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La régionalisation du maintien de la paix et de la sécurité internationales. étude appliquée au conflit en République Centrafricaine


par Chrisogone Ignace MENEHOUL KOBALE
Université de Yaoundé II (Cameroun) - Master recherche en Droit public 2016
  

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PARAGRAPHE II : Une intervention finalement directe via la MINUSCA396

Dans les principales lignes de son mandat qui concernent la protection des civils et le soutien aux efforts de stabilisation de la RCA, mieux encore de consolidation des acquis enregistrés, tour à tour, par la CEEAC puis l'UA, la Réforme du Secteur de Sécurité (RSS) constitue une composante essentielle pour la MINUSCA.

C'est alors qu'elle va appuyer, non seulement les programmes concernant, d'un côté, le Désarmement, Démobilisation et Réintégration ou DDR, et de l'autre, la Réduction de la Violence Communautaire, communément appelée Community Violence Reduction ou CVR, ce qui peut être appréhendé comme une stratégie fondamentale de construction rationnelle et technique d'un environnement sécuritaire sûr et stable (A), mais également la Réforme du Secteur de la Sécurité ou RSS, ce qui est appréhendé une stratégie complémentaire (B).

A- La MINUSCA et l'appui aux programmes DDR et CVR397, stratégie

fondamentale de construction rationnelle et technique d'un environnement sécuritaire sûr et stable

Le Conseil de sécurité des Nations Unies, par la résolution 2397 (2017), a assigné à la Section DDR le mandat d'appuyer le gouvernement centrafricain à élaborer et mettre en oeuvre les programmes de DDR et de CVR. Ces programmes sont des aspects essentiels des efforts visant à créer un environnement sûr et stable dans lequel les processus de reconstruction peuvent s'amorcer. Cela peut comporter la fourniture d'une assistance technique, la sécurisation des sites de désarmement et de cantonnement et, ou la collecte et la destruction d'armes, de munitions et d'autres matériels rendus par les anciens combattants.

396 Le Conseil de sécurité des Nations Unies a mis en place la Mission multidimensionnelle intégrée de stabilisation des Nations Unies en République centrafricaine (MINUSCA) par la résolution 2149 du 10 avril 2014. Le 15 septembre 2014, la responsabilité des opérations militaires en RCA a été transférée de la MISCA à la MINUSCA. Un an après, par la résolution 2217 adoptée le 28 avril 2015, le Conseil de sécurité a réaffirmé son engagement à sauvegarder la souveraineté, l'indépendance, l'unité et l'intégrité du territoire centrafricain et a décidé de proroger le mandat de la MINUSCA jusqu'au 30 avril 2016 en autorisant le déploiement d'un effectif de 10.677 hommes.

Cette prorogation d'un an est intervenue au moment où la MINUSCA était officiellement déclarée pleinement opérationnelle en présence de monsieur Hervé LADSOUS, Secrétaire général adjoint et chef du Département des OMP des NU.

Le mandat de la MINUSCA vise essentiellement la protection des populations civiles et le soutien aux efforts de stabilisation. Information tirée sur www.un.org, le 26 août 2018.

Il convient également de préciser que la MINUSCA n'est pas la première Mission des Nations Unies en RCA. Il y avait la Mission des Nations Unies en RCA ou MINURCA le 27 mars 1998 et la Mission des Nations Unies en RCA et au Tchad ou MINURCAT le 15 mars 2009 dans la préfecture de VAKAGA.

397 Nous tenons pour source principale, dans le cadre de ce développement, la Section DDR de la MINUSCA à travers le lien https://minusca.unmissions.org/ddr consulté le 26 août 2018.

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Nous verrons d'abord ce qui s'agit du DDR comme point de départ de cette stratégie (1), puis ce qui s'agit du CVR en tant que point d'achèvement de ladite stratégie (2).

1- L'appui de la MINUSCA au programme DDR398 comme point de départ

La Section DDR a posé les bases de ses programmes et projets avec le gouvernement de transition. Elle était activement présente pendant le Forum de Bangui en mai 2015 et a contribué à l'élaboration du premier texte qui a servi de base à l'Accord de Bangui sur les principes de DDRR et d'intégration dans les corps en uniforme de l'Etat.

