vont pas toujours correspondre au territoire
politique d'un département ou d'une commune (autonomies produites par la
décentralisation de l'État).
L'interculturalité
Le concept d'interculturalité, développé
parmi les critiques aux politiques multiculturelles, fut articulé par
les mouvements autochtones à partir des années 80 en
référence au problème de l'éducation et,
particulièrement en Équateur, comme l'élément
principal de la décolonisation. « Au cours des dernières
décennies, le principe de l'interculturalité a guidé les
demandes, les actions et les propositions du mouvement [autochtone],
dirigées à repenser et à refonder l'État
»82. Ces demandes, actions et propositions, à leur tour,
ont servi à définir les bases sémantiques de
l'interculturalité. Cette dernière va au-delà d'une simple
relation entre cultures, elle se réfère à des changements
profonds pour que toutes les cultures soient représentées et
articulées sur les plans économique, social, juridique,
politique, du savoir et dans la construction d'une société
plurinationale83. Ainsi, l'interculturalité vise la
construction de relations équitables entre les cultures et en même
temps renforce la nécessité d'échanges et d'apprentissage
mutuel. Pour que ces échanges soient faits de manière
équitable, les
81 SANTOS Boaventura de Sousa, op.cit., p.
93.
82 WALSH Catherine, Interculturalidad, Estado,
sociedad: luchas (de)coloniales de nuestra época, ed. Abya-Yala,
Quito : Universidad Andina Simón Bolívar, 2009, p. 53.
83 Ibid., p. 53.
53
inégalités doivent disparaitre, d'où la
préoccupation bolivienne et équatorienne avec la
décolonisation. Tandis que les politiques multiculturelles renforcent
l'égalité formelle entre les cultures, inspirées de la
philosophie libérale de la sauvegarde des droits individuels et la
promotion de la tolérance entre les cultures, l'interculturalité
promeut un dialogue entre les cultures et implique un changement structurel. Il
ne s'agit pas de tolérer la différence au sein des structures de
la colonialité, mais de transformer profondément la distribution
du pouvoir politique et socioéconomique pour combattre les
inégalités entre les cultures.
La démocratie interculturelle
Dans le cadre de la plurinationalité,
l'interculturalité ne peut se concrétiser que parmi la
démocratie interculturelle. Selon Santos, nous pouvons comprendre comme
démocratie interculturelle :
1) la coexistence de différentes façons de
délibération démocratique, du vote individuel au
consensus, des élections à la rotation [...] ; 2) les
différents critères de représentation démocratique
(la représentation quantitative, d'origine moderne, eurocentrée,
au côté de la représentation qualitative, d'origine
ancestrale [...]) ; 3) reconnaissance des droits collectifs des peuples comme
condition de l'effectif exercice des droits individuels (citoyenneté
culturelle comme condition de la citoyenneté civique) ; 4)
reconnaissance des nouveaux droits fondamentaux (à la fois individuels
et collectifs) : le droit à l'eau, à la terre, à la
souveraineté alimentaire, aux ressources naturelles, à la
biodiversité, aux forêts et aux savoirs traditionnels ; et 5) bien
au-delà des droits, l'éducation orientée vers des
façons de sociabilité et de subjectivité fondées
dans la réciprocité culturelle : un membre d'une culture est
seulement disposé à reconnaitre l'autre culture s'il sent que la
vôtre est respectée, et cela s'applique tant aux cultures
autochtones qu'aux cultures non-autochtones84.
Nous pouvons citer l'article premier de la constitution de
Bolivie comme exemple de démocratie interculturelle, elle prévoit
trois formes de démocratie : la démocratie représentative,
la démocratie participative et la démocratie communautaire.
84 SANTOS Boaventura, op.cit. p. 98-99.
54
Le pluralisme juridique
Le pluralisme juridique fut conçu dans le contexte du
monisme juridique, ce dernier étant un paradigme avec lequel le
constitutionnalisme plurinational a rompu. Selon Santos85, la
symétrie existante entre droit et État est très
problématique puisqu'elle ne reconnait pas la diversité des
droits non-étatiques qui existent dans la société et plus
encore elle affirme l'autonomie du droit par rapport au politique au sein du
même processus où le droit fait dépendre sa validité
de l'État. Le constitutionnalisme plurinational, au contraire,
établit que l'unité du système juridique ne
présuppose pas son uniformité. Dans les États
plurinationaux, les systèmes juridiques (celui de la culture
européenne et celui de la culture autochtone) sont autonomes et pourtant
ils peuvent communiquer entre eux. Les relations entre les systèmes
constituent cependant un exigeant défi.
