I.3.2. Elevage à plusieurs
systèmes
Pratiqué par les Arabes et les nomades qui
représentent environ 28% de la population totale de la région,
l'élevage est du type extensif qui mobilise aussi bien les hommes, les
femmes que les enfants. Autrefois, l'élevage réussissait
médiocrement autour du lac car l'extrême humidité
favorisait la multiplication des mouches, des taons et des moustiques ainsi que
la glossine responsable de nombreuses pertes animales. Seuls les animaux
adaptés à de telles conditions pouvaient y survivre. Mais depuis
les grandes sécheresses des années 1970 et la
dérèglementation de l'accès au lac qui s'en est suivie, le
Fitri est devenu une zone de passage et un lieu de séjour de saison
sèche pour de nombreux éleveurs transhumants. Ceux-ci descendent
dans la zone surtout en saison sèche où ils exploitent les
pâturages aquatiques et de décrue et les pâturages secs en
bordure du lac.
En effet, plusieurs systèmes d'élevage
cohabitent dans la région et se disputent l'accès et
l'exploitation des ressources pastorales : le système transhumant,
le système semi- transhumant et le système sédentaire. La
présence d'un tel lac d'eau douce riche en ressources naturelles (eau et
pâturages) attire de nombreux éleveurs. Le système
agro-pastoral sédentaire est pratiquépar les Bilala qui associent
l'activité d'élevage à l'agriculture.Ils investissent une
partie de leurs revenus de vente des récoltes dans l'achat de bovins ou
de petits ruminants qu'ils confient aux éleveurs transhumants pendant la
saison des cultures. Le bétail constitue ainsi une garantie permettant
de faire face aux situations difficiles (dot, déficit
céréalier...). Certains bovins sont aussi gardés au
village comme animaux de bât.
En raison des mobilités permanentes des éleveurs
dans cette zone, les effectifs réels du cheptel dans le lac Fitri sont
mal connus. Selon le BIEP (1989), on dénombre 100 000 bovins (dont
87000 pour les seuls éleveurs transhumants, 195 000 petits ruminants
(dont 130 000 pour les transhumants) et environ 6000 animaux de selle ou
de bât (âne, chevaux, et dromadaires). Ces chiffres paraissent
très éloignés des potentialités réelles
de la région aujourd'hui. L'espèce animale dominante dans la
région est l'espèce bovine à robe rouge noire et noire
rouge blanche (Al Hassine, 2016).
I.3.3. La Pêche, pratique
artisanale mais aussi professionnel
La pêche est pratiquée toute l'année de
manière artisanale par plus de 1000 pêcheurs au gré des
fluctuations du lac. Elle est l'oeuvre des professionnels venus d'ailleurs et
par les riverains du lac (une vingtaine de villages) à des
périodes bien indiquées. L'ouverture officielle a lieu en
novembre et la fin coïncide avec l'arrivée des eaux du Batha. En
saison sèche, période d'étiage du lac, les pêcheurs
s'installent sur les îles. Pendant la saison des pluies, période
de reproduction des poissons, la pêche à l'intérieur du lac
est interdite. Le lac Fitri comme on l'a vu précédemment est peu
profond (entre 0 et 4 mètres). Il n'est donc pas adapté aux
espèces plus exigeantes comme l'Altes Nurse et Mormyrus
sp qui ont aujourd'hui disparu (Agard, 2002). Les principales
espèces pêchées dans le lac sont par ordre
d'importanceleClarias sp (silures), suivis duTilipia sp,
Shilbe mystus (de très petite taille), Protopterus
anectensis (poisson chat de vase), Gnatonemus niger,
Polypterus sp. (aux écailles trop dures) et le
Cynodontissp.
Le matériel de pêche est constitué de
pirogueset de palangres (lignes d'hameçons tendues à l'aide de
piquets). Avec trois palangres de 1 000 hameçons, un pêcheur peut
capturer chaque semaine un sac de 25 kg de poisson durant les bonnes
années, contre le tiers les mauvaises années.Certains
pêcheurs possèdent jusqu'à une vingtaine de palangres.
Très variable selon l'année, la production annuelleest mal
connue. Le service de Pêche à Yao qui contrôle efficacement
la délivrance des permis et le paiement des taxes sur le marché
n'arrive pas à suivre les circuits informels de commercialisation du
poisson séché et fumé qui vont à N'Djamena et
jusqu'au Nigéria. En 2006, la production serait de 350 tonnes de poisson
dont le tiers serait vendu aux grossistes locaux sous forme
séchée ou fumée. Cette production générerait
des revenusnon négligeables et représente une source de
protéines indispensable à la population.Aujourd'hui, on assiste
à une adoption des textes et lois sur la gestion de la
biodiversité et de l'environnement à cause des changements
climatiques, d'une forte anthropisation et de l'augmentation du nombre de
pécheurs qui viennent duNigeria, du Niger, du Mali...Cette augmentation
du nombre des pêcheurs accompagnée de plusieurs autres facteurs
entrainent la raréfaction des poissons dans le Fitri.
I.3.4. La cueillette : une activité
d'appoint pour la sécurité alimentaire
Au Tchad, la région du lac-Fitri demeure l'une des
régions où la famine touche une grande partie de la population.
La cueillette est donc une activité traditionnelle pratiquée pour
parer à des situations de carences alimentaires. La
végétation naturelle de la région du lac Fitri constitue
une source importante de produits de cueillette. Les principaux produits de
cueillette sont les céréales, les fruits et les légumes
sauvages. De la racine aux feuilles en passant par les fruits et les fleurs,
les différentes parties de la plante sont concernées par la
cueillette. Plusieurs espèces ligneuses et herbacées font
régulièrement l'objet de la cueillette. Les espèces les
plus sollicitées sont : Balanites aegyptiaca, Hyphaene
thebaica, Ziziphus mauritiana, Tamarindus indica,
Accacia seyal,... Ces produits complètent non seulement le
régime alimentaire mais génèrent également des
revenus monétaires non négligeables. Certaines plantes
spontanées comme Corchorusolitorius, Gynandropsis gynandra, Cassia
obtusifoliasont également très sollicitées à
cause de leurs feuilles consommées comme légumes. Quant aux
graminées sauvages, le « Kreb »
(Panicum laetum, Echinocloa colona) et le riz sauvage
(Oryza Barthii, Oryza longistaminata) jouent un grand rôle dans
l'alimentation pendant la période de soudure où ces plantes
subissent de fortes pressions humaines. Des fourmilières sont parfois
éventrées pour ramasser du kreb (Panicum laetum, Echinocloa
colona) ou autres céréales accumulés par les
fourmis.
Il est important de souligner en outre que la récolte
de la gomme dans le département n'est pas très
développée suite à la disparition des Acacia
senegalensis dans le sud du département. Seule la gomme de
qualité moindre d'Acacia seyal est récoltée au
sud-est du département, dans la zone du socle.
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