Par ailleurs, la Section a facilité la création du Comité Consultatif et de Suivi (CCS), composé de représentants de 14 groupes armés reconnus par le gouvernement, de représentants de la société civile, d'experts nationaux et internationaux. Le CCS est un cadre politique pour discuter de toutes questions relatives au DDRR. La Section continue à soutenir le gouvernement actuel, en particulier l'Unité d'Exécution du Programme National de Désarmement, Démobilisation, Réintégration et Rapatriement (UEPNDDRR).

La Section a conçu et mis en place le Programme pré-DDR qui a démarré en octobre 2015 et a pris fin en juin 2017. C'est un programme innovant car la RCA est le premier pays où les Nations Unies ont mis en oeuvre un tel programme comme phase préparatoire du Programme National de DDRR et en tant qu'outil essentiel pour la sécurité et la stabilisation au niveau communautaire.

A travers ce programme, la Section a soutenu les combattants souhaitant quitter les groupes armés avant le lancement officiel du Programme National de Désarmement, Démobilisation, Réintégration et Rapatriement (PNDDRR). Il a offert à ceux qui ont accepté de déposer volontairement des armes des alternatives au recours à la violence [(Cash for Work, et Activités Génératrices de Revenus (AGR)]. Ce sont au total 4324 bénéficiaires dont 737 femmes qui ont participé à ce programme.

Le Pré-DDR a contribué à l'instauration d'un climat sécuritaire favorable à la tenue des élections présidentielle et législatives en 2016, à la réduction de la violence et de la criminalité des localités399, à la relance des activités économiques à travers les fonds injectés dans les projets des bénéficiaires et à l'instauration de la paix et de la cohésion sociale.

398 Le DDR est un programme qui consiste à recueillir des armes auprès des personnes en uniformes, autres que les membres de l'armée nationale. Cette activité fait appel à la bonne foi des parties signataires de l'accord de paix sur lequel elle se fonde ; elle suppose le rassemblement et le cantonnement des combattants, voire leur rapatriement s'il existe des éléments étrangers dans les forces des groupes armés, la mise en place de programmes de gestion des armes, c'est-à-dire leur stockage en lieu sûr et leur élimination définitive.

399 Il s'agit notamment de Bangui, Bria, Kaga-Bandoro, Bambari, Bouar, N'délé, Bossangoa et Birao.

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La Section a par ailleurs appuyé la mise en oeuvre du projet pilote du PNDDRR. A la volonté du Président de la République, en vue de créer un climat de confiance entre le gouvernement et les groupes armés, le projet pilote DDR a été lancé à Bangui le 30 août 2017 pour 440 éléments issus de 12 groupes armés. La phase de désarmement/démobilisation s'est déroulée à Bangui et dans les villes de Bouar, Paoua, Bambari, Kaga-Bandoro, Birao et Koui et a permis la collecte de 309 armes, 499 explosives de guerre et 7257 munitions. La question de la réduction de la violence communautaire a aussi été prise en compte par la MINUSCA.

2- L'appui de la MINUSCA au programme CVR comme point d'achèvement

La Section a également développé les programmes de CVR qui incluent une composante de désarmement avec la collecte des armes. Ces programmes sont concentrés dans des zones ayant une activité accrue des groupes armés ou milices et des violences intra-communautaires. Ils ont pour but de lutter contre la prolifération des milices et le recrutement par les groupes armés ; de permettre aux ex-combattants ou membres des milices de réintégrer la vie civile. Ils représentent un des mécanismes clés pour appuyer les accords locaux de paix ainsi que les autres efforts engagés, y compris le renforcement des capacités dans le domaine de la résolution de conflits locaux, la protection des civils, la collecte d'armes et la prévention contre la violence. Les programmes CVR fournissent des opportunités économiques aux jeunes enclins à la violence et aux communautés auxquelles ils appartiennent.

Lancé officiellement en 2016, l'objectif de ce projet était de prendre en charge, à Bangui notamment, les groupes d'autodéfense au PK5, les ex-Séléka des trois camps de Bangui, les Anti-Balaka et des membres de leurs communautés. Il visait au total 3000 bénéficiaires. Dans ses activités, le projet a inclus la formation professionnelle, la cohésion sociale et le renforcement des mécanismes de dialogue communautaire. Six ONG ont formé les bénéficiaires dans les options telles que la soudure, la mécanique, la menuiserie, la maçonnerie, l'électricité, la conduite automobile, le commerce, l'informatique et la couture. L'Organisation des NU pour l'alimentation et l'agriculture a pris en charge les filières relatives à l'agriculture et à l'élevage.