Après deux siècles d'une supposée
uniformité juridique, il ne sera pas facile pour les citoyens, les
organisations sociales, les acteurs politiques, les services publics, les
avocats et les juges d'adopter une conception plus large du droit qui, en
reconnaissant la pluralité des ordres juridiques, permette la
déconnexion partielle du droit de l'État et le reconnecter avec
la vie et la culture des peuples86.
La reconnaissance officielle de cette coexistence de
systèmes implique des changements, tant pour le droit eurocentré
que pour le droit ancestral des peuples originaires.
Les limites constitutionnelles des juridictions autochtones
(limites personnelles, matérielles et territoriales) ne suffisent pas
à éliminer les conflits dans un cadre normatif qui n'est plus
celui de la légalité, mais de l'interlégalité. La
solution de tels conflits sera toujours précaire, risquée et
provisoire, puisqu'elle oblige à la traduction interculturelle
(qu'est-ce que le "due process of law" en droit ancestral ? Un
rêve peut-il fonder la légitime défense ?). Mais telle est
la voie de la dignité et du respect mutuellement partagé, la voie
de la décolonisation 87.
Pour résumer, nous pouvons dire que les concepts de
plurinationalité et d'interculturalité ont fonctionné
comme noeud d'articulation des revendications des
85 Ibid., p. 88.
86 Ibid., p. 89.
87 SANTOS Boaventura de Sousa, op.cit., p.
90.
55
mouvements autochtones durant les processus constituants qui
ont marqué le début d'une véritable émancipation
sociale.
B - Un processus d'émancipation
sociale
L'État plurinational cherche à renforcer une
pratique épistémique, sociale, juridique et politique
interculturelle qui, comme nous avons pu voir, se différencie
substantiellement du multiculturalisme. Ce dernier n'implique pas
nécessairement les échanges entre les différentes
cultures, mais tout simplement une reconnaissance de droits
différenciés et une tolérance pour la coexistence des
cultures. À son tour, l'interculturalité ne prévoit pas
une simple inclusion d'une culture, subordonnée à une autre, mais
une relation d'échanges mutuels établie en conditions
d'égalité, dans un contexte d'interactions démocratiques
et émancipatrices. « L'interculturalité est un processus
permanent, conflictuel et dynamique de relation, de communication et
d'apprentissage entre des personnes et des groupes ayant des connaissances, des
valeurs, des croyances et des traditions différentes
»88. Elle est orientée à développer les
potentialités des participants, au-delà de leurs
différences sociales et culturelles, elle apparait donc comme une
proposition de dialogue et de complémentarité mutuelle. Ainsi,
l'interculturalité est un outil politique et éducatif
d'émancipation sociale, cette dernière étant
définie comme un processus, ou une action, marqués par la
volonté de dénaturaliser l'oppression au sein d'une
démocratie.
Dans le contexte de mouvements sociaux autochtones qui
revendiquent un État plurinational et interculturel dans les termes vus
auparavant, le constitutionnalisme transformateur est apparu. Ce nouveau
constitutionnalisme peut être défini comme la création et
l'application d'une nouvelle constitutionnalité engagée dans
l'objectif de transformer les relations de pouvoir existantes, ainsi que les
institutions politiques et sociales d'un pays, dans une perspective
interculturelle, participative et également solidaire.
Face au centrisme occidental invisibilisateur appartenant au
constitutionnalisme libéral, le constitutionnalisme transformateur se
déclare plurinational, interculturel, dialogique et postcolonial, car il
promeut la dénaturalisation de l'institutionnalité
libérale capitaliste et
88 BONET Antoni Jesús Aguiló, «
Interculturalidad, democracia y emancipación social: algunos retos para
una teoría política intercultural », Revista
internacional de filosofía, n. 11, 2010, p. 5.
56
coloniale, la décolonisation des peuples autochtones et
favorise l'ouverture d'espaces dialogiques [...]89.
De cette manière, le constitutionnalisme pour les
États plurinationaux ne sert plus seulement à déclarer les
droits fondamentaux et à assurer la distribution et division du pouvoir
et des fonctions de l'État. Il propose de faire attention à
l'opprimé et de lui rendre sa dignité tant par les
mécanismes de démocratie participative (plébiscite,
référendum, révocation de mandat) que par le pluralisme,
qui ne se limite pas à l'aspect politique. Le pluralisme « promeut
la refondation de l'État fondée sur des prémisses
différentes de celles qui ont caractérisé l'État
moderne du type européen durant longtemps »90.
Il est vrai que ce constitutionnalisme est né d'une
partie marginalisée de la société, mais il est important
de souligner ici le cadre philosophique de ce nouveau constitutionnalisme
(NCL), qui fut la philosophie de la libération, développée
à partir des années 60 et qui a comme principal auteur l'argentin
Enrique Dussel. Il s'agit d'une philosophie de la pensée critique
latino-américaine qui remet en cause les bases de domination du
subcontinent91 et qui renforce dans la région les questions
sur l'inclusion des peuples autochtones avec l'objectif de décoloniser,
libérant ainsi tous les opprimés par les asymétries
historiques. De plus, sur le plan économique, la théorie de la
dépendance s'est développée en parallèle à
la philosophie de la libération, critique de la dépendance et
subordination économique de l'Amérique latine. À cela nous
pouvons ajouter la pensée du collectif de pensée critique du
groupe modernité/colonialité, qui prend forme à la fin des
années 90. Ce groupe propose, sous une perspective décoloniale,
une discussion critique sur les relations de pouvoir installées par la
colonisation européenne en Amérique latine. Il propose
également l'idée d'un tournant décolonial en
définissant l'origine de la modernité à partir de la
conquête de l'Amérique et non à partir du siècle des
Lumières, pour lier la modernité à la colonialité.
Enfin, la pensée de la théorie critique latino-américaine
se différencie substantiellement des théories critiques
européennes ou eurocentrées, dans lesquelles
l'émancipation sociale n'est pas possible hors des limites du
progrès et de l'évolutionnisme92.
89 BONET Antoni Jesús Aguiló, op.
cit., p. 7.
90 CORRÊA DE SOUSA Adriano, « A
emancipação como objetivo central do novo constitucionalismo
latino-americano: os caminhos para um constitucionalismo de
libertação », in BELLO Enzo et VAL Eduardo Manuel (dir.),
O pensamento pós e descolonial do novo constitucionalismo
latino-americano, Caxias do Sul : Educs, 2014, p. 66.
91 Ce terme désigne l'Amérique
latine.
92 Cf. MARX Karl et ENGELS Friedrich, Le
colonialisme, Paris : Critique Eds, 2018, 396 p.
57
L'histoire récente de l'Amérique latine a donc
démontré que la recherche de l'émancipation sociale n'est
pas survenue à travers les prévisions marxistes traditionnelles,
c'est-à-dire à travers un prolétariat comme acteur social
qui aurait la potentialité instinctive d'apporter la rédemption
de l'humanité. Malgré le fait que la majorité de la gauche
latino-américaine soit encore emprisonnée schématiquement
à l'idée qui prévoit que la classe laborieuse est une
classe ontologiquement révolutionnaire, le nouveau constitutionnalisme
latinoaméricain remet (allié de la gauche) en cause cette
thèse93. Les constitutions de l'Équateur et de la
Bolivie dénotent la rupture avec l'eurocentrisme et avec l'importation
de théories des pays centraux avec non seulement leur contenu, mais
aussi avec la forme par laquelle les sujets ont été pris en
compte dans les constitutions. Leurs processus constituants ont ouvert les
voies pour l'émergence d'un acteur social avec un potentiel
révolutionnaire : l'émancipation sociale des peuples autochtones
cumulée avec la libération nationale
économique94.
Ainsi, dans le contexte théorique, les thèses
pour une émancipation sociale avaient été
déjà consolidées avec la philosophie de la
libération et la théorie de la dépendance. Sur le plan
pratique, la population marginalisée commença à
s'organiser politiquement afin de s'émanciper, autrement dit, de se
libérer du contrôle des élites politiques pour
décider enfin de leur propre destin. Ces contextes sociopolitique et
théorique ont fait apparaitre les processus constituants de
l'Équateur et de la Bolivie, qui peuvent illustrer l'utilisation d'un
processus constituant pour l'émancipation sociale des peuples et nations
autochtones.
[Le] changement s'est déroulé de manière
démocratique, à travers le constitutionnalisme
démocratique, contrairement à la culture imprégnée
des coups d'État, constituant une utilisation clairement
contre-hégémonique d'instruments hégémoniques pour
ouvrir la voie à l'émancipation, d'où le fait que
Rubén Martinez Dalmau et Roberto Viciano Pastor (2012) se battent pour
l'existence d'un nouveau constitutionnalisme
latinoaméricain95.
Avec ce dernier, le constitutionnalisme est désormais
concrétisé par le peuple, selon leurs intérêts et
leurs besoins, rompant avec la logique très présente dans la
région
93 KELLER Rene Jose, « O processo
emancipatório dos atores sociopolíticos no constitucionalismo
latino-americano », Revista Em debate, n. 9, 2013, p. 48.
94 Ibid., p. 51.
95 TOLEDO JUNIOR Rubens et RIBEIRO DE SALES Luiz
Fernando, O Estado plurinacional da Bolívia e as garantias
constitucionais à reafirmação das horizontalidades
geográficas, Redes, v. 25, ed. Especial 2, 2020, p. 2657.
58
d'un constitutionnalisme dirigé par les élites
et qui ne correspond pas à la réalité sociale de la
majorité de la population. Dans cette perspective théorique
constitutionnelle, la constitution est la consolidation de la manifestation
souveraine du pouvoir constituant originaire (le peuple), à laquelle les
pouvoirs constitués doivent subordination et obédience. La
légitimité et la constitutionnalité des actes de ces
derniers découlent de l'exacte conformité avec la volonté
de leur créateur, exprimée dans le texte constitutionnel.
Ainsi, la plurinationalité se présente comme un
outil de nature émancipateur. L'État plurinational tient à
la liberté, à l'autonomie et à l'autodétermination
des peuples autochtones et de cette façon la plurinationalité est
devenue un important moyen juridique pour viabiliser un horizon fécond
pour la promotion du bien vivre autochtone. Avec la mise en place de la
plurinationalité et de l'interculturalité, l'État assure
également le pluralisme juridique d'une juridiction autochtone, ce qui
signifie la fin de la souveraineté étatique sur son territoire et
la refondation de l'État à partir d'une juridiction plurielle, ce
qui corrobore les prétentions émancipatrices des peuples
autochtones, pour mettre fin aux impositions intégrationnistes. Pour
Santos96, la reconstruction de la tension entre régulation
sociale et émancipation sociale a obligé la sujétion du
droit moderne à une analyse critique radicale pour libérer le
pragmatisme de sa tendance à suivre les conceptions dominantes de la
réalité. Une fois ces conceptions dominantes
écartées, il devient possible d'identifier un paysage juridique
plus riche et plus large ainsi qu'une réalité qui est devant nos
yeux, mais que souvent nous ne voyons pas puisqu'il nous manque la perspective
adéquate. Pour l'étude de la plurinationalité, il est donc
inévitable qu'il y ait une intersection entre le droit, l'anthropologie
du droit, la philosophie du droit et la sociologie du droit, mais sans les
canons de la modernité, qui réduisent ou font taire les
expériences juridiques d'autres groupes de la population. Sans tout cela
la concrétisation de l'interculturalité n'est pas possible. Il
est important de souligner également que le droit n'est pas
émancipateur en soi, mais que ce sont les groupes sociaux qui en
recourant au droit pour mener leurs luttes peuvent s'émanciper.
En outre, la simple existence théorique ou normative du
NCL ou de l'État plurinational n'est pas une fin en soi pour les
mouvements autochtones, ce qui importe pour eux est la concrétisation de
cet État. Pour mieux comprendre cela, dans le prochain chapitre, nous
allons analyser plus profondément le développement normatif
96 SANTOS Boaventura de Sousa, op.cit. p.
70.
constitutionnel en Bolivie et en Équateur, autrement
dit nous allons étudier comment se sont formés les premiers
États plurinationaux et interculturels du monde.
59
Chapitre II - Un développement normatif
constitutionnel à deux vitesses
Le nouveau constitutionnalisme latinoaméricain et les
États plurinationaux ont l'objectif d'émanciper les peuples
autochtones en consacrant l'autonomie autochtone,
60
c'est-à-dire la possibilité de
l'autodétermination de ces nations avec un système pluraliste et
interculturel. Cependant, chaque constitution représentative du NCL (les
constitutions de la Bolivie et de l'Équateur) consacre cela de sa propre
manière. Nous constatons un état un peu plus poussé du
pluralisme en Bolivie, ce qui dévoile les difficultés de
l'Équateur à mettre en place la plurinationalité. Pour
démontrer cela, nous analyserons d'abord comment l'État
plurinational a été consacré par les deux constitutions
(Sect. I) pour ensuite analyser la consécration des autonomies
autochtones dans chaque État (Sect. II).
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