Depuis novembre 2017, la Section a lancé des programmes CVR étendus à sept localités400. Ces programmes ont jusqu'à présent mobilisé plus de 5 000 bénéficiaires (au moins 20% de femmes), composés d'éléments associés aux groupes armés et de membres de

400 Il s'agit de Bouar, Berberati, Kaga Bandoro, Batangafo, Bambari, Bria et Bangassou.

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la communauté. Dans son intervention directe à travers la MINUSCA, l'ONU appuie les autorités nationales à restructurer les forces de défense et de sécurité.

B- La MINUSCA et l'appui à la RSS401, stratégie complémentaire de construction rationnelle et technique d'un environnement sécuritaire sûr et stable

L'insécurité est généralement reconnue comme l'un des principaux vecteurs d'instabilité. La RCA est particulièrement confrontée à cette problématique de la fragilité de l'Etat, ce qui n'est pas sans conséquence pour sa défense et sa sécurité nationales. Le gouvernement centrafricain n'est pas en mesure d'assurer la sécurité intérieure, ni de défendre sa souveraineté. Les institutions étatiques, et notamment les services sécuritaires de l'Etat doivent être renforcés pour être en mesure de s'autogérer.

C'est pourquoi une dynamique d'abord limitée au plan national avec des conseils et assistances stratégiques et techniques d'une part (1) et ensuite une autre étendue au plan international, avec une coordination de l'assistance technique internationale et des activités de formation d'autre part (2) s'avèrent capitales de manière à développer les capacités de l'Etat centrafricain à assurer sa propre défense et sa propre sécurité ; ce que fait évidemment depuis et maintenant la MINUSCA.

1- Des conseils et assistances stratégiques et techniques, une dynamique limitée au plan national

D'abord, la MINUSCA fournit des conseils stratégiques et techniques aux autorités centrafricaines pour mettre en oeuvre la Stratégie Nationale de Réforme du Secteur de la Sécurité, en étroite coordination avec la mission de formation de l'Union européenne en RCA (EUTM-RCA) ; l'objectif étant de veiller à la cohérence du processus de réforme, notamment par une répartition claire des responsabilités entre les FACA et les Forces de Sécurité Intérieure (FSI), tout en appuyant les acteurs centrafricains pour exercer leur contrôle démocratique sur le secteur de la sécurité.

Elle aide les autorités centrafricaines à élaborer une méthode pour la vérification préalable des éléments des forces de défense et de sécurité (FACA, police et gendarmerie) comme un préalable indispensable au respect des droits de l'homme, du droit international et du droit interne afin que les auteurs de violations graves aient à en répondre, qu'il s'agisse de membres des Forces de Défense et de Sécurité (FDS) ou d'éléments des groupes armés

401 Nous tenons ici pour principale source la Section RSS de MINUSCA, à travers le lien

https://minusca.unmissions.org/reforme-du-secteur-de-la-securité, consulté le 26 août 2018.

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démobilisés, au moment d'envisager leur intégration dans les institutions du secteur de la sécurité.

Ensuite, la MINUSCA joue un rôle de premier plan dans l'appui fourni aux autorités centrafricaines pour la mise en oeuvre du plan national de développement et de renforcement des capacités des forces de sécurité intérieure, en particulier en ce qui concerne les structures de commandement et de contrôle et les mécanismes de supervision, et coordonner l'assistance internationale à cet égard.

Enfin, la MINUSCA aide le gouvernement centrafricain à mettre au point un système d'incitation pour la formation des forces de police et de gendarmerie et pour la sélection, le recrutement, la vérification préalable et la formation de policiers et de gendarmes, avec l'appui de donateurs et de l'équipe de pays des Nations Unies, en tenant compte de la nécessité de recruter des femmes et dans le plein respect de la politique de diligence voulue en matière de droits de l'homme appliquée par l'ONU. La MINUSACA a vocation à coordonner aussi l'assistance technique internationale et les activités de formation en RCA.

2- Une coordination de l'assistance technique internationale et des activités de formation402, une dynamique étendue au plan international

La MINUSCA coordonne la fourniture de l'assistance technique et les activités de formation entre les partenaires internationaux présents en RCA, en particulier avec la Mission de Formation de l'Union Européenne en République Centrafricaine (EUTM-RCA), afin d'assurer une répartition claire des tâches dans le domaine de la RSS, dans l'intérêt des FACA et des FSI centrafricaines (particulièrement la police et la gendarmerie).

La MINUSCA en coordination avec l'EUTM et d'autres partenaires internationaux soutient aussi les efforts du gouvernement centrafricain en vue de définir un concept de reploiement immédiat et à long terme des FACA, de la gendarmerie, de la police et des autres Forces publiques dans le cadre du Rétablissement et de l'Extension de l'Autorité de l'Etat (RESA) en vue d'un transfert progressif des responsabilités de sécurité aux appareils de sécurité nationale.

Depuis 2016, l'appui de la MINUSCA est focalisé sur la mise en place d'un cadre juridique et institutionnel cohérent à travers la finalisation et l'adoption de la politique de

402 A ce jour, il existe deux acteurs internationaux sur le territoire centrafricain, menant des activités de formation aux FDS. Il y a la Force de l'Union européenne et une délégation russe, sur autorisation du Conseil de sécurité des Nations Unies.

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sécurité nationale et le plan de développement des FSI, condition essentielle mais pas suffisante d'un cadre institutionnel et juridique respectueux des droits de l'homme et sensible aux perspectives du genre. Une stratégie nationale RSS a été adoptée par le gouvernement en mars 2017, afin d'impulser des réformes au sein des comités sectoriels suivants : défense, sécurité intérieure, justice et administration pénitentiaire, douanes, eaux et forêts, communication, contrôle démocratique et renseignements.

En outre, la MINUSCA met un accent particulier sur la promotion de la responsabilité et de l'efficacité, y compris à travers l'amélioration des inspections et la ré-opérationnalisation de la justice militaire. Le Tribunal Militaire Permanent de Bangui (TMP) a tenu sa première session pénale d'après-crise du 12 au 15 décembre 2017, après quatre années d'inactivité. La présence de l'ONU en Centrafrique n'a pas empêché à la CEEAC ou à l'UA d'y demeurer et de continuer à intervenir, surtout dans l'optique de faciliter l'oeuvre de paix de la MNUSCA ou Mission de l'ONU.

SECTION II : L'INTERVENTION FACILITATRICE DE LA CEEAC ET DE L'UA DEPUIS LA PRISE EN CHARGE DU CONFLIT CENTRAFRICAIN PAR L'ONU Au cours des années écoulées, les organismes régionaux considérés, dans leurs efforts pour réaliser leur vision d'un continent libre, paisible et prospère403, ont noué divers partenariats ; et le partenariat avec les NU dans le domaine de la paix et de la sécurité, rappelons-le, est l'un des plus importants. Par exemple, la Commission de l'UA et le Secrétariat des NU travaillent en collaboration et se consultent régulièrement sur les questions d'intérêt commun ; c'est dans cette perspective qu'ils ils ont mis en place des mécanismes institutionnels comme le Desk-to-Desk (rencontre entre points focaux), qui regroupent respectivement les hauts responsables et les fonctionnaires des deux organisations, chargés de questions spécifiques.

En l'espèce, il faut constater que ces organismes et l'ONU coordonnent étroitement leurs efforts dans la recherche d'une solution au conflit en RCA depuis le changement anticonstitutionnel de gouvernement qui a eu lieu le 24 mars 2013. La preuve en est que, malgré la transformation de la MISCA en MINUSCA, l'UA et la CEEAC sont restées présentes pour faciliter, d'une manière ou d'une autre, l'atteinte de l'objectif de la MINUSCA. Leur intervention s'effectue de la façon suivante : initialement, de façon directe

403 Cf. Rapport de la Présidente de la Commission de l'UA sur Le partenariat Union africaine - Nations Unies : l'impératif d'une plus grande cohérence, op. cit., par. 2.

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et en nature (Paragraphe I), et finalement, de façon indirecte et en industrie à travers l'initiative africaine pour la paix et la réconciliation en RCA (Paragraphe II).

